L'homélie du dimanche (prochain)

17 septembre 2011

Les ouvriers de la 11° heure

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Les ouvriers de la 11° heure

 

Homélie du 25° dimanche ordinaire / Année A / 18/09/2011

 

La vocation sociale de la foi chrétienne

Encore une parabole inspirée par la vie économique ! Et qui peut l’inspirer en retour…

Si certains voudraient cantonner la foi chrétienne à la seule vie intérieure ou aux seules pratiques rituelles, ces paraboles « économiques » obligent les Églises à demeurer – même minoritaires – un ferment de transformation sociale. Le repli sur des petites communautés chaleureuses, mais trop autocentrées, et bientôt folkloriques, ne pourra jamais assumer cette vocation socio-économique qui court dans tous les Évangiles.

Les ouvriers de la 11° heure dans Communauté spirituelle
Le travail est par-dessus tout une prérogative de l’homme en tant que personne, un facteur d’accomplissement humain, qui précisément aide l’homme à être davantage homme. Sans le travail, non seulement, il ne peut plus s’alimenter, mais il ne peut plus se réaliser lui-même, c’est-a-dire rejoindre sa véritable dimension. En second lieu et en conséquence, le travail est une nécessité, un devoir qui donne à l’homme vie, sérénité, engagement, signification. L’Apôtre Paul, rappelons-le, admoneste sévèrement, « celui qui ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas ! » (II Thessaloniciens, III 10). Ainsi chacun est appelé à développer une activité à quelque niveau qu’il soit placé, tandis que se trouvent condamnées la paresse et l’exploitation. D’autre part, le travail est un droit, c’est le grand droit fondamental de l’homme (?) En tant que tel, il doit être promu et sauvegardé par la société et aussi dans l’éventuel conflit avec les autres droits. A ces conditions le travail devient aussi un service de telle sorte que l’homme croisse dans la mesure par laquelle il se donne lui-même aux autres.
(Jean-Paul II : Angélus du 20 septembre 1981).

 

 

Embaucher, c’est divin

Une parabole qui parle de travail donc, et plus précisément d’embauche.

 11° heure dans Communauté spirituelleTous ceux qui ont connu le chômage vous raconteront la détresse non seulement financière mais plus encore humaine : se sentir inutile, ne pas avoir sa place dans la société, « rester là, toute la journée, sans rien faire » comme le constate avec tristesse le maître de la vigne.

Le travail est vraiment un lieu d’humanisation. En être privé est une souffrance que Dieu lui-même nous invite à combattre.

De six heures du matin à six heures du soir, Dieu embauche. Bien sûr, c’est pour son travail à lui. Mais il souligne par là même la grandeur de tout travail humain. L’oisiveté (« rester là sans rien faire ») est bien la mère de tous les vices ! Les moines bénédictins ont gardé précieusement ce conseil, même au coeur de leur vie contemplative : « ora et labora », « prie et travaille », car les deux vont ensemble dans le coeur de Dieu qui lui-même est toujours à l’oeuvre (cf. Jn 5,17, et le thème des oeuvres’ dans Jn).

 

La liturgie du travail, le travail liturgique

D’ailleurs, les cinq fois où Dieu sort pour embaucher sont les cinq heures liturgiques, à la  chômagefois juives et chrétiennes. Au point du jour, c’est l’office de Matines (6h du matin). La troisième heure, c’est Laudes (9h). La sixième heure, c’est Sexte (midi). La neuvième heure, c’est None (15h). La 11° heure, c’est Vêpres (17h).

Comparer l’embauche des ouvriers à l’office liturgique : voilà qui relie indissolublement le travail et la prière, la vie sociale et la pratique religieuse, l’activité économique et la vie divine !

 

Comment participer aujourd’hui à cette embauche ? Comment appeler chacun à prendre sa place dans l’activité humaine, ecclésiale, associative ?

Ne pas appeler l’autre à venir travailler est criminel .

Que chaque communauté s’examine. Ne sommes-nous pas trop habitués à fonctionner avec un petit cercle, sans oser appeler ceux qui sont là « à ne rien faire » ?

Dans la vie professionnelle, l’emploi est-il réellement un objectif prioritaire au-dessus du profit (même si celui-ci est nécessaire pour embaucher !) ?

 

Dieu sort

Cinq fois dans la journée, Dieu sort de lui-même pour ne pas laisser les ouvriers au  liturgiechômage. Comme Moïse (Ex 2,11), il faut sortir de son palais doré pour voir la misère du peuple et être témoin de son esclavage.

Sortir de soi est proprement divin.

C’est le mouvement même de la vie trinitaire. Les autres religions appellent à revenir vers soi, à retrouver l’unité intérieure, à se fondre dans le Tout. Le Dieu de Jésus est au contraire un Dieu qui ne cesse de sortir de lui-même pour aller vers l’autre. Tout le contraire de l’indépendance ou de l’autosuffisance : Dieu sort car il est amour, et l’amour veut dépendre de l’autre ; et l’amour ne veut pas se suffire à lui-même.

Cette place où il vient chercher ses ouvriers représente le monde avec ses foules mélangées, ses querelles, ses calomnies, le tumulte de tant d’affaires diverses où Dieu n’a point dédaigné de descendre
(saint Hilaire de Poitiers : commentaire de l’évangile selon saint Matthieu, XX 5).

Là encore, chacun peut réfléchir : que veut dire sortir de moi-même pour moi actuellement ?

 

Les ouvriers de la 11° heure

À tout âge il est possible d’entendre l’appel du maître de la vigne. Les Pères de l’Église voyaient dans les cinq tranches horaires de la parabole l’histoire de l’humanité (scandée par Noé, Abraham, Moïse, Jésus), ou bien les différents âges de la vie (même à la fin de sa vie, on peut venir travailler au Royaume).

