L'homélie du dimanche (prochain)

22 juin 2025

Pierre et Paul, ordonnés pour nous

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Pierre et Paul, ordonnés pour nous


Homélie pour la fête de saint Pierre et saint Paul, Apôtres / Année C
29/06/25
 
Cf. également :
Jésus évalué à 360°

Philippe à la mêlée, Pierre à l’ouverture 

Le kôan qui changea Simon en Pierre

L’Esprit nous précède 

Pâques : Courir plus vite que Pierre

Paul et Coldplay, façon Broken

Quelle est votre écharde dans la chair ?

Qui est votre Ananie ?

Le pur amour : pour qui êtes-vous prêts à aller en enfer ?

« Passons aux barbares »…

 

Le 29 juin est une date connue et aimée d’une multitude de prêtres dans le monde entier.

Pierre et Paul, ordonnés pour nous dans Communauté spirituelle ciric_298968_ordination_pretreC’est en ce jour de la fête de Pierre et Paul que l’Église aime en effet ordonner ses prêtres, comme pour les enraciner dans le ministère de ces deux apôtres.

Pourquoi donc ordonner un 29 juin ? La Préface de cette fête nous met sur la piste :

« Tu nous donnes de fêter en ce jour – dit la Préface – les deux apôtres Pierre et Paul. Celui qui fut le premier a confessé la foi : Pierre, et celui qui l’a mise en lumière : Paul. Pierre qui constitua l’Église en s’adressant d’abord aux fils d’Israël, et Paul qui fit connaître aux nations l’évangile du salut. L’un et l’autre ont travaillé chacun selon sa grâce à rassembler l’unique famille du Christ ». 

Vous avez là dans cette Préface des éléments fondamentaux du ministère des prêtres aujourd’hui encore : rassembler, confesser la foi, la mettre en lumière, constituer l’Église, l’ouvrir aux nations. Regardons chaque terme de cette Préface.

 

- Rassembler l’unique famille du Christ 

VISUEL+LE+CORPS+DU+CHRIST+%25282%2529 ordination dans Communauté spirituelleC’est bien ce que l’on attend des prêtres : qu’ils soient des rassembleurs, au-delà des clivages sociaux qui ne devraient pas avoir cours dans l’Église, au-delà des légitimes différents de sensibilité de tous ordres, les prêtres, inlassablement, font retenir l’appel  de Dieu à la communion : « Laissez Dieu vous initier à une vie de communion avec lui, avec vos frères et sœurs, avec l’univers, avec vous-même ». Le geste où culmine cette communion ecclésiale est bien sûr la communion eucharistique, mais c’est toute la mission des prêtres que de faire en sorte que les gens se parlent, se pardonnent, apprennent à s’aimer d’avantage. C’est cela « rassembler l’unique famille du Christ ».

 

- Deuxième élément de la Préface : confesser la foi, comme Pierre, qui se jette à l’eau pour proclamer : « Tu es le Messie », alors même qu’il ne saisit pas encore tout ce que cela veut dire, et notamment la croix. Les prêtres initient à la foi de l’Église, pour que les baptisés  se laissent porter par cette foi, cette confiance – c’est le même mot – en un Dieu communion d’amour, Père, Fils et Esprit saint. Cela passe par la première annonce de la foi, puis la catéchèse, à tout âge de la vie, des petits enfants ou personnes âgées, en passant par les fiancés, les adolescents, mais cela passe aussi par toute la vie des prêtres.
Confesser la foi de l’Église. 

 

matt-botsford-566660-unsplash-2 Paul- Troisième élément de la Préface : mettre cette foi en lumière, comme Paul, qui met son immense culture juive, grecque et romaine au service de la foi. Paul débat, argumente, explicite, écrit, dénonce les dérives. C’est lui qui met en lumière, par exemple, la primauté de la grâce sur les œuvres, la primauté de l’Esprit sur la lettre de la Loi, la primauté de l’amour sur tous les autres charismes. Mettre en lumière la pertinence de la foi pour aujourd’hui, pour les prêtres, comme pour les diacres et les évêques en premier lieu, cela passe notamment par le ministère de l’homélie du Dimanche, mais aussi par l’écriture de livres, la prédication de retraites, la participation aux débats contemporains, dans les médias, radios, Internet, réseaux sociaux, universités, etc.

Mettre la foi en lumière. 

 

- Quatrième élément de la Préface sur le ministère des prêtres : constituer l’Église.

VISUEL+LE+CORPS+DU+CHRIST+%25282%2529 PierreLa passion des prêtres, c’est de servir l’engendrement du Corps du Christ à travers tout cela. Tels des sages-femmes – et saint Paul se compare souvent à une sage-femme – ils guettent les signes d’une nouvelle naissance du Christ possible en chacun. Ils accompagnent l’émergence de nouvelles manières de vivre en Église. Ils constituent cette Église, en célébrant les sacrements, en créant des équipes de chrétiens, en appelant chacun à devenir responsable, là où il est, dans sa communauté chrétienne et dans la société.

Constituer l’Église. 

 

- Cinquième élément de la Préface sur le ministère des prêtres : ouvrir cette même Église à toutes les nations. Pierre a accueilli le centurion romain Corneille, il a reconnu que l’Esprit saint « ouvre les portes de la foi aux païens », selon ses mots. Paul – lui – a sillonné la Méditerranée jusqu’à l’Europe, pour maintenir grandes ouvertes ces portes de l’Église à toutes les cultures, langues peuples et nations. Ce souci de l’ouverture à l’universel, à la catholicité de l’Église, anime toujours le ministère des prêtres. Empêcher une Église locale de se refermer sur elle-même, la mettre en communion avec la grande Église de tous les temps et de toutes les cultures, c’est cela la Tradition vivante. Les prêtres y participent à leur manière, en maintenant ouvertes ces portes que l’Esprit a déverrouillé et par lesquelles il nous donne des catéchumènes venus d’ailleurs, aujourd’hui encore. Ils doivent également être attentifs aux nouvelles Pentecôtes qui – comme à Jérusalem – ouvrent des chemins inédits d’évangélisation et de communion…

Ouvrir l’Église aux nations.

 

Rassembler l’unique famille du Christ, confesser la foi, la mettre en lumière, constituer l’Église, l’ouvrir aux nations. 

 

Voilà pourquoi le ministère des prêtres nous est si précieux. Voilà pourquoi il est vital de recevoir les prêtres qui nous sont donnés et ordonnés. Car il s’agit bien de recevoir les prêtres. Quand l’Église appelle un prêtre, c’est qu’elle reconnaît en lui un don de Dieu. Quand elle l’ordonne, c’est pour à son tour le donner au monde. Selon la belle théologie du ministère qui vient de Paul : « Les dons que Dieu a fait aux hommes, ce sont des apôtres, des prophètes, des évangélistes, des pasteurs et catéchistes, afin de mettre les saints  (c’est-à-dire les baptisés) en état d’accomplir le ministère pour bâtir le corps du Christ » (Ep 4,11) . Les ministres ordonnés ne sont donc pas des gens privilégiés ou supérieurs, mais des personnes qui sont données à toute l’Église afin qu’elle devienne elle-même, afin qu’elle accomplisse son ministère. En termes théologiques, Vatican II dira que le ministère presbytéral est au service du sacerdoce commun des fidèles : quelques-uns sont prêtres (en grec : presbyteroï = anciens) afin que tous soient prêtres (en latin : sacerdotes = sacerdoce), c’est-à-dire que tous puissent faire de leur vie un sacrifice eucharistique, selon les termes de Paul : « Je vous exhorte donc, frères, par la tendresse de Dieu, à lui présenter votre corps – votre personne tout entière –, en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu : c’est là, pour vous, la juste manière de lui rendre un culte » (Rm 12,1). De la même manière, certains sont appelés à être diacres pour que tous soient serviteurs.

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Pierre et Paul, gravure sur une pierre tombale en marbre venant de la catacombe St Sébastien – IV° siècle, Musée du Vatican

 

En ce 29 juin, puissions-nous apprendre toujours davantage à nous recevoir les uns les autres – quelle que soit notre vocation – comme de vrais cadeaux que Dieu nous fait pour accomplir le ministère de l’Église. C’est d’ailleurs l’un des enjeux spirituels des nominations diocésaines de prêtres à venir : changer de paroisse, aller ailleurs, c’est pour un prêtre recevoir sa mission d’un autre. Pour nous, recevoir ceux qui nous sont donnés comme prêtres ou diacres (et que nous n’avons pas choisis), c’est se recevoir ensemble de Celui qui est la source de toute communion.

 

Prions cette semaine la Préface du 29 Juin, afin de mieux percevoir comment articuler notre vocation de baptisés à celle des ministres qui nous sont envoyés :

 

50862562_p sacerdoceVraiment, il est juste et bon,
pour ta gloire et notre salut,
de t’offrir notre action de grâce,
toujours et en tout lieu,
Seigneur, Père très saint,
Dieu éternel et tout-puissant.

Car tu nous donnes la joie de célébrer en ce jour
les bienheureux apôtres Pierre et Paul :
celui qui fut le premier à confesser la foi,
et celui qui l’a mise en lumière ;
Pierre qui constitua l’Église naissante
parmi les pauvres d’Israël,
et Paul, maître et docteur
des nations appelées au salut ;
l’un et l’autre ont travaillé, par des voies différentes,
à rassembler l’unique famille du Christ ;
dans le martyre, une même couronne les a réunis
et ils reçoivent, de par le monde, la même vénération.
C’est pourquoi, avec les saints et tous les anges,
nous te louons et sans fin nous proclamons :

Saint ! Saint ! Saint, le Seigneur, Dieu de l’univers…

Messe du jour

 

Première lecture

« Vraiment, je me rends compte maintenant que le Seigneur m’a arraché aux mains d’Hérode » (Ac 12, 1-11)

 

Lecture du livre des Actes des Apôtres

À cette époque, le roi Hérode Agrippa se saisit de certains membres de l’Église pour les mettre à mal. Il supprima Jacques, frère de Jean, en le faisant décapiter. Voyant que cette mesure plaisait aux Juifs, il décida aussi d’arrêter Pierre. C’était les jours des Pains sans levain. Il le fit appréhender, emprisonner, et placer sous la garde de quatre escouades de quatre soldats ; il voulait le faire comparaître devant le peuple après la Pâque. Tandis que Pierre était ainsi détenu dans la prison, l’Église priait Dieu pour lui avec insistance. Hérode allait le faire comparaître. Or, Pierre dormait, cette nuit-là, entre deux soldats ; il était attaché avec deux chaînes et des gardes étaient en faction devant la porte de la prison. Et voici que survint l’ange du Seigneur, et une lumière brilla dans la cellule. Il réveilla Pierre en le frappant au côté et dit : « Lève-toi vite. » Les chaînes lui tombèrent des mains. Alors l’ange lui dit : « Mets ta ceinture et chausse tes sandales. » Ce que fit Pierre. L’ange ajouta : « Enveloppe-toi de ton manteau et suis-moi.» Pierre sortit derrière lui, mais il ne savait pas que tout ce qui arrivait grâce à l’ange était bien réel ; il pensait qu’il avait une vision. Passant devant un premier poste de garde, puis devant un second, ils arrivèrent au portail de fer donnant sur la ville. Celui-ci s’ouvrit tout seul devant eux. Une fois dehors, ils s’engagèrent dans une rue, et aussitôt l’ange le quitta. Alors, se reprenant, Pierre dit : « Vraiment, je me rends compte maintenant que le Seigneur a envoyé son ange, et qu’il m’a arraché aux mains d’Hérode et à tout ce qu’attendait le peuple juif. »

 

Psaume

(Ps 33 (34), 2-3, 4-5, 6-7, 8-9)

R/ De toutes mes frayeurs, le Seigneur me délivre. (cf. 33, 5)

 

Je bénirai le Seigneur en tout temps, 

sa louange sans cesse à mes lèvres. 

Je me glorifierai dans le Seigneur : 

que les pauvres m’entendent et soient en fête !

 

Magnifiez avec moi le Seigneur, 

exaltons tous ensemble son nom. 

Je cherche le Seigneur, il me répond : 

de toutes mes frayeurs, il me délivre.

 

Qui regarde vers lui resplendira, sans ombre ni trouble au visage. 

Un pauvre crie ; le Seigneur entend : il le sauve de toutes ses angoisses.

L’ange du Seigneur campe alentour, pour libérer ceux qui le craignent. 

Goûtez et voyez : le Seigneur est bon ! Heureux qui trouve en lui son refuge !

 

Deuxième lecture

« Je n’ai plus qu’à recevoir la couronne de la justice » (2 Tm 4, 6-8.17-18)

 

Lecture de la deuxième lettre de saint Paul apôtre à Timothée

Bien-aimé, je suis déjà offert en sacrifice, le moment de mon départ est venu. J’ai mené le bon combat, j’ai achevé ma course, j’ai gardé la foi. Je n’ai plus qu’à recevoir la couronne de la justice : le Seigneur, le juste juge, me la remettra en ce jour-là, et non seulement à moi, mais aussi à tous ceux qui auront désiré avec amour sa Manifestation glorieuse.

Tous m’ont abandonné. Le Seigneur, lui, m’a assisté. Il m’a rempli de force pour que, par moi, la proclamation de l’Évangile s’accomplisse jusqu’au bout et que toutes les nations l’entendent. J’ai été arraché à la gueule du lion ; le Seigneur m’arrachera encore à tout ce qu’on fait pour me nuire. Il me sauvera et me fera entrer dans son Royaume céleste. À lui la gloire pour les siècles des siècles. Amen.

 

Évangile

« Tu es Pierre, et je te donnerai les clés du royaume des Cieux » (Mt 16, 13-19)

Alléluia. Alléluia. Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle. Alléluia. (Mt 16, 18)

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

En ce temps-là, Jésus, arrivé dans la région de Césarée-de-Philippe, demandait à ses disciples : « Au dire des gens, qui est le Fils de l’homme ? » Ils répondirent : « Pour les uns, Jean le Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres encore, Jérémie ou l’un des prophètes. » Jésus leur demanda : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je? » Alors Simon-Pierre prit la parole et dit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! » Prenant la parole à son tour, Jésus lui dit :
« Heureux es-tu, Simon fils de Yonas : ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux. Et moi, je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle. Je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux. »

Patrick Braud

 

 

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18 août 2024

Femmes soumises ?

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Femmes soumises ?

 

Homélie pour le 21° Dimanche du Temps ordinaire / Année B 

25/08/24

 

Cf. également :

« En même temps » : pas très biblique !
Le polythéisme des valeurs
Sur quoi fonder le mariage ?
L’homme, la femme, et Dieu au milieu
Voulez-vous partir vous aussi ?
La liberté de partir ou de rester
Le peuple des murmures
Pourquoi Paul n’a-t-il pas voulu abolir l’esclavage ?

 

1. Que faire de ces versets gênants ?

Le parti de la France Insoumise (LFI) occupe une place de premier choix dans le paysage médiatique et politique depuis les législatives 2024. Les courants féministes traversent toutes les formations et travaillent puissamment à réformer les lois et les coutumes concernant le statut de la femme. La conjugaison de ces deux influences rend inaudible la 2° lecture de ce dimanche (Ep 5, 21-32) pour la plupart de nos contemporains : « Femmes, soyez soumises à vos maris ».

Que faire de ces versets gênants ?

 

– Les appliquer aveuglément

couverture représentant au-dessus des nuages le haut de la tour Eiffel au sommet de laquelle trône le croissant de l'IslamLes fondamentalistes se raidissent sur l’observance littérale des passages ‘malheureux’ de Paul, apparemment misogynes : « Vous les femmes, soyez soumises à votre mari ; dans le Seigneur, c’est ce qui convient. » (Col 3,18) ; « En effet, si la femme ne se couvre pas, qu’elle aille jusqu’à se faire tondre ; et si c’est une honte pour la femme d’être tondue ou rasée, qu’elle se couvre la tête » (1Co 11,6) ; « Que la femme reçoive l’instruction dans le calme, en toute soumission. Je ne permets pas à une femme d’enseigner, ni de dominer son mari ; mais qu’elle reste dans le calme » (1Tm 2,11–15)… Pour les Mormons, les Amish, les Témoins de Jéhovah ou même certains protestants puritains et évangélistes, c’est la Parole de Dieu, et il faut donc lui obéir sans discuter, à la lettre, quitte à être en complet décalage avec la culture de notre temps.

La soumission islamique (le mot arabe   الْإِسْلَامُ = islam signifie soumission) n’est jamais que la reviviscence de cette lecture fondamentaliste de la volonté de Dieu soi-disant exprimée dans le Coran et qu’il faudrait observer à la lettre..

 

Mais c’est complètement incohérent par rapport aux autres écrits de Paul, et plus encore les Évangiles ! Paul en effet plaide pour l’égalité de tous : « Il n’y a plus ni juif ni grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus l’homme et la femme, car tous, vous ne faites plus qu’un dans le Christ Jésus » (Ga 3,28). Il s’entoure d’un groupe de femmes, il profite de leur argent. Il nomme même « apôtre » Junie à (« Saluez Andronicos et Junie qui sont de ma parenté. Ils furent mes compagnons de captivité. Ce sont des apôtres bien connus ; ils ont même appartenu au Christ avant moi. » – Rm 16,7), « diaconesse » Phébée (« Je vous recommande Phébée notre sœur, diaconesse de l’Église qui est à Cencrée » – Rm 16,1-2) (en effet, elle lit en public, explique et commente la lettre de Paul aux Romains), « collaboratrice » Priscille (« Saluez de ma part Priscille et Aquilas, mes collaborateurs en Jésus Christ » – Rm 16,3). Ces femmes ouvrent leurs maisons aux premières assemblées chrétiennes, devenant ainsi les premières églises domestiques de l’histoire.

 

Dans les évangiles, on ne voit jamais les femmes soumises à Jésus dans un rapport d’autorité verticale. Au contraire, Jésus semble plutôt obéir aux femmes qu’il rencontre : Marie à Cana, la cananéenne du Liban, l’hémorroïsse, Marie de Béthanie, Marie de Magdala (‘apôtre des apôtres’) etc.

Le principe de cohérence oblige donc à ne pas sélectionner dans les écrits pauliniens les versets de ‘soumission’ en les isolant de leur contexte.

 

– Les nettoyer de leurs préjugés culturels datés

Femmes soumises ? dans Communauté spirituelle 178012-5-techniques-pour-eplucher-les-oignons-sans-pleurer-580x0-1D’où la 2e solution : traiter ces versets comme des scories culturelles de pratiques  aujourd’hui dépassées et disparues. Paul était de son époque. Il faut débarrasser son message de sa gangue culturelle liée à une société patriarcale à dominante masculine.

Solution séduisante, car compatible avec nos mentalités modernes tout en préservant l’essentiel du message. Mais faire le tri peut s’avérer dangereux, car on peut jeter le bébé avec l’eau du bain, ou éplucher un oignon jusqu’à découvrir qu’il ne reste plus rien…

 

– Poursuivre le déplacement qu’ils opéraient à l’époque

Féministe et chrétienneOn a alors imaginé la solution historico-critique, qui consiste à regarder le déplacement opéré par Paul par rapport à la culture de son temps. C’est ce déplacement qu’il faut poursuivre, et non le résultat qu’il faudrait sacraliser, résultat provisoires qui évoluera avec le temps.

Paul parle non pas dans l’absolu, mais par rapport à un contexte particulier. Il faut donc, pour être fidèle à Paul, voir ce qu’il dit par rapport à la situation de départ et le déplacement qu’il opère. Or la situation de départ, c’est que, de son temps, les femmes n’étaient pas admises du tout dans les églises, comme c’est le cas dans les synagogues.

Ainsi, quand Paul écrit que les femmes doivent se taire dans les églises, cela veut dire qu’il leur permet d’entrer, certes sans parler, mais elles peuvent entrer. Il leur fait donc faire un pas de plus dans l’intégration dans l’Église, et pour lui être fidèle, nous devrions aller dans le même sens, et non pas restreindre la place des femmes dans l’Église, mais plutôt chercher comment leur permettre de s’intégrer d’avantage.

Pour le dire en termes mathématiques, c’est une identité de rapport et non une identité terme à terme. Paul a déplacé le rapport des femmes F à la société juive du premier siècle S. C’est ce déplacement qu’il faut retrouver, avec une nouvelle place des femmes F’ dans la société contemporaine S’ (avec F ¹ F’ car S’ ¹ S) : F/S = F’/S’

Identité de rapport

Figer l’un des termes alors que l’autre évolue c’est trahir l’esprit qui animait Paul. S’il a osé confier des missions ecclésiales, et même des ministères aux femmes qui l’entouraient et l’accompagnaient, c’est donc il nous faut nous aussi trouver la juste place pour les femmes dans la mission de l’Église du XXI° siècle, qui ne sera pas celle du temps de Paul. 

 femme dans Communauté spirituelleL’’important, c’est de labourer son champ, dira La Fontaine, et non de s’asseoir pour le contempler.

 

– Les jeter à la poubelle

Autre solution, plus radicale : Paul, c’est Paul ; Jésus c’est Jésus. Paul n’est pas le Christ. Or nous sommes chrétiens, pas « pauliens ». Donc ce qu’il dit en plus de l’Évangile est son opinion, respectable et intéressante certes, mais ce n’est pas « parole d’Évangile ». On n’est pas forcé de le suivre là-dessus…

Après tout, être libre par rapport à la lettre fait partie du message de Paul lui-même ! Attention cependant à ne pas éliminer trop vite les passages qui ne nous plaisent pas…

 

Et vous, qu’allez-vous faire de ces versets gênants ?…

 

2. Petite histoire de la soumission dans le Nouveau Testament

soumission-couv misogynieLe terme soumission ὑποτάσσω (hupotasso) est utilisé 40 fois dans 32 versets du Nouveau Testament, essentiellement des lettres de Paul. Le mot signifie : être au-dessous de, être subordonné à, obéir à. Ce qui traduit un rapport d’autorité. Signalons pourtant rapidement que ce mot qui pourrait nous paraître péjoratif sera plus tard choisi par les conciles œcuméniques pour exprimer le mystère de la personne du Christ, une seule hypostase (personne) assumant les deux natures, humaine et divine. On parlera à ce sujet d’union hypostatique = union des deux natures dans l’unique personne de Jésus. Si l’hypostase deviendra la personne, c’est donc que la ‘soumission’ biblique est à l’origine du sujet moderne, et du personnalisme chrétien. Pas si mal !

 

Surprise : des quatre évangiles, seul Luc parle de soumission. Et pas dans le sens attendu : c’est Jésus qui se soumet volontairement à ses parents à Nazareth (Lc 2,51) ! Le premier soumis serait-il donc Dieu lui-même ?…

Les seconds soumis chez Luc sont… les démons : soumis à l’autorité des apôtres, ils leur obéissent pour le plus grand bien des possédés ainsi libérés des chaînes les entravant (Lc 10,17.20). Pour Luc, ce sont les démons et Dieu qui se soumettent à l’homme, et non l’inverse !

Les autres usages de la soumission se trouvent chez Paul (29 fois), chez Pierre (7 fois) et Jacques (1 fois). Ils insistent d’abord sur une soumission mutuelle, de tous envers tous, dans l’amour et le service fraternel : « Que tout chez vous se passe dans l’amour » (1Co 16,14). Le début de notre 2e lecture veut explicitement étendre cette attitude à tous dans la communauté : « Par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres » (Ep 5,21). Paul et Pierre déclinent alors cette soumission à tous les rapports sociaux : esclaves/maîtres (1P 5,5) (Tite 2,9; 3,1) ; jeunes/anciens (1P 5,5) ; sujet/souverain (1P 2,13; Rm 13,1) ; communauté/ministres (1Co 16,16) ; femmes/maris (Ep 5,22.24 ; Col 3,18 ; Tite 2,5 ; 1P 3,15).

Le modèle de cette ‘soumission’ généralisée dans l’amour et le service est la relation de l’Église au Christ, se plaçant sous lui comme le corps sous la tête, afin de lui être unie en une seule personne, une seule hypostase (le « Christ total » de saint Augustin, tête et corps). Rien à voir avec la soumission islamique !

 

Dans les évangiles, Jésus se soumet aux juifs et aux païens (lavement des pieds, sacrifice de la croix, pardon, guérison, salut) pour leur donner la vie. Dans les lettres, chacun est invité à se soumettre librement à Dieu, c’est-à-dire à se placer sous sa bienveillance, son amour, sa puissance de vie. Ce qui a pour conséquence de se soumettre mutuellement, librement, dans l’amour et le service, les uns aux autres, afin de laisser l’Esprit de Dieu faire de nous des Christs les uns pour les autres.

 

3. Pourquoi Paul n’a-t-il pas voulu abolir la soumission femme/homme ?

Gérer son héritage est une chose. Mais comment comprendre que Paul n’ait pas été le grand réformateur des mœurs de son temps ?

 

a) 1° réponse : Parce que le statut de la femme était une telle évidence sociale que même Paul ne pouvait penser l’abolir.

À nos yeux, l’audace féministe de Paul (Cf. supra) ne va pas assez loin. Comme pour l’esclavage, il s’arrête à la conversion des cœurs et ne veut pas légiférer. Il aurait dû ‑ pensons-nous un peu facilement – dénoncer les structures d’oppression qui empêchaient l’égalité hommes/femmes de son temps !

PAUL ET LES FEMMESC’est oublier que nous avons mis des siècles à dénoncer l’esclavage, auquel nos ancêtres s’étaient confortablement habitués. Cet aveuglement a duré jusqu’au XVIII° siècle. L’esclavage était une telle évidence sociale que même Paul ne pensait pouvoir l’abolir, et pas tout de suite.

De même pour le rôle social des femmes : c’était un angle mort, qu’il n’a pas pu ni su contourner. Avant d’être trop critique sur cet aveuglement, méfions-nous : qui sait de quels aveuglements plus terribles encore nous accuseront les générations ultérieures (respect de la planète, de la vie sous toutes ses formes, des plus pauvres etc.) ?

 

b) 2° réponse : Parce qu’il voulait la conversion des cœurs et non la réforme des structures.

C’est vrai que Paul parle d’abord au cœur de chacun et ne veut pas instaurer un autre régime, ni inscrire de nouveaux droits dans la Constitution. Car il n’est pas un militant politique luttant pour le triomphe de tel ou tel modèle de société. Il n’est ni révolutionnaire ni réformiste ni conservateur : il appelle chacun à accueillir la grâce de la vie. À nous ensuite d’en tirer les conséquences pour l’Église, la société, le commerce, la politique etc.

Les lettres de Paul ne sont pas le Manifeste du Parti communiste de 1848 : ce sont des encouragements, des exhortations, des nourritures de foi. Paul ne veut pas partir à la conquête du pouvoir : il témoigne du Ressuscité qui a bouleversé sa vie. Il cherche ensuite les conséquences ecclésiales, éthiques, spirituelles de cette conversion. Mais ce qui demeure premier, c’est la relation personnelle au Ressuscitée : « il m’a aimé et s’est livré pour moi ». « Pour moi vivre c’est le Christ » .

 

C’est peut-être une faiblesse du Nouveau Testament, à la différence de l’Ancien et du Coran, de ne pas proposer un modèle de société, de ne pas promouvoir une organisation politique, sociale, économique spécifique. Mais c’est aussi sa force : le christianisme peut être à l’aise en régime monarchique ou républicain, libéral ou collectiviste, laïque ou confessionnel… Il ne sacralise aucune coutume, aucun système, car il a la tête ailleurs (en Christ !).

 

c) 3° réponse : En proclamant l’égalité spirituelle entre hommes et femmes, Paul a introduit le ver dans le fruit, qui finira par tomber tout seul.

Le ver est dans le fruitC’est une autre raison, eschatologique, qui pousse Paul à ne pas s’attarder aux réformes de société : le retour du Christ est à ses yeux imminent. Et ce n’est plus le moment de préparer ses valises !

Du coup il relativise le commerce, le mariage, les affaires politiques etc. : « Frères, je dois vous le dire : le temps est limité. Dès lors, que ceux qui ont une femme soient comme s’ils n’avaient pas de femme » (1Co 7,29).

 

Avec Paul, les premières générations chrétiennes étaient persuadées que le monde présent s’en allait, (« elle passe la figure de ce monde » – 1Co 7,31), et donc que mieux valait investir dans le Royaume s’approchant que dans la société finissante.

 

La soumission islamique veut figer l’histoire dans une obéissance intemporelle. La soumission paulinienne veut ouvrir l’histoire sur son accomplissement imminent : c’est l’avenir en Christ qui change tout dès à présent, depuis les relations hommes/femmes jusqu’aux pouvoirs politiques et financiers. Tout est relatif, tout est provisoire, puisque le la venue du Christ va tout transfigurer.

 

Évidemment, nous sommes très loin de cette fièvre eschatologique aujourd’hui. Après la peur de l’an 1000, puis de l’an 2000, nous proclamons vaguement à la messe que nous espérons le retour du Christ en gloire, mais en pratique c’est le présent seul qui nous préoccupe…

Retrouver la tension eschatologique qui structure les lettres de Paul nous ferait du bien : c’est le but qui trace le chemin, l’avenir qui informe le présent, l’espérance qui guide l’action.

Les Hébreux fatigués de ne pas voir Moïse descendre du Sinaï avaient fondu un veau d’or et s’étaient prosternés devant lui. Prenons garde à ce que, fatigués d’attendre le retour du Christ, les combats féministes ne se détournent d’un au-delà de l’humain et ne dérivent en nouvelles soumission étincelantes à de nouveaux veaux d’or…

 

d) 4° réponse : Paul a si fortement espéré le retour imminent du Christ qu’il en a oublié la transformation de la société en attendant.

LOasis-21_Couverture-724x1024 PaulC’est l’interprétation la plus féconde peut-être. Paul a posé les bases d’une égalité réelle entre hommes et femmes ; il a osé transgresser les interdits juifs et romains concernant le rôle des femmes en leur confiant le ministère de la Parole, du service, de l’accueil domestique, du financement communautaire etc. Ce faisant, il a prolongé la liberté étonnante que Jésus avait avec les femmes qui l’entouraient et l’accompagnaient. Et cet élan ne doit pas cesser, ne doit pas se figer. Tôt ou tard, il portera des fruits politiques : non pas imposés par des forces révolutionnaires, mais librement choisis par tous. D’ailleurs, Paul parle de se soumettre et non d’être soumis. La différence est essentielle : choisir librement d’être serviteur de l’autre n’est pas se voir imposer un statut inférieur ou subordonné. Cette soumission dans l’amour et le service n’est pas la « servitude volontaire » dénoncée par La Boétie, nous rendant complices de nos tyrans, mais au contraire le principe vital qui vide la domination de sa substance et empêche le tyran des piétiner ses sujets, l’homme d’avilir les femmes, le maître de posséder son esclave, le riche  d’exploiter le pauvre…

 

Comme pour l’esclavage, Paul met le ver dans le fruit de la domination hommes/femmes. C’est la relation Christ-Église qu’hommes et femmes sont appelés à vivre. Tous sont membres d’un même corps, sans séparation ni confusion, sans domination ni asservissement. Traiter un esclave comme un frère, une femme comme sa propre chair, un mari comme son propre visage [1], c’est toujours « renverser les puissants de leur trône » et « élever les humbles », comme le chantait Marie dans son Magnificat.

 

Alors finalement, si je devais me « soumettre » à quelqu’un dans les jours qui viennent, ce serait qui et comment ?

Symétriquement, si je dois être le « chef » de quelqu’un, comment l’être dans l’Esprit du Christ, dans l’amour, le service, jusqu’à donner ma vie pour lui/elle ? 

__________________________________________

[1]. Le « chef » (caput en latin) dont parle Paul est bien la tête du corps, que le visage incarne au plus point.

 

 

LECTURES DE LA MESSR

PREMIÈRE LECTURE
« Nous voulons servir le Seigneur, car c’est lui notre Dieu » (Jos 24, 1-2a.15-17.18b)

Lecture du livre de Josué
En ces jours-là, Josué réunit toutes les tribus d’Israël à Sichem ; puis il appela les anciens d’Israël, avec les chefs, les juges et les scribes ; ils se présentèrent devant Dieu. Josué dit alors à tout le peuple : « S’il ne vous plaît pas de servir le Seigneur, choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir : les dieux que vos pères servaient au-delà de l’Euphrate, ou les dieux des Amorites dont vous habitez le pays. Moi et les miens, nous voulons servir le Seigneur. » Le peuple répondit : « Plutôt mourir que d’abandonner le Seigneur pour servir d’autres dieux ! C’est le Seigneur notre Dieu qui nous a fait monter, nous et nos pères, du pays d’Égypte, cette maison d’esclavage ; c’est lui qui, sous nos yeux, a accompli tous ces signes et nous a protégés tout le long du chemin que nous avons parcouru, chez tous les peuples au milieu desquels nous sommes passés. Nous aussi, nous voulons servir le Seigneur, car c’est lui notre Dieu. »

PSAUME
(Ps 33 (34), 2-3, 16-17, 20-21, 22-23)

R/ Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur ! (cf. Ps 33, 9)

Je bénirai le Seigneur en tout temps,
sa louange sans cesse à mes lèvres.
Je me glorifierai dans le Seigneur :
que les pauvres m’entendent et soient en fête !

Le Seigneur regarde les justes,
il écoute, attentif à leurs cris.
Le Seigneur affronte les méchants
pour effacer de la terre leur mémoire.

Malheur sur malheur pour le juste,
mais le Seigneur chaque fois le délivre.
Il veille sur chacun de ses os :
pas un ne sera brisé.

Le mal tuera les méchants ;
ils seront châtiés d’avoir haï le juste.
Le Seigneur rachètera ses serviteurs :
pas de châtiment pour qui trouve en lui son refuge.

DEUXIÈME LECTURE
« Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église » (Ep 5, 21-32)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Éphésiens
Frères, par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres ; les femmes, à leur mari, comme au Seigneur Jésus ; car, pour la femme, le mari est la tête, tout comme, pour l’Église, le Christ est la tête, lui qui est le Sauveur de son corps. Eh bien ! puisque l’Église se soumet au Christ, qu’il en soit toujours de même pour les femmes à l’égard de leur mari.
Vous, les hommes, aimez votre femme à l’exemple du Christ : il a aimé l’Église, il s’est livré lui-même pour elle, afin de la rendre sainte en la purifiant par le bain de l’eau baptismale, accompagné d’une parole ; il voulait se la présenter à lui-même, cette Église, resplendissante, sans tache, ni ride, ni rien de tel ; il la voulait sainte et immaculée. C’est de la même façon que les maris doivent aimer leur femme : comme leur propre corps. Celui qui aime sa femme s’aime soi-même. Jamais personne n’a méprisé son propre corps : au contraire, on le nourrit, on en prend soin.
C’est ce que fait le Christ pour l’Église, parce que nous sommes les membres de son corps. Comme dit l’Écriture : À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’un. Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église.

ÉVANGILE
« Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle » (Jn 6, 60-69)
Alléluia. Alléluia. Tes paroles, Seigneur, sont esprit et elles sont vie ; tu as les paroles de la vie éternelle. Alléluia. (cf. Jn 6, 63c.68c)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean
En ce temps-là, Jésus avait donné un enseignement dans la synagogue de Capharnaüm. Beaucoup de ses disciples, qui avaient entendu, déclarèrent : « Cette parole est rude ! Qui peut l’entendre ? » Jésus savait en lui-même que ses disciples récriminaient à son sujet. Il leur dit : « Cela vous scandalise ? Et quand vous verrez le Fils de l’homme monter là où il était auparavant !… C’est l’esprit qui fait vivre, la chair n’est capable de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et elles sont vie. Mais il y en a parmi vous qui ne croient pas. » Jésus savait en effet depuis le commencement quels étaient ceux qui ne croyaient pas, et qui était celui qui le livrerait. Il ajouta : « Voilà pourquoi je vous ai dit que personne ne peut venir à moi si cela ne lui est pas donné par le Père. »
À partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s’en retournèrent et cessèrent de l’accompagner. Alors Jésus dit aux Douze : « Voulez-vous partir, vous aussi ? » Simon-Pierre lui répondit : « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Quant à nous, nous croyons, et nous savons que tu es le Saint de Dieu. »
.Patrick Braud

 

 

 

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22 janvier 2023

La fierté illucide

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

La fierté illucide

 

Homélie pour le 4° Dimanche du temps ordinaire / Année A 

29/01/2023

 

Cf. également :

Défendre la veuve et l’orphelin

Le petit reste d’Israël, ou l’art d’être minoritaires
Le bonheur illucide
Agents de service
Le maillon faible
Éthique de conviction, éthique de responsabilité

Toussaint : le bonheur illucide


Une vie sans éclat ?

La fierté illucide dans Communauté spirituelle femme-en-ehpad-en-fauteuil-roulantÀ 88 ans, elle s’est éteinte en quelques jours sans déranger personne. Depuis plus de 20 ans en EHPAD et toute sa vie en institution, Jeanine était de ces personnes apparemment inutiles et un peu là par erreur, sans aucune famille pour l’entourer. Mais de son fauteuil roulant qu’elle ne quittait plus, elle trouvait la vie pourtant belle, souriait quand on lui adressait la parole, riait de bon cœur sur une blague, ou essayait de fredonner une chanson des années 60 avec la chorale de la résidence. Simple et douce comme la pluie, elle s’accrochait à son pèlerinage annuel à Lourdes avec l’Hospitalité pour faire provision d’espérance pour 12 mois. Elle a rien accompli aux yeux de la société : ni travail, ni couple, ni enfant, 88 ans de dépendance totale, à charge. Au moment de ses obsèques, nous n’étions que trois autour de son cercueil, avec le sentiment étrange que c’était quelqu’un de grand qui nous réunissait. Le psaume de la célébration exprimait à merveille l’humilité de son existence :

« Seigneur, je n’ai pas le cœur fier ni le regard ambitieux ; 

Je ne poursuis ni grands desseins, ni merveilles qui me dépassent. 

Non, mais je tiens mon âme égale et silencieuse ; 

Mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère. 

Attends le Seigneur, Israël, maintenant et à jamais » (Ps 131)

Voilà de quoi comprendre ce que dit Paul dans notre deuxième lecture :
« Aucun être de chair ne pourra s’enorgueillir devant Dieu. […] Ainsi, comme il est écrit : Celui qui veut être fier, qu’il mette sa fierté dans le Seigneur » (1Co 1,29‑31) [1]. Il répète sa conviction mot à mot en 2Co 10,17, signe que cela doit être important pour lui.


À contre-courant de notre époque !

 fierté dans Communauté spirituelleDans un entretien d’embauche, on vous posera la question : ‘de quoi êtes-vous fiers dans votre parcours professionnel ?’ Si vous répondez en citant 1Co 1,29‑31, vous n’aurez pas le job !

Dans les techniques de développement personnel, on vous intimera de retrouver la fierté en vous-même, on vous coachera pour cela : vos réussites, vos défis surmontés, vos qualités intrinsèques etc. Si vous dites : la fierté est une non-question pour moi à cause de ma foi, vous ferez jeter du stage, de la formation ou du séminaire !

Et si vous n’est pas fier de l’équipe de France pour son très beau parcours pendant la coupe du monde de football, on vous prendra pour un traître à la patrie…

Alors, que veut dire : mettre sa fierté dans le Seigneur ?


Fier de quoi ?

De quoi peut-on être légitimement fier dans la vie ?

Meilleur ouvrier de France logo médailleDe nos qualités (santé, intelligence, force, énergie) ? Elles nous ont été données, sans mérite aucun. Si les gènes nous ont favorisés, pourquoi nous en vanter ? C’est même légèrement méprisant pour ceux qui, comme Jeanine, sont totalement dépourvus de ces qualités innées…

De nos talents, de notre travail pour les développer ? Mais le serviteur inutile de la parabole percute de plein fouet ces satisfactions apparemment légitimes : « De même vous aussi, quand vous aurez exécuté tout ce qui vous a été ordonné, dites : ‘Nous sommes de simples serviteurs : nous n’avons fait que notre devoir’ » (Lc 17, 10).

On peut encore être fier de sa famille, de son pays, de ses collègues de travail. Attention cependant : cela peut devenir malsain si on essentialise ! Exemple : ‘je suis fier d’être français’ peut sous-entendre que les autres nationalités n’ont pas vraiment de quoi être fières, pas autant… Telle l’étincelle entre deux silex, la violence surgit très rapidement des rapprochements de ces fiertés nationales… Car être fier de quelque chose va facilement avec le symétrique : se sentir supérieur, reprocher aux autres leur origine, leur marqueur social etc.

Déjà, au temps des Juges, YHWH savait bien que la tentation serait forte pour Israël de se glorifier de ses victoires militaires. Alors de temps en temps il lui inflige des défaites, histoire de lui rappeler que ce n’est pas lui qui mène le bal : « Le Seigneur dit à Gédéon : Le peuple qui est avec toi est trop nombreux pour que je livre Madiane entre ses mains. Israël pourrait s’en glorifier et dire : ‘C’est ma main qui m’a sauvé’ » (Jg 7,2).

Paul tranche la question : « Qui donc t’a mis à part ? Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? Et si tu l’as reçu, pourquoi te vanter comme si tu ne l’avais pas reçu ? » (1Co 4,7) Pour lui c’est clair : nos œuvres ne nous sauvent pas, mais la grâce seule. Pourquoi alors être fier de ce qu’on l’on a accompli ? « C’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, et par le moyen de la foi. Cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Cela ne vient pas des actes : personne ne peut en tirer orgueil » (Ep 2,8-9).


Fier de qui ?

Peut-être notre fierté est-elle à mettre dans des personnes et non dans des choses ?

photographe-famille-grenoble-08 illucideC’est vrai qu’être fier de ses enfants, c’est plus noble. Et cela paraît juste : on y est bien pour quelque chose, non ? Mais la dérive possessive n’est pas loin… L’enfant ne vous appartient pas, et il devra tracer son propre chemin sans dépendre du jugement – même élogieux – que vous portez ou non sur lui.

Un professeur a envie d’être fier de ses élèves. Est-ce vraiment leur rendre service ? Si cela se traduit par trop d’exigence ou au contraire trop d’aveuglement, mieux vaudrait laisser cette envie de côté.

L’ultime personne dont nous souhaitons être fier est… nous-même ! Être fier de soi, c’est dans un premier temps s’accepter soi-même avec lucidité et réalisme, et se réassurer dans l’existence. Bravo ! : Tu as réussi à t’arrêter de fumer ; tu es aligné sur tes valeurs ; tu es respecté et estimé… tu peux être fier de toi !

Pas faux ; mais on voit poindre derrière ces satisfecit le pharisien debout au Temple énumérant en lui-même tout ce qui le rend impeccable (Lc 18,9-14).

De la fierté à l’orgueil il n’y a qu’un pas, que nous franchissons souvent sans nous en rendre compte : « Et voilà que vous mettez votre fierté dans vos vantardises. Toute fierté de ce genre est mauvaise ! » (Jc 4,16).

Tiens ! L’orgueil est la plupart du temps illucide ! Si les orgueilleux se rendaient compte combien ils sont bouffis d’eux-mêmes, ils auraient honte.

Sans le savoir, on devient orgueilleux et seuls nos proches voient le changement : nous sommes aveuglés par la recherche de nos fiertés. Cela nous rend durs et intransigeants à l’égard de ceux qui n’y arrivent pas comme nous. Cela nous empêche de comprendre les personnes comme Jeanine qui n’ont rien à mettre en avant.

Si l’orgueil est illucide (en négatif), on pressent que la fierté devrait l’être également (en positif).  Car se priver de toute fierté risque de vous faire basculer dans la dévaluation de soi. Il doit bien y avoir une façon de se réjouir d’être soi sans verser dans l’orgueil… !

« Celui qui veut se glorifier, qui se glorifie dans le Seigneur ». Et si la fierté illucide de Paul nous indiquait la voie : ni auto-dévaluation, ni orgueil, dans le Seigneur.

Qu’est-ce à dire ?


La fierté illucide

Icoon_kleur_2 PaulOn a déjà cité le psaume 131 qui nous invite à une égale confiance en Dieu, sans l’angoissante recherche de nos qualités : « Seigneur, je n’ai pas le cœur fier ni le regard ambitieux ; je ne poursuis ni grands desseins, ni merveilles qui me dépassent. Non, mais je tiens mon âme égale et silencieuse… »

On pourrait citer aussi le psaume 139 : « Je reconnais devant toi le prodige, l’être étonnant que je suis : étonnantes sont tes œuvres, toute mon âme le sait » (Ps 139,14). Pas de triomphalisme dans cet acte de reconnaissance : seulement la joie d’être en Dieu et Dieu en nous, ce qui nous confère une dignité merveilleuse, qui vient de Dieu et y conduit.

Et bien sûr, Marie est la première en chemin sur cette route d’une fierté illucide : « mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon sauveur. Il s’est penché sur son humble servante, toutes les générations me diront bienheureuse. Le Puissant fit pour moi des merveilles… » (Lc 1,46-55). Aucun repli sur soi dans son Magnificat : la fierté de Marie n’est pas en elle-même, mais dans l’action de Dieu en elle, dans la présence de Dieu en son sein.

Est illucide une fierté qui comme celle de Marie ne s’appartient pas, n’a pas conscience d’elle-même, et rapporte tout à Dieu en y collaborant de tout son être.

On est loin des fiertés (prides) agressives revendiquées par des minorités inquiètes de leur identité. La fierté de Paul ou de Marie ne se conquiert pas à la force du poignet, elle se reçoit ; elle ne s’étale pas pour s’imposer, elle est cachée en Dieu (Col 3,3), selon les paroles d’un autre psaume : « Quand je me tiens sous l’abri du Très-Haut et repose à l’ombre du Puissant, je dis au Seigneur : ‘Mon refuge, mon rempart, mon Dieu, dont je suis sûr !’ (Ps 91,1) ou encore : « Garde-moi comme la prunelle de l’œil ; à l’ombre de tes ailes, cache-moi » (Ps 17,8).

La fierté lucide est celle que nous donnons à nous-même. Paul connaît bien cette fierté des juifs ultra-pratiquants par exemple, qui se glorifient d’observer les 613 commandements de la Loi juive : « toi qui mets ta fierté dans la Loi, tu déshonores Dieu en transgressant la Loi » (Rm 2,23 ; Rm 2,17 ; Ga 6,13). Du coup il a choisi de se glorifier non pas de ses forces, mais de ses faiblesses, afin de montrer que c’est Dieu qu’il faut louer et non celui à travers qui il agit : « [Dieu] m’a déclaré : ‘Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse.’ C’est donc très volontiers que je mettrai plutôt ma fierté dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ fasse en moi sa demeure » (2Co 12,9). Sa seule fierté est dans la croix du Christ : « pour moi, que la croix de notre Seigneur Jésus Christ reste ma seule fierté. Par elle, le monde est crucifié pour moi, et moi pour le monde » (Ga 6,14). D’ailleurs il ne s’appartient plus lui-même : « ce n’est plus moi qui vis, c’est Christ qui vit en moi » (Ga 2,20).

Comment être fier de soi si soi est en Dieu, sinon justement en mettant sa fierté dans le Seigneur ?

Le verbe « se glorifier », « être fier de » (καυχάομαι, kauchaomai en grec) apparaît 38 fois dans le Nouveau Testament, dont 35 usages sous la seule plume de Paul ! On voit que c’est un de ses vieux démons avec lesquels il s’est battu jusqu’au bout. D’ailleurs, Paul reconnaît lui-même avoir une certaine tendance à l’autoritarisme : « Même si je suis un peu trop fier de l’autorité que le Seigneur nous a donnée sur vous pour construire et non pour démolir, je n’aurai pas à en rougir » (2Co 10,8). Il devait avoir un sale caractère et un ego surdimensionné ! À tel point que le doux Barnabé a failli se bagarrer physiquement avec lui et a préféré le planter là plutôt que de continuer à supporter son arrogance : « Leur désaccord s’aggrava tellement qu’on faillit en venir aux mains ; ils partirent chacun de leur côté. Et Barnabé, prenant Marc avec lui, s’embarqua pour l’île de Chypre » (Ac 15,39).

Peut-être est-ce une trace de la fameuse « écharde dans la chair » (2Co 12,7) qui justement empêchait Paul d’être trop fier, trop mal fier


Une non-question

Finalement, se poser la question : ‘de qui, de quoi être fier ?’ n’est pas pertinent aux yeux de la foi. La fierté est une non-question : elle n’a pas lieu d’être, puisque celui qui est caché en Dieu ne fait plus qu’un avec Lui, et ne le sait pas (sinon, il serait extérieur à Dieu). Celui qui voit la flamme n’est pas dans la flamme. De l’intérieur, celui qui est Dieu ne sait pas s’il est dans la lumière ou dans l’obscurité. Celui qui ne fait qu’un avec Dieu ne se pose pas la question de ses réussites ou de ses échecs, de ses forces de ses faiblesses, de ses qualités ou de ses défauts… S’il est fier, c’est comme dit Paul dans le Seigneur : uni à Lui, il se réjouit d’être en Dieu et que Dieu soit en lui.

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Ruminons donc avec insistance les mots du psaume 131, en pensant à ceux qui ont incarné à nos yeux cette douce humilité de qui s’abandonne à Dieu :

« Seigneur, je n’ai pas le cœur fier ni le regard ambitieux ; 

Je ne poursuis ni grands desseins, ni merveilles qui me dépassent. 

Non, mais je tiens mon âme égale et silencieuse ; 

Mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère. 

Attends le Seigneur, Israël, maintenant et à jamais » (Ps 131)  

_______________________________________________

[1]. Libre citation de Jr 9,23-24 : « celui qui se vante, qu’il se vante plutôt de ceci : avoir de l’intelligence pour me connaître, moi, le Seigneur qui exerce sur la terre la fidélité, le droit et la justice ».

1ère lecture : « Je laisserai chez toi un peuple pauvre et petit » (So 2, 3 ; 3, 12-13)


Lecture du livre du prophète Sophonie

Cherchez le Seigneur, vous tous, les humbles du pays, qui accomplissez sa loi. Cherchez la justice, cherchez l’humilité : peut-être serez-vous à l’abri au jour de la colère du Seigneur. Je laisserai chez toi un peuple pauvre et petit ; il prendra pour abri le nom du Seigneur. Ce reste d’Israël ne commettra plus d’injustice ; ils ne diront plus de mensonge ; dans leur bouche, plus de langage trompeur. Mais ils pourront paître et se reposer, nul ne viendra les effrayer.

 

Psaume : Ps 145 (146), 7, 8, 9ab.10b
R/ Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux ! ou : Alléluia ! (Mt 5, 3)

Le Seigneur fait justice aux opprimés ;
aux affamés, il donne le pain,
le Seigneur délie les enchaînés.

 

Le Seigneur ouvre les yeux des aveugles,
le Seigneur redresse les accablés,
le Seigneur aime les justes.

 

Le Seigneur protège l’étranger,
il soutient la veuve et l’orphelin,
le Seigneur est ton Dieu pour toujours.

 

2ème lecture : « Ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi » (1 Co 1, 26-31)

 

Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères, vous qui avez été appelés par Dieu, regardez bien : parmi vous, il n’y a pas beaucoup de sages aux yeux des hommes, ni de gens puissants ou de haute naissance. Au contraire, ce qu’il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi, pour couvrir de confusion les sages ; ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi, pour couvrir de confusion ce qui est fort ; ce qui est d’origine modeste, méprisé dans le monde, ce qui n’est pas, voilà ce que Dieu a choisi, pour réduire à rien ce qui est ; ainsi aucun être de chair ne pourra s’enorgueillir devant Dieu. C’est grâce à Dieu, en effet, que vous êtes dans le Christ Jésus, lui qui est devenu pour nous sagesse venant de Dieu, justice, sanctification, rédemption. Ainsi, comme il est écrit : Celui qui veut être fier, qu’il mette sa fierté dans le Seigneur.

 

Evangile : « Heureux les pauvres de cœur » (Mt 5, 1-12a)
Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! 
Alléluia. (Mt 5, 12)

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
En ce temps-là, voyant les foules, Jésus gravit la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent de lui. Alors, ouvrant la bouche, il les enseignait. Il disait : « Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux. Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés. Heureux les doux, car ils recevront la terre en héritage. Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés. Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde. Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu. Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu. Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des Cieux est à eux. Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi. Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! »
Patrick BRAUD

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18 septembre 2022

Professer sa foi

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Professer sa foi

 

Homélie pour le 26° dimanche du Temps Ordinaire / Année C
25/09/2022

 

Cf. également :

Qui est votre Lazare ?

Le pauvre Lazare à nos portes

La bande des vautrés n’existera plus

Où est la bénédiction ? Où est le scandale ? dans la richesse, ou la pauvreté ?

Chameau et trou d’aiguille

À quoi servent les riches ?

Plus on possède, moins on est libre

 

La profession de foi

Professer sa foi dans Communauté spirituelle I-Moyenne-33576-image-de-communion-solennelle-garcon-j-ai-renouvele-les-promesses-de-mon-bapteme-blanc-sur-fond-bleu.netL’expression est devenue un peu péjorative, car on pense immédiatement aux enveloppes électorales qui polluent nos boîtes aux lettres à chaque échéance avec des papiers de mauvaise qualité sur lesquels les candidats promettent la main sur le cœur qu’ils feront tout pour notre bonheur. « Comptez sur moi, je suis fidèle à mes convictions », essaient-ils de nous persuader… Mais nous avons eu tant de revirements politiques, tant de changements de cap sous prétexte de pragmatisme que ces belles paroles nous paraissent suspectes.

Pour les plus anciens, la Profession de foi les ramène à leur ‘communion solennelle’ : procession en aube blanche, cierge allumé à la main, avec l’énorme repas de famille qui s’ensuit, et les cadeaux tant attendus des parrains, marraines et parents.

Image désuète, car la profession de foi ne concerne plus que 5% à 10% des enfants français maximum, la plupart en Enseignement catholique. Et encore, on ne parle pas de la Confirmation, qui a tout simplement disparu du paysage !

Désintérêt électoral, abandon populaire : la profession de foi n’a pas la cote ! Raison de plus pour retrouver son importance grâce à la deuxième lecture de ce dimanche (1Tim 6,11-16).

Toi, homme de Dieu, recherche la justice, la piété, la foi, la charité, la persévérance et la douceur. Mène le bon combat, celui de la foi, empare-toi de la vie éternelle ! C’est à elle que tu as été appelé, c’est pour elle que tu as prononcé ta belle profession de foi devant de nombreux témoins.

Il y est question de deux professions de foi : celle de Timothée et celle du Christ. Examinons en quoi elles peuvent (elles doivent) devenir les nôtres.

 

La profession de foi de Timothée

Paul fait explicitement allusion à un moment donné de la vie de Timothée où celui-ci a  proclamé sa foi en public :

Combats le bon combat de la foi, saisis la vie éternelle, à laquelle tu as été appelé, et pour laquelle tu as professé (μαρτύρων = martureo) une belle confession en présence d’un grand nombre de témoins (1Tim 6,12).

Cela se voit au temps du verbe employé par Paul : c’est l’aoriste actif, le passé simple en grec, qui désigne un moment précis, dans des circonstances bien particulières. Lesquelles ? Le texte ne le dit pas. Plusieurs hypothèses ont été avancées.

 

 foi dans Communauté spirituelle– Paul ferait référence au martyr de Timothée, ou du moins à sa comparution devant un tribunal romain devant lequel il n’a pas renié Jésus mais a proclamé sa foi en lui. Le verbe μαρτύρων (martureo) employé par Paul semble nous mettre sur cette piste. Les martyrs chrétiens sont ceux qui témoignent publiquement de leur adhésion au Christ, quelles que soient les conséquences mortelles pour eux ou leurs proches. Rappelons la différence fondamentale entre martyrs et djihadistes ou kamikazes : les premiers préfèrent mourir plutôt que de renier leur foi, les seconds veulent faire mourir pour imposer leur foi aux autres. Rien à voir ! Timothée a peut-être été obligé de proclamer devant les autorités romaines ou juives sa foi au Christ : il a eu ce courage, et en cela il a été martyr, au sens premier du verbe martureo : témoigner devant tous, proclamer publiquement.

Nous est-il demandé d’être martyr nous aussi comme Timothée ? Vous me direz qu’heureusement on n’en est pas là en France. C’est vrai que la liberté religieuse garantie par la République nous protège en ce sens. Pour autant, nous n’en sommes pas quittes avec le martyre. Car il existe bien d’autres formes de martyres que la prison ou le goulag. Le martyre éthique par exemple nous demande d’assumer avec courage, publiquement, des positions éthiques au nom de notre attachement au Christ. Même si elles sont à contre-courant de l’opinion majoritaire. Même si elles nous valent à cause de cela l’opprobre, l’insulte, le mépris si facilement accordée aux fachos, aux gauchos, aux intolérants que nous sommes alors accusés d’être.

Le martyre idéologique est une autre forme de témoignage : à cause du Christ, nous osons penser différemment, nous osons contester des référentiels admis par tous, nous argumentons pour d’autres manières de penser le monde et l’humanité.

En entreprise par exemple, prendre position pour les plus petits au nom du Christ peut nous conduire à l’ostracisation, voire au rejet. En société, parler de Création et pas seulement de nature, dénoncer l’idolâtrie du marché, défendre la vie humaine dès le début et jusqu’à la fin, critiquer tous les ‘ismes’ qui s’érigent en pensée ultime sont des hérésies aux yeux de nos contemporains et peuvent nous valoir leur farouche opposition, voire leur haine.

Chacun de nous est appelé à devenir martyr comme Timothée : prendre publiquement position pour le Christ, quoi qu’il en coûte.

 

– Paul emploie également le mot ὁμολογία (homologia) [1] pour désigner la profession de foi de Timothée.

Combats le bon combat de la foi, saisis la vie éternelle, à laquelle tu as été appelé, et pour laquelle tu as fait une belle confession (homologia) en présence d’un grand nombre de témoins (1Tim 6,12).

En grec, ce terme signifie : une parole conforme, une parole pareille à une première, cohérente avec elle. Il s’agit là de la proclamation publique de Timothée, cohérente avec celle de toute l’Église. Certains exégètes ont pensé à l’ordination de Timothée. Lorsque Paul lui a imposé les mains, il a sûrement au préalable proclamé devant l’assemblée son ‘orthodoxie’, sa ‘pensée droite’ s’accordant à celle des Apôtres. L’appel de Paul concernerait donc ici particulièrement les ministres ordonnés de l’Église, ces « hommes de Dieu » (1Tim 6,11)  mis à part pour servir la communion ecclésiale.

Appel d’une urgence contemporaine absolue, si on veut bien voir les dégâts provoqués par les clergés de tous bords lorsqu’ils agissent en contradiction avec la proclamation publique de leur ordination ! Qu’on pense aux centaines d’autochtones canadiens pour le génocide culturel desquels le Pape François a demandé pardon lors de son dernier voyage au Canada. Qu’on pense bien sûr aux milliers de victimes d’abus en tout genre par des prêtres en tous pays. Sans tomber dans l’obsession pathologique de la repentance, force est de constater que plus on a de responsabilités dans l’Église, plus il faut écouter l’exhortation de Paul à Timothée afin de ne pas trahir en secret ce qu’on a proclamé en public.

Ordonné ou pas, l’avertissement vaut finalement pour chacun de nous : fais corps avec l’Église, sois cohérent, mets tes actes en accord avec tes paroles !

 

– Une troisième hypothèse, plus vraisemblable encore que les deux autres, serait que Paul fait allusion à la profession de foi baptismale de Timothée. En effet, baptisé adulte, Timothée a dû comme tous les autres confesser la foi de l’Église devant l’assemblée avant de recevoir le sacrement.

Celebration-de-la-Vigile-pascale martyrCertains pensent pouvoir se passer d’un tel acte public pour être chrétien. Ainsi Saint Augustin nous raconte l’histoire d’un certain Victorinus, rhéteur à Rome, qui se disait chrétien en privé, mais ne se joignait jamais à l’assemblée du dimanche (Confessions, Livre VIII, II, 3-4). Il raillait ouvertement ce qu’il considérait comme une hypocrisie : « Alors ce sont les murs qui font les chrétiens ? » aimait-il à répéter en riant. Pourtant, à force de lire et de ruminer l’Écriture tout seul, il désira bientôt rejoindre l’assemblée locale pour dire le Credo avec elle :

« En plongeant plus profondément dans ses lectures, il y puisa de la fermeté, il craignit d’être désavoué du Christ devant ses saints anges, s’il craignait de le confesser devant les hommes (Mt 10,33), et reconnaissant qu’il serait coupable d’un grand crime s’il rougissait des sacrés mystères de l’humilité de ton Verbe, […] et tout à coup, il surprit son ami Simplicianus par ces mots: ’Allons à l’église; je veux être chrétien !’ Et lui, ne se sentant pas de joie, l’y conduisit à l’instant. Aussitôt qu’il eut reçu les premières instructions sur les mystères, il donna son nom pour être régénéré dans le baptême, à l’étonnement de Rome, à la joie de l’Église. […]

Puis, quand l’heure fut venue de faire la profession de foi, qui consiste en certaines paroles retenues de mémoire, et que récitent ordinairement d’un lieu plus élevé, en présence des fidèles de Rome, ceux qui demandent l’accès de ta grâce ; les prêtres, ajouta Simplicianus, offrirent à Victorinus de réciter en particulier, comme c’était l’usage de le proposer aux personnes qu’une solennité publique pouvait intimider ; mais lui aima mieux professer son salut en présence de la multitude sainte. 

[…] Il prononça le symbole de vérité avec une admirable foi, et tous auraient voulu l’enlever dans leur cœur ; et tous l’y portaient dans les bras de leur joie et de leur amour ».

Que vient faire l’Église dans le salut ? Pourquoi est-il vital de s’agréger à la communauté des croyants ? Cette question rejoint celles que nous entendons souvent autour de nous : je suis croyant, mais à quoi sert l’Église ? Pourquoi serait-elle nécessaire pour croire, prier, et être sauvé ?

Ce récit d’Augustin montre plusieurs choses [2] :

- l’expérience individuelle de la foi peut prétendre se passer de l’appartenance à l’Église dans un premier temps. Or, si l’on considère la foi sous l’angle de l’expérience individuelle seulement, nous dit Saint Augustin, on la condamne à l’isolement. C’est donc qu’on ne peut séparer ce  qui est dit dans le Credo de ceux qui disent ensemble le Credo. Tous les « Je » qui disent ensemble « Je crois » forment un « Nous »: l’Esprit-Saint forme ce « Nous » des chrétiens qui constitue alors l’Église, dans la conjonction de la personne (« Je ») et de la communauté (« Nous »). C’est pour cela que le texte du Credo est fort justement appelé un Symbole (syn-balein en grec = acte de réunir ensemble des éléments séparés) : le fait de le réciter ensemble permet symboliquement à l’assemblée de se reconnaître d’Église.

- Victorinus, si savant et connaissant tous les philosophes, reconnaît avoir besoin du langage de l’Église pour dire sa foi personnelle. Nous sommes parlés avant que de parler nous-mêmes, dirions-nous aujourd’hui… Victorinus articula la formule de vérité avec assurance ; c’est dire que l’Église nous engendre à la foi tout autant que notre profession de foi constitue l’Église.

- la proclamation de foi publique devient proclamation du salut. Victorinus préféra proclamer hautement son salut devant la multitude sainte, plutôt que dans la sacristie. Il s’agit de ne pas rougir devant les hommes de « l’opprobre de la Croix ». « Car la foi du cœur obtient la justice, et la confession des lèvres le salut » (Rm 10,10).

 

Professer sa foi comme Timothée, c’est donc revenir à la source de notre baptême, faire Église avec d’autres pour témoigner du Christ et proclamer ainsi publiquement notre attachement à Jésus de Nazareth, son message, sa personne.

Nul doute que l’importance de cette profession de foi baptismale a largement influencé Mohammed et la tradition musulmane : il suffit en effet de proclamer à haute voix la Chahada (« Il n’y a de Dieu que Dieu, et Mohamed est son prophète ») pour devenir musulman. Tout le baptême chrétien a été comme ‘cristallisé’ par les musulmans en cet élément fondamental : témoigner du Dieu unique à haute voix devant tous. Notons cependant la différence : la Chahada énonce la foi en un Dieu unique comme un constat objectif (« il n’y a pas d’autre dieu que Dieu ») alors que le Credo chrétien manifeste un attachement subjectif, personnel : « je crois », « nous croyons ». La première se veut une vérité s’imposant à tous ; la seconde est le résultat d’une expérience relationnelle qui invite l’autre à vivre la sienne propre.

Notons d’ailleurs au passage que la profession de foi juive marie les deux aspects : « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’Unique » (Dt 6,4). En effet, elle est en même temps dialogale (Écoute, Israël) et objective (le Seigneur notre Dieu est l’Unique).

 

La profession de foi de Jésus-Christ

Jésus devant PilateC’est sur la question de la vérité de foi que Paul rebondit en comparant la profession de foi de Timothée à celle du Christ devant Pilate :

Je te recommande, devant Dieu qui donne la vie à toutes choses, et devant Jésus-Christ, qui fit une belle confession (homologia) devant Ponce Pilate (1Tim 6,13), de garder le commandement…

En quoi consiste-t-elle ? Paul ne le dit pas. Mais il a écouté les Apôtres et lu les Évangiles. Il sait que Jean met la question de la vérité au cœur de la comparution de Jésus devant Pilate : « qu’est-ce que la vérité ? » (Jn 18,38) À la question de Pilate, Jésus se tait. Car Pilate cherchait une doctrine, une vérité objective, alors que Jésus propose une relation personnelle, une adhésion de confiance, une amitié vitale : « Je suis la vérité, le chemin et la vie » (Jn 14,6). Jésus devant Pilate témoigne que la vérité n’est pas un objet à croire ou à imposer. C’est une personne, avec qui entrer en communion. Professer sa foi comme Jésus-Christ devant Pilate signifie alors quitter le terrain meurtrier des idéologies érigées en système. Et proclamer que seule la relation vivante est source de salut.

 

Jésus devant Pilate témoigne… que la vérité est ailleurs ! Pilate veut lui faire préciser en quoi consiste le royaume prêché, et s’il est vraiment le Roi des juifs que les foules acclament. En répondant à côté : « mon royaume n’est pas de ce monde » (Jn 18,36), Jésus témoigne de l’altérité absolue de Dieu, qui ne se laisse enfermer dans aucun de nos concepts : royaume, grandeur, puissance etc. Témoigner que Dieu est toujours au-delà, indicible, irréductible à nos approches, plus grand que nos concepts : voilà également une belle profession de foi à laquelle notre baptême nous appelle, comme Jésus devant Pilate !

La vérité est ailleurs ; elle est relationnelle et non objective ; elle ne peut servir d’alibi à nos intérêts car nous engage à suivre le Christ dans sa Passion.

 

Notre profession de foi

Charles de Foucauld priait pour mourir martyr au milieu des Touaregs qu’il aimait tant. Prions nous-mêmes pour vivre martyrs au milieu de nos proches : en témoignant publiquement pour le Christ, en nous engageant à sa suite, en cherchant à mettre nos actes en cohérence avec cette belle proclamation de foi qui fut celle de Timothée, et d’abord de Jésus.


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[1]. Il y a 6 occurrences du terme dans le NT. Outre les 2 usages dans notre lecture :
2Co 9,13 : « les fidèles glorifient Dieu de votre obéissance dans la profession (homologia) de l’Evangile de Christ ».
He 3,1 : « Ainsi donc, frères saints, vous qui avez en partage une vocation céleste, considérez Jésus, l’apôtre et le grand prêtre de notre confession de foi (homologia) ».
He 4.14 : « En Jésus, le Fils de Dieu, nous avons le grand prêtre par excellence, celui qui a traversé les cieux ; tenons donc ferme l’affirmation de notre foi  (homologia) » (He 4,14).
He 10.23 : « Retenons fermement la profession (homologia) de notre espérance, car celui qui a fait la promesse est fidèle.

[2]. Cf. OCVIRK D., La foi et le Credo, Cerf, Coll. Cogitatio Fidei n°131, Paris, 1985, pp. 161-168.

 

 

LECTURES DE LA MESSE

 

1ère LECTURE 

« La bande des vautrés n’existera plus » (Am 6, 1a.4-7)


Lecture du livre du prophète Amos

Ainsi parle le Seigneur de l’univers : Malheur à ceux qui vivent bien tranquilles dans Sion, et à ceux qui se croient en sécurité sur la montagne de Samarie. Couchés sur des lits d’ivoire, vautrés sur leurs divans, ils mangent les agneaux du troupeau, les veaux les plus tendres de l’étable ; ils improvisent au son de la harpe, ils inventent, comme David, des instruments de musique ; ils boivent le vin à même les amphores, ils se frottent avec des parfums de luxe, mais ils ne se tourmentent guère du désastre d’Israël ! C’est pourquoi maintenant ils vont être déportés, ils seront les premiers des déportés ; et la bande des vautrés n’existera plus.

 

PSAUME 

Ps 145 (146), 6c.7, 8.9a, 9bc-10

R/ Chante, ô mon âme, la louange du Seigneur ! ou : Alléluia ! (Ps 145, 1b)

 

Le Seigneur garde à jamais sa fidélité,
il fait justice aux opprimés ;
aux affamés, il donne le pain ;
le Seigneur délie les enchaînés.

 

Le Seigneur ouvre les yeux des aveugles,
le Seigneur redresse les accablés,
le Seigneur aime les justes,
le Seigneur protège l’étranger.

 

Il soutient la veuve et l’orphelin,
il égare les pas du méchant.
D’âge en âge, le Seigneur régnera :
ton Dieu, ô Sion, pour toujours !

 

2ÈME LECTURE 

« Garde le commandement jusqu’à la Manifestation du Seigneur » (1 Tm 6, 11-16)


Lecture de la première lettre de saint Paul apôtre à Timothée

Toi, homme de Dieu, recherche la justice, la piété, la foi, la charité, la persévérance et la douceur. Mène le bon combat, celui de la foi, empare-toi de la vie éternelle ! C’est à elle que tu as été appelé, c’est pour elle que tu as prononcé ta belle profession de foi devant de nombreux témoins.

Et maintenant, en présence de Dieu qui donne vie à tous les êtres, et en présence du Christ Jésus qui a témoigné devant Ponce Pilate par une belle affirmation, voici ce que je t’ordonne : garde le commandement du Seigneur, en demeurant sans tache, irréprochable jusqu’à la Manifestation de notre Seigneur Jésus Christ. Celui qui le fera paraître aux temps fixés, c’est Dieu, Souverain unique et bienheureux, Roi des rois et Seigneur des seigneurs, lui seul possède l’immortalité, habite une lumière inaccessible ; aucun homme ne l’a jamais vu, et nul ne peut le voir. À lui, honneur et puissance éternelle. Amen.

 

ÉVANGILE 

« Tu as reçu le bonheur, et Lazare, le malheur. Maintenant, lui, il trouve ici la consolation, et toi, la souffrance » (Lc 16, 19-31)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. 
Jésus Christ s’est fait pauvre, lui qui était riche, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté. Alléluia. (cf. 2 Co 8, 9)

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

En ce temps-là, Jésus disait aux pharisiens : « Il y avait un homme riche, vêtu de pourpre et de lin fin, qui faisait chaque jour des festins somptueux. Devant son portail gisait un pauvre nommé Lazare, qui était couvert d’ulcères. Il aurait bien voulu se rassasier de ce qui tombait de la table du riche ; mais les chiens, eux, venaient lécher ses ulcères. Or le pauvre mourut, et les anges l’emportèrent auprès d’Abraham. Le riche mourut aussi, et on l’enterra. Au séjour des morts, il était en proie à la torture ; levant les yeux, il vit Abraham de loin et Lazare tout près de lui. Alors il cria : ‘Père Abraham, prends pitié de moi et envoie Lazare tremper le bout de son doigt dans l’eau pour me rafraîchir la langue, car je souffre terriblement dans cette fournaise. – Mon enfant, répondit Abraham, rappelle-toi : tu as reçu le bonheur pendant ta vie, et Lazare, le malheur pendant la sienne. Maintenant, lui, il trouve ici la consolation, et toi, la souffrance. Et en plus de tout cela, un grand abîme a été établi entre vous et nous, pour que ceux qui voudraient passer vers vous ne le puissent pas, et que, de là-bas non plus, on ne traverse pas vers nous.’ Le riche répliqua : ‘Eh bien ! père, je te prie d’envoyer Lazare dans la maison de mon père. En effet, j’ai cinq frères : qu’il leur porte son témoignage, de peur qu’eux aussi ne viennent dans ce lieu de torture !’ Abraham lui dit : ‘Ils ont Moïse et les Prophètes : qu’ils les écoutent ! – Non, père Abraham, dit-il, mais si quelqu’un de chez les morts vient les trouver, ils se convertiront.’ Abraham répondit : ‘S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus.’ »
Patrick BRAUD

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