L'homélie du dimanche (prochain)

18 septembre 2022

Professer sa foi

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Professer sa foi

 

Homélie pour le 26° dimanche du Temps Ordinaire / Année C
25/09/2022

 

Cf. également :

Qui est votre Lazare ?

Le pauvre Lazare à nos portes

La bande des vautrés n’existera plus

Où est la bénédiction ? Où est le scandale ? dans la richesse, ou la pauvreté ?

Chameau et trou d’aiguille

À quoi servent les riches ?

Plus on possède, moins on est libre

 

La profession de foi

Professer sa foi dans Communauté spirituelle I-Moyenne-33576-image-de-communion-solennelle-garcon-j-ai-renouvele-les-promesses-de-mon-bapteme-blanc-sur-fond-bleu.netL’expression est devenue un peu péjorative, car on pense immédiatement aux enveloppes électorales qui polluent nos boîtes aux lettres à chaque échéance avec des papiers de mauvaise qualité sur lesquels les candidats promettent la main sur le cœur qu’ils feront tout pour notre bonheur. « Comptez sur moi, je suis fidèle à mes convictions », essaient-ils de nous persuader… Mais nous avons eu tant de revirements politiques, tant de changements de cap sous prétexte de pragmatisme que ces belles paroles nous paraissent suspectes.

Pour les plus anciens, la Profession de foi les ramène à leur ‘communion solennelle’ : procession en aube blanche, cierge allumé à la main, avec l’énorme repas de famille qui s’ensuit, et les cadeaux tant attendus des parrains, marraines et parents.

Image désuète, car la profession de foi ne concerne plus que 5% à 10% des enfants français maximum, la plupart en Enseignement catholique. Et encore, on ne parle pas de la Confirmation, qui a tout simplement disparu du paysage !

Désintérêt électoral, abandon populaire : la profession de foi n’a pas la cote ! Raison de plus pour retrouver son importance grâce à la deuxième lecture de ce dimanche (1Tim 6,11-16).

Toi, homme de Dieu, recherche la justice, la piété, la foi, la charité, la persévérance et la douceur. Mène le bon combat, celui de la foi, empare-toi de la vie éternelle ! C’est à elle que tu as été appelé, c’est pour elle que tu as prononcé ta belle profession de foi devant de nombreux témoins.

Il y est question de deux professions de foi : celle de Timothée et celle du Christ. Examinons en quoi elles peuvent (elles doivent) devenir les nôtres.

 

La profession de foi de Timothée

Paul fait explicitement allusion à un moment donné de la vie de Timothée où celui-ci a  proclamé sa foi en public :

Combats le bon combat de la foi, saisis la vie éternelle, à laquelle tu as été appelé, et pour laquelle tu as professé (μαρτύρων = martureo) une belle confession en présence d’un grand nombre de témoins (1Tim 6,12).

Cela se voit au temps du verbe employé par Paul : c’est l’aoriste actif, le passé simple en grec, qui désigne un moment précis, dans des circonstances bien particulières. Lesquelles ? Le texte ne le dit pas. Plusieurs hypothèses ont été avancées.

 

 foi dans Communauté spirituelle– Paul ferait référence au martyr de Timothée, ou du moins à sa comparution devant un tribunal romain devant lequel il n’a pas renié Jésus mais a proclamé sa foi en lui. Le verbe μαρτύρων (martureo) employé par Paul semble nous mettre sur cette piste. Les martyrs chrétiens sont ceux qui témoignent publiquement de leur adhésion au Christ, quelles que soient les conséquences mortelles pour eux ou leurs proches. Rappelons la différence fondamentale entre martyrs et djihadistes ou kamikazes : les premiers préfèrent mourir plutôt que de renier leur foi, les seconds veulent faire mourir pour imposer leur foi aux autres. Rien à voir ! Timothée a peut-être été obligé de proclamer devant les autorités romaines ou juives sa foi au Christ : il a eu ce courage, et en cela il a été martyr, au sens premier du verbe martureo : témoigner devant tous, proclamer publiquement.