Les différentes heures de la journée se retrouvent dans notre vie : le matin c’est l’enfance ; la troisième heure, la jeunesse où déjà se fait sentir la chaleur des passions ; la sixième, l’heure de midi, c’est la maturité de l’âge avec toutes les forces de l’homme dans leur plénitude ; la neuvième où le soleil se penche vers son couchant, c’est la vieillesse avec ses déclins ; et enfin la onzième l’âge de la décrépitude où la journée tend vers sa fin (saint Grégoire le Grand : homélie XVII sur les péricopes évangéliques 1 & 2).

 ouvrierLes ouvriers de la 11° heure peuvent également représenter les païens, appelés grâce à Jésus après les juifs, mais partageant avec eux le même salaire : la vie éternelle.

Les ouvriers appelés à la onzième heure représentent les Gentils. Pendant que le peuple hébreu, à toutes les heures de la journée, était venu travailler dans la vigne de Dieu, en le servant avec une vraie foi, les Gentils pendant longtemps avaient négligé de travailler pour la vie véritable, et avaient perdu leur temps dans des agitations stériles. Et ils peuvent donner comme excuse à leur désoeuvrement que personne n’était venu les employer. Ils n’on vu ni patriarches, ni prophètes, et personne n’est venu leur parler de la vie éternelle (ibid.).

 

Dans toute culture, à tout âge, quelque soit les conditions sociales, il est donc possible de devenir un ouvrier au service du Royaume de Dieu. Que nul ne désespère alors de sa jeunesse ou de son grand âge, de sa pauvreté ou de sa richesse : il n’est jamais trop tôt ni trop tard, il n’est jamais impossible de travailler à l’oeuvre de Dieu !

 

Au-delà des conventions collectives

Un mot enfin sur les salaires versés. Le salaire promis par le maître est juste. Il  parabolecorrespond aux conventions collectives de l’époque : un denier par jour de travail, du lever au coucher du soleil (pause comprise ?…).

Les ouvriers des premières heures accusent le maître d’injustice, alors qu’il est généreux. Il donne ce qui est juste, mais va au-delà de la justice.

Saint Augustin résout élégamment cette question en rappelant que le denier versé, c’est la vie éternelle, qui est infinie. Or on ne peut diviser l’infini ou en donner deux fois moins à quelqu’un !

Parce que la pièce d’argent, c’est la vie éternelle, tous jouiront d’une même vie éternelle (?). Elle sera la même pour tous. Car elle ne sera pas plus longue pour l’un, ni moins longue pour l’autre, puisqu’elle est éternelle pour tous : ce qui n’a pas de fin pour moi n’en aura pas pour toi. (St Augustin, sermon 87,6)

Quand Dieu donne la vie éternelle, aux ouvriers de la 11° heure comme à ceux du petit matin, il leur donne tout ce qu’il a, tout ce qu’il est, et comment être jaloux alors que chacun est comblé de cette plénitude ?

 

Cette révélation de la bonté de Dieu au-delà de la justice pourrait là encore inspirer bien des responsables économiques. Travailler une heure quand on a été chômeur ne peut pas être évalué au prorata de ceux qui travaillent normalement depuis le matin, c’est-à-dire de ceux qui ont toujours été bien insérés dans le monde professionnel. Les débats sur les allocations de ressources, CMU, RSA et autres aides sociales ont là une référence évangélique assez audacieuse…

 

1ère lecture : « Mes pensées ne sont pas vos pensées » (Is 55, 6-9)

Lecture du livre d’Isaïe

Cherchez le Seigneur tant qu’il se laisse trouver. Invoquez-le tant qu’il est proche. Que le méchant abandonne son chemin,et l’homme pervers, ses pensées ! Qu’il revienne vers le Seigneur qui aura pitié de lui, vers notre Dieu qui est riche en pardon. Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et mes chemins ne sont pas vos chemins, déclare le Seigneur. Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes chemins sont élevés au-dessus des vôtres, et mes pensées, au-dessus de vos pensées.

 

Psaume : 144, 2-3, 8-9, 17-18

R/ Proche est le Seigneur de ceux qui l’invoquent

Chaque jour je te bénirai, 
je louerai ton nom toujours et à jamais.
 
Il est grand, le Seigneur, hautement loué ;
 
à sa grandeur, il n’est pas de limite.
 

Le Seigneur est tendresse et pitié, 
lent à la colère et plein d’amour ;
 
la bonté du Seigneur est pour tous,
 
sa tendresse, pour toutes ses oeuvres.
 

Le Seigneur est juste en toutes ses voies, 
fidèle en tout ce qu’il fait.
 
Il est proche de ceux qui l’invoquent,
 
de tous ceux qui l’invoquent en vérité.

2ème lecture : « Pour moi, vivre c’est le Christ » (1, 20c-24.27a)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens

Frères, soit que je vive, soit que je meure, la grandeur du Christ sera manifestée dans mon corps. En effet, pour moi, vivre c’est le Christ, et mourir est un avantage. Mais si, en vivant en ce monde, j’arrive à faire un travail utile, je ne sais plus comment choisir. Je me sens pris entre les deux : je voudrais bien partir pour être avec le Christ, car c’est bien cela le meilleur ; mais, à cause de vous, demeurer en ce monde est encore plus nécessaire. Quant à vous, menez une vie digne de l’Évangile du Christ.

Evangile : La générosité de Dieu dépasse notre justice (Mt 20, 1-16)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. La bonté du Seigneur est pour tous, sa tendresse, pour toutes ses oeuvres : tous acclameront sa justice.Alléluia. (cf. Ps 144, 7-9)

 

Evangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Jésus disait cette parabole : 
« le Royaume des cieux est comparable au maître d’un domaine qui sortit au petit jour afin d’embaucher des ouvriers pour sa vigne. Il se mit d’accord avec eux sur un salaire d’une pièce d’argent pour la journée, et il les envoya à sa vigne. Sorti vers neuf heures, il en vit d’autres qui étaient là, sur la place, sans travail. Il leur dit : ‘Allez, vous aussi, à ma vigne, et je vous donnerai ce qui est juste.’ Ils y allèrent. Il sortit de nouveau vers midi, puis vers trois heures, et fit de même. Vers cinq heures, il sortit encore, en trouva d’autres qui étaient là et leur dit : ‘Pourquoi êtes-vous restés là, toute la journée, sans rien faire ?’ Ils lui répondirent : ‘Parce que personne ne nous a embauchés.’ Il leur dit : ‘Allez, vous aussi, à ma vigne.’
 
Le soir venu, le maître de la vigne dit à son intendant : ‘Appelle les ouvriers et distribue le salaire, en commençant par les derniers pour finir par les premiers.’ Ceux qui n’avaient commencé qu’à cinq heures s’avancèrent et reçurent chacun une pièce d’argent. Quand vint le tour des premiers, ils pensaient recevoir davantage, mais ils reçurent, eux aussi, chacun une pièce d’argent. En la recevant, ils récriminaient contre le maître du domaine : ‘Ces derniers venus n’ont fait qu’une heure, et tu les traites comme nous, qui avons enduré le poids du jour et de la chaleur !’ Mais le maître répondit à l’un d’entre eux : ‘Mon ami, je ne te fais aucun tort. N’as-tu pas été d’accord avec moi pour une pièce d’argent ? Prends ce qui te revient, et va-t’en. Je veux donner à ce dernier autant qu’à toi : n’ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mon bien ? Vas-tu regarder avec un oeil mauvais parce que moi, je suis bon ?’
 
Ainsi les derniers seront premiers, et les premiers seront derniers. »

Patrick Braud 

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16 juillet 2011

La patience serait-elle l’arme des forts ?

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La patience serait-elle l’arme des forts ?

Homélie du 16° dimanche ordinaire / année A
17/07/2011

 

·       Un Dieu différent de nos attentes

La patience serait-elle l’arme des forts ?

Le livre de la Sagesse nous met sur la voie : ceux qui doutent de leur pouvoir veulent l’affirmer à tout prix.

La patience serait-elle l'arme des forts ? dans Communauté spirituelleC’est Kadhafi, lamentable dans sa répression de l’opposition libyenne interne.

C’est un chef de service qui exige tout tout de suite de ses collaborateurs, même le plus contradictoire.

C’est le père de famille qui impose son point de vue à ses enfants, parce que évidemment il a raison.

 

Or comment agit le Dieu de la Bible ?

Lui qu’on dit tout-puissant, il renonce à exercer cette puissance pour dominer. Il préfère l’utiliser pour éduquer Israël au long des siècles, et l’Église.

Lui qu’on dit omniscient (dans le Coran), il préfère utiliser cette connaissance des hommes pour leur pardonner, au lieu de les condamner.

En somme, Dieu patiente et prend pitié là où on attendrait qu’il s’impose et impose sa justice immédiate.

 

La parabole du bon grain et de l’ivraie (Mt 13, 24-30) porte cette attitude à son paroxysme : « laissez les pousser ensemble jusqu’à la moisson ».

Or la moisson (c’est-à-dire le jugement dernier), c’est loin, très loin. Et c’est long, très long, de tenir dans cette situation intermédiaire où le bon et le mauvais grandissent ensemble, inextricablement mêlés.

 

La liste est grande dans nos existences de ces réalités mélangées, ni entièrement bonnes, ni entièrement mauvaises, que l’on voudrait trancher sans plus attendre.

Une vie de couple qui n’a plus son intensité d’avant, et qui en même temps tient encore la route.

Un boulot dans lequel on n’est pas malheureux, et dans lequel on ne s’épanouit pas non plus vraiment.

Une Église pas toujours enthousiasmante, et qui pourtant véhicule des trésors…

Nous avons une liste impressionnante de situations mélangées qui exigent notre patience là où nous voudrions trancher tout de suite.

Or les couples forts ne se séparent pas lorsque l’épreuve apparaît ; ils changent leur voilure, et – tels des voiliers dans un coup de chien – ils mobilisent leur énergie pour traverser le mauvais temps, déferlante après déferlante, sans perdre de vue le compas et la carte marine.

Or les professionnels compétents n’enverront pas leur démission à la première contradiction ; ils patienteront activement jusqu’à ce qu’une nouvelle opportunité, interne ou externe, leur ouvre les portes d’une sage décision.

Or les paroissiens de base ne changeront pas de clocher à chaque contrariété ou à chaque nomination. Ils savent que l’Église est plus grande que les coups de volant idéologiques d’un côté ou de l’autre qui semblent la déstabiliser à un moment donné.

 

·       Le temps de la patience

Et si nous apprenions de Dieu sa patience ? sa capacité à croire en l’autre au-delà des  force dans Communauté spirituelleapparences du moment ? sa force tranquille pour ne pas s’imposer, mais attendre activement ?

Évidemment, la tentation est grande de dire : ce n’est pas juste que l’ivraie parasite le blé à ce point ! C’est trop long d’attendre la moisson, car c’est maintenant que je veux profiter de la vie !

Mais Dieu sait comment mystérieusement la présence de l’ivraie est utile à la croissance du blé. Il promet que même l’ivraie sera utile d’ailleurs, puisqu’elle brûlera en bottes d’un combustible appréciable.

 

Dieu sait que la moisson viendra bientôt. Pour lui, mille ans sont comme un jour et un jour comme mille ans.

 

Il nous introduit à une autre conception du temps. Pas un temps quantitatif, linéaire, sur l’échelle duquel l’horizon final est désespérément loin. Le temps de Dieu est un temps complexe, qualitatif, qui permet de patienter au-delà de nos capacités naturelles. En Dieu l’horizon et le présent ne sont pas séparés. En lui, la moisson et la croissance ne sont pas des réalités successives.

La patience est alors à cette vertu qui donne la force d’unir ce qui est disjoint aux yeux des hommes : le bon grain et l’ivraie, la croissance et la moisson, le grenier et la flambée…

 

Unir les contraires est le propre du divin. La traduction relationnelle de cette force surhumaine, c’est bien la patience, capable d’unir ce qui est et ce qui sera, le visage actuel et celui qui sera transfiguré, le bon et le mauvais.

Une oraison du missel prie ainsi : « Dieu, toi qui montres la preuve suprême de ta puissance lorsque tu patientes et prends pitié… » Et l’oraison de ce dimanche fait également le lien entre les lectures : « Dieu, maître de la moisson, tu es un juge plein de patience. Comment désespérer de nous-mêmes et des autres, alors que tu fais lever parmi nous ta parole ? Remplis-nous d’espérance dans l’attente du jugement, car ton Fils révèlera ta miséricorde pour les siècles des siècles ».

Envers qui, envers quoi suis-je appelé à être patient cette semaine ? (et celles qui suivent !)

 

 

1ère lecture : La patience du Tout-Puissant (Sg 12, 13.16-19)

Lecture du livre de la Sagesse

Il n’y a pas de Dieu en dehors de toi, Seigneur, toi qui prends soin de toute chose, et montres ainsi que tes jugements ne sont pas injustes.
Ta force est à l’origine de ta justice, et ta domination sur toute chose te rend patient envers toute chose.
Il montre sa force, l’homme dont la puissance est discutée, et ceux qui la bravent sciemment, il les réprime.
Tandis que toi, Seigneur, qui disposes de la force, tu juges avec indulgence, tu nous gouvernes avec beaucoup de ménagement, car tu n’as qu’à vouloir pour exercer ta puissance.
Par ton exemple tu as enseigné à ton peuple que le juste doit être humain, et tu as pénétré tes fils d’une belle espérance : à ceux qui ont péché tu accordes la conversion.

Psaume : Ps 85, 5-6, 9ab.10, 15-16ab

R/ Toi qui est bon et qui pardonnes, écoute-moi mon Dieu !

Toi qui es bon et qui pardonnes,
plein d’amour pour tous ceux qui t’appellent,
écoute ma prière, Seigneur,
entends ma voix qui te supplie.

Toutes les nations, que tu as faites,
viendront se prosterner devant toi,
car tu es grands et tu fais des merveilles,
toi, Dieu, le seul.

Toi, Seigneur, Dieu de tendresse et de pitié, 
lent à la colère, plein d’amour et de vérité,
regarde vers moi,
prends pitié de moi.

2ème lecture : C’est l’Esprit Saint qui nous fait prier (Rm 8, 26-27)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Frères,
l’Esprit Saint vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas prier comme il faut. L’Esprit lui-même intervient pour nous par des cris inexprimables.
Et Dieu, qui voit le fond des coeurs, connaît les intentions de l’Esprit : il sait qu’en intervenant pour les fidèles, l’Esprit veut ce que Dieu veut.

Evangile : Les paraboles du Royaume. L’ivraie – La graine de moutarde et le levain (brève : 24-30) (Mt 13, 24-43)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Tu es béni, Dieu notre Père, Seigneur de l’univers, toi qui révèles aux petits les mystères du Royaume ! Alléluia. (cf. Mt 11, 25)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Jésus proposa cette parabole à la foule :
« Le Royaume des cieux est comparable à un homme qui a semé du bon grain dans son champ.
Or, pendant que les gens dormaient, son ennemi survint ; il sema de l’ivraie au milieu du blé et s’en alla.
Quand la tige poussa et produisit l’épi, alors l’ivraie apparut aussi.
Les serviteurs du maître vinrent lui dire : ‘Seigneur, n’est-ce pas du bon grain que tu as semé dans ton champ ? D’où vient donc qu’il y a de l’ivraie ?’
Il leur dit : ‘C’est un ennemi qui a fait cela.’ Les serviteurs lui disent :’Alors, veux-tu que nous allions l’enlever ?’
Il répond : ‘Non, de peur qu’en enlevant l’ivraie, vous n’arrachiez le blé en même temps.
Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson ; et, au temps de la moisson, je dirai aux moissonneurs : Enlevez d’abord l’ivraie, liez-la en bottes pour la brûler ; quant au blé, rentrez-le dans mon grenier.’ »

Il leur proposa une autre parabole :
« Le Royaume des cieux est comparable à une graine de moutarde qu’un homme a semée dans son champ.
C’est la plus petite de toutes les semences, mais, quand elle a poussé, elle dépasse les autres plantes potagères et devient un arbre, si bien que les oiseaux du ciel font leurs nids dans ses branches. »
Il leur dit une autre parabole : « Le Royaume des cieux est comparable à du levain qu’une femme enfouit dans trois grandes mesures de farine, jusqu’à ce que toute la pâte ait levé. »

Tout cela, Jésus le dit à la foule en paraboles, et il ne leur disait rien sans employer de paraboles, accomplissant ainsi la parole du prophète : C’est en paraboles que je parlerai, je proclamerai des choses cachées depuis les origines.

Alors, laissant la foule, il vint à la maison. Ses disciples s’approchèrent et lui dirent : « Explique-nous clairement la parabole de l’ivraie dans le champ. »
Il leur répondit : « Celui qui sème le bon grain, c’est le Fils de l’homme ;
le champ, c’est le monde ; le bon grain, ce sont les fils du Royaume ; l’ivraie, ce sont les fils du Mauvais.
L’ennemi qui l’a semée, c’est le démon ; la moisson, c’est la fin du monde ; les moissonneurs, ce sont les anges.
De même que l’on enlève l’ivraie pour la jeter au feu, ainsi en sera-t-il à la fin du monde.
Le Fils de l’homme enverra ses anges, et ils enlèveront de son Royaume tous ceux qui font tomber les autres et ceux qui commettent le mal, et ils les jetteront dans la fournaise : là il y aura des pleurs et des grincements de dents.
Alors les justes resplendiront comme le soleil dans le royaume de leur Père.
Celui qui a des oreilles, qu’il entende ! »
Patrick Braud

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14 mai 2011

Le berger et la porte

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Le berger et la porte

 

Homélie pour le 4° Dimanche de Pâques / Année A

15/05/2011

 

Deux paraboles apparemment semblables ont été réunies par Jean dans ce chapitre 10,1-10.

Dans la première, Jésus se désigne comme « le berger des brebis ». Dans la seconde, c’est à la « porte » qu’il s’identifie.

Les deux images ne se superposent donc pas.

Essayons d’actualiser chacune, et les relations qu’elles entretiennent.

 

1. Le berger, le pasteur

Le berger et la porte dans Communauté spirituelle

La première parabole évoque Jésus comme celui qui entre par la porte, grâce au portier qui lui ouvre, pour appeler les brebis à sortir. Les Pères de l’Église, habitués à une lecture allégorique, voyaient dans la porte le symbole des Écritures, et dans le portier celui de Moïse, le prophète annonçant Jésus.

Passer par la porte ici, c’est accomplir les Écritures, être habité par les psaumes, la Torah, la Sagesse. Le Christ au plus haut point est celui qui est imbibé du premier Testament. Il ne s’impose pas par la magie, la puissance politique ou le génie de l’intelligence. Il vient à nous (les brebis) à travers la Bible, et Moïse lui-même reconnaît en Jésus celui que toute l’espérance d’Israël annonçait. C’est pourquoi il lui ouvre la porte, il se ?porte’ garant auprès des brebis de l’accomplissement des Écritures en Jésus.

 

Très belle image rurale, mais avouons-le assez étrangère aux citadins que nous sommes devenus. Qui a vu de ses yeux cette scène entre un berger et ses brebis dans une bergerie ? À part les randonneurs en montagne ou les touristes dans les Landes, seule une infime partie de la population – et particulièrement des jeunes – peut savoir d’expérience de quoi il s’agit.

Nul doute que Jésus inventerait aujourd’hui une autre parabole… Mais laquelle ?

 

2. Le berger, le président

Difficile de comparer le rôle de berger à un rôle social actuel.

 

On pourrait penser au leader d’un groupe, au meilleur sens de ce terme. Un leader est par définition celui qui conduit son peuple (to lead, en anglais). En temps de crise, un leader comme De Gaulle est celui qui va à la rencontre du peuple français pour le faire sortir de l’Occupation. Par contre l’ambivalence du mot montre qu’il n’est pas facile de discerner qui est un vrai leader. Hitler s’est fait appeler le Führer, le guide, en prétendant justement sortir le peuple allemand de l’humiliation de 1918 et de l’inflation de la crise de 1929… Mussolini a lui aussi sali ce terme en se faisant appeler le « Duce », le « conducteur ».

 

En français, le mot dirigeant reste connoté négativement. Le comportement scandaleux de dirigeants qui se servent au lieu de servir, qui tondent la laine des brebis au lieu de les nourrir, a trop compromis ce terme pourtant très noble.

 

 berger dans Communauté spirituelleIl y a un mot qui désigne le ministère pastoral des prêtres et qui pourrait convenir : la présidence. Présider, c’est faire sortir les gens hors de chez eux, les rassembler dans l’ekklesia, les rendre libres, les nourrir de la Parole et des sacrements, les renvoyer à leurs responsabilités dans le monde.

Evidemment, la perspective de 2012 peut engendrer à nouveau une confusion entre la présidence liturgique / ecclésiale et la présidence républicaine. Mais cela ne suffit pas à disqualifier ce beau (et ancien) terme pour désigner le ministère des prêtres.

 

3. La porte, l’interface

Quant à l’image de la porte, elle reste très parlante. « Je suis la porte » : on voit bien qu’en disant cela, Jésus invite à passer par lui pour aller vers Dieu, vers « la vie en abondance ».

Les portes d’aujourd’hui sont multiples ; elles sont virtuelles le plus souvent. Le ?portail’ Internet d’un groupe est la page qui permet d’entrer sur une multitude d’autres sites. Un ?port’ USB ou HDMI est l’interface qui permet de passer d’un appareil à un autre, d’échanger des données…

 Jésus

Interface est d’ailleurs un joli mot qui reprend le meilleur de la porte (inter = entre deux mondes) et du visage (la face).

Jésus est l’interface par excellence !

Il conduit vers le Père ; il est le Médiateur ; il appartient à la fois au monde des hommes et au monde de Dieu ; dans l’eucharistie il assure « l’admirable commerce » entre Dieu et les hommes… Bref : « prendre la porte » en christianisme, c’est être uni au Christ pour aller vers Celui qui est la source de « la vie en abondance ». Le moment le plus solennel de l’eucharistie le chante avec force : « par lui, avec lui et en lui, à toi Dieu le Père tout-puissant, dans l’unité du Saint Esprit… ».

 

4. Entre le berger et la porte

Entre le berger et la porte, entre la présidence et l’interface, il y a des points communs : rassembler / faire sortir, appeler / faire passer.

 management

Ceux qui assument des responsabilités en entreprise, dans une association, une famille etc. se reconnaîtront dans ce portrait christique (et le baptême fait de nous d’autres Christs).

 

Un vrai dirigeant n’entrera pas par effraction dans le travail de ceux qu’il doit conduire.

Il ne se servira pas au passage.

Il aura à coeur de faire grandir collaborateurs et clients, de leur permettre « d’aller et venir ».

Il désirera pour eux « la vie en abondance » et non pas l’abondance d’argent ou de pouvoir pour lui-même.

Utopique ? Mais le bon berger qu’est le Christ nous associe à son leadership.

Et cela peut transformer l’exercice de toute responsabilité.

Et chacun de nous est concerné.

 

 

 

1ère lecture : Pierre appelle à la conversion, et il baptise les premiers convertis (Ac 2, 14a.36-41)

 

Lecture du livre des Actes des Apôtres

Le jour de la Pentecôte, Pierre, debout avec les onze autres Apôtres, avait pris la parole ; il disait d’une voix forte : « Que tout le peuple d’Israël en ait la certitude : ce même Jésus que vous avez crucifié, Dieu a fait de lui le Seigneur et le Christ. »
Ceux qui l’entendaient furent remués jusqu’au fond d’eux-mêmes ; ils dirent à Pierre et aux autres Apôtres : « Frères, que devons-nous faire ? »
Pierre leur répondit : « Convertissez-vous, et que chacun de vous se fasse baptiser au nom de Jésus Christ pour obtenir le pardon de ses péchés. Vous recevrez alors le don du Saint-Esprit.

C’est pour vous que Dieu a fait cette promesse, pour vos enfants et pour tous ceux qui sont loin, tous ceux que le Seigneur notre Dieu appellera. »
Pierre trouva encore beaucoup d’autres paroles pour les adjurer, et il les exhortait ainsi : « Détournez-vous de cette génération égarée, et vous serez sauvés. »

Alors, ceux qui avaient accueilli la parole de Pierre se firent baptiser. La communauté s’augmenta ce jour-là d’environ trois mille personnes.

 

Psaume : Ps 22, 1-2ab, 2c-3, 4, 5, 6

 

R/ Le Seigneur est mon berger : rien ne saurait me manquer

Le Seigneur est mon berger :
je ne manque de rien.
Sur des prés d’herbe fraîche,
il me fait reposer.

Il me mène vers les eaux tranquilles
et me fait revivre ; 
il me conduit par le juste chemin
pour l’honneur de son nom. 

Si je traverse les ravins de la mort,
je ne crains aucun mal,
car tu es avec moi :
ton bâton me guide et me rassure. 

Tu prépares la table pour moi
devant mes ennemis ; 
tu répands le parfum sur ma tête,
ma coupe est débordante. 

Grâce et bonheur m’accompagnent
tous les jours de ma vie ; 
j’habiterai la maison du Seigneur
pour la durée de mes jours.

 

2ème lecture : Celui qui a souffert pour nous est devenu notre berger (1P 2, 20b-25)

 

Lecture de la première lettre de saint Pierre Apôtre

Frères, si on supporte la souffrance en ayant fait le bien, c’est une grâce aux yeux de Dieu.
C’est bien à cela que vous avez été appelés, puisque le Christ lui-même a souffert pour vous et vous a laissé son exemple afin que vous suiviez ses traces, lui qui n’a jamais commis de péché ni proféré de mensonge : couvert d’insultes, il n’insultait pas ; accablé de souffrances, il ne menaçait pas, mais il confiait sa cause à Celui qui juge avec justice.
Dans son corps, il a porté nos péchés sur le bois de la croix, afin que nous puissions mourir à nos péchés et vivre dans la justice : c’est par ses blessures que vous avez été guéris.
Vous étiez errants comme des brebis ; mais à présent vous êtes revenus vers le berger qui veille sur vous.

 

Evangile : Jésus est le bon pasteur et la porte des brebis (Jn 10, 1-10)

 Acclamation : Alléluia. Alléluia. Jésus, le bon Pasteur, connaît ses brebis et ses brebis le connaissent : pour elles il a donné sa vie. Alléluia. (cf. Jn 10, 14-15)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

Jésus parlait ainsi aux pharisiens :
« Amen, amen, je vous le dis : celui qui entre dans la bergerie sans passer par la porte, mais qui escalade par un autre endroit, celui-là est un voleur et un bandit.
Celui qui entre par la porte, c’est lui le pasteur, le berger des brebis.
Le portier lui ouvre, et les brebis écoutent sa voix. Ses brebis à lui, il les appelle chacune par son nom, et il les fait sortir.
Quand il a conduit dehors toutes ses brebis, il marche à leur tête, et elles le suivent, car elles connaissent sa voix.
Jamais elles ne suivront un inconnu, elles s’enfuiront loin de lui, car elles ne reconnaissent pas la voix des inconnus. »
Jésus employa cette parabole en s’adressant aux pharisiens, mais ils ne comprirent pas ce qu’il voulait leur dire.
C’est pourquoi Jésus reprit la parole : « Amen, amen, je vous le dis : je suis la porte des brebis.
Ceux qui sont intervenus avant moi sont tous des voleurs et des bandits ; mais les brebis ne les ont pas écoutés.
Moi, je suis la porte. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra aller et venir, et il trouvera un pâturage.
Le voleur ne vient que pour voler, égorger et détruire. Moi je suis venu pour que les hommes aient la vie, pour qu’ils l’aient en abondance. »
Patrick Braud

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11 septembre 2010

La parabole du petit-beurre perdu

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Dimanche 12 septembre 2010

24° Dimanche du temps ordinaire / Année C

 

La parabole du petit-beurre perdu

 

·      Connaissez-vous la parabole du petit-beurre perdu ?

Un internaute astucieux (Peter Greenfinch) la raconte ainsi, non sans humour :

« Vous êtes heureux sur un bateau de croisière (ou sur votre yacht avec quelques people de vos amis), un petit beurre dans la main droite *.

Une vague un peu plus forte que d’autres, et pof, le biscuit tombe à la mer.

Voici votre journée gâchée, vous voilà de mauvaise humeur, vous piquez une grosse colère, tapez des pieds, faites tanguer le navire.

Survient un steward attentionné, dont l’arrière grand mère avait survécu à la tragédie du Titanic. Sentant le danger, il vous place trois petits beurres dans la main gauche, pour compenser votre douleur.

Vous revoilà heureux, c’était la valeur sentimentale que vous attribuiez au petit beurre perdu. »

 

·      Cette petite histoire a toutes les caractéristiques d’une parabole évangélique ; elle est construite comme les trois paraboles de ce dimanche et peut nous aider à les comprendre.

 

En effet, c’est une histoire inventée de toutes pièces, mais inspirée par des faits réels (comme le mentionnent les fictions télévisées) : le Titanic, la vague, l’émotion de la perte…

C’est une histoire où il y a de l’étrange, assez pour nous intriguer, nous dérouter, exciter notre curiosité pour aller voir ce qu’il y a à tirer de ce récit bizarre…

 

Provoquer l’étonnement, susciter l’interrogation, encourager la recherche : voilà des caractéristiques de la parabole que Jésus n’a cessé d’exploiter au maximum. Se comportant ainsi en maître de sagesse, il surprend ses auditeurs, les intéresse, les « accroche », pour les encourager à aller plus loin que leurs certitudes et leurs opinions immédiates.

 

Belle pédagogie ! Plutôt que de s’opposer frontalement aux pharisiens scandalisés par le bon accueil qu’il fait aux pécheurs, Jésus préfère prendre un chemin détourné : il leur invente trois histoires-à-réfléchir, pour qu’ils découvrent par eux-mêmes combien Dieu est «riche en miséricorde»

 

Ce genre littéraire de la parabole (Mashal en hébreu = enseignement par énigme) était bien connu au temps de Jésus. Mais l’Ancien Testament l’emploie peu (trois ou quatre fois seulement). Le Nouveau Testament y fait recours environ 90 fois !

Jésus a largement utilisé ce mode de prédication qui relève de la sagesse, alors que les autorités religieuses ne se référaient qu’à la Loi, et que les foules n’attendaient avec exaltation qu’un prophète révolutionnaire.

 

Voici une piste sûre pour annoncer l’Évangile aujourd’hui encore : ne pas recourir à la loi ou aux prophètes seulement, mais également à la sagesse. C’est ce que Jésus fait ici avec talent dans ces trois paraboles.

 

D’ailleurs le mot parabole nous met sur la voie d’un parallélisme entre l’observation du réel et la révélation de Dieu / de l’homme.

para – balleïn : étymologiquement, parler en parabole signifie : mettre côte à côte des réalités différentes (jeter balleïn à côté para).

C’est donc un procédé de comparaison : mettre en parallèle la miséricorde divine et le comportement du berger aux 100 brebis, de la femme aux 10 pièces d’argent, ou du père des 2 fils permet de s’interroger, fait réfléchir et progresser chacun, sans lui asséner une vérité extérieure. En méditant sur les paraboles, pour y trouver sans cesse de nouveaux sens cachés, l’auditeur sera conduit toujours plus loin dans l’infini de la révélation divine au-dedans de lui, sans extériorité…

 

·      Regardez ces trois paraboles : elles ont étonnamment comme sujet commun… l’économie ! et une structure commune : perdre / chercher / trouver / se réjouir.

 

- La première s’inspire de l’économie agricole : 1 % de perte est un coût marginal relativement faible, et normalement très supportable. Pas pour Dieu, qui est plus berger que les bergers humains ! Il prend le risque d’aller « chercher et sauver ce qui était perdu ».

Remplacez « berger » par « responsable d’équipe », « brebis » par « collaborateur », et vous lisez un principe de management assez peu pratiqué : se soucier d’abord du collaborateur le plus faible, celui qui est « perdu »… Ne pas passer par pertes et profits les difficultés d’un membre de l’équipe en ne se concentrant que sur les « gagnants », les « performers » ?

 

- La deuxième parabole relève de l’économie domestique (c’est un pléonasme, car économie vient justement de oïkos = maison et nomos = ordre, gestion). Là, cette femme subit 10 % de perte de son capital financier. Logiquement, elle remue ciel et terre sans se résigner à ce déficit, dû à trop de poussière et de désordre. Comment pourrions-nous nous résigner à perdre une partie de nous-mêmes dans la poussière et le désordre de nos vies ?

 

- La troisième parabole ? presque trop connue ! – a pour cadre l’économie familiale. Cette histoire d’héritage anticipé, gaspillé, de jalousie entre héritiers et entre frères, est hélas terriblement courante…

 

Les commentaires sur ces trois paraboles sont innombrables et méritent d’être lus pour nourrir la recherche.

Retenons, en amont de ces interprétations, la manière dont Jésus a voulu parler : en paraboles au nom de la sagesse, et non en diktats au nom de la morale.

Retenons également que l’économie, sous toutes ses formes, a fourni à Jésus des éléments pour dire le salut : c’est donc que les réalités économiques actuelles peuvent toujours nous révéler quelque chose du salut chrétien, si nous prenons le temps du recul pour méditer dessus?

 

 

·      Et le petit beurre perdu ?

Cette parabole permet de présenter les concepts d’utilité économique et d’aversion à la perte. ***

La parabole du petit-beurre perdu dans Communauté spirituelle biscuit-petit-beurre-au-sel-de-guerande-216808Une perte ne peut être compensée émotionnellement que par un gain bien plus grand. Les économistes disent que la désutilité économique d’une perte de 1 ? ne peut être compensée que par l’utilité économique d’un gain de 3 ?.

Remplacer le petit beurre perdu n’aurait pas suffi à vous consoler : il en a fallu trois pour calmer votre chagrin?

Ce qui explique l’aversion à la perte : la peur de perdre 1 ? sera telle qu’il faudra une promesse d’un gain de 3 ? pour faire changer de comportement.

 

Comme quoi Jésus aurait pu faire un excellent prof de Fac ou de grande école en économie, grâce à son art des paraboles?

 

______________________________________ 

* À noter que la parabole fonctionne tout aussi bien avec des tranches de saucisson à l’ail !

** Le symbole (synballeïn) est au contraire l’art de les réunir. Et l’hyperbole est une réalité largement au-dessus (hyper – balleïn) d’une autre (c’est donc une exagération voulue). Le diable (dia – balleïn) est celui qui divise et éparpille (dia), en empêchant de réunir ce qui est distinct.

*** cf. http://knol.google.com/k/peter-greenfinch/parabole-du-petit-beurre-perdu-et/2m7299842u04v/146#La_parabole

 

 

1ère lecture : Moïse obtient le pardon pour le peuple infidèle (Ex 32, 7-11.13-14)

Moïse était encore sur la montagne du Sinaï. Le Seigneur lui dit : « Va, descends, ton peuple s’est perverti, lui que tu as fait monter du pays d’Égypte.
Ils n’auront pas mis longtemps à quitter le chemin que je leur avais prescrit ! Ils se sont fabriqué un veau en métal fondu. Ils se sont prosternés devant lui, ils lui ont offert des sacrifices en proclamant : ‘Israël, voici tes dieux, qui t’ont fait monter du pays d’Égypte.’ »
Le Seigneur dit encore à Moïse : « Je vois que ce peuple est un peuple à la tête dure.
Maintenant, laisse-moi faire ; ma colère va s’enflammer contre eux et je vais les engloutir ! Mais, de toi, je ferai une grande nation. »
Moïse apaisa le visage du Seigneur son Dieu en disant : « Pourquoi, Seigneur, ta colère s’enflammerait-elle contre ton peuple, que tu as fait sortir du pays d’Égypte par la vigueur de ton bras et la puissance de ta main ?
Souviens-toi de tes serviteurs, Abraham, Isaac et Jacob, à qui tu as juré par toi-même : ‘Je rendrai votre descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel, je donnerai à vos descendants tout ce pays que j’avais promis, et il sera pour toujours leur héritage.’ »
Le Seigneur renonça au mal qu’il avait voulu faire à son peuple.

 

Psaume : Ps 50, 3-4, 12-13, 17.19

 

R/ Oui, je me lèverai, et j’irai vers mon Père

Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.

Crée en moi un coeur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint.

Seigneur, ouvre mes lèvres,
et ma bouche annoncera ta louange.
Le sacrifice qui plaît à Dieu, c’est un esprit brisé ;
tu ne repousses pas, ô mon Dieu, un coeur brisé et broyé.

2ème lecture : Action de grâce du pécheur pardonné (1Tm 1, 12-17)

 

Je suis plein de reconnaissance pour celui qui me donne la force, Jésus Christ notre Seigneur, car il m’a fait confiance en me chargeant du ministère,
moi qui autrefois ne savais que blasphémer, persécuter, insulter. Mais le Christ m’a pardonné : ce que je faisais, c’était par ignorance, car je n’avais pas la foi ;
mais la grâce de notre Seigneur a été encore plus forte, avec la foi et l’amour dans le Christ Jésus.
Voici une parole sûre, et qui mérite d’être accueillie sans réserve : le Christ Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs ; et moi le premier, je suis pécheur,
mais si le Christ Jésus m’a pardonné, c’est pour que je sois le premier en qui toute sa générosité se manifesterait ; je devais être le premier exemple de ceux qui croiraient en lui pour la vie éternelle.
Honneur et gloireau roi des siècles,au Dieu unique, invisible et immortel, pour les siècles des siècles. Amen.

 

Evangile : Paraboles de la brebis perdue, de la drachme perdue (et du fils perdu) (brève : 1-10) (Lc 15, 1-32)

 

 

Voir également une version « réactualisée » de la parabole ici :

http://www.dti.be/prodigue/fr/movie2.htm

Les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter.
Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : « Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux ! »
Alors Jésus leur dit cette parabole :
« Si l’un de vous a cent brebis et en perd une, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il la retrouve ?
Quand il l’a retrouvée, tout joyeux, il la prend sur ses épaules,
et, de retour chez lui, il réunit ses amis et ses voisins ; il leur dit : ‘Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé ma brebis, celle qui était perdue !’
Je vous le dis : C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion.
Ou encore, si une femme a dix pièces d’argent et en perd une, ne va-t-elle pas allumer une lampe, balayer la maison, et chercher avec soin jusqu’à ce qu’elle la retrouve ?
Quand elle l’a retrouvée, elle réunit ses amies et ses voisines et leur dit : ‘Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé la pièce d’argent que j’avais perdue !’
De même, je vous le dis : Il y a de la joie chez les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit. »
Jésus dit encore : « Un homme avait deux fils.
Le plus jeune dit à son père : ‘Père, donne-moi la part d’héritage qui me revient.’ Et le père fit le partage de ses biens.
Peu de jours après, le plus jeune rassembla tout ce qu’il avait, et partit pour un pays lointain où il gaspilla sa fortune en menant une vie de désordre.
Quand il eut tout dépensé, une grande famine survint dans cette région, et il commença à se trouver dans la misère.
Il alla s’embaucher chez un homme du pays qui l’envoya dans ses champs garder les porcs.
Il aurait bien voulu se remplir le ventre avec les gousses que mangeaient les porcs, mais personne ne lui donnait rien.
Alors il réfléchit : ‘Tant d’ouvriers chez mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim !
Je vais retourner chez mon père, et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi.
Je ne mérite plus d’être appelé ton fils. Prends-moi comme l’un de tes ouvriers.’
Il partit donc pour aller chez son père. Comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut saisi de pitié ; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers.
Le fils lui dit : ‘Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi. Je ne mérite plus d’être appelé ton fils…’
Mais le père dit à ses domestiques : ‘Vite, apportez le plus beau vêtement pour l’habiller. Mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds.
Allez chercher le veau gras, tuez-le ; mangeons et festoyons.
Car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.’ Et ils commencèrent la fête.
Le fils aîné était aux champs. A son retour, quand il fut près de la maison, il entendit la musique et les danses.
Appelant un des domestiques, il demanda ce qui se passait.
Celui-ci répondit : ‘C’est ton frère qui est de retour. Et ton père a tué le veau gras, parce qu’il a vu revenir son fils en bonne santé.’
Alors le fils aîné se mit en colère, et il refusait d’entrer. Son père, qui était sorti, le suppliait.
Mais il répliqua : ‘Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais désobéi à tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis.
Mais, quand ton fils que voilà est arrivé après avoir dépensé ton bien avec des filles, tu as fait tuer pour lui le veau gras !’
Le père répondit : ‘Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi.
Il fallait bien festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé ! » 
Patrick Braud

  Une parabole moderne très célèbre: « Oscar et la dame rose » d’Eric Emmanuel Schmitt :

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