L'homélie du dimanche (prochain)

16 janvier 2010

Jésus que leur joie demeure

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Jésus que leur joie demeure

Homélie du  2° Dimanche du temps ordinaire / Année C
17/01/10


C’est un peu le sens de l’intercession de Marie dans ses noces de Cana.

« Ils n’ont plus de vin ». En disant cela à son fils, c’est comme si Marie le suppliait : « Jésus, que leur joie demeure »…

Car le vin est dans la Bible le symbole de la joie qui coule à flots. « Le vin réjouit le coeur de l’homme » (Ps 104,15) ne cessent de répéter les textes bibliques (cf. Jg 9,13 ; Dt 14,26 ; Qo 10,9 ; Za 10,7?), bien loin en cela du Coran pour qui le vin ne conduit qu’à des excès et doit donc être interdit.

Sur le fronton du temple de Jérusalem, le peuple d’Israël était représenté par une grappe de raisin destiné à produire du vin savoureux. Dans le repas de Pâques, on boit trois coupes de vin, la quatrième restant cachée jusqu’à la venue d’Élie annonçant le Messie : là on pourra boire cette quatrième coupe, car la joie sera complète.

Vous le voyez, Marie s’inscrit dans cette longue tradition qui aime la vie, qui aime la fête : « Jésus, que leur joie demeure ».

S’ils n’ont plus de vin, leur joie va s’épuiser…

Comme Marie est la figure de l’Église, son icône personnifiée, on voit là un des rôles majeurs de notre Église dans le monde de ce temps : intercéder auprès du Christ pour que la joie des hommes de s’épuise  pas…

Et comme Marie, nous ne demandons pas cette joie d’abord pour nous-mêmes, mais pour les autres, pour ceux qui nous ont invité et chez qui nous sommes de passage, à la noce.

Car la joie des hommes est fragile et s’éteint vite.

La joie du mariage dont parle notre évangile ne dure parfois que quelques mois ou quelques années en Occident… Intercéder et agir pour que la joie entre l’homme et la femme ne s’épuise pas est toujours une des missions majeures de l’Église, à la suite de Marie.

Mais on peut encore penser à d’autres joies qui ont besoin d’être sublimées, transfigurées en Christ pour ne pas se tarir : la joie de la transformation du monde par la science et les techniques, la joie de la création artistique, la joie sportive d’une communion qui nous dépasse…

Marie-Église ne méprise aucune joie humaine : elle cherche à lui donner sa plénitude en la greffant sur le Christ.


« Les deux soifs »

Cette intercession de Marie fait irrésistiblement penser à celle que Jésus osera supplier lui-même sur la croix : « j’ai soif » ? (Jn 19,28)

À Cana, les invités de la noce ont soif de vin et de joie, et Jésus leur fait servir le meilleur vin de la soirée.

Sur la croix, Jésus a soif d’eau et de compassion, et les soldats lui servent du fiel et du vinaigre.

Pourtant c’est bien la soif de Jésus sur la croix qui va nourrir (« rétroactivement ») la soif de la foule à Cana.

Le vinaigre qu’on lui donne à boire peut représenter la dérision des soldats se moquant de lui jusqu’au sadisme, jusqu’à augmenter encore sa souffrance. Ou bien le vinaigre peut aussi être un dérivatif une drogue comme un anesthésiant pour qu’il ne sente plus sa soif. Jésus refuse les deux : la dérision et la fuite. Il ne veut ni susciter le sadisme de ses ennemis, ni s’évader dans un coma artificiel. Il affronte la solitude et la mort avec cette soif inextinguible qui est en fait sa soif de communion avec Dieu…

C’est cette soif-là, tragique est crucifiée, qui change l’eau en vin à Cana ; c’est cette soif s’affrontant à la mort, la solitude, à l’abandon, qui va sauver la fête, la joie, le mariage de Cana.

Dans l’Évangile de Jean, les deux soifs se répondent : celle de Cana et celle de la Croix. Et c’est la deuxième qui exauce la première.

Ainsi donc la joie ne s’épuisera pas de nos vies, quelque soit les circonstances…

Le choral des mains vides

D’ailleurs, l’intercession de Marie-Église : « Jésus, que leur joie demeure » fait encore penser au célébrissime choral de la cantate BWV 147 de Jean-Sébastien Bach. Or, savez-vous quand Bach a écrit ce choral ? En 1716, pour le quatrième dimanche de l’Avent, alors qu’il vient d’apprendre la mort de son fils. Il est anéanti. Et pourtant il prend sa plume et compose cet air parmi les plus sereins du répertoire. C’est cela « le miracle des mains vides » : donner à d’autres la joie qu’on ne possède pas soi-même…

Dans le film sur François Mitterrand intitulé : « Le promeneur du Champ-de-Mars » (2005), c’est dans un cimetière que le président raconte cette anecdote sur Bach au journaliste qui écrit un livre sur lui : « tout le monde se serait effondré, s’étonne Mitterrand, mais c’est à ce moment qu’il écrivit : Jésus que ma joie demeure. »

Voilà comment la soif de la Croix nourrit la joie de Cana…

Puissions-nous être fidèles à ce que Marie nous indique comme rôle pour notre Église aujourd’hui : intercéder et tout préparer pour que la joie des hommes continue à couler à flots.

« Jésus, que leur joie demeure » …

  

1ère lecture : Les noces de Dieu et de son peuple (Is 62, 1-5)
Lecture du livre d’Isaïe

Pour la cause de Jérusalem je ne me tairai pas,
pour Sion je ne prendrai pas de repos,
avant que sa justice ne se lève comme l’aurore
et que son salut ne flamboie comme une torche.
Les nations verront ta justice,
tous les rois verront ta gloire.
On t’appellera d’un nom nouveau,
donné par le Seigneur lui-même.
Tu seras une couronne resplendissante
entre les doigts du Seigneur,
un diadème royal dans la main de ton Dieu.
On ne t’appellera plus : « La délaissée »,
on n’appellera plus ta contrée : « Terre déserte »,
mais on te nommera : « Ma préférée »,
on nommera ta contrée : « Mon épouse »,
car le Seigneur met en toi sa préférence
et ta contrée aura un époux.
Comme un jeune homme épouse une jeune fille,
celui qui t’a construite t’épousera.
Comme la jeune mariée est la joie de son mari,
ainsi tu seras la joie de ton Dieu.

Psaume : Ps 95, 1-2a, 2b-3, 7-8a, 9a.10ac

R/ Allez dire au monde entier
les merveilles de Dieu !

Chantez au Seigneur un chant nouveau,
chantez au Seigneur, terre entière,
chantez au Seigneur et bénissez son nom !

De jour en jour, proclamez son salut,
racontez à tous les peuples sa gloire,
à toutes les nations ses merveilles !

Rendez au Seigneur, familles des peuples,
rendez au Seigneur la gloire et la puissance,

rendez au Seigneur la gloire de son nom.

Apportez votre offrande, entrez dans ses parvis,
adorez le Seigneur, éblouissant de sainteté :
tremblez devant lui, terre entière.

Allez dire aux nations : « Le Seigneur est roi ! »
Le monde, inébranlable, tient bon.
Il gouverne les peuples avec droiture.

2ème lecture : Diversité des charismes dans l’unité (1Co 12, 4-11)
Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères,
Les dons de la grâce sont variés, mais c’est toujours le même Esprit. Les fonctions dans l’Église sont variées, mais c’est toujours le même Seigneur.
Les activités sont variées, mais c’est toujours le même Dieu qui agit en tous.
Chacun reçoit le don de manifester l’Esprit en vue du bien de tous.
A celui-ci est donné, grâce à l’Esprit, le langage de la sagesse de Dieu ; à un autre, toujours par l’Esprit, le langage de la connaissance de Dieu ;
un autre reçoit, dans l’Esprit, le don de la foi ; un autre encore, des pouvoirs de guérison dans l’unique Esprit ;
un autre peut faire des miracles, un autre est un prophète, un autre sait reconnaître ce qui vient vraiment de l’Esprit ; l’un reçoit le don de dire toutes sortes de paroles mystérieuses, l’autre le don de les interpréter.
Mais celui qui agit en tout cela, c’est le même et unique Esprit : il distribue ses dons à chacun, selon sa volonté.

Evangile : Les noces de Cana (Jn 2, 1-11)

Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Soyons dans la joie pour l’Alliance nouvelle :
heureux les invités aux noces de l’Agneau !
Alléluia. (Ap 19, 7.9)

Evangile de Jésus Christ selon saint Jean

Il y avait un mariage à Cana en Galilée. La mère de Jésus était là.
Jésus aussi avait été invité au repas de noces avec ses disciples.Or, on manqua de vin ; la mère de Jésus lui dit : « Ils n’ont pas de vin. »
Jésus lui répond : « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue. »
Sa mère dit aux serviteurs : « Faites tout ce qu’il vous dira. »
Or, il y avait là six cuves de pierre pour les ablutions rituelles des Juifs ; chacune contenait environ cent litres.
Jésus dit aux serviteurs : « Remplissez d’eau les cuves. » Et ils les remplirent jusqu’au bord.
Il leur dit : « Maintenant, puisez, et portez-en au maître du repas. » Ils lui en portèrent.
Le maître du repas goûta l’eau changée en vin. Il ne savait pas d’où venait ce vin, mais les serviteurs le savaient, eux qui avaient puisé l’eau.
Alors le maître du repas interpelle le marié et lui dit : « Tout le monde sert le bon vin en premier, et, lorsque les gens ont bien bu, on apporte le moins bon. Mais toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à maintenant. »Tel fut le commencement des signes que Jésus accomplit. C’était à Cana en Galilée. Il manifesta sa gloire, et ses disciples crurent en lui.

Patrick BRAUD
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