Nous est-il demandé d’être martyr nous aussi comme Timothée ? Vous me direz qu’heureusement on n’en est pas là en France. C’est vrai que la liberté religieuse garantie par la République nous protège en ce sens. Pour autant, nous n’en sommes pas quittes avec le martyre. Car il existe bien d’autres formes de martyres que la prison ou le goulag. Le martyre éthique par exemple nous demande d’assumer avec courage, publiquement, des positions éthiques au nom de notre attachement au Christ. Même si elles sont à contre-courant de l’opinion majoritaire. Même si elles nous valent à cause de cela l’opprobre, l’insulte, le mépris si facilement accordée aux fachos, aux gauchos, aux intolérants que nous sommes alors accusés d’être.

Le martyre idéologique est une autre forme de témoignage : à cause du Christ, nous osons penser différemment, nous osons contester des référentiels admis par tous, nous argumentons pour d’autres manières de penser le monde et l’humanité.

En entreprise par exemple, prendre position pour les plus petits au nom du Christ peut nous conduire à l’ostracisation, voire au rejet. En société, parler de Création et pas seulement de nature, dénoncer l’idolâtrie du marché, défendre la vie humaine dès le début et jusqu’à la fin, critiquer tous les ‘ismes’ qui s’érigent en pensée ultime sont des hérésies aux yeux de nos contemporains et peuvent nous valoir leur farouche opposition, voire leur haine.

Chacun de nous est appelé à devenir martyr comme Timothée : prendre publiquement position pour le Christ, quoi qu’il en coûte.

 

– Paul emploie également le mot ὁμολογία (homologia) [1] pour désigner la profession de foi de Timothée.

Combats le bon combat de la foi, saisis la vie éternelle, à laquelle tu as été appelé, et pour laquelle tu as fait une belle confession (homologia) en présence d’un grand nombre de témoins (1Tim 6,12).

En grec, ce terme signifie : une parole conforme, une parole pareille à une première, cohérente avec elle. Il s’agit là de la proclamation publique de Timothée, cohérente avec celle de toute l’Église. Certains exégètes ont pensé à l’ordination de Timothée. Lorsque Paul lui a imposé les mains, il a sûrement au préalable proclamé devant l’assemblée son ‘orthodoxie’, sa ‘pensée droite’ s’accordant à celle des Apôtres. L’appel de Paul concernerait donc ici particulièrement les ministres ordonnés de l’Église, ces « hommes de Dieu » (1Tim 6,11)  mis à part pour servir la communion ecclésiale.

Appel d’une urgence contemporaine absolue, si on veut bien voir les dégâts provoqués par les clergés de tous bords lorsqu’ils agissent en contradiction avec la proclamation publique de leur ordination ! Qu’on pense aux centaines d’autochtones canadiens pour le génocide culturel desquels le Pape François a demandé pardon lors de son dernier voyage au Canada. Qu’on pense bien sûr aux milliers de victimes d’abus en tout genre par des prêtres en tous pays. Sans tomber dans l’obsession pathologique de la repentance, force est de constater que plus on a de responsabilités dans l’Église, plus il faut écouter l’exhortation de Paul à Timothée afin de ne pas trahir en secret ce qu’on a proclamé en public.

Ordonné ou pas, l’avertissement vaut finalement pour chacun de nous : fais corps avec l’Église, sois cohérent, mets tes actes en accord avec tes paroles !

 

– Une troisième hypothèse, plus vraisemblable encore que les deux autres, serait que Paul fait allusion à la profession de foi baptismale de Timothée. En effet, baptisé adulte, Timothée a dû comme tous les autres confesser la foi de l’Église devant l’assemblée avant de recevoir le sacrement.

Celebration-de-la-Vigile-pascale martyrCertains pensent pouvoir se passer d’un tel acte public pour être chrétien. Ainsi Saint Augustin nous raconte l’histoire d’un certain Victorinus, rhéteur à Rome, qui se disait chrétien en privé, mais ne se joignait jamais à l’assemblée du dimanche (Confessions, Livre VIII, II, 3-4). Il raillait ouvertement ce qu’il considérait comme une hypocrisie : « Alors ce sont les murs qui font les chrétiens ? » aimait-il à répéter en riant. Pourtant, à force de lire et de ruminer l’Écriture tout seul, il désira bientôt rejoindre l’assemblée locale pour dire le Credo avec elle :

« En plongeant plus profondément dans ses lectures, il y puisa de la fermeté, il craignit d’être désavoué du Christ devant ses saints anges, s’il craignait de le confesser devant les hommes (Mt 10,33), et reconnaissant qu’il serait coupable d’un grand crime s’il rougissait des sacrés mystères de l’humilité de ton Verbe, […] et tout à coup, il surprit son ami Simplicianus par ces mots: ’Allons à l’église; je veux être chrétien !’ Et lui, ne se sentant pas de joie, l’y conduisit à l’instant. Aussitôt qu’il eut reçu les premières instructions sur les mystères, il donna son nom pour être régénéré dans le baptême, à l’étonnement de Rome, à la joie de l’Église. […]

Puis, quand l’heure fut venue de faire la profession de foi, qui consiste en certaines paroles retenues de mémoire, et que récitent ordinairement d’un lieu plus élevé, en présence des fidèles de Rome, ceux qui demandent l’accès de ta grâce ; les prêtres, ajouta Simplicianus, offrirent à Victorinus de réciter en particulier, comme c’était l’usage de le proposer aux personnes qu’une solennité publique pouvait intimider ; mais lui aima mieux professer son salut en présence de la multitude sainte. 

[…] Il prononça le symbole de vérité avec une admirable foi, et tous auraient voulu l’enlever dans leur cœur ; et tous l’y portaient dans les bras de leur joie et de leur amour ».

Que vient faire l’Église dans le salut ? Pourquoi est-il vital de s’agréger à la communauté des croyants ? Cette question rejoint celles que nous entendons souvent autour de nous : je suis croyant, mais à quoi sert l’Église ? Pourquoi serait-elle nécessaire pour croire, prier, et être sauvé ?

Ce récit d’Augustin montre plusieurs choses [2] :

- l’expérience individuelle de la foi peut prétendre se passer de l’appartenance à l’Église dans un premier temps. Or, si l’on considère la foi sous l’angle de l’expérience individuelle seulement, nous dit Saint Augustin, on la condamne à l’isolement. C’est donc qu’on ne peut séparer ce  qui est dit dans le Credo de ceux qui disent ensemble le Credo. Tous les « Je » qui disent ensemble « Je crois » forment un « Nous »: l’Esprit-Saint forme ce « Nous » des chrétiens qui constitue alors l’Église, dans la conjonction de la personne (« Je ») et de la communauté (« Nous »). C’est pour cela que le texte du Credo est fort justement appelé un Symbole (syn-balein en grec = acte de réunir ensemble des éléments séparés) : le fait de le réciter ensemble permet symboliquement à l’assemblée de se reconnaître d’Église.

- Victorinus, si savant et connaissant tous les philosophes, reconnaît avoir besoin du langage de l’Église pour dire sa foi personnelle. Nous sommes parlés avant que de parler nous-mêmes, dirions-nous aujourd’hui… Victorinus articula la formule de vérité avec assurance ; c’est dire que l’Église nous engendre à la foi tout autant que notre profession de foi constitue l’Église.

- la proclamation de foi publique devient proclamation du salut. Victorinus préféra proclamer hautement son salut devant la multitude sainte, plutôt que dans la sacristie. Il s’agit de ne pas rougir devant les hommes de « l’opprobre de la Croix ». « Car la foi du cœur obtient la justice, et la confession des lèvres le salut » (Rm 10,10).

 

Professer sa foi comme Timothée, c’est donc revenir à la source de notre baptême, faire Église avec d’autres pour témoigner du Christ et proclamer ainsi publiquement notre attachement à Jésus de Nazareth, son message, sa personne.

Nul doute que l’importance de cette profession de foi baptismale a largement influencé Mohammed et la tradition musulmane : il suffit en effet de proclamer à haute voix la Chahada (« Il n’y a de Dieu que Dieu, et Mohamed est son prophète ») pour devenir musulman. Tout le baptême chrétien a été comme ‘cristallisé’ par les musulmans en cet élément fondamental : témoigner du Dieu unique à haute voix devant tous. Notons cependant la différence : la Chahada énonce la foi en un Dieu unique comme un constat objectif (« il n’y a pas d’autre dieu que Dieu ») alors que le Credo chrétien manifeste un attachement subjectif, personnel : « je crois », « nous croyons ». La première se veut une vérité s’imposant à tous ; la seconde est le résultat d’une expérience relationnelle qui invite l’autre à vivre la sienne propre.

Notons d’ailleurs au passage que la profession de foi juive marie les deux aspects : « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’Unique » (Dt 6,4). En effet, elle est en même temps dialogale (Écoute, Israël) et objective (le Seigneur notre Dieu est l’Unique).

 

La profession de foi de Jésus-Christ

Jésus devant PilateC’est sur la question de la vérité de foi que Paul rebondit en comparant la profession de foi de Timothée à celle du Christ devant Pilate :

Je te recommande, devant Dieu qui donne la vie à toutes choses, et devant Jésus-Christ, qui fit une belle confession (homologia) devant Ponce Pilate (1Tim 6,13), de garder le commandement…

En quoi consiste-t-elle ? Paul ne le dit pas. Mais il a écouté les Apôtres et lu les Évangiles. Il sait que Jean met la question de la vérité au cœur de la comparution de Jésus devant Pilate : « qu’est-ce que la vérité ? » (Jn 18,38) À la question de Pilate, Jésus se tait. Car Pilate cherchait une doctrine, une vérité objective, alors que Jésus propose une relation personnelle, une adhésion de confiance, une amitié vitale : « Je suis la vérité, le chemin et la vie » (Jn 14,6). Jésus devant Pilate témoigne que la vérité n’est pas un objet à croire ou à imposer. C’est une personne, avec qui entrer en communion. Professer sa foi comme Jésus-Christ devant Pilate signifie alors quitter le terrain meurtrier des idéologies érigées en système. Et proclamer que seule la relation vivante est source de salut.

 

Jésus devant Pilate témoigne… que la vérité est ailleurs ! Pilate veut lui faire préciser en quoi consiste le royaume prêché, et s’il est vraiment le Roi des juifs que les foules acclament. En répondant à côté : « mon royaume n’est pas de ce monde » (Jn 18,36), Jésus témoigne de l’altérité absolue de Dieu, qui ne se laisse enfermer dans aucun de nos concepts : royaume, grandeur, puissance etc. Témoigner que Dieu est toujours au-delà, indicible, irréductible à nos approches, plus grand que nos concepts : voilà également une belle profession de foi à laquelle notre baptême nous appelle, comme Jésus devant Pilate !

La vérité est ailleurs ; elle est relationnelle et non objective ; elle ne peut servir d’alibi à nos intérêts car nous engage à suivre le Christ dans sa Passion.

 

Notre profession de foi

Charles de Foucauld priait pour mourir martyr au milieu des Touaregs qu’il aimait tant. Prions nous-mêmes pour vivre martyrs au milieu de nos proches : en témoignant publiquement pour le Christ, en nous engageant à sa suite, en cherchant à mettre nos actes en cohérence avec cette belle proclamation de foi qui fut celle de Timothée, et d’abord de Jésus.


____________________________________________________

[1]. Il y a 6 occurrences du terme dans le NT. Outre les 2 usages dans notre lecture :
2Co 9,13 : « les fidèles glorifient Dieu de votre obéissance dans la profession (homologia) de l’Evangile de Christ ».
He 3,1 : « Ainsi donc, frères saints, vous qui avez en partage une vocation céleste, considérez Jésus, l’apôtre et le grand prêtre de notre confession de foi (homologia) ».
He 4.14 : « En Jésus, le Fils de Dieu, nous avons le grand prêtre par excellence, celui qui a traversé les cieux ; tenons donc ferme l’affirmation de notre foi  (homologia) » (He 4,14).
He 10.23 : « Retenons fermement la profession (homologia) de notre espérance, car celui qui a fait la promesse est fidèle.

[2]. Cf. OCVIRK D., La foi et le Credo, Cerf, Coll. Cogitatio Fidei n°131, Paris, 1985, pp. 161-168.

 

 

LECTURES DE LA MESSE

 

1ère LECTURE 

« La bande des vautrés n’existera plus » (Am 6, 1a.4-7)


Lecture du livre du prophète Amos

Ainsi parle le Seigneur de l’univers : Malheur à ceux qui vivent bien tranquilles dans Sion, et à ceux qui se croient en sécurité sur la montagne de Samarie. Couchés sur des lits d’ivoire, vautrés sur leurs divans, ils mangent les agneaux du troupeau, les veaux les plus tendres de l’étable ; ils improvisent au son de la harpe, ils inventent, comme David, des instruments de musique ; ils boivent le vin à même les amphores, ils se frottent avec des parfums de luxe, mais ils ne se tourmentent guère du désastre d’Israël ! C’est pourquoi maintenant ils vont être déportés, ils seront les premiers des déportés ; et la bande des vautrés n’existera plus.

 

PSAUME 

Ps 145 (146), 6c.7, 8.9a, 9bc-10

R/ Chante, ô mon âme, la louange du Seigneur ! ou : Alléluia ! (Ps 145, 1b)

 

Le Seigneur garde à jamais sa fidélité,
il fait justice aux opprimés ;
aux affamés, il donne le pain ;
le Seigneur délie les enchaînés.

 

Le Seigneur ouvre les yeux des aveugles,
le Seigneur redresse les accablés,
le Seigneur aime les justes,
le Seigneur protège l’étranger.

 

Il soutient la veuve et l’orphelin,
il égare les pas du méchant.
D’âge en âge, le Seigneur régnera :
ton Dieu, ô Sion, pour toujours !

 

2ÈME LECTURE 

« Garde le commandement jusqu’à la Manifestation du Seigneur » (1 Tm 6, 11-16)


Lecture de la première lettre de saint Paul apôtre à Timothée

Toi, homme de Dieu, recherche la justice, la piété, la foi, la charité, la persévérance et la douceur. Mène le bon combat, celui de la foi, empare-toi de la vie éternelle ! C’est à elle que tu as été appelé, c’est pour elle que tu as prononcé ta belle profession de foi devant de nombreux témoins.

Et maintenant, en présence de Dieu qui donne vie à tous les êtres, et en présence du Christ Jésus qui a témoigné devant Ponce Pilate par une belle affirmation, voici ce que je t’ordonne : garde le commandement du Seigneur, en demeurant sans tache, irréprochable jusqu’à la Manifestation de notre Seigneur Jésus Christ. Celui qui le fera paraître aux temps fixés, c’est Dieu, Souverain unique et bienheureux, Roi des rois et Seigneur des seigneurs, lui seul possède l’immortalité, habite une lumière inaccessible ; aucun homme ne l’a jamais vu, et nul ne peut le voir. À lui, honneur et puissance éternelle. Amen.

 

ÉVANGILE 

« Tu as reçu le bonheur, et Lazare, le malheur. Maintenant, lui, il trouve ici la consolation, et toi, la souffrance » (Lc 16, 19-31)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. 
Jésus Christ s’est fait pauvre, lui qui était riche, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté. Alléluia. (cf. 2 Co 8, 9)

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

En ce temps-là, Jésus disait aux pharisiens : « Il y avait un homme riche, vêtu de pourpre et de lin fin, qui faisait chaque jour des festins somptueux. Devant son portail gisait un pauvre nommé Lazare, qui était couvert d’ulcères. Il aurait bien voulu se rassasier de ce qui tombait de la table du riche ; mais les chiens, eux, venaient lécher ses ulcères. Or le pauvre mourut, et les anges l’emportèrent auprès d’Abraham. Le riche mourut aussi, et on l’enterra. Au séjour des morts, il était en proie à la torture ; levant les yeux, il vit Abraham de loin et Lazare tout près de lui. Alors il cria : ‘Père Abraham, prends pitié de moi et envoie Lazare tremper le bout de son doigt dans l’eau pour me rafraîchir la langue, car je souffre terriblement dans cette fournaise. – Mon enfant, répondit Abraham, rappelle-toi : tu as reçu le bonheur pendant ta vie, et Lazare, le malheur pendant la sienne. Maintenant, lui, il trouve ici la consolation, et toi, la souffrance. Et en plus de tout cela, un grand abîme a été établi entre vous et nous, pour que ceux qui voudraient passer vers vous ne le puissent pas, et que, de là-bas non plus, on ne traverse pas vers nous.’ Le riche répliqua : ‘Eh bien ! père, je te prie d’envoyer Lazare dans la maison de mon père. En effet, j’ai cinq frères : qu’il leur porte son témoignage, de peur qu’eux aussi ne viennent dans ce lieu de torture !’ Abraham lui dit : ‘Ils ont Moïse et les Prophètes : qu’ils les écoutent ! – Non, père Abraham, dit-il, mais si quelqu’un de chez les morts vient les trouver, ils se convertiront.’ Abraham répondit : ‘S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus.’ »
Patrick BRAUD

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12 mai 2012

Parlez-moi d’amour, redites-moi des choses dures

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Parlez-moi d’amour, redites-moi des choses dures

Homélie du 6° dimanche de Pâques / Année B
13/05/2012

  • Mère Teresa racontait que les hindous caractérisaient ainsi les religions présentes à Calcutta : « le bouddhisme est la religion du détachement, l’islam est la religion de l’obéissance, le christianisme est la religion de l’amour ». Bien vu !

Les « gens du dehors » ont souvent de meilleurs yeux pour repérer qui est qui. On se souvient que ce sont des païens qui à Antioche ont donné aux disciples de Jésus le nom de chrétiens qui leur est resté dans l’histoire (Ac 11,19).

Le christianisme est réellement la religion de l’amour. À condition de s’entendre sur ce terme.

La tentation moderne et occidentale serait d’exalter le côté sentimental de la démarche religieuse : avoir de la compassion pour les pauvres, être ému par ceux qui souffrent, être capable d’élans du coeur pour ceux que personne n’aime. Les textes du jour devraient nous éviter une telle méprise. Quand Jésus parle d’amour, il parle de commandement. Or le sentiment ne vient pas sur commande. Il rajoute : « comme je vous ai aimé », ce qui évoque aussi bien les conflits avec les pharisiens que le pardon à ses bourreaux. Nul côté sentimental à cela.

  • Jésus va encore plus loin : « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis ». Certes, donner sa vie peut s’accompagner d’intenses sentiments, lorsque par exemple une mère se sacrifie pour son enfant. Mais le Christ lui est mort pour les coupables. Comme le constate Paul : « Christ est mort pour des impies ; à peine en effet voudrait-on mourir pour un homme juste ; pour un homme de bien, oui, peut-être osera-t-on mourir; mais la preuve que Dieu nous aime, c’est que Christ, alors que nous étions encore pécheurs, est mort pour nous. » (Rm 5,7-8)
  • Jean quant à lui est sans doute celui qui parle le plus d’amour dans ses écrits (27 usages du mot). Cet amour « vient de Dieu » et non pas de nos seuls élans. Il se traduit chez Dieu par une gratuité antérieure à toutes nos réponses, par une ténacité qui va jusqu’à faire de Jésus une « victimes offerte » pour nous sauver. C’est donc un amour en actes, qui va jusqu’à payer le prix du sang pour faire vivre ce qui pourtant tuent et rejettent.
  • Pierre, dans les Actes des Apôtres, reconnaît lui aussi l’amour de Dieu à ses actes : « Dieu ne fait pas de différence entre les hommes ». L’amour promeut une égalité absolue : pas de préférés, ou plutôt tous et chacun sont préférés.
  • Pendant trois siècles, les martyrs chrétiens ont pratiqué l’amour évangélique au Parlez-moi d'amour, redites-moi des choses dures dans Communauté spirituelle doc8martyrpoint d’aimer leurs ennemis, ceux-là mêmes qui les condamnaient, les jetaient en prison puis aux bêtes dans les arènes du cirque romain. Les premiers chrétiens seront confrontés à ces défis de l’amour au sens évangélique : comment aimer ceux qui ne sont pas aimables ? Ceux qui n’inspirent aucun sentiment de sympathie ni de compassion ? Les dockers de Corinthe, les métèques de Rome, partout les esclaves et souvent les prostituées et les collabos : un tel ramassis de sous-humanité faisait des Églises locales avec très peu de notables au début. Paul le constate : « Aussi bien, frères, considérez votre appel: il n’y a pas beaucoup de sages selon la chair, pas beaucoup de puissants, pas beaucoup de gens bien nés » (1Co 1,26)

C’est avec ces gens-là, qui ne se sont pas choisis, qui n’inspirent pas d’élan compassionnel, que l’amour fraternel demandé par Jésus a d’abord été vécu.

  • Ce défi reste le nôtre : nos assemblées sont-elles un lieu pour découvrir l’amour mutuel, tels que le Christ l’a commandé ? Si nous reproduisons entre nous les mêmes barrières sociales et les mêmes liens d’attachement que d’habitude, sommes-nous  fidèles au commandement du Christ ? Si un inconnu peut entrer et ressortir de nos assemblées sans que personne ne lui adresse une parole ou un regard, verra-t-il là  un témoignage d’amour fraternel ? Si nos assemblées sont monocolores, si elles choisissent leurs membres à la manière des clubs mondains pour être entre gens  semblables, seront-elles encore chrétiennes ?

Ce sont là des choses dures, contrairement aux choses tendres qu’aurait aimées entendre Lucienne Boyer dans les années 30 en demandant de lui parler d’amour…

  • « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimé » : c’est sûrement l’une des phrases les plus célèbres de l’humanité, et il faut du temps pour en deviner toute la profondeur. Beaucoup ne connaissent pas cette phrase, et pourtant ils en vivent. Car, comme le constate Jean : « tous ceux qui aiment connaissent Dieu », chrétiens ou non. Décidément, impossible d’enfermer l’Évangile dans une identité particulière !

 

1ère lecture : Les premiers païens baptisés (Ac 10, 25-26.34-35.44-48)

Lecture du livre des Actes des Apôtres

Quand Pierre arriva à Césarée chez Corneille, centurion de l’armée romaine, celui-ci vint à sa rencontre, et se jetant à ses pieds, il se prosterna. Mais Pierre le releva et lui dit : « Reste debout. Je ne suis qu’un homme, moi aussi. »
Puis il s’adressa à ceux qui étaient là : « En vérité, je le comprends : Dieu ne fait pas de différence entre les hommes ; mais, quelle que soit leur race, il accueille les hommes qui l’adorent et font ce qui est juste. »
Pierre parlait encore quand l’Esprit Saint s’empara de tous ceux qui écoutaient la Parole. Tous les croyants qui accompagnaient Pierre furent stupéfaits, eux qui étaient Juifs, de voir que même les païens avaient reçu à profusion le don de l’Esprit Saint. Car on les entendait dire des paroles mystérieuses et chanter la grandeur de Dieu.
Pierre dit alors : « Pourrait-on refuser l’eau du baptême à ces gens qui ont reçu l’Esprit Saint tout comme nous ? » Et il donna l’ordre de les baptiser au nom de Jésus Christ. Alors ils lui demandèrent de rester quelques jours avec eux.

 

Psaume : 97, 1, 2-3ab, 3cd-4a.6b

R/ Dieu révèle sa puissance à toutes les nations

 

Chantez au Seigneur un chant nouveau,
car il a fait des merveilles ;
par son bras très saint, par sa main puissante,
il s’est assuré la victoire.

Le Seigneur a fait connaître sa victoire
et révélé sa justice aux nations ;
il s’est rappelé sa fidélité, son amour,
en faveur de la maison d’Israël.

La terre tout entière a vu
la victoire de notre Dieu.
Acclamez le Seigneur, terre entière.
Acclamez votre roi, le Seigneur !

 

2ème lecture : « Dieu est amour » (1Jn 4, 7-10)

Lecture de la première lettre de saint Jean

Mes bien-aimés, aimons-nous les uns les autres, puisque l’amour vient de Dieu. Tous ceux qui aiment sont enfants de Dieu, et ils connaissent Dieu. Celui qui n’aime pas ne connaît pas Dieu, car Dieu est amour.

Voici comment Dieu a manifesté son amour parmi nous : Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde pour que nous vivions par lui. Voici à quoi se reconnaît l’amour : ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, c’est lui qui nous a aimés, et il a envoyé son Fils qui est la victime offerte pour nos péchés.

 

Evangile : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jn 15, 9-17)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Le Seigneur nous a laissé un commandement nouveau : « Aimez vous les uns les autres, comme je vous ai aimés. » Alléluia. (cf. Jn 13, 34)

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour.
Si vous êtes fidèles à mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi, j’ai gardé fidèlement les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour.
Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que vous soyez comblés de joie.
Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis.
Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande.
Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ignore ce que veut faire son maître ; maintenant, je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai appris de mon Père, je vous l’ai fait connaître.
Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis afin que vous partiez, que vous donniez du fruit, et que votre fruit demeure. Alors, tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous l’accordera.
Ce que je vous commande, c’est de vous aimer les uns les autres. »
Patrick BRAUD

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