Petite théologie du football
Petite théologie du football
Homélie pour le 13° dimanche du temps ordinaire / Année B
01/07/2018
Cf. également :
La générosité de Dieu est la nôtre
Les matriochkas du 12
Coupe du monde de rugby : petit lexique à usage théologique
Petite théologie du rugby pour la Coupe du Monde
« Le football est un jeu très simple : 22 hommes courent après une balle pendant 90 mn, et à la fin ce sont les Allemands qui gagnent » : cette boutade de Gary Lineker (ancien international anglais) nous plonge d’emblée dans une atmosphère quasi-biblique pendant cette Coupe du Monde, avec cette notion de peuple élu que serait l’Allemagne (ou le Brésil) pour incarner le dieu football…
Puisque la coupe du monde de football bat son plein en Russie, essayons – comme nous l’avons fait pour le rugby – de reconsidérer quelques éléments de ce sport sous un éclairage philosophique et théologique.
Il y a d’abord tous les éléments communs aux sports en général. Et en premier lieu la ritualisation de la violence : plutôt que d’en venir aux mains entre bandes rivales, mieux vaut mettre en jeu la rivalité en la mettant en scène sur un terrain de manière régulée, régulière, et la ritualiser avec quelques-uns représentant tout le groupe. Le jeu de balle se pratique depuis environ 3000 ans, et on a des exemples célèbres où il a permis de désamorcer les conflits.
Par exemple au Mexique au XVI° siècle. Deux rois de la triple alliance aztèque Nezahualpilli (Roi de Texcoco) et Motecuzoma II (Roi de Tenochtitlan et empereur des aztèques) se sont livrés en 1519 un combat singulier : un partie de jeu de balle (jeu connu à Chichen Itza dans l’actuel Mexique depuis le VI° siècle av JC [1]). Le match-duel se termina par la victoire sans conteste du roi de Texcoco (pourtant moins puissant que l’empereur). Il fit passer la balle dans l’anneau scellé au mur, exploit suprême. L’empereur se retrouva contraint de céder au vœu de pacifisme du roi de Texcoco formulé avant le match en cas de victoire. Le récit du match se trouvait aussi bien dans les annales de Texcoco que de celle de Tenochtitlan.
Exorciser la violence en la ritualisant, en la codifiant, en la symbolisant est une fonction quasi religieuse. Les sacrements font-ils autrement autre chose dans la foi chrétienne que d’exorciser la mort par le baptême, la violence sacrificielle par l’eucharistie, la guerre des sexes par le mariage ?
Dans les sports collectifs il y a bien d’autres éléments qui relèvent du religieux.
On peut évoquer rapidement le désir de se dépasser, témoin de la transcendance qui habite en nous, la ferveur qui unit les supporters touche à la communion au sens le plus fort et le plus spirituel du terme (on sait que le sport est un opérateur de convivialité, autour d’un apéro entre le voisin, famille, amis ou d’un barbecue…). Les manifestations d’unité en 1998 en France lorsque nous avons été champions du monde sont encore dans toutes les mémoires. On peut évoquer encore l’apprentissage de l’échec et l’humilité qui en découle ; le rôle si important du juge arbitre, référence inconsciente au jugement dernier où chacun est sanctionné pour ses fautes et salué lorsqu’il atteint son but etc.
Essayons de repérer quelques éléments propres au football.
Une quasi-religion, plus populaire et universelle que les grandes religions
Le football parle à tous, mais avec prédilection aux plus pauvres. Il leur fait entendre une promesse de gloire, une fierté d’appartenance, une espérance de salut hors de la misère quotidienne. Comme avec la religion : ce qui fait dire au théologien protestant Paul Tillich que le football est une quasi-religion, populaire, mondiale. Par exemple, la Coupe du Monde de la FIFA 2014 a attiré plus de 3,2 milliards de téléspectateurs ; 1 milliard ont suivi tout ou partie de la finale selon les chiffres définitifs de la FIFA et de KantarSport… Quelle religion peut en dire autant ?
La main interdite
Curieuse, cette interdiction de toucher le ballon avec les mains !
C’est ce qui oblige chacun à déployer des trésors de virtuosité avec ses pieds, sa tête, ses genoux, sa poitrine. C’est comme si le rôle fondateur de l’interdit était discrètement rappelé, alors que jouer à la main est aussi désirable que le fruit de l’arbre de la Genèse ! Heureusement, Daniel Webb Ellis en 1823 transgressera cet interdit, et le rugby fera jouer tout le corps humain (mais avec d’autres interdits, comme l’en-avant ! Comme quoi on ne peut pas se passer d’interdit…).
Le gardien est le seul à être dispensé de cet interdit : joueur à part, situation unique dans les sports collectifs. Un peu comme les cohen (prêtres juifs) qui seuls avaient le droit de rentrer dans le parvis réservé et le sanctuaire. Le gardien est le seul à pouvoir mettre la main sur le ballon dans la surface de réparation. D’ailleurs, faire entrer la balle dans les filets adverses ne revient-il pas à prendre possession du Temple de Jérusalem comme le firent Nabuchodonosor et l’empire romain en leur temps ? Il s’agirait alors de déposséder le Dieu de l’autre de son prestige et de sa force.
La notion de réparation
En Israël, il y avait des sacrifices d’animaux en guise de réparation d’une faute commise envers Dieu. En football, il y a une surface pour cela, dont le but tient lieu de Temple. Toute faute commise dans cet espace donne lieu à un penalty (pénalité en anglais) car sa gravité est proportionnelle à la proximité du lieu saint ! Le penalty est un peu le sacrifice de réparation après une grave entorse au règlement de la violence codifiée. La surface de réparation est le parvis symbolique où l’on sacrifie les animaux pour rétablir la paix avec Dieu.
Le génie individuel, ou le messianisme sécularisé
Un seul joueur peut renverser le cours d’un match. Le doublé d’un Antoine Griezmann, le coup du chapeau (triplé consécutif) d’un Christiano Ronaldo peuvent à eux seuls décider de l’issue incertaine d’un match. C’est comme si un seul individu, soudain revêtu de grâce (charisme en grec) et de talent, pouvait devenir le sauveur de son équipe, et finalement de son peuple. La nature même du sport et en particulier du football, où une carrière et une vie peuvent basculer grâce un but, semble propice au recours au sacré. Dans nul autre sport collectif le rôle de l’individuel n’est aussi décisif (sauf peut-être le basket-ball). Impossible par exemple pour un rugbyman de faire basculer à lui tout seul le score d’une partie. Même les buteurs fameux comme Wilkinson ont besoin que les autres joueurs poussent les autres à la faute pour pouvoir tranquillement enquiller pénalité sur pénalité. Et d’ailleurs justement, même ici, on retrouve les origines footballistiques du rugby, car ce sont des coups de pied arrêtés, et non des jeux de mains…
L’héroïsme qui distingue l’un des Onze d’une équipe de foot (les Douze moins Judas ?) comme le sauveur, le Messie de tous n’est pas loin du messianisme juif ou chrétien. Un seul homme, Jésus, peut en effet inverser le sort humain. Là où tous ont échoué depuis Adam, il a suffi que lui réussisse (par la croix) pour que tous deviennent vainqueurs en lui et grâce à lui. La concentration sur la figure d’un seul au milieu de tous a bien des affinités avec la mise à part du Christ comme seul sauveur, seul médiateur entre Dieu et les hommes (la fameuse main de Dieu de Maradona en est un exemple poussé à l’extrême !). Il y a donc quelque chose de christique dans la légende vivante qui entoure les héros du football, de Just Fontaine à Lionel Messi, en passant par Pelé et autres Zidane…
Un vecteur de l’identité nationale et de la communion entre les peuples
À l’heure de la globalisation à tout-va, chanter l’hymne national (souvent guerrier) pour se démarquer de l’autre partie du stade qui chantera l’autre l’hymne national, c’est presque une provocation. Le thème de l’identité d’un peuple, renforcé par le drapeau, les couleurs du maillot (la Squadra azzura, les Bleus, les Oranges…) revient ici en force, incompressible, irrépressible. Seuls les nationaux jouent en coupe du monde : pas de mercenaires étrangers, pas d’équipe sans nation. Un pays riche comme le Qatar peut certes s’acheter des stars du ballon rond à coups de milliards pour les naturaliser ensuite, cela ne fait toujours pas une sélection nationale. Renforcer l’identité des participants tout en l’ouvrant à la différence, voilà une belle opération symbolique que le football réussit à merveille, quelquefois bien mieux que les religions établies.
Tout gamin de la rue a sa chance
Pelé est la figure de l’ascension sociale fulgurante que peut provoquer le football. Sans école ni formation préalable, un gamin de la rue qui sait d’instinct taper dans le ballon pourra peut-être avoir un avenir exceptionnel. Le football fait la promesse d’élever les humbles et d’offrir à leurs chances aux petits. Le Magnificat n’est pas loin ! Cette promesse n’est pas sans harmoniques évangéliques, même si l’Évangile la fait à tous et pas seulement à quelques vedettes. Reste que la possibilité d’inverser le cours d’une existence, autrement promise à la pauvreté, fait partie du pouvoir de séduction du football. Un peu comme le loto. L’espérance d’une vie meilleure est si fortement chevillée au corps que les pauvres admirent et adulent ceux qui réussissent grâce au football, en s’identifiant à eux. Or c’est également un rôle un des rôles sociaux de la religion que de promouvoir chaque membre de la communauté à une vie meilleure, sur tous les plans, même matériel. Les catholiques ont beaucoup pratiqué ce lien entre baptême et ascension sociale, notamment dans les pays de mission. Actuellement, dans les banlieues et les zones de pauvreté, ce sont plutôt les évangéliques qui relèvent ce défi toujours actuel.
La tentation superstitieuse
Plus que les autres sports, le football donne lieu à des manifestations publiques de religiosité étonnantes. Olivier Giroud, l’attaquant de l’équipe de France, s’est tatoué un psaume en latin sur le bras (« le Seigneur est mon Berger, je ne manque de rien »). Une foi affichée et assumée qui devrait engager aussi à l’extérieur des terrains de football…
Le 6 juin 2016, le jeune brésilien Neymar, vainqueur de la ligue des champions avec le FC Barcelone, revêt le bandeau « 100% Jésus » pour célébrer la victoire. Une inscription plus tard censurée par la FIFA dans une vidéo pour la cérémonie du ballon d’or. Après leur victoire en 2002, l’équipe brésilienne tout entière s’est agenouillée en cercle pour une prière collective intense. Quelques joueurs enlevaient leurs maillots pour laisser apparaître leur T-shirts où était écrit : « J’appartiens à Jésus » (« I belong to Jesus »). L’influence évangéliste sur ce genre de pratiques publiques est manifeste.
Le risque est grand d’utiliser Dieu pour la victoire. « Dieu avec nous » est hélas un vieux slogan que l’on peut trouver chez les meilleurs comme chez les pires. Instrumentaliser Dieu pour le succès a été le péché d’Israël : il croyait que Dieu sortait avec ses armées, et il a fallu une énorme défaite (1 Samuel 4) - avec pourtant l’arche d’Alliance comme emblème – pour que le peuple redécouvre le commandement du Décalogue : « tu ne prononceras pas le Nom de ton Dieu en vain » (Dt 5,11). La superstition (ou la magie) consiste justement à invoquer des force invisibles pour expliquer ou favoriser le cours des évènements…
La tentation du divertissement
« Les hommes, ayant perdu le paradis, se mirent à courir après une balle. »
Cette citation attribuée à Blaise Pascal nous met sur la piste de l’utilisation du football comme divertissement, au sens pascalien du terme, c’est-à-dire quelque chose qui nous divertit, nous détourne de l’essentiel. Les pouvoirs publics utilisent le football et le sport comme force de légitimation (cf. Hitler et les jeux de Berlin, ou l’URSS et le dopage). Ils savent également que le peuple qui a la tête au football ne manifestera pas dans la rue, et oubliera ses problèmes le temps de la compétition et après. Les individus quant à eux vont chercher à s’étourdir dans l’euphorie des supporters, pour oublier leurs problèmes. Poutine en Russie ou Macron en France n’ont pas laissé passer cette occasion d’instrumentaliser la réussite de leur équipe nationale…
Cette vision pessimiste du plaisir des supporters est très puritaine ! Les catholiques préfèreront voir dans ce divertissement un jeu proprement humain, qui n’est pas sans rappeler le plaisir du jeu dont la Sagesse se délectait auprès du Créateur à l’origine du monde (Proverbes 8)…
La tentation du mercenaire
Le revers de cette médaille de réussite est le risque de vendre son âme au succès et à la richesse qui l’accompagne. Plus que tout autre sport, le football actuel est envahi par l’argent. Chaque année, le mercato fait monter le prix de transfert des joueurs pour les clubs à des sommets de plus en plus extravagants. La FIFA estime à 4 milliards d’€ le chiffre d’affaires à réaliser autour de la Coupe du Monde 2018, dont 2 milliards de bénéfices.
En bon marxiste, Mélenchon s’en étonne : « comment voulez-vous que je me passionne pour un sport ou des smicards viennent applaudir des milliardaires ? » Devenir footballeur professionnel est un rêve d’enrichissement et de gloire qui hélas transforme la vie des milliers d’enfants, notamment africains, en long exil décevant à travers l’Europe. Pour ceux qui réussissent (en proportion assez rare), l’ascension est fulgurante. Des gamins de 18 ans se retrouvent à amasser des fortunes qui leur brûlent les doigts et leur tournent la tête. Certains deviennent délinquants, voire criminels ; la plupart flambent leur argent en voitures, boîtes de nuit, filles, alcool etc. Sur le terrain, ils ressemblent plus à des mercenaires qu’à des amoureux du ballon rond et d’une identité locale. Ils sont prêts à se vendre au plus offrant. Heureusement, le PSG avec l’argent du Qatar et ses stars si coûteuses ne vaut pas encore le Real Madrid entraîné par Zidane… Reste que le budget d’un club est proportionnel à son succès en Ligue 1 ou Ligue 2, et vice versa hélas. Le mythe du petit Poucet détrônant les pros se réalise de temps en temps en Coupe de France (Guingamp, les Herbiers…). Mais la dure loi de l’argent règne sur les performances des clubs.
Comment ne pas entendre le Christ tonner : « vous ne pouvez servir Dieu et l’argent ? » Ou bien saint Jacques : « malheur à vous les riches. Vos richesses sont pourries ». Quand taper dans un ballon permet à quelqu’un de gagner en un mois plus qu’un ouvrier pourra jamais économiser tout au long de sa vie, on se dit qu’il y a effectivement quelque chose de pourri au royaume du football…
Ce ne sont là que quelques linéaments dans le désordre, quelques briques d’une relecture théologique bien incomplète, à affiner davantage.
L’important est dans l’acte même de prendre du recul sur le spectacle de la Coupe du monde qui nous est offert. L’important est de prendre le temps de réfléchir sur ce jeu et sur cet événement mondial : Dieu n’est certes pas absent des stades (le diable non plus !), de la ferveur qui unit des peuple pacifiquement, de l’envie sportive de se dépasser témoignant de la transcendance etc.
Posons un autre regard sur ces réjouissances : un regard de bienveillance qui cherche à discerner les vraies attentes de nos contemporains derrière les enthousiasmes faciles, agréables et fragiles.
[1]. On pense, en s’appuyant notamment sur les grandes fresques en bas-reliefs qui entourent le grand terrain de Chichen Itza au Mexique, que lors des grandes fêtes une équipe représentant les forces de l’inframonde (le monde souterrain où les morts se rendaient – symbolisées par des jaguars) affrontait une équipe représentant la lumière (sous la forme d’aigles) avec une balle en caoutchouc (ils maîtrisaient la vulcanisation). Le match pouvait s’étendre sur plus d’un jour et selon les explications des guides sur place, la tête du capitaine de l’équipe perdante était tranchée par le capitaine de l’équipe gagnante et son sang était répandu sur le sol. Les Mayas associaient le sang à la vie et pensaient qu’il permettait donc une fertilisation du sol, améliorant les récoltes. Pour les Mayas, c’était un grand honneur ; on versait la tête était ensuite empalée dans le mur prévu à cet effet juste à côté du stade de ce jeu de balle.
Lectures de la messe
Première lecture
« C’est par la jalousie du diable que la mort est entrée dans le monde » (Sg 1, 13-15 ; 2, 23-24)
Lecture du livre de la Sagesse
Dieu n’a pas fait la mort, il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. Il les a tous créés pour qu’ils subsistent ; ce qui naît dans le monde est porteur de vie : on n’y trouve pas de poison qui fasse mourir. La puissance de la Mort ne règne pas sur la terre, car la justice est immortelle. Dieu a créé l’homme pour l’incorruptibilité, il a fait de lui une image de sa propre identité. C’est par la jalousie du diable que la mort est entrée dans le monde ; ils en font l’expérience, ceux qui prennent parti pour lui.
Psaume
(29 (30), 2.4, 5-6ab, 6cd.12, 13)
R/ Je t’exalte, Seigneur : tu m’as relevé. (29, 2a)
Je t’exalte, Seigneur : tu m’as relevé,
tu m’épargnes les rires de l’ennemi.
Seigneur, tu m’as fait remonter de l’abîme
et revivre quand je descendais à la fosse.
Fêtez le Seigneur, vous, ses fidèles,
rendez grâce en rappelant son nom très saint.
Sa colère ne dure qu’un instant,
sa bonté, toute la vie.
Avec le soir, viennent les larmes,
mais au matin, les cris de joie.
Tu as changé mon deuil en une danse,
mes habits funèbres en parure de joie.
Que mon cœur ne se taise pas,
qu’il soit en fête pour toi,
et que sans fin, Seigneur, mon Dieu,
je te rende grâce !
Deuxième lecture
« Ce que vous avez en abondance comblera les besoins des frères pauvres » (2Co 8, 7.9.13-15)
Lecture de la deuxième lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens
Frères, puisque vous avez tout en abondance, la foi, la Parole, la connaissance de Dieu, toute sorte d’empressement et l’amour qui vous vient de nous, qu’il y ait aussi abondance dans votre don généreux ! Vous connaissez en effet le don généreux de notre Seigneur Jésus Christ : lui qui est riche, il s’est fait pauvre à cause de vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté. Il ne s’agit pas de vous mettre dans la gêne en soulageant les autres, il s’agit d’égalité. Dans la circonstance présente, ce que vous avez en abondance comblera leurs besoins, afin que, réciproquement, ce qu’ils ont en abondance puisse combler vos besoins, et cela fera l’égalité, comme dit l’Écriture à propos de la manne : Celui qui en avait ramassé beaucoup n’eut rien de trop, celui qui en avait ramassé peu ne manqua de rien.
Évangile
« Jeune fille, je te le dis, lève-toi ! » (Mc 5, 21-43)
Alléluia. Alléluia. Notre Sauveur, le Christ Jésus, a détruit la mort ; il a fait resplendir la vie par l’Évangile. Alléluia. (2 Tm 1, 10)
Évangile de Jésus Christ selon saint Marc
En ce temps-là, Jésus regagna en barque l’autre rive, et une grande foule s’assembla autour de lui. Il était au bord de la mer. Arrive un des chefs de synagogue, nommé Jaïre. Voyant Jésus, il tombe à ses pieds et le supplie instamment : « Ma fille, encore si jeune, est à la dernière extrémité. Viens lui imposer les mains pour qu’elle soit sauvée et qu’elle vive. » Jésus partit avec lui, et la foule qui le suivait était si nombreuse qu’elle l’écrasait.
Or, une femme, qui avait des pertes de sang depuis douze ans… – elle avait beaucoup souffert du traitement de nombreux médecins, et elle avait dépensé tous ses biens sans avoir la moindre amélioration ; au contraire, son état avait plutôt empiré – … cette femme donc, ayant appris ce qu’on disait de Jésus, vint par-derrière dans la foule et toucha son vêtement. Elle se disait en effet : « Si je parviens à toucher seulement son vêtement, je serai sauvée. » À l’instant, l’hémorragie s’arrêta, et elle ressentit dans son corps qu’elle était guérie de son mal. Aussitôt Jésus se rendit compte qu’une force était sortie de lui. Il se retourna dans la foule, et il demandait : « Qui a touché mes vêtements ? » Ses disciples lui répondirent : « Tu vois bien la foule qui t’écrase, et tu demandes : “Qui m’a touché ?” » Mais lui regardait tout autour pour voir celle qui avait fait cela. Alors la femme, saisie de crainte et toute tremblante, sachant ce qui lui était arrivé, vint se jeter à ses pieds et lui dit toute la vérité. Jésus lui dit alors : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix et sois guérie de ton mal. »
Comme il parlait encore, des gens arrivent de la maison de Jaïre, le chef de synagogue, pour dire à celui-ci : « Ta fille vient de mourir. À quoi bon déranger encore le Maître ? » Jésus, surprenant ces mots, dit au chef de synagogue : « Ne crains pas, crois seulement. » Il ne laissa personne l’accompagner, sauf Pierre, Jacques, et Jean, le frère de Jacques. Ils arrivent à la maison du chef de synagogue. Jésus voit l’agitation, et des gens qui pleurent et poussent de grands cris. Il entre et leur dit : « Pourquoi cette agitation et ces pleurs ? L’enfant n’est pas morte : elle dort. » Mais on se moquait de lui. Alors il met tout le monde dehors, prend avec lui le père et la mère de l’enfant, et ceux qui étaient avec lui ; puis il pénètre là où reposait l’enfant. Il saisit la main de l’enfant, et lui dit : « Talitha koum », ce qui signifie : « Jeune fille, je te le dis, lève-toi! » Aussitôt la jeune fille se leva et se mit à marcher – elle avait en effet douze ans. Ils furent frappés d’une grande stupeur. Et Jésus leur ordonna fermement de ne le faire savoir à personne ; puis il leur dit de la faire manger.
Patrick BRAUD