L'homélie du dimanche (prochain)

5 mai 2016

Lapidation : le retour !

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 00 min

Lapidation : le retour !

 

Homélie du 7° dimanche de Pâques / Année C
08/05/2016

Cf. également :

Poupées russes et ruban de Möbius…

Sois un être de désir !

Lapider : oui, mais qui ?

 

Nous avons déjà croisé ce supplice particulièrement inhumain sur notre route avec le sauvetage de la femme adultère par Jésus (Jn 8). Le voilà qui revient, en force si l’on peut dire, car dès les débuts de l’Église le diacre Étienne y perd la vie. Et de quelle manière !

Suivons pas à pas la passion d’Étienne, pour y discerner comment nous sommes nous-mêmes appelés à donner notre vie, jusqu’au sang s’il le fallait un jour.

 

Témoigner des cieux ouverts

Des milliers de chrétiens sont encore aujourd’hui traînés devant des tribunaux à cause de leur foi. Leurs accusateurs leur reprochent de violer la loi islamique, ou de diffuser la Bible, ou de revendiquer une liberté de conscience intolérable pour le pouvoir en place. Devant la machine judiciaire qui broie et écrase ceux qu’on lui présente, il y a de quoi être terrorisé. Nombre d’adultes de par le monde entier savent qu’ils risquent gros à demander le baptême : perdre son métier, voir sa famille inquiétée, être intimidés, tabassés, et souvent emprisonnés, voire exécutés. Les chrétiens d’Orient en savent quelque chose, mais aussi ceux des pays communistes, islamistes…

Afficher l'image d'origineÉtienne visiblement est rempli d’une force intérieure, l’Esprit Saint en personne, qui vient lui donner le courage de faire face à ses accusateurs. « Je vois les cieux ouverts… » En disant cela, Étienne sait qu’il va déchaîner la violence contre lui, pour cause de blasphème. Au moment où on l’enferme dans cette accusation, lui témoigne que les cieux sont ouverts, qu’il n’y a plus de fossé entre Dieu et l’homme, depuis que Jésus est ressuscité, « debout à la droite de Dieu ».

Témoigner que tout reste ouvert alors que la haine et la violence semblent victorieuses !

Annoncer que Dieu est proche au moment où la fraternité s’éloigne.

Transmettre la possibilité du pardon alors que la blessure va devenir irrémédiable.

Laisser ouvert le chemin de la réconciliation juste quand le conflit est à son maximum…

Cette vision d’Étienne n’est pas héroïque ni surhumaine. Elle est le fruit de l’Esprit animant notre esprit. À la suite d’Étienne, les martyrs des trois premiers siècles continueront à témoigner des cieux ouverts sous la dent des fauves et les épées des gladiateurs romains. Les victimes du génocide du Rwanda s’accrocheront à cette vision des cieux ouverts pour reconstruire leur pays, comme Nelson Mandela s’y était ancré pour réconcilier les anciens ennemis à mort de l’apartheid.

Nous pouvons, nous devons témoigner que les cieux demeurent ouverts : dans nos tragédies professionnelles (faillites, licenciements…), familiales (divorce, brouille, éloignement…) ou même politiques (lutte idéologique, militante active…). Depuis que le rideau du Temple s’est déchiré à la mort du crucifié, rien ni personne ne pourra clôturer l’espace ainsi dégagé entre Dieu et l’homme, avec toutes les possibilités de miséricorde, de réconciliation, de retrouvailles improbables que cette ouverture implique.

 

Compter sur Dieu (plus que sur les hommes)

Afficher l'image d'originePendant que les pierres pleuvent sur lui, Étienne se recueille, et s’appuie sur la prière pour tenir bon jusqu’au bout : « Seigneur Jésus, reçoit mon esprit ». Le Christ le premier s’était recueilli autour de cette attitude intérieure : « Père, en tes mains je remets mon esprit ». Impossible de résister sans haine ni désespoir si on ne s’appuie pas sur ce dialogue intérieur. « Compter sur Dieu vaut mieux que compter sur les puissants », chantaient des psaumes depuis déjà bien longtemps.

Vient toujours le moment où la solitude envahit tout, où l’appui des hommes est inexistant ou impuissant, où seule demeure la confiance en Dieu, apparemment injustifiable. Tant que demeurent les calculs pour s’en sortir, les compromis pour dévier le coup, les appuis influents pour nous protéger, nous comptons davantage sur nous-mêmes ou sur nos alliés que sur Dieu. Vient toujours dans une vie le moment où cela n’est plus possible.

Abandonné des hommes, seul devant la mort qui approche, Étienne s’en remet au Christ, sans réserve, les mains vides.

 

Prier pour ses bourreaux

Afficher l'image d'origine« Seigneur, ne leur compte pas ce péché » : Étienne trouve la force de prier pour ses tortionnaires alors qu’il rend son dernier souffle. On lui a raconté que Jésus avait eu cette délicatesse du coeur et de l’âme quand ses bourreaux s’acharnaient sur lui : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ». Toujours cette distinction capitale entre le péché et le pécheur, entre l’acte et l’acteur. La vérité commande de dénoncer l’un et la miséricorde de sauver l’autre.

Prier pour ses bourreaux, ses ennemis, lors d’un divorce, d’un conflit professionnel, d’une lutte politique n’a rien à voir avec la faiblesse dénoncée par Nietzsche. Il ne s’agit pas de renoncer au combat, d’être complice du mal, de se laisser vaincre ou de s’évader dans du pseudo spirituel. Il s’agit bien d’aller jusqu’au bout dans la dénonciation du mal, tout en priant pour que chacun en soit libéré : et celui qui le commet et celui qui y est exposé. « Délivre-nous du mal » suppose de prier pour ses bourreaux tout en leur montrant le mal commis : « si j’ai mal parlé, montre-moi ce que j’ai dit de mal. Mais sinon, pourquoi me frappes-tu ? »

Dans son testament spirituel du 01/01/1994, le frère Christian de Chergé, moine de Tibhirine, adoptait par avance cette même attitude intérieure :

Ma vie n’a pas plus de prix qu’une autre. Elle n’en a pas moins non plus. En tout cas, elle n’a pas l’innocence de l’enfance. J’ai suffisamment vécu pour me savoir complice du mal qui semble, hélas, prévaloir dans le monde et même de celui-là qui me frapperait aveuglément. J’aimerais, le moment venu avoir ce laps de lucidité qui me permettrait de solliciter le pardon de Dieu et celui de mes frères en humanité, en même temps que de pardonner de tout cœur à qui m’aurait atteint. Je ne saurais souhaiter une telle mort. Il me paraît important de le professer. Je ne vois pas, en effet, comment je pourrais me réjouir que ce peuple que j’aime soit indistinctement accusé de mon meurtre. C’est trop cher payer ce qu’on appellera, peut-être, la « grâce du martyre » que de la devoir à un Algérien, quel qu’il soit, surtout s’il dit agir en fidélité à ce qu’il croit être l’Islam.

 

Prier pour ceux qui nous font souffrir n’est pas naturel. Si l’Esprit du Christ ne vient pas en personne murmurer cette prière en nous, comment pourrions-nous désirer ardemment le salut de ceux qui nous condamnent ? Le premier à le faire après Jésus fut le diacre Étienne, et non l’un des apôtres, comme pour ancrer la force du témoignage dans celle du service des pauvres (car c’était la mission des diacres).

 

Croire en la fécondité et d’une vie offerte

Pour Étienne, tout semble finir avec la lapidation. Il ne verra pas les fruits que cette offrande de lui-même va produire. Pourtant ces fruits sont déjà là en germe, puisque Luc prend bien soin de préciser dans le texte que le jeune homme Saül faisait office de vestiaire pour que ces Messieurs se défoulent en lapidant Étienne.

« Le sang des martyrs est semence de chrétiens » constatera plus tard Tertullien.

L’intention de Luc est claire : témoigner que les cieux sont ouverts - ici dans le sang, pour nous dans nos tribulations familiales, professionnelles, politiques etc. - est pour l’Église ce que les semailles sont pour la moisson. La fécondité d’un combat qui va jusqu’au bout est une promesse dont nous ne voyons que rarement la réalisation, mais qui cependant se réalise toujours au-delà de nos espérances. Le jeune Saül deviendra l’apôtre Paul, et avec lui l’Europe et l’Occident découvriront la formidable espérance apportée par un juif obscur d’une trentaine d’années dont le rêve s’était disloqué sur le bois d’une croix…

Saül gardant les vêtements de ceux qui lapident Étienne est la figure de la fécondité promise à nos épreuves, si nous pouvons-les vivre en communion avec le Christ.

Afficher l'image d'origine 

La lapidation d’Étienne nous parle de nos combats pour tenir bon sous l’avalanche des revers de fortune.

Prions l’Esprit qui l’a soutenu d’être maintenant notre force pour ne rien lâcher, sans haine.

 

 

1ère lecture : « Voici que je contemple le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu » (Ac 7, 55-60)
Lecture du livre des Actes des Apôtres

 En ces jours-là, Étienne était en face de ses accusateurs. Rempli de l’Esprit Saint, il fixait le ciel du regard : il vit la gloire de Dieu, et Jésus debout à la droite de Dieu. Il déclara : « Voici que je contemple les cieux ouverts et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu. » Alors ils poussèrent de grands cris et se bouchèrent les oreilles. Tous ensemble, ils se précipitèrent sur lui, l’entraînèrent hors de la ville et se mirent à le lapider. Les témoins avaient déposé leurs vêtements aux pieds d’un jeune homme appelé Saul. Étienne, pendant qu’on le lapidait, priait ainsi : « Seigneur Jésus, reçois mon esprit. » Puis, se mettant à genoux, il s’écria d’une voix forte : « Seigneur, ne leur compte pas ce péché. » Et, après cette parole, il s’endormit dans la mort.

Psaume : Ps 96 (97), 1-2b, 6.7c, 9
R/ Le Seigneur est roi, le Très-Haut sur toute la terre !
ou : Alléluia ! (Ps 96, 1a.9a)

Le Seigneur est roi ! Exulte la terre !
Joie pour les îles sans nombre !
justice et droit sont l’appui de son trône.

Les cieux ont proclamé sa justice,
et tous les peuples ont vu sa gloire.
À genoux devant lui, tous les dieux !

Tu es, Seigneur, le Très-Haut
sur toute la terre :
tu domines de haut tous les dieux.

2ème lecture : « Viens, Seigneur Jésus ! » (Ap 22, 12-14.16-17.20)
Lecture de l’Apocalypse de saint Jean

Moi, Jean, j’ai entendu une voix qui me disait : « Voici que je viens sans tarder, et j’apporte avec moi le salaire que je vais donner à chacun selon ce qu’il a fait. Moi, je suis l’alpha et l’oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin. Heureux ceux qui lavent leurs vêtements : ils auront droit d’accès à l’arbre de la vie et, par les portes, ils entreront dans la ville. Moi, Jésus, j’ai envoyé mon ange vous apporter ce témoignage au sujet des Églises. Moi, je suis le rejeton, le descendant de David, l’étoile resplendissante du matin. » L’Esprit et l’Épouse disent : « Viens ! » Celui qui entend, qu’il dise : « Viens ! » Celui qui a soif, qu’il vienne. Celui qui le désire, qu’il reçoive l’eau de la vie, gratuitement.
 Et celui qui donne ce témoignage déclare : « Oui, je viens sans tarder. » – Amen ! Viens, Seigneur Jésus !

Evangile : « Qu’ils deviennent parfaitement un » (Jn 17, 20-26)
Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Je ne vous laisserai pas orphelins, dit le Seigneur,
je reviens vers vous, et votre cœur se réjouira.
Alléluia. (cf. Jn 14, 18)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

En ce temps-là, les yeux levés au ciel, Jésus priait ainsi : « Père saint, je ne prie pas seulement pour ceux qui sont là, mais encore pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi. Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé. Et moi, je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes UN : moi en eux, et toi en moi. Qu’ils deviennent ainsi parfaitement un, afin que le monde sache que tu m’as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé. Père, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi, et qu’ils contemplent ma gloire, celle que tu m’as donnée parce que tu m’as aimé avant la fondation du monde. Père juste, le monde ne t’a pas connu, mais moi je t’ai connu, et ceux-ci ont reconnu que tu m’as envoyé. Je leur ai fait connaître ton nom, et je le ferai connaître, pour que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux, et que moi aussi, je sois en eux. »
Patrick BRAUD

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29 avril 2015

Que veut dire être émondé ?

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Que veut dire être émondé ?

 

cf. également

La parresia, ou l’audace de la foi

Homélie du 5° dimanche de Pâques / Année B
03/05/2015

 

Dans l’image de la vigne employée par Jésus, le mot émonder pose problème. Car il renvoie à l’action de tailler, de couper, de faire souffrir (même si c’est pour du mieux après). Ressurgit alors le spectre d’un Dieu prenant plaisir à nous mutiler, ou au moins à nous envoyer toutes sortes d’épreuves soi-disant pour notre bien. Avec l’inénarrable argument : « qui aime bien châtie bien » (He 12,6), utilisé tant de fois comme alibi pour le dolorisme chrétien. « Plus tu souffres, plus tu te rapproches de Dieu ». « Si Dieu t’éprouve ainsi, c’est qu’il doit aimer beaucoup ». Ce genre de phrases pieuses à l’emporte-pièce sont moins courantes qu’au siècle dernier, mais elles continuent à polluer l’inconscient collectif. C’est une tentative un peu naïve – mais tragique – de concilier l’amour de Dieu et le malheur innocent qui s’abat sur nous. Comme était magique autrefois une certaine conception de la Providence où Dieu était censé nous protégé des aléas de la vie moyennant un cierge, une médaille ou un pèlerinage.

Que veut dire alors : être émondé ?

 

La taille du martyre

Que veut dire être émondé ? dans Communauté spirituelle doc8martyrLes premiers chrétiens y ont vu assez naturellement la figure du martyre, qui a frappé l’Église naissante pendant ses trois premiers siècles.

Frappés par le glaive, mis en croix, livrés aux bêtes, au feu, nous demeurerons fidèles au Christ. Mais plus les tourments se multiplient, plus par le nom de Jésus-Christ se multiplient les croyants, plus leur fidélité et leur piété deviennent parfaites : comme une vigne, plus elle est taillée, plus elle multiplie les branches qui portent du fruit.
(saint Justin : « Dialogue avec Tryphon », CX).

L’image de la vigne taillée et coupée, qui pourtant porte toujours plus de fruits,  permet à ces premiers chrétiens de déchiffrer les persécutions dont ils sont les victimes comme des opérations-vérité permettant à l’Église de grandir tout autour du bassin méditerranéen. Devant le danger et la menace romaine ou juive, certains baptisés renient leur foi au Christ (les lapsi) : ce sont les sarments se détachant du cep. Les autres, au prix de leur vie, rendent un si beau témoignage de pardon et d’amour qu’il bouleverse le coeur de leurs bourreaux et suscite de nombreuses conversions dans tout l’empire. Ainsi la vigne-Église, au lieu d’être décapitée par la violence s’exerçant contre elle, croît et fructifie de plus belle.
« Le sang des martyrs est semence de chrétiens » constatait fort justement Tertullien à la fin du II° siècle.

Appliquez cela à ce que vivent les chrétiens aujourd’hui au Moyen-Orient, en Égypte ou en Éthiopie, au Yémen, au Kenya, au Nigéria et dans tant d’autres pays : la justice et les massacres commis contre ces croyants ne pourront empêcher à terme l’Évangile de porter des fruits dans ces pays.

 

La méprise de l’ascèse

Tentation de St AntoineDans les siècles suivants, pour retrouver la ferveur des martyrs, beaucoup de chrétiens sont partis au désert explorer le combat intérieur. Une autre façon de continuer la résistance spirituelle face à une religion d’État devenue très mondaine. À leur suite, d’innombrables auteurs ont cru qu’il fallait s’imposer à soi-même cette violence qu’on ne subissait plus des autres, puisque l’Église vivait enfin en paix. D’où l’idée qu’émonder la vigne pouvait être une invitation à l’ascèse.

Toute vigne qui n’est pas taillée devient sauvage. Le Verbe est un glaive qui retranche les branches luxuriantes : il force toutes les passions à ne pas convoiter et à porter du fruit
Saint Clément d’Alexandrie : le « Pédagogue », I 8

Tailler dans ses passions, purifier le terreau de la fois, lutter contre l’égoïsme et l’orgueil : le but de l’ascèse est en effet cohérent avec l’image de la vigne émondée. Il s’agit bien d’empêcher les feuilles et les longs bois d’étouffer les grappes à naître. C’est la manière qui pose question. En effet, dans la bouche de Jésus comme dans la réalité viticole, la vigne ne s’émonde pas elle-même. Elle est émondée par un autre.

Ce passif c’est toute la différence.

L’ascèse croit qu’on peut s’auto-purifier en quelque sorte à la force du poignet, à l’aide d’exercices spirituels de plus en plus tranchants. Cette doctrine de l’auto-rédemption resurgit d’ailleurs aujourd’hui dans les courants prônant le bien-être, l’harmonie, l’équilibre etc. grâce à des techniques de méditation, de relaxation, de respiration et bien d’autres ascèses modernes.

Or c’est le vigneron qui taille sa vigne.

Nul ne peut (ni ne doit) choisir la façon dont vont lui être enlevées les parures, la gloire, les artifices l’empêchant de porter davantage de fruits. C’est a posteriori, en relisant l’épreuve et sa traversée, qu’on y devine le travail de purification qui a pu s’y accomplir. Mais l’épreuve ne vient pas de soi, sinon ce n’est que de l’orgueil au carré, s’abritant derrière une fausse humilité. D’ailleurs il n’est pas sûr du tout qu’émondage rime avec épreuve : le cep est reconnaissant au sécateur du vigneron de l’alléger de ce qui l’alourdit, l’asphyxie et le stérilise.

La méprise de l’ascèse, c’est de choisir par soi-même ce qui doit être coupé, taillé, au lieu de l’accueillir en laissant Dieu le faire en nous.
Être émondé doit rester un passif, sinon l’orgueil est de retour !

 

Le dépouillement intérieur

Les mystiques ont contesté cette interprétation ascétique dangereuse de l’émondage comme auto-progression. Pour Maître Eckhart, Jean de la Croix ou Thérèse d’Avila, l’émondage divin ne correspond pas à l’ascèse, mais au lâcher-prise intérieur, à l’acceptation d’un certain dépouillement qui nous est imposé par la vie et l’intimité avec Dieu.

Il faut non seulement ôter les mauvais désirs, mais ôter le trop qui se trouve souvent dans les bons : le trop agir, l’excessive activité qui se détruit et se consume elle-même, qui épuise les forces de l’âme, qui la remplit d’elle-même et la rend superbe. Âme chrétienne, abandonne-toi aux mains, au couteau, à l’opération du céleste vigneron ; laisse-le trancher jusqu’au vif. Le temps de tailler est venu ; dans le printemps lorsque la vigne commence à pousser, on lui doit ôter jusqu’à la fleur, quand elle est excessive. Coupez, céleste ouvrier ; et toi, âme chrétienne, coupe aussi toi-même, car Dieu t’en donnera la force et, c’est par toi-même qu’il te veut tailler. Coupe non seulement les mauvaises volontés, mais le trop d’activité de la bonne qui se repaît d’elle-même (J.-B. Bossuet : « Méditations sur l’Evangile », la Cène, seconde partie, IV).

La vigne sera dépouillée progressivement de ses fruits (les fruits ne sont pas pour elle), de sa belle parure de feuille automnales (le paraître), de ses sarments (les traces de sa gloire) par l’émondage. 

Ce nettoyage de la vigne se pratique après les vendanges et généralement pendant le repos de la végétation, soit à la fin de l’hiver, quand les grandes gelées en principe ne sont plus à craindre et avant que la sève du printemps commence à faire éclore de nouveaux bourgeons. Sinon lorsque la sève commence à monter, après l’émondage le sarment va « pleurer », des gouttes vont tomber sur la terre. 

Si l’émondage de la vigne n’est pas incessant, il est tout de même régulier. Pour la vigne, c’est une fois par an, une fois qu’elle a porté du fruit et après un temps de repos. Pour nous, probablement après chaque belle production de fruits !

Il s’agit alors, à chaque étape de la vie, après chaque vendange, de constater ce qui doit partir, être séparé, enlevé, et de s’en réjouir pour préparer les vendanges suivantes. Quand des enfants quittent la maison familiale, quand ils se marient, quand ils vous font grands-parents, quand la retraite vient tout changer… : à chaque âge de la vie, juste après les fruits récoltés et engrangés, vient le travail pour consentir à perdre à nouveau afin de croître à nouveau. Ce mouvement est incessant, d’étape en étape, jusqu’à la vendange ultime qu’est la mort physique.

 

Se laisser émonder par la parole

Émonder en grec se dit « kathairos » et signifie : purifier, nettoyer, enlever les impuretés, enlever les pousses inutiles, purifier par le feu, libérer des désirs corrompus.
Pourquoi le Père émonde-t-il seulement les sarments qui portent du fruit ?
Afin qu’ils en portent davantage.
Sans émondage, l’année suivante, les sarments ne produisent que de petits raisins ne présentant guère d’intérêt pour la production du vin. L’émondage limite la croissance démesurée du bois, pour régulariser la production des raisins en qualité et en quantité. Dans le but d’obtenir des raisins plus gros qui contiennent plus de jus ou de vin.

Le même vigneron qui a émondé la vigne, est celui qui ensuite s’occupe de nous, prend soin de nous, nous protège, veille sur nous. Il met l’engrais au temps voulu, surveille, il soigne les maladies, traite les parasites afin que l’ensemble de ses soins aboutisse à une abondante et belle production de fruits.
L’émondage n’est ni continuel ni inconsidéré. Une fois la vigne émondée, le vigneron ne guette pas la moindre pousse de bourgeon pour la couper à nouveau. Une fois émondée, ce qui intéresse le vigneron, c’est la pousse, la croissance, la maturité, la production.

Il y a un temps où, par son feuillage, ses rameaux, le cep n’est plus très visible (risque d’orgueil) ; alors le dépouillement est de nouveau nécessaire, l’émondage aussi, afin que ce soit le cep (le Christ), et lui seul, source de vie, qui soit vu.
Le but de l’émondage, ce n’est donc pas de souffrir comme si c’était un but en soi ; c’est seulement un traitement nécessaire. Le but de l’émondage, c’est que nous soyons protégés… de l’orgueil, de la suffisance, de l’arrivisme etc., et qu’ensuite nous portions davantage de fruits.

0000000760L ascèse dans Communauté spirituelleUne fois émondée, le vigneron va tout faire pour que la vigne croisse, devienne belle : c’est Lui l’auteur de la vie, pas nous !

Le Christ fournit lui-même une interprétation de ce travail d’émondage de la vigne : « déjà vous voici purifiés grâce à la parole que je vous ai dite. »

Sa parole est plus tranchante que le glaive (He 4,12). Elle opère en nous un discernement, une crise qui révèle ce qui est fécond et ce qui stérilise.
En écoutant cette parole, Zachée ou Marie-Madeleine mettent de l’ordre dans leur vie, et quittent ce qui les empêche de suivre Jésus.
En écoutant cette parole, Paul acceptera de laisser tomber son fanatisme pharisien, Augustin son manichéisme intransigeant, François d’Assise sa richesse de parentale, Mère Teresa son école bien tranquille…

Se laisser émonder va de pair avec la rumination de la Bible, pour laisser la parole du Christ nous alléger de ce qui alourdit notre marche, tailler et couper en nous ce qui ne porte pas un fruit meilleur encore.

 

Mais que veut dire porter du fruit ?
Ceci est une autre histoire, qui demandera d’y revenir plus longuement…

 

 

 

1ère lecture : « Barnabé leur raconta comment, sur le chemin, Saul avait vu le Seigneur » (Ac 9, 26-31)

Lecture du livre des Actes des Apôtres

En ces jours-là, arrivé à Jérusalem, Saul cherchait à se joindre aux disciples, mais tous avaient peur de lui, car ils ne croyaient pas que lui aussi était un disciple. Alors Barnabé le prit avec lui et le présenta aux Apôtres ; il leur raconta comment, sur le chemin, Saul avait vu le Seigneur, qui lui avait parlé, et comment, à Damas, il s’était exprimé avec assurance au nom de Jésus. Dès lors, Saul allait et venait dans Jérusalem avec eux, s’exprimant avec assurance au nom du Seigneur. Il parlait aux Juifs de langue grecque, et discutait avec eux. Mais ceux-ci cherchaient à le supprimer. Mis au courant, les frères l’accompagnèrent jusqu’à Césarée et le firent partir pour Tarse.

 L’Église était en paix dans toute la Judée, la Galilée et la Samarie ; elle se construisait et elle marchait dans la crainte du Seigneur ; réconfortée par l’Esprit Saint, elle se multipliait.

Psaume : 21 (22), 26b-27, 28-29, 31-32

R/ Tu seras ma louange, Seigneur, dans la grande assemblée. ou : Alléluia !  (cf. 21, 26a)

Devant ceux qui te craignent, je tiendrai mes promesses.
Les pauvres mangeront : ils seront rassasiés ;
ils loueront le Seigneur, ceux qui le cherchent :
« À vous, toujours, la vie et la joie ! 

La terre entière se souviendra et reviendra vers le Seigneur,
chaque famille de nations se prosternera devant lui :
« Oui, au Seigneur la royauté,
le pouvoir sur les nations ! »

Et moi, je vis pour lui : ma descendance le servira ;
on annoncera le Seigneur aux générations à venir.
On proclamera sa justice au peuple qui va naître :
Voilà son œuvre !

2ème lecture : « Voici son commandement : mettre notre foi dans le nom de Jésus Christ et nous aimer les uns les autres »(1 Jn 3, 18-24)

Lecture de la première lettre de saint Jean

Petits enfants, n’aimons pas en paroles ni par des discours, mais par des actes et en vérité. Voilà comment nous reconnaîtrons que nous appartenons à la vérité, et devant Dieu nous apaiserons notre cœur ; car si notre cœur nous accuse, Dieu est plus grand que notre cœur, et il connaît toutes choses.
Bien-aimés, si notre cœur ne nous accuse pas, nous avons de l’assurance devant Dieu. Quoi que nous demandions à Dieu, nous le recevons de lui, parce que nous gardons ses commandements, et que nous faisons ce qui est agréable à ses yeux. Or, voici son commandement : mettre notre foi dans le nom de son Fils Jésus Christ, et nous aimer les uns les autres comme il nous l’a commandé. Celui qui garde ses commandements demeure en Dieu, et Dieu en lui ; et voilà comment nous reconnaissons qu’il demeure en nous, puisqu’il nous a donné part à son Esprit.

Evangile : « Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruit » (Jn 15, 1-8)
Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Demeurez en moi, comme moi en vous, dit le Seigneur ; celui qui demeure en moi porte beaucoup de fruit. Alléluia. (Jn 15, 4a.5b)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Moi, je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron. Tout sarment qui est en moi, mais qui ne porte pas de fruit, mon Père l’enlève ; tout sarment qui porte du fruit, il le purifie en le taillant, pour qu’il en porte davantage. Mais vous, déjà vous voici purifiés grâce à la parole que je vous ai dite. Demeurez en moi, comme moi en vous. De même que le sarment ne peut pas porter de fruit par lui-même s’il ne demeure pas sur la vigne, de même vous non plus, si vous ne demeurez pas en moi.
 Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est, comme le sarment, jeté dehors, et il se dessèche. Les sarments secs, on les ramasse, on les jette au feu, et ils brûlent. Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voulez, et cela se réalisera pour vous. Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous portiez beaucoup de fruit et que vous soyez pour moi des disciples. »
Patrick BRAUD

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22 avril 2015

Des brebis, un berger, un loup

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 1 h 01 min

Des brebis, un berger, un loup

Homélie du 4° dimanche de Pâques / Année B
26/04/2015

Des brebis, un berger, un loup.

Des brebis, un berger, un loup dans Communauté spirituelle 555426_bernard-bruno-un-berger-du-plateau-de-caussols-dans-les-alpes-maritimes-regarde-l-une-de-ses-brebis-tuee-par-un-loup-le-7-novembre-2012

Traduisez : des personnes à charge (famille, salariés, communauté…), un leader, un danger.

Notre évangile du bon Pasteur est revêtu d’une actualité étonnante lorsqu’on le transpose aux situations de leadership d’aujourd’hui.

Le pape François en est sans doute le plus bel exemple. Alors qu’un danger de mort menace et décime tant de chrétiens – au Moyen-Orient comme en Afrique ou ailleurs – il est l’un des rares à élever la voix pour défendre ces oubliés médiatiques. Il a osé prononcer à voix haute le mot de génocide  - le premier du XX° siècle – pour qualifier l’extermination du peuple arménien par l’empire ottoman, s’attitrant ainsi la colère de la Turquie. Il ne cesse de dénoncer les persécutions des martyrs chrétiens d’aujourd’hui.

La préoccupation du pape pour le sort des chrétiens d’Orient s’est exprimée tout au long de cette semaine de Noël. Lors de la bénédiction urbi et orbi qu’il a prononcée à midi, jeudi 25 décembre 2014, place Saint-Pierre à Rome, à l’occasion de la fête de la nativité, François a dénoncé les « persécutions brutales » dont sont victimes les chrétiens d’Irak et de Syrie, avec ceux « qui appartiennent à d’autres groupes ethniques et religieux ».

Il a évoqué « les nombreuses personnes déplacées, dispersées et réfugiées […] de la région et du monde entier » et a demandé qu’elles « puissent recevoir les aides humanitaires nécessaires pour survivre à la rigueur de l’hiver et revenir dans leur pays ».

Lundi, le pape argentin avait adressé une lettre aux chrétiens du Moyen-Orient pour les « encourager » et leur dire « combien [leur] présence et [leur] mission sont précieuses en cette terre » où « est né et où s’est répandu le christianisme ». Comme à son habitude, il n’y citait pas nommément l’État islamique mais il y dénonçait une « organisation terroriste » qui « commet toutes sortes d’abus et de pratiques indignes de l’homme, en frappant de manière particulière certains d’entre vous qui ont été chassés de façon brutale de leurs propres terres, où les chrétiens sont présents depuis les temps apostoliques ».

Après l’horreur du massacre de Garissa au Kenya en Avril 2015, la dénonciation de la violence djihadiste a pris le pas sur les thèmes de paix et de justice d’ordinaire évoqués lors des célébrations de Pâques. Le pape François a dénoncé samedi 4 avril au soir, lors de la longue Veillée pascale, qui célèbre, selon la croyance chrétienne, la résurrection de Jésus, « le silence complice » et « l’indifférence » devant la « furie djihadiste » qui frappe les chrétiens.

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Il a fermement condamné la « brutalité insensée » du massacre des Shebab contre les étudiants de Garissa qui a fait au moins 148 morts. « Tous les responsables doivent redoubler leurs efforts afin de mettre un terme à une telle violence », a demandé dès vendredi le chef de l’église catholique. Équipés d’explosifs et d’armes à feu, les assaillants se sont lancés jeudi à l’aube à l’assaut du campus universitaire situé à près de 200 kilomètres de la frontière somalienne, tuant d’abord sans discernement avant d’épargner les étudiants musulmans et de prendre de nombreux chrétiens en otages, en fonction de leurs vêtements.

Les chrétiens, « victimes désignées »

Au Vatican, on s’irrite du fait que la multiplication des persécutions de chrétiens – par des individus ou des groupes islamistes – de l’Irak au Kenya en passant par la Libye, le Pakistan ou le Nigeria, ne soit pas plus dénoncée, y compris par les autorités occidentales et musulmanes. « Aujourd’hui nous voyons nos frères persécutés, décapités et crucifiés pour leur foi en Toi, sous nos yeux ou souvent avec notre silence complice », a accusé le pape François d’une voix sombre à la fin du Chemin de Croix vendredi soir au Colisée, s’adressant au Christ.

Source : http://www.lemonde.fr/

 

Loup, y es-tu ?

2015-04-02-affiche-les-pretres-en-concert-pour-les-chretiens-d-orient FrançoisLe loup actuel, c’est bien la folie djihadiste d’un islam ne supportant pas la différence, et notamment la différence chrétienne. Les médias occidentaux, les hommes politiques occidentaux, n’osent pas mettre le mot chrétiens sur les victimes de ces persécutions. En réveillant les consciences, le pape François défend les brebis de son troupeau (et des autres troupeaux) et oblige Hollande comme Obama à nommer le drame : oui, ces hommes et ces femmes sont kidnappés, déportés, torturés, décapités, forcés à s’exiler parce qu’ils sont chrétiens, et qu’aux yeux de ces musulmans c’est insupportable.

Voilà le rôle du berger : élever la voix pour faire fuir le loup, avertir pour organiser la défense des plus faibles, ne pas avoir peur de s’exposer soi-même pour protéger les petits.

La lamentable polémique au sujet de l’affiche du concert du groupe « Les Prêtres » interdite par la RATP sous prétexte de la mention « pour les chrétiens d’Orient » montre qu’en France la défense  des chrétiens est une cause qui suscite bien des polémiques, bien des allergies atterrantes…

 

Entreprise et famille

Il n’y a pas que dans le domaine religieux où cette parabole du bon berger est éclairante. En entreprise également, le manager se voit confier une équipe de collaborateurs qu’il doit défendre bec et ongles contre les loups internes ou externes.

En interne, le loup peut revêtir la figure de celui qui est toujours hors jeu, dénigrant toute forme d’action collective et cherchant même à la faire échouer, n’adhérant pas aux valeurs communes. Un leader responsable sait que la défense des salariés intègres passe par un certain courage managérial envers les loups destructeurs et toxiques. Le bon berger d’une équipe maniera à la fois la  bienveillance envers les personnes et l’intransigeance sur les valeurs. Sinon l‘injustice qui pèsera sur les brebis intègres compromettra toute réussite future.

Le loup en entreprise peut encore prendre la figure de patrons malhonnêtes, voire manipulateurs. Et là, le management lui-même doit faire le ménage en son sein : écoute des salariés pour détecter les tyrans, mise en place d’un numéro vert, d’aide extérieure etc. Les organisations syndicales doivent monter au créneau pour défendre les sans-voix qui risquent d’être massacrés sans que personne n’ose s’élever contre (harcèlement, exploitation des sans-papiers, marchands de sommeil, embauches ou pratiques illégales…). D’ailleurs, lorsque les syndicats agissent ainsi, ils sont suivis, reconnus, à la différence des mercenaires (les jaunes disait-on autrefois) qui gardent le silence et n’osent rien faire.

 leader 

En famille, la plupart des parents adoptent d’instinct cette posture du bon berger : protéger leurs proches des dangers de la vie, les mettre à l’abri d’accidents financiers, être à leurs côtés en cas de coup dur. Que dirait-on d’un père ou d’une mère qui délaisserait son enfant à l’approche d’un divorce, d’une maladie grave ou d’une perte d’emploi ?

 

Risquer sa vie

Ce faisant, chacun de ces bergers s’expose et risque sa vie, comme le suggère l’évangile en identifiant le bon Pasteur avec le Christ qui donne sa vie pour ceux qu’il aime.

Le pape François sait que bien des menaces entourent ses prises de positions courageuses pour défendre ses ouailles (= brebis !) : la mafia pourrait vouloir lui faire payer sa guerre ouverte contre la corruption en Italie ; les fanatiques musulmans seront tentés par un coup d’éclat contre lui etc.

Le leader attentif à la défense de son équipe de salariés sait qu’il prendra des coups, de sa hiérarchie ou de collègues malveillants ou de salariés contrariés dans leur travail de sape.

Même les parents savent que défendre leurs proches c’est s’exposer à la rigueur bancaire ou judiciaire ou sociale…

Ne réduisons donc pas l’évangile du bon berger à un discours sur les pasteurs qu’il nous faudrait.

C’est un manifeste pour un leadership au service des plus petits.

C’est un engagement à défendre les plus faibles.

C’est une conception de l’autorité comme un devoir envers ceux qui ont besoin de sécurité.

C’est une conversion de l’exercice du pouvoir pour qu’il devienne une libération des sans-grade.

 

Et les mercenaires ?

Que faire des mercenaires dont parle l’évangile ? Doit-on faire la chasse aux sorcières pour éliminer tous ces bergers à gages qui s’enfuient à la vue du loup ? Écoutez l’habileté avec laquelle Saint Augustin analyse l’utilité de ces faux bergers en finale :

Et que dirons-nous du mercenaire, du berger à gages ?

Le Christ ne les mentionne pas parmi les bons. Le bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis. Le berger à gages qui n’est pas le pasteur et à qui n’appartiennent pas les brebis, voit-il venir le loup, il laisse là les brebis, il se sauve et le loup les emporte et les disperse. Le berger à gages ne joue pas le rôle d’un homme de bien. Pourtant, il est utile à quelque chose ; on ne le nommerait pas berger à gages, s’il ne recevait un salaire de son employeur. Quel est donc ce berger à gages, à la fois coupable et nécessaire ? Il y a dans l’Église des gens bien placés, dont l’Apôtre Paul déclare : « Tous recherchent leurs propres intérêts, non ceux de Jésus-Christ » (Ph 2,21). Qu’est-ce que cela veut dire ? Leur amour pour le Christ n’est pas désintéressé ; ce n’est pas pour Dieu qu’ils cherchent Dieu : ils poursuivent des avantages temporels, ils désirent vivement gagner de l’argent, acquérir des honneurs. Quand c’est ce qu’on aime dans les premières places et que c’est là la raison de servir Dieu, quel qu’on soit, on est un berger à gages ; on ne doit pas se mettre au nombre des fils. De ces bergers à gages, le Christ déclare : « En vérité, je vous le dis, ils ont reçu leur récompense » (Mt 5,5). Apprenez maintenant pourquoi les bergers à gages sont nécessaires. Il y a dans l’Église beaucoup de gens qui recherchent des avantages temporels. Pourtant, ils prêchent le Christ ; par eux la voix du Christ se fait entendre: les brebis les suivent. Ce n’est pas le berger à gages qu’elles suivent, mais la voix du pasteur à travers la sienne. Écoutez le Seigneur lui-même définir les bergers à gages : « Les Scribes et les Pharisiens occupent la chaire de Moïse : faites donc et observez tout ce qu’ils pourront vous dire ; mais ne vous réglez pas sur leurs actes » (Mt 23,2). Ce qui revient à dire : Écoutez la voix du pasteur qui se fait entendre par les bergers à gages. Ils sont assis sur la chaire de Moïse et enseignent la Loi de Dieu, c’est donc par eux que Dieu vous instruit. Mais s’ils voulaient vous enseigner leurs propres pensées, ne les écoutez pas, ne faites pas ce qu’ils disent. Évidemment, de tels maîtres cherchent leurs intérêts et non ceux de Jésus-Christ; pourtant, aucun berger à gages n’a osé dire au peuple du Christ : Cherche mes intérêts et non ceux de Jésus-Christ.

Saint Augustin : « Tractatus in Johannis evangelium », XLVI, 5-8

 

Des brebis, un berger, un loup : peut-être sommes nous tour à tour l’un ou l’autre ?

Qui avons-nous en charge de défendre et de protéger ?

Contre quel loup nous faut-il trouver le courage de nous dresser pour le bien de ceux qui nous sont confiés ?

 

 

1ère lecture : « En nul autre que lui, il n’y a de salut » (Ac 4, 8-12)

Lecture du livre des Actes des Apôtres

En ces jours-là, Pierre, rempli de l’Esprit Saint, déclara : « Chefs du peuple et anciens, nous sommes interrogés aujourd’hui pour avoir fait du bien à un infirme, et l’on nous demande comment cet homme a été sauvé. Sachez-le donc, vous tous, ainsi que tout le peuple d’Israël : c’est par le nom de Jésus le Nazaréen, lui que vous avez crucifié mais que Dieu a ressuscité d’entre les morts, c’est par lui que cet homme se trouve là, devant vous, bien portant. Ce Jésus est la pierre méprisée de vous, les bâtisseurs, mais devenue la pierre d’angle. En nul autre que lui, il n’y a de salut, car, sous le ciel, aucun autre nom n’est donné aux hommes, qui puisse nous sauver. 

Psaume : 117 (118), 1.8-9, 21-23, 26.28-29

R/ La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle. ou : Alléluia ! (117, 22)

Rendez grâce au Seigneur : Il est bon !
Éternel est son amour !
Mieux vaut s’appuyer sur le Seigneur
que de compter sur les hommes ;
mieux vaut s’appuyer sur le Seigneur
que de compter sur les puissants !

Je te rends grâce car tu m’as exaucé :
tu es pour moi le salut.
La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs
est devenue la pierre d’angle :
c’est là l’œuvre du Seigneur,
la merveille devant nos yeux.

Béni soit au nom du Seigneur celui qui vient !
De la maison du Seigneur, nous vous bénissons !
Tu es mon Dieu, je te rends grâce,
mon Dieu, je t’exalte !
Rendez grâce au Seigneur : Il est bon !
Éternel est son amour !

2ème lecture : « Nous verrons Dieu tel qu’il est » (1 Jn 3, 1-2)
Lecture de la première lettre de saint Jean

Bien-aimés, voyez quel grand amour nous a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes. Voici pourquoi le monde ne nous connaît pas : c’est qu’il n’a pas connu Dieu. Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n’a pas encore été manifesté. Nous le savons : quand cela sera manifesté, nous lui serons semblables car nous le verrons tel qu’il est.

Evangile : « Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis » (Jn 10, 11-18)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Je suis le bon pasteur, dit le Seigneur ; je connais mes brebis et mes brebis me connaissent. Alléluia. (Jn 10, 14)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

En ce temps-là, Jésus déclara : « Moi, je suis le bon pasteur, le vrai berger, qui donne sa vie pour ses brebis. Le berger mercenaire n’est pas le pasteur, les brebis ne sont pas à lui : s’il voit venir le loup, il abandonne les brebis et s’enfuit ; le loup s’en empare et les disperse. Ce berger n’est qu’un mercenaire, et les brebis ne comptent pas vraiment pour lui. Moi, je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît, et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis. J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur. Voici pourquoi le Père m’aime : parce que je donne ma vie, pour la recevoir de nouveau. Nul ne peut me l’enlever : je la donne de moi-même. J’ai le pouvoir de la donner, j’ai aussi le pouvoir de la recevoir de nouveau : voilà le commandement que j’ai reçu de mon Père. »
Patrick BRAUD

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13 novembre 2014

Entre dans la joie de ton maître

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Entre dans la joie de ton maître


Homélie du 33° Dimanche du temps ordinaire / Année A

16/11/14

 

Entre dans la joie de ton maître dans Communauté spirituelle« Je dormais et je rêvais que la vie n’était que joie.
Je m’éveillais et je vis que la vie n’est que service.
Je servis et je compris que le service est joie. »

Cette belle évocation poétique de Rabindranàth Tagore sur le lien entre la joie et le service est très célèbre. Elle a le mérite d’honorer la quête de la joie comme le rêve de toute une vie, et de ramener à la réalité de l’humble service quotidien.

La parabole des talents fait elle aussi le lien entre le service et la joie. Les serviteurs qui auront fait fructifier leur capital découvriront eux aussi que la joie est liée à ce service.

La parabole est juste un peu plus discrète – ou réaliste c’est selon – sur le moment où cette jonction joie/service sera manifeste. Ce n’est qu’à la fin – c’est-à-dire au commencement d’un monde nouveau inauguré par la deuxième venue du Christ – que la joie sera évidente. D’ici là, on ne sait pas. Les serviteurs s’activent, font leur devoir, et on ne sait pas trop ce qu’ils ressentent.

Par contre on sait que celui qui enfouit son talent vit dans la peur, et donc sans joie.

 

Servir procure-t-il la joie ?

La vision optimiste de Tagore peut se révéler fragile lorsque le serviteur d’une juste cause est persécuté, emprisonné, torturé et finalement éliminé par ceux qu’il dérange. Promettre des lendemains qui chantent et une joie facile pour inviter les hommes à devenir serviteurs peut se révéler très décevant, et frustrant. Car le service, s’il est authentique, rencontrera tôt ou tard la question des sacrifices à faire pour y être fidèle, l’énigme du mal qui se déchaîne contre ceux qui font le bien. Les vrais serviteurs rencontrent inévitablement la souffrance sur leur route, bien loin d’une joie immédiate et facile. La figure du serviteur heureux a quelque chose d’illusoire si elle ne s’affronte pas au drame du mal qui veut la détruire.

Le marathonien épuisé meurt en remplissant fidèlement son devoir de messager. Spartacus est pourchassé et crucifié pour avoir voulu servir la cause des esclaves de Rome. Jérémie vit un enfer à cause de sa qualité de prophète, serviteur de la parole de Dieu. Israël est déporté plusieurs fois dans son histoire, en lien étroit avec sa particularité de service du Nom unique. Mandela a moisi pendant près de 30 ans dans les geôles de l’apartheid. Et Jésus a incarné au plus haut point la figure du serviteur souffrant annoncé par Isaïe.

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La joie et le service ne font pas toujours bon ménage au même instant…

 

La réponse franciscaine

François d’Assise a peut-être résolu cette aporie. Avec ce qu’il appelle la « joie parfaite ». La joie parfaite franciscaine, c’est celle du serviteur fidèle, pourtant battu, méprisé et rejeté par les siens. Car il est ainsi configuré au Christ, serviteur par excellence qui est désintéressé de sa joie même.

41RTW739SEL._SY300_ joie« Quand nous arriverons à Sainte-Marie-des-Anges, ainsi trempés par la pluie et glacés par le froid, souillés de boue et tourmentés par la faim, et que nous frapperons à la porte du couvent, et que le portier viendra en colère et dira : « Qui êtes-vous ? » et que nous lui répondrons : « Nous sommes deux de vos frères », et qu’il dira : « Vous ne dites pas vrai, vous êtes même deux ribauds qui allez trompant le monde et volant les aumônes des pauvres; allez-vous en » ; et quand il ne nous ouvrira pas et qu’il nous fera rester dehors dans la neige et la pluie, avec le froid et la faim, jusqu’à la nuit, alors si nous supportons avec patience, sans trouble et sans murmurer contre lui, tant d’injures et tant de cruauté et tant de rebuffades, et si nous pensons avec humilité et charité que ce portier nous connaît véritablement, et que Dieu le fait parler contre nous, ô frère Léon, écris que là est la joie parfaite.

Et si nous persistons à frapper, et qu’il sorte en colère, et qu’il nous chasse comme des vauriens importuns, avec force vilenies et soufflets en disant : « Allez-vous-en d’ici misérables petits voleurs, allez à l’hôpital, car ici vous ne mangerez ni ne logerez », si nous supportons tout cela avec patience, avec allégresse, dans un bon esprit de charité, ô frère Léon, écris que là est la joie parfaite.

Et si nous, contraints pourtant par la faim, et par le froid, et par la nuit, nous frappons encore et appelons et le supplions pour l’amour de Dieu, avec de grands gémissements, de nous ouvrir et de nous faire cependant entrer, et qu’il dise, plus irrité encore : « ceux-ci sont des vauriens importuns, et je vais les payer comme ils le méritent », et s’il sort avec un bâton noueux, et qu’il nous saisisse par le capuchon, et nous jette par terre, et nous roule dans la neige, et nous frappe de tous les nœuds de ce bâton, si tout cela nous le supportons patiemment et avec allégresse, en pensant aux souffrances du Christ béni, que nous devons supporter pour son amour, ô frère Léon, écris qu’en cela est la joie parfaite.

 

Que répondrez-vous à Bernard Pivot ?

Mais la pointe de la parabole des talents ne porte pas sur le serviteur heureux ou souffrant, bien plutôt sur la promesse faite à celui qui tiendra bon jusqu’au bout : « entre dans la joie de ton maître ».

Il y avait une question rituelle de Bernard Pivot à la fin de son émission télévisée Bouillon de culture avec des auteurs célèbres : « Si Dieu existe, qu’aimeriez-vous, après votre mort, l’entendre vous dire ? » On se souvient notamment de la réponse de François Mitterrand en 1995 : « Enfin, tu sais….». Et il complétait : «J’espère qu’il ajoutera : Sois le bienvenu ».

1995-229-221 martyr

Notre évangile répond quant à lui : « entre dans la joie de ton maître ».

À travers cette parabole le Christ fait donc une promesse : le serviteur qui développe ses talents pour les autres partage la joie divine elle-même.

La réponse des martyrs chrétiens

Les martyrs chrétiens (rien à voir avec les soi-disant martyrs djihadistes qui sont en fait des kamikazes et non des martyrs) s’appuient sur cette promesse pour aller vers les fauves de l’arène en chantant. Ils anticipent en quelque sorte la joie promise pour qu’elle reflue sur la souffrance à traverser. Voilà une autre réponse à l’énigme du mal que la joie parfaite de François d’Assise : la joie anticipée des martyrs.

 paraboleLa bienheureuse Blandine, la dernière de tous, comme une noble mère qui, après avoir encouragé ses enfants, les a envoyés en avant victorieux vers le Roi, subissait à son tour la rigueur de tous les combats soutenus par ses enfants. Maintenant elle se hâtait de les rejoindre, heureuse et rayonnante de joie à cause de ce départ, comme si elle était conviée â un repas de noces et non pas livrée aux bêtes. Après les fouets, après les bêtes, après le gril, on finit par la jeter dans un filet et l’exposer ainsi à un taureau. Bien des fois projetée en l’air par cet animal, elle ne s’apercevait même plus de ce qui lui arrivait, absorbée qu’elle était dans l’espérance et l’attente de sa foi, et dans son entretien avec le Christ. On l’égorgea, elle aussi, et les païens eux-mêmes reconnaissaient que jamais chez eux une femme n’avait supporté autant de pareils tourments.

Lettre des chrétiens de Vienne et de Lyon à leurs frères d’Asie et de Phrygie (177)

 

Et cela est possible pour chacun de nous. Puisque c’est l’après qui fonde le présent et non l’inverse, appuyons-nous sur la joie promise pour la laisser dès maintenant transformer ce que nous avons à traverser.

Il ‘suffit’ de vivre l’instant comme étant celui de la venue du Christ pour s’entendre dire : « entre dans la joie de ton maître » (Mt 25, 14-30). Alors on comprend que les pires persécutions, les prisons et les humiliations ne peuvent finalement pas empêcher les serviteurs fidèles d’entrer dès maintenant dans la joie promise.

La liturgie est le lieu par excellence où nous pouvons ainsi nous recevoir de l’avenir. Dans l’eucharistie, nous « faisons le plein » en quelque sorte de cette joie promise pour qu’elle puisse refluer sur toute la semaine à venir. Alors la conviction de saint Paul peut nous habiter, quoi qu’il arrive : « rien ne pourra nos séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ » (Rm 8).

« Entre dans la joie de ton maître » : cette promesse ne se réalisera en plénitude que lors du retour du Christ en gloire.
Mais d’ici là, nous pouvons l’anticiper, la laisser irradier à travers nous et la laisser transformer notre présent à l’image de ce qu’elle sera enfin en Christ.

Et la voie la plus sûre pour cela est bