L'homélie du dimanche (prochain)

17 décembre 2014

La dilatation du désir

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 8 h 01 min

La dilatation du désir

Homélie du 4° Dimanche de l’Avent / Année B
21/12/2014

cf. également :  Laisser le volant à Dieu

« Que tout se passe pour moi selon ta parole… » (Lc 1, 26-38)

La dilatation du désir dans Communauté spirituelle 260px-Fra_Angelico_069Marie consent à la parole de Dieu qui lui est adressée.

Elle a d’abord été bouleversée par cette annonce qui ne ressemble à aucune autre, comme le sont souvent les annonces imprévues dans nos vies.

Elle a ensuite présenté loyalement son objection majeure : sa virginité, comme nous opposons souvent à Dieu notre manque de compétences ou nos réticences pour ce qu’il veut faire de nous.

Et finalement, elle consent.

Elle ne dit pas oui en fait dans le texte : c’est plus qu’un détail. Elle ne dit pas oui, mais « fiat » : « que tout se passe pour moi selon ta parole ». Dire oui aurait pu laisser croire qu’elle comprenait ce qui se passait et allait tout prendre en main. Il n’en est rien. Elle est loin de tout comprendre ; elle ne maîtrise rien. Mais elle agrandit son désir à la taille du désir de Dieu pour elle : « que tout se passe pour moi selon ta parole ».

Et du coup, parce que la Parole de Dieu est efficace, cette parole prend chair aussitôt en elle.

Parce que en Dieu la Parole et la Chair ne sont pas séparées, la chair elle-même de Marie s’élargit, sans le savoir encore, pour accueillir le Verbe de Dieu en son sein.

Dilater notre désir jusqu’au désir de Dieu a des répercussions sur tout notre être, notre chair même.

Le 4° Dimanche de l’Avent agrandit encore donc notre présent à tous les possibles qu’il contient. À l’image de Marie, dont le subjonctif indique l’élargissement de son corps, de son désir, de tout son être : « Que tout se passe pour moi selon ta parole ».

La Bible devient Parole de Dieu pour nous lorsqu’elle agrandit nos souhaits à l’immensité du souhait de Dieu pour nous…

 

« Que tout se passe pour moi selon ta parole… »

vierge-annonciation Annonciation dans Communauté spirituelleCe subjonctif exprime encore plus qu’un souhait : c’est un élargissement de notre désir le plus vrai, c’est une dilatation du cœur, c’est un puits creusé pour agrandir la soif, c’est une réorientation fondamentale de l’envie de vivre.

« Donne-moi quelqu’un qui aime, et il comprend ce que je dis » écrit saint Augustin.
« Donne-moi quelqu’un qui désire, qui a faim, donne-moi un homme qui voyage dans ce désert, qui a soif, qui soupire après la source de l’éternelle patrie, donne-moi un tel homme, et il comprend ce que je dis. Si je parle à un homme insensible, il ne sait pas de quoi je parle. Montre un rameau vert à une brebis et tu l’attires ; présente des noix à un enfant et il est attiré, il est attiré parce qu’il aime : c’est par la chaîne du cœur qu’il est attiré ».
« Ne t’imagines pas que tu es attiré malgré toi : c’est par l’amour que l’âme est attirée ».
(Commentaire sur l’Évangile de Jean 26, 4-6).

« Que tout se passe pour moi selon ta parole… »

Marie, icône de l’Église, consent à la conversion de son désir.

En réponse à la Parole de Dieu qui lui est adressée, elle s’ouvre ainsi à tous les possibles que l’Esprit va engendrer en elle…

Comme l’écrit encore le génial Augustin, il s’agit d’élargir les aspirations de notre cœur à « plus haut », « plus vrai » que nos ambitions ordinaires :

« Toute la vie du chrétien est un saint désir.
Sans doute, ce que tu désires, tu ne le vois pas encore : mais en le désirant tu deviens capable d’être comblé lorsque viendra ce que tu dois voir.
Supposons que vous vouliez remplir une sorte de poche, et que vous sachiez les grandes dimensions de ce qu’on va vous donner. Vous élargissez cette poche, que ce soit un sac, une outre ou n’importe quoi de ce genre. Vous savez l’importance de ce que vous allez y mettre, et vous voyez que la poche est trop resserrée : en l’élargissant, vous augmentez sa capacité.
C’est ainsi que Dieu, en faisant attendre, élargit le désir.
En faisant désirer, il élargit l’âme ;
en l’élargissant, il augmente sa capacité de recevoir.
Nous devons donc désirer, mes frères, parce que nous allons être comblés. (…)

Et nous ? À l’approche de Noël, où en sommes-nous de cet élargissement de nos désirs ?

Allons-nous laisser la Parole convertir notre énergie la plus secrète ?

Ou resterons-nous englués dans de petites envies superficielles qui rétrécissent notre soif de vivre au lieu de la dilater à l’extrême ?

Les enfants auront les yeux rivés sur les tablettes spécialement conçues pour eux, les ados sur les dernières consoles de jeux… ; les adultes sur les écrans incurvés 4K 1000 Hz…

En s’élevant un peu, on se mettra à rêver d’une famille enfin réunie autour de la table de Noël, et en paix.

Certains se demanderont s’ils n’ont pas faim d’autre chose que d’accumuler des biens matériels ou de continuer sur des rails bien tracés.

D’autres, à cause de la crise ou de difficultés personnelles, devront réorienter leur vie radicalement.

 

 Augustin 


À tous, la Parole de Dieu transmise par Gabriel s’adresse, bouleversante :
veux-tu engendrer de nouveaux possibles ? Acceptes-tu d’élargir ton désir bien au-delà de tes horizons immédiats ?’

Pour chacun, la réponse de Marie peut devenir votre réponse : « Que tout se passe pour moi selon ta parole… »

 

 

1ère lecture : La royauté de David subsistera toujours devant le Seigneur (2 S 7, 1-5.8b-12.14a.16)

Lecture du deuxième livre de Samuel
Le roi David habitait enfin dans sa maison.  Le Seigneur lui avait accordé la tranquillité  en le délivrant de tous les ennemis qui l’entouraient.  Le roi dit alors au prophète Nathan : « Regarde ! J’habite dans une maison de cèdre,  et l’arche de Dieu habite sous un abri de toile ! »  Nathan répondit au roi : « Tout ce que tu as l’intention de faire,  fais-le, car le Seigneur est avec toi. » Mais, cette nuit-là,  la parole du Seigneur fut adressée à Nathan : « Va dire à mon serviteur David :  Ainsi parle le Seigneur :  Est-ce toi qui me bâtiras une maison  pour que j’y habite ?  C’est moi qui t’ai pris au pâturage,  derrière le troupeau,  pour que tu sois le chef de mon peuple Israël.  J’ai été avec toi partout où tu es allé,  j’ai abattu devant toi tous tes ennemis.  Je t’ai fait un nom aussi grand  que celui des plus grands de la terre.  Je fixerai en ce lieu mon peuple Israël,  je l’y planterai, il s’y établira  et ne tremblera plus,  et les méchants ne viendront plus l’humilier,  comme ils l’ont fait autrefois,  depuis le jour où j’ai institué des juges  pour conduire mon peuple Israël.  Oui, je t’ai accordé la tranquillité  en te délivrant de tous tes ennemis.   Le Seigneur t’annonce  qu’il te fera lui-même une maison.  Quand tes jours seront accomplis  et que tu reposeras auprès de tes pères,  je te susciterai dans ta descendance un successeur,  qui naîtra de toi,  et je rendrai stable sa royauté. Moi, je serai pour lui un père ;  et lui sera pour moi un fils.  Ta maison et ta royauté subsisteront toujours devant moi,  ton trône sera stable pour toujours. »

Psaume : 88 (89), 2-3, 4-5, 27.29
R/ Ton amour, Seigneur, sans fin je le chante ! cf. 88, 2a

L’amour du Seigneur, sans fin je le chante ;
ta fidélité, je l’annonce d’âge en âge.

Je le dis : c’est un amour bâti pour toujours ;
ta fidélité est plus stable que les cieux.

« Avec mon élu, j’ai fait une alliance, j’ai juré à David, mon serviteur :
J’établirai ta dynastie pour toujours,
je te bâtis un trône pour la suite des âges. »

« Il me dira : ‘Tu es mon Père, mon Dieu, mon roc et mon salut !’
Sans fin je lui garderai mon amour, mon alliance avec lui sera fidèle. »

2ème lecture : Le mystère gardé depuis toujours dans le silence est maintenant manifesté (Rm 16, 25-27)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Romains
Frères,
à Celui qui peut vous rendre forts  selon mon Évangile qui proclame Jésus Christ : révélation d’un mystère  gardé depuis toujours dans le silence,  mystère maintenant manifesté  au moyen des écrits prophétiques,  selon l’ordre du Dieu éternel, mystère porté à la connaissance de toutes les nations  pour les amener à l’obéissance de la foi, à Celui qui est le seul sage, Dieu, par Jésus-Christ,  à lui la gloire pour les siècles. Amen.

Évangile : « Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils » (Lc 1, 26-38)
Acclamation : Alléluia. Alléluia. Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. Alléluia.  (Lc 1, 38)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là,
l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu  dans une ville de Galilée, appelée Nazareth,  à une jeune fille vierge,  accordée en mariage à un homme de la maison de David,  appelé Joseph ;  et le nom de la jeune fille était Marie.  L’ange entra chez elle et dit : « Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi. » À cette parole, elle fut toute bouleversée,  et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation.  L’ange lui dit alors : « Sois sans crainte, Marie,  car tu as trouvé grâce auprès de Dieu.  Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils ;  tu lui donneras le nom de Jésus.  Il sera grand,  il sera appelé Fils du Très-Haut ;  le Seigneur Dieu  lui donnera le trône de David son père ;  il régnera pour toujours sur la maison de Jacob,  et son règne n’aura pas de fin. » Marie dit à l’ange : « Comment cela va-t-il se faire,  puisque je ne connais pas d’homme ? » L’ange lui répondit : « L’Esprit Saint viendra sur toi,  et la puissance du Très-Haut  te prendra sous son ombre ;  c’est pourquoi celui qui va naître sera saint,  il sera appelé Fils de Dieu.  Or voici que, dans sa vieillesse, Élisabeth, ta parente,  a conçu, elle aussi, un fils  et en est à son sixième mois,  alors qu’on l’appelait la femme stérile.  Car rien n’est impossible à Dieu. »  Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur ;  que tout m’advienne selon ta parole. »  Alors l’ange la quitta.
Patrick BRAUD

Mots-clés : , , , , , , ,

21 décembre 2012

Enfanter le Verbe en nous…

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Enfanter le Verbe en nous…

Homélie du 4° Dimanche de l’Avent Dimanche / Année C
23/12/2012

Une rencontre tout en rondeurs

Que font deux femmes enceintes lorsqu’elles se rencontrent ?

Elles parlent de leur grossesse !

Elisabeth et Marie ne font pas exception. Comme toutes les femmes du monde qui attendent un enfant, elles aiment à partager ce que le mystère de la vie en elles produit comme émotions et sentiments. La rencontre entre les deux cousines est d’abord la rencontre profondément humaine de deux femmes déjà habitées par quelqu’un d’autre. Enfanter le Verbe en nous... dans Communauté spirituelle visitation-2Elles s’embrassent comme toutes les futures mères :

- guettant la transformation de leur corps qui s’arrondit, qui s’alourdit.

- désirant et redoutant à la fois la croissance de ce petit être en elles jusqu’à la naissance.

- attentives au miracle qui s’accomplit au plus intime d’elles-mêmes.

- soucieuses de ce qui pourrait menacer cette croissance.

- attendant chaque échographie avec soulagement et émerveillement.

- ayant besoin de parler de tout cela, pour en partager la joie et en exorciser les peurs?

 

Images de l’Église enceinte

Par cette visite, Elisabeth et Marie célèbrent le temps de leur grossesse ; elles la vierge_trois_quarts_sm Eckhart dans Communauté spirituellesavourent. En cela, elles sont l’image de l’Église, notre Église que nous formons chacun et ensemble.

Car nous aussi nous portons le Christ en nous, comme Marie l’abritait en elle.
Nous aussi nous sommes habités par un Autre qui déjà transforme notre corps et notre coeur.
Nous aussi nous sommes ‘enceint(e)s’ du Verbe de Dieu qui, depuis Noël, désire être engendré en chacun, engendré par l’Église et dans l’Église

Il y a en nous une allégresse qui nous est donnée, qui nous fait tressaillir de l’intérieur.
Il y a en nous un amour qui nous presse à « nous mettre en route rapidement », comme Marie, pour le partager à notre famille humaine.
Il y a en nous une joie qui nous vient de plus grand que nous, et qui est le signe d’une naissance à venir?

Oui : Elisabeth et Marie partageant leur bonheur d’être enceintes figurent l’Église : tantôt femme âgée qu’on croyait stérile (comme certains désespèrent de notre Église en France, âgée et faible…), tantôt jeune femme qu’on croyait incapable d’engendrer (comme les jeunes Églises d’Afrique).

Toutes deux se rencontrent et laissent éclater leur allégresse d’être habitées par quelqu’un d’autre.

C’est notre allégresse, puisque nous sommes nous aussi appelés à devenir la Mère du Christ. Écoutez comment St Augustin rappelait aux chrétiens d’Hippone leur vocation maternelle divine :

« Faites attention, je vous en supplie, à ce que dit le Christ Seigneur, étendant la main vers ses disciples : Voici ma mère et mes frères. Et ensuite : Celui qui fait la volonté de mon Père, qui m’a envoyé, c’est lui mon frère, ma soeur, ma mère.

Est-ce que la Vierge Marie n’a pas fait la volonté du Père, elle qui a cru par la foi, qui a conçu par la foi, qui a été élue pour que le salut naquît d’elle en notre faveur, qui a été créée dans le Christ avant que le Christ fût créé en elle ? Sainte Marie a fait, oui, elle a fait la volonté du Père, et par conséquent, il est plus important pour Marie d’avoir été disciple du Christ que d’avoir été mère du Christ ; il a été plus avantageux pour elle d’avoir été disciple du Christ que d’avoir été sa mère.

Donc, Marie était bienheureuse, parce que, avant même d’enfanter le Maître, elle l’a porté dans son sein. Voyez si ce que je dis n’est pas vrai. Comme le Seigneur passait, suivi par les foules et accomplissant des miracles divins, une femme se mit à dire : Heureux, bienheureux, le sein qui t’a porté! Et qu’est-ce que le Seigneur a répliqué, pour éviter qu’on ne place le bonheur dans la chair ? Heureux plutôt ceux qui entendent la parole de Dieu et la gardent!

naissancedieuame MarieDonc, Marie est bienheureuse aussi parce qu’elle a entendu la parole de Dieu, et l’a gardée: son âme a gardé la vérité plus que son sein n’a gardé la chair. La Vérité, c’est le Christ; la chair, c’est le Christ. La vérité, c’est le Christ dans l’âme de Marie ; la chair, c’est le Christ dans le sein de Marie. Ce qui est dans l’âme est davantage que ce qui est dans le sein.

Sainte Marie, heureuse Marie ! Et pourtant l’Église vaut mieux que la Vierge Marie.Pourquoi ? Parce que Marie est une partie de l’Église. Un membre éminent, un membre supérieur aux autres, mais enfin un membre du corps entier. S’il s’agit du corps entier, le corps est certainement davantage qu’un seul membre. Le Seigneur est la tête, et le Christ total est à la fois la tête et le corps. Bref, nous avons un chef divin, nous avons Dieu pour tête. Donc, mes très chers, regardez vous-mêmes: vous êtes les membres du Christ, et vous êtes le corps du Christ. Comment l’êtes-vous ? Faites attention à ce qu’il dit: Voici ma mère et mes frères.

Comment serez-vous la mère du Christ ? Celui qui entend, celui qui fait la volonté de mon Père, qui est aux cieux, celui-là est mon frère, ma soeur, ma mère. »
(Homélie sur l’évangile de Matthieu)

Maître Eckhart précisait :

«  Le Père engendre dans l’éternité le Fils, comme son image.  » Le Verbe était auprès de Dieu et Dieu était le Verbe  » : comme le même que lui et de la même nature. Mais je vais plus loin et je dis : il l’a engendré dans mon âme ! Elle n’est pas seulement auprès de lui et lui auprès d’elle, comme étant semblable à lui, mais il est en elle. Et le Père engendre son Fils dans l’âme exactement comme dans l’éternité et pas autrement. Il faut qu’il le fasse, que cela lui plaise ou non ! Il l’engendre sans interruption. Et je dis en outre : il m’engendre comme son Fils, comme le même Fils ! Oui, il ne m’engendre pas seulement comme son Fils, il m’engendre comme lui, et lui comme moi, il m’engendre comme son essence propre, sa propre nature : dans la source la plus profonde je jaillis dans l’Esprit saint, là il n’y a qu’une vie, une essence, une oeuvre !
Tout ce que Dieu opère est un, c’est pourquoi il m’engendre comme son Fils, sans qu’une séparation intervienne. Mon père corporel n’est pas à proprement parler mon père, il ne l’est qu’avec une petite partie de sa nature, et je suis séparé de lui : il peut être mort et moi vivre. Mais le Père céleste est bien vraiment mon père : parce que je suis sien et que tout ce que je possède je le tiens de lui, et, en tant que fils, je suis le même que lui, et pas un autre. Comme le Père n’accomplit somme toute qu’une oeuvre, cette oeuvre : m’établir comme son fils, ne produit pas quelque chose de séparé. »
(La grâce divine de l’accomplissement, sur Lc 1,26).

Visitez-vous les uns les autres

Vous avez  là, dans cet évangile de la Visitation, le sens profond des visites entre Églises locales. La coopération missionnaire c’est cela : aller chez l’autre, le visiter pour s’émerveiller du travail de l’Esprit chez lui.? Car c’est une grande joie de découvrir l’action de l’Esprit de Dieu ailleurs comme chez nous. En allant là-bas, nous vivons la même Visitation qu’entre Marie et Élisabeth…

Et vous, où en êtes-vous de votre grossesse spirituelle ?
Que sentez-vous bouger en vous d’un désir spirituel bien vivant ?
Quels projets, quelle joie, quel amour grandit en vous et vous fait tressaillir d’allégresse ?

Pour le savoir, rien ne vaut une bonne visite comme celle de Marie à Elisabeth : une échographie spirituelle en quelque sorte !
C’est bon d’avoir des amis avec qui partager la joie d’être « habité(e)s ».
C’est bon d’avoir un accompagnateur spirituel à qui rendre visite pour mesurer la croissance de la Vie en nous.
C’est bon d’avoir une équipe de chrétiens avec qui parler de nos transformations les plus personnelles?

Quand nous nous rendons visite, pour ces fêtes de fin d’année par exemple, nous pouvons être, comme Marie et Elisabeth, des « échographes » de la Vie qui grandit en nous, à tout âge.

 

Le Verbe de Dieu est engendré en nous depuis notre baptême, nous le portons en nous comme on porte un trésor dans un vase d’argile, comme une femme enceinte porte l’enfant, miracle permanent de l’engendrement de Dieu en chacun.

Puissent nos visites, familiales et amicales, s’inspirer de la Visitation de Marie à Elisabeth, pour laisser grandir au plus intime de nous-mêmes la joie d’être aimés, d’être habités, d’être transformés dans la chair de notre chair.

Car « le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous ».

 

 

1ère lecture : Le Messie viendra de Bethléem (Mi 5, 1-4)

Lecture du livre de Michée

Parole du Seigneur :
Toi, Bethléem Ephrata,le plus petit des clans de Juda, c’est de toi que je ferai sortir celui qui doit gouverner Israël. Ses origines remontent aux temps anciens, à l’aube des siècles.
Après un temps de délaissement, viendra un jour où enfantera celle qui doit enfanter, et ceux de ses frères qui resteront rejoindront les enfants d’Israël.
Il se dressera et il sera leur berger par la puissance du Seigneur, par la majesté du nom de son Dieu. Ils vivront en sécurité, car désormaissa puissance s’étendra jusqu’aux extrémités de la terre, et lui-même, il sera la paix !

Psaume : Ps 79, 2.3bc, 15-16a, 18-19

R/ Dieu, fais-nous revenir ; que ton visage s’éclaire, et nous serons sauvés !

Berger d’Israël, écoute,
toi qui conduis ton troupeau, resplendis !
Réveille ta vaillance
et viens nous sauver.

Dieu de l’univers, reviens !
Deu haut des cieux, regarde et vois :
visite cette vigne, protège-la,
celle qu’a plantée ta main puissante.

Que ta main soutienne ton protégé,
le fils de l’homme qui te doit sa force.
Jamais plus nous n’irons loin de toi :
fais-nous vivre et invoquer ton nom !

2ème lecture : « Je suis venu pour faire ta volonté » (He 10, 5-10)

Lecture de la lettre aux Hébreux

Frères,
en entrant dans le monde, le Christ dit, d’après le Psaume : Tu n’as pas voulu de sacrifices ni d’offrandes, mais tu m’as fait un corps.
Tu n’as pas accepté les holocaustes ni les expiations pour le péché ;
alors, je t’ai dit : Me voici, mon Dieu, je suis venu pour faire ta volonté,c ar c’est bien de moi que parle l’Écriture.
Le Christ commence donc par dire : Tu n’as pas voulu ni accepté les sacrifices et les offrandes, les holocaustes et les expiations pour le péché que la Loi prescrit d’offrir.
Puis il déclare : Me voici, je suis venu pour faire ta volonté. Ainsi, il supprime l’ancien culte pour établir le nouveau.
Et c’est par cette volonté de Dieu que nous sommes sanctifiés, grâce à l’offrande que Jésus Christ a faite de son corps, une fois pour toutes.

Evangile : La Visitation (Lc 1, 39-45)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Chante et réjouis-toi, Vierge Marie : celui que l’univers ne peut contenir demeure en toi. Alléluia. (cf. So 3, 14.17)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

En ces jours-là, Marie se mit en route rapidement vers une ville de la montagne de Judée.
Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth.
Or, quand Élisabeth entendit la salutation de Marie, l’enfant tressaillit en elle. Alors, Élisabeth fut remplie de l’Esprit Saint,
et s’écria d’une voix forte : « Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni.
Comment ai-je ce bonheur que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ?
Car, lorsque j’ai entendu tes paroles de salutation, l’enfant a tressailli d’allégresse au-dedans de moi.
Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. »
Patrick Braud

Mots-clés : , , ,

8 décembre 2012

Le Verbe et la voix

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Le Verbe et la voix

Homélie du 2° Dimanche de l’Avent / Année C
09/12/12

Vois  la voix 

Le Verbe et la voix dans Communauté spirituelle 37453235Le Christ est le Verbe de Dieu (Jn 1,1). Jean-Baptiste en est la voix, qui crie pour préparer sa venue. Même si elle crie dans le désert, cette voix est indispensable pour que Jésus soit plongé dans le Jourdain, pour que le Verbe de Dieu soit baptisé dans notre humanité.

C’est donc qu’aujourd’hui encore, dans la nouvelle évangélisation de l’Europe particulièrement, une voix est nécessaire avant l’annonce explicite, pour que l’Évangile soit manifesté.

Comme toujours le génial St Augustin nous met sur la voie? de la voix en l’occurrence ! (sermon 288)

« Cherchons donc ce qui fait la différence entre voix et parole. Cherchons avec attention, car c’est important, il faut nous y arrêter.
Voici donc deux choses : la voix et la parole. Qu’est-ce qu’une voix ? Qu’est-ce qu’une parole » »

« ‘Je suis la voix qui crie dans le désert’.
Par cette parole, Jean se déclare la voix.  Jean est la voix.
Et qu’est le Christ, sinon la Parole ?
La voix doit d’abord se faire entendre pour qu’ensuite la parole soit comprise.

Mais de quelle parole s’agit-il ?
Écoute, il te le montre clairement : « Au commencement était la Parole et la Parole était près de Dieu, et la Parole était Dieu. Elle était au commencement avec Dieu. Tout fut par elle et sans elle rien ne fut ». Tout a été fait par la Parole, et Jean aussi. Quoi d’étonnant si la Parole se soit fait une voix ! Regarde : vois sur les rives du fleuve la Voix et la Parole : la Voix, c’est Jean, la Parole c’est le Christ.»


Voix, cri, parole : il y a dans ces distinctions un enjeu capital pour l’évangélisation aujourd’hui.

Comment entendre la Parole (qu’est le Christ) si elle n’est pas précédée par la voix (qu’est Jean-Baptiste) ?

pour-comprendre-les-media_150 Avent dans Communauté spirituelleLe médium est aussi important que le message : medium is message (Mac Luhan). La façon de dire quelque chose est aussi importante que le contenu de ce qui est dit. Par exemple, dire « je t’aime » sur l’air de « passe-moi le sel » garantit un effet de doute. Alors que la formule « engeance de vipères » va bien avec un Jean Baptiste hirsute maigre et couvert de peaux de bêtes.

La voix qui porte la parole crée un climat de communication ou d’hostilité.
L’empreinte vocale de quelqu’un dépasse d’ailleurs la seule voix : l’apparence et le comportement physique de quelqu’un peut devenir une petite musique qui porte son message avant même les mots.
Le bon pape Jean XXIII, rien qu’en apparaissant, respirait la bonté de Dieu, grâce à ses rondeurs mises au service de l’Évangile.
Jean Paul 1° avait pour lui son sourire qui faisait la conquête les foules avant même de parler.
Pour Jean-Paul II, c’était son allure d’athlète de Dieu, défiant tous les pouvoirs totalitaires.
Benoît XVI quant à lui est handicapé par son air timide d’intellectuel peu à l’aise devant les foules.

Medium is message : l’important est de retenir que, quelque soit votre morphologie, vous pouvez en faire une « voix de l’Évangile » !

 

Qu’est-ce donc que la voix, sans laquelle la parole ne peut exister ?

a) Nous l’avons en commun avec tous les animaux, qui sont parvenus au seuil du langage, sans franchir cette frontière avec l’humain.

On a inventé un tas de mots pour qualifier la diversité de ces voix animales.
Par exemple : « l’oiseau crie, siffle, babille, caquette, chuchote, vocalise, hulule, gazouille, murmure, pépie, gringotte, jabote, cacarde, jase, piaille, piaule, jacasse, ramage »  1.

Pourquoi ne jouerions-nous pas de toute cette gamme de nuances pour porter la parole de l’Évangile ?


b) les caractéristiques de la voix de quelqu’un sont en lien avec sa personnalité profonde.
Elles dépendent beaucoup de son état affectif.
Quand on téléphone à un proche, rien qu’à entendre sa voix quand il décroche, on peut deviner si son moral est bon, moyen ou mauvais?
Certains ont une voix de poitrine, ou de fausset, d’autres des voix de tête?

- La fréquence d’une voix, mesurée en hertz, traduit la tonalité moyenne de la voix. Parler en basse fréquence ou en haute fréquence n’est pas du tout pareil (pensez à votre poste FM : modulation de fréquence, pour capter toutes les stations).

- L’intensité d’une voix, mesurée en décibels, traduit la force de la relation, depuis le murmure jusqu’au cri inaudible. Timidité ou affirmation de soi jouent de l’intensité de la voix?

- Le timbre de la voix est sans doute le facteur le plus personnel, non mesurable. La voix chaude de Jean Rochefort, nasillarde de Claude Piéplu dans les shaddocks, ou la voie suave et sensuelle des hôtesses d’aéroport nous marquent plus qu’on ne le pense?

Comment travaillons-nous notre « voix de l’Évangile » en jouant de tous ces registres ?

- Calons-nous notre fréquence sur celle que peut recevoir notre auditeur ? (fréquence art / fréquence sport / fréquence humanité?).

- Adaptons-nous l’intensité de notre annonce à la situation du moment ? (cf. les évêques haussant le ton pour appeler à un débat social sur le ‘mariage pour tous’)

- Choisissons-nous le timbre de notre voix pour annoncer l’Évangile : chaleureux ou grave s’il le faut, frais et joyeux à un autre moment etc ??


Vous voyez : la voix est une médiation entre le corps et le langage, entre la chair et les sons articulés.
C’est une transition, un « espace transitionnel » (Winnicott) entre une personne et un message.

 

La Parole ne peut se faire chair sans la Voix

Comme Jésus se révèle Parole grâce à Jean Baptiste – la voix dans le désert – la voix n’est pas la parole, mais sans elle pas de parole.

« La voix est ce par où le corps franchit sa limite pour devenir progressivement langage » 2. Depuis le premier cri du nourrisson sortant des entrailles maternelles jusqu’au chant mystique, la voix est médiatrice entre le corps et le langage.

Jean Baptiste dans l’Évangile d’aujourd’hui nous invite à travailler ces médiations: par quelle voix porterons-nous le Christ à nos frères ?

 

La Parole avant la voix

Pour terminer, une petite ouverture, encore plus vertigineuse que le mystère de la voix humaine, pourtant à peine esquissé.

Ce qu’il y a d’original en christianisme, c’est que - en Dieu comme en moi – la Parole précède la voix, à l’inverse du genre humain.

« Au commencement était la Parole «  (Prologue de Jean).

Christ est d’abord au plus intime de notre être, Verbe incarné (c’est cela Noël-pour-moi).
Parole de Dieu enfouie dans ma chair et qui en façonne une voix, un cri.
Si ma voix se nourrit de la présence du Verbe en moi, elle transmettra quelque chose de Dieu aux hommes.
Si ma voix n’a pas d’autre source que l’animal qui est aussi en moi, elle ne sera qu’un « cymbale qui résonne » dans le vide.


Seigneur Jésus, toi la Parole qui demeure près du Père, fais de nous la voix de ton amour, pour crier dans le désert, pour chanter ta venue au coeur de nos villes !

 _________________________________

1. La voix et ses sortilèges, M. Fr Castarède, Ed les Belles Lettres, 1987, p 15.

2. ibid., p 131.

 

1ère lecture : En marche vers la Jérusalem nouvelle (Ba 5, 1-9)

Lecture du livre de Baruc

Jérusalem, quitte ta robe de tristesse et de misère, et revêts la parure de la gloire de Dieu pour toujours, enveloppe-toi dans le manteau de la justice de Dieu, mets sur ta tête le diadème de la gloire de l’Éternel.
Dieu va déployer ta splendeur partout sous le ciel, car Dieu pour toujours te donnera ces noms : « Paix-de-la-justice » et « Gloire-de-la-piété-envers-Dieu ».
Debout, Jérusalem ! tiens-toi sur la hauteur, et regarde vers l’orient : vois tes enfants rassemblés du levant au couchant par la parole du Dieu Saint ; ils se réjouissent parce que Dieu se souvient.
Tu les avais vus partir à pied, emmenés par les ennemis, et Dieu te les ramène, portés en triomphe, comme sur un trône royal.
Car Dieu a décidé que les hautes montagnes et les collines éternelles seraient abaissées, et que les vallées seraient comblées : ainsi la terre sera aplanie, afin qu’Israël chemine en sécurité dans la gloire de Dieu.
Sur l’ordre de Dieu, les forêts et leurs arbres odoriférants donneront à Israël leur ombrage ; car Dieu conduira Israël dans la joie, à la lumière de sa gloire, lui donnant comme escorte sa miséricorde et sa justice.

Psaume : Ps 125, 1-2ab, 2cd-3, 4-5, 6

R/ Dieu guidera son peuple dans la joie à la lumière de sa gloire

Quand le Seigneur ramena les captifs à Sion,
nous étions comme en rêve !
Alors notre bouche était pleine de rires,
nous poussions des cris de joie. 

Alors on disait parmi les nations : 
« Quelles merveilles fait pour eux le Seigneur ! » 

Quelles merveilles le Seigneur fit pour nous :
nous étions en grande fête ! 

Ramène, Seigneur, nos captifs,
comme les torrents au désert.

Qui sème dans les larmes
moissonne dans la joie. 

Il s’en va, il s’en va en pleurant,
il jette la semence ;
il s’en vient, il s’en vient dans la joie,
il rapporte les gerbes. 

2ème lecture : Marchons sans trébucher vers le jour du Christ(Ph 1, 4-6.8-11)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens

Frères, chaque fois que je prie pour vous tous, c’est toujours avec joie, à cause de ce que vous avez fait pour l’Évangile en communion avec moi, depuis le premier jour jusqu’à maintenant.
Et puisque Dieu a si bien commencé chez vous son travail, je suis persuadé qu’il le continuera jusqu’à son achèvement au jour où viendra le Christ Jésus.
Dieu est témoin de mon attachement pour vous tous dans la tendresse du Christ Jésus.
Et, dans ma prière, je demande que votre amour vous fasse progresser de plus en plus dans la connaissance vraie et la parfaite clairvoyance qui vous feront discerner ce qui est plus important. Ainsi, dans la droiture, vous marcherez sans trébucher vers le jour du Christ ; et vous aurez en plénitude la justice obtenue grâce à Jésus Christ, pour la gloire et la louange de Dieu.

Evangile : Jean Baptiste prépare le chemin du Seigneur (Lc 3, 1-6)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Préparez le chemin du Seigneur, aplanisez la route : tout homme verra le salut de Dieu. Alléluia. (Cf. Lc 3, 4.6)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

L’an quinze du règne de l’empereur Tibère, Ponce Pilate étant gouverneur de la Judée, Hérode prince de Galilée, son frère Philippe prince du pays d’Iturée et de Traconitide, Lysanias prince d’Abilène, les grands prêtres étant Anne et Caïphe, la parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean, fils de Zacharie.
Il parcourut toute la région du Jourdain ; il proclamait un baptême de conversion pour le pardon des péchés, comme il est écrit dans le livre du prophète Isaïe : À travers le désert, une voix crie : Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route.
Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées ; les passages tortueux deviendront droits, les routes déformées seront aplanies ; et tout homme verra le salut de Dieu.
Patrick Braud

Mots-clés : , , , , ,

12 mars 2011

Nous ne sommes pas une religion du livre, mais du Verbe

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Nous ne sommes pas une religion du livre, mais du Verbe

 

Homélie pour le 1° dimanche de Carême / Année A

Dimanche 13 Mars 2011

 

Comment résister sans l’appuyer sur l’Écriture ?

- Dans le récit des tentations au désert, le démon utilise l’identité de Jésus pour le pousser paradoxalement à se renier lui-même. « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains ».

Si Jésus fait cela, il se nourrit lui-même ; il cesserait alors de recevoir sa nourriture de son Père. Il renierait son identité de Fils au moment même où il l’affirmerait de cette manière ! C’est pourquoi Jésus, dont la nourriture est de faire la volonté de son Père, répond en citant l’Écriture.  « Il est écrit : Ce n’est pas seulement de pain que l’homme doit vivre?».

 

- Voyant que l’Écriture nourrit et imprègne tout l’être de Jésus, le diable va alors essayer d’utiliser cette Écriture pour le faire tomber, littéralement : « jette-toi en bas, car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges? »

Jésus répond avec une autre phrase de l’Écriture, qui lui permet de ne pas interpréter au pied de la lettre le passage cité par le tentateur : « il est encore écrit: tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu. »

Jésus met ainsi en oeuvre un principe d’interprétation (une herméneutique) qui nous vient des juifs et que nous conservons précieusement :

« interpréter le texte en tenant compte de l’unité de l’ensemble de l’Écri­ture »

 (Benoît XVI, Verbum Domini, 30/09/2010, n° 34).

 

Le démon est très fondamentaliste dans son rapport à l’Écriture : il isole un passage de son contexte, il le lit au premier degré et en fait un absolu.

Benoît XVI dénonce avec force cette instrumentalisation de l’écrit (en citant un texte remarquable de la Commission Biblique pontificale pour l’interprétation de la Bible) :

Nous ne sommes pas une religion du livre, mais du Verbe dans Communauté spirituelle 9782204094979_1« le « littéralisme » mis en avant par la lecture fondamentaliste représente en réalité une trahison aussi bien du sens littéral que du sens spirituel, ouvrant la voie à des ins­trumentalisations de diverses natures, répandant par exemple des interprétations anti-ecclésiales des Écritures elles-mêmes. L’aspect probléma­tique de la « lecture fondamentaliste est que, en refusant de tenir compte du caractère historique de la Révélation biblique, on se rend incapable d’accepter pleinement la vérité de l’Incarnation elle-même. Le fondamentalisme fuit l’étroite re­lation du divin et de l’humain dans les rapports avec Dieu (?) Pour cette raison, il tend à traiter le texte biblique comme s’il avait été dicté mot à mot par l’Esprit et n’arrive pas à reconnaître que la Parole de Dieu a été formulée dans un langage et une phraséologie conditionnés par telle ou telle époque » » (n° 44).

 

- Dans la 3° tentation, le démon parle de pouvoir et de gloire, même s’ils ont pour prix la soumission au mal.

Jésus lui réplique par le cinglant : « Vade retro Satanas ! », en s’appuyant à nouveau sur l’Écriture : « car il est écrit : c’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras…».

 

Une christologie de la Parole

Trois fois, c’est en allant puiser dans l’Écriture que Jésus se révèle vraiment Fils de Dieu.

Le tentateur, lui, n’arrive pas à faire son chemin de l’écrit à la Parole. Il utilise le livre pour étouffer la Parole de Dieu.

Jésus est le Verbe de Dieu qui fait vivre ce qui est écrit pour rester libre.

Il est la Parole qui surgit du livre.

Il est la Parole qui constitue le livre.

« Jésus-Christ, né de la Vierge Marie, est réellement le Verbe de Dieu qui s’est fait consubstantiel à nous. Par conséquent, l’expression « Parole de Dieu » in­dique ici la Personne de Jésus-Christ, le Fils éter­nel du Père, fait homme. » (n° 7)

 

En christianisme, ce n’est donc pas le livre qui est Parole, c’est Jésus lui-même.

C’est ce que Benoît XVI appelle une « christologie de la Parole ».

« En contemplant cette « Christologie de la Parole », la tradition patristique médiévale a utilisé une expression suggestive : le Verbe s’est abrégé. Dans leur traduction grecque de l’Ancien Testa­ment, les Pères de l’Église ont trouvé une parole du prophète Isaïe – que saint Paul cite aussi – pour montrer que les voies nouvelles de Dieu étaient déjà annoncées dans l’Ancien Testament. On pouvait y lire : Dieu a rendu brève sa Parole, il l’a abrégée » (Is 10, 23 ; Rm 9, 28). Le Fils, lui-même, est la Parole de Dieu, il est le « Logos : la Parole éter­nelle s’est faite petite ? si petite qu’elle peut entrer dans une mangeoire. Elle s’est faite enfant, afin que la Parole devienne pour nous saisissable ». À présent, la Parole n’est pas seulement audible, elle ne possède pas seulement une voix, maintenant la Parole a un visage, qu’en conséquence nous pou­vons voir : Jésus de Nazareth. »

 

Nous ne sommes pas une religion du Livre

La parole de Dieu, c’est quelqu’un ; un vivant : le Ressuscité, Jésus de Nazareth, un instant abaissé au rang des criminels, élevé pour toujours dans la gloire de Dieu.

Nous ne sommes pas une religion du Livre comme le Coran l’écrit à tort.

« Dans l’Église, nous vénérons beaucoup les Saintes Écritures, bien que la foi chrétienne ne soit pas une « religion du Livre » : le Christianisme est la religion de la Parole de Dieu, non d’une parole écrite et muette, mais du Verbe incarné et vivant. » (n° 7)

 

La symphonie de la Parole unique

LaSymphonieDeLaParole Carême dans Communauté spirituelleBenoît XVI suit les Pères du synode en développant à partir du Christ, parole vivante, toutes les harmoniques de cette unique parole qui résonne autour de nous.

« On a parlé avec justesse d’une symphonie de la Parole, d’une Parole unique qui s’exprime de diffé­rentes manières : « comme un chant à plusieurs voix » » (n° 7).

 

La polyphonie à travers laquelle Dieu nous parle est largement plus grande que les cinq livres bibliques (pourtant essentiels !).

- Dieu nous parle à travers le livre de la nature (liber naturae), à travers l’émerveillement de l’homme devant le réel, le vivant, les lois de l’univers, sa majesté… La dimension cosmique de la Parole de Dieu reprend aujourd’hui toute sa place, grâce à une conscience écologique renouvelée, grâce également au progrès de l’astrophysique, de la compréhension de l’infiniment grand et de l’infiniment petit.

« La création elle-même, le liber naturae, fait aussi essentiellement partie de cette symphonie à plusieurs voix dans laquelle le Verbe unique s’exprime » (n° 7).

- Dieu nous parle par la voix les prophètes, ceux d’hier comme ceux d’aujourd’hui.

- Dieu nous parle à travers la voix des apôtres, tradition vivante.

- Dieu nous parle à travers la proclamation des Écritures en Église.

 

On pourrait prolonger cette liste :

- Dieu nous parle à travers l’art qui célèbre la beauté et la profondeur du monde,

- Dieu nous parle à travers à travers les sciences qui explorent la complexité de l’univers, les techniques qui continuent l’oeuvre créatrice, l’économie qui peut rapprocher les hommes par le travail et la création de richesses etc. etc.

- On peut aller jusqu’à entendre l’unique Parole de Dieu nous atteindre à travers chaque être humain. « Toute créature est parole de Dieu puisqu’elle proclame Dieu » (n° 8). D’ailleurs, le mot personne (en grec : pro-sopon, en latin : per-sona) désigne le masque à travers lequel la voix de l’acteur de théâtre atteint le public. Une personne humaine est donc au service de la proclamation d’une parole qui la traverse pour nous émouvoir…

 

À nous de savoir lire et écouter

Quelle est donc notre conception de la Parole de Dieu ?

Comment écoutons-nous cette Parole dans l’Écriture (loin de toute ignorance, de tout fondamentalisme…) ?

Comment l’écoutons-nous dans la nature, les événements, les progrès humains, et finalement à travers chaque personne rencontrée ?

 

Nous ne pouvons résister aux trois tentations de Mt 4 qu’en écoutant l’unique Parole vivante de Dieu, qui s’adresse à nous à travers ses multiples diffractions.

À nous de régler nos sonotones !

 

 

 

 

1ère lecture : La création de l’homme. Le péché (Gn 2, 7-9; 3, 1-7a)

 

Lecture du livre de la Genèse

Au temps où le Seigneur Dieu fit le ciel et la terre, il modela l’homme avec la poussière tirée du sol ; il insuffla dans ses narines le souffle de vie, et l’homme devint un être vivant.
Le Seigneur Dieu planta un jardin en Éden, à l’orient, et y plaça l’homme qu’il avait modelé.
Le Seigneur Dieu fit pousser du sol toute sorte d’arbres à l’aspect attirant et aux fruits savoureux ; il y avait aussi l’arbre de vie au milieu du jardin, et l’arbre de la connaissance du bien et du mal.

Or, le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs que le Seigneur Dieu avait faits. Il dit à la femme : « Alors, Dieu vous a dit : « Vous ne mangerez le fruit d »aucun arbre du jardin »»
La femme répondit au serpent : « Nous mangeons les fruits des arbres du jardin. Mais, pour celui qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : ‘Vous n’en mangerez pas, vous n’y toucherez pas, sinon vous mourrez.’ »
Le serpent dit à la femme : « Pas du tout ! Vous ne mourrez pas !
Mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal. »
La femme s’aperçut que le fruit de l’arbre devait être savoureux, qu’il avait un aspect agréable et qu’il était désirable, puisqu’il donnait l’intelligence. Elle prit de ce fruit, et en mangea. Elle en donna aussi à son mari, et il en mangea.
Alors leurs yeux à tous deux s’ouvrirent et ils connurent qu’ils étaient nus.

 

Psaume : Ps 50, 3-4, 5-6ab, 12-13, 14.17

 

R/ Pitié, Seigneur, car nous avons péché.

Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.

Oui, je connais mon péché,
ma faute est toujours devant moi. 
Contre toi, et toi seul, j’ai péché,
ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait. 

Crée en moi un coeur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. 
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint. 

Rends-moi la joie d’être sauvé ;
que l’esprit généreux me soutienne.
Seigneur, ouvre mes lèvres,
et ma bouche annoncera ta louange.

 

2ème lecture : Là où le péché s’était multiplié, la grâce a surabondé (brève : 5, 12.17-19) (Rm 5, 12-19)

 

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Frères,
par un seul homme, Adam, le péché est entré dans le monde, et par le péché est venue la mort ; et ainsi, la mort est passée en tous les hommes, du fait que tous ont péché.
Avant la loi de Moïse, le péché était déjà dans le monde. Certes, on dit que le péché ne peut être sanctionné quand il n’y a pas de loi ; mais pourtant, depuis Adam jusqu’à Moïse, la mort a régné, même sur ceux qui n’avaient pas péché par désobéissance à la manière d’Adam. Or, Adam préfigurait celui qui devait venir.
Mais le don gratuit de Dieu et la faute n’ont pas la même mesure. En effet, si la mort a frappé la multitude des hommes par la faute d’un seul, combien plus la grâce de Dieu a-t-elle comblé la multitude, cette grâce qui est donnée en un seul homme, Jésus Christ.
Le don de Dieu et les conséquences du péché d’un seul n’ont pas la même mesure non plus : d’une part, en effet, pour la faute d’un seul, le jugement a conduit à la condamnation ; d’autre part, pour une multitude de fautes, le don gratuit de Dieu conduit à la justification.
En effet, si, à cause d’un seul homme, par la faute d’un seul homme, la mort a régné, combien plus, à cause de Jésus Christ et de lui seul, régneront-ils dans la vie, ceux qui reçoivent en plénitude le don de la grâce qui les rend justes.
Bref, de même que la faute commise par un seul a conduit tous les hommes à la condamnation, de même l’accomplissement de la justice par un seul a conduit tous les hommes à la justification qui donne la vie.
En effet, de même que tous sont devenus pécheurs parce qu’un seul homme a désobéi, de même tous deviendront justes parce qu’un seul homme a obéi.

 

Évangile : Les tentations de Jésus au désert (Mt 4, 1-11)

 

Acclamation : Ta parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance. L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole venant de la bouche de Dieu. Ta parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance.

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Jésus, après son baptême, fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le démon.
Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim.
Le tentateur s’approcha et lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains. »
Mais Jésus répondit : « Il est écrit : Ce n’est pas seulement de pain que l’homme doit vivre, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. »

Alors le démon l’emmène à la ville sainte, à Jérusalem, le place au sommet du Temple et lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. »
Jésus lui déclara : « Il est encore écrit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. »

Le démon l’emmène encore sur une très haute montagne et lui fait voir tous les royaumes du monde avec leur gloire.
Il lui dit : « Tout cela, je te le donnerai, si tu te prosternes pour m’adorer. »
Alors, Jésus lui dit : « Arrière, Satan ! car il est écrit : C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras, et c’est lui seul que tu adoreras. »

Alors le démon le quitte. Voici que des anges s’approchèrent de lui, et ils le servaient.
Patrick BRAUD

Mots-clés : , , , ,
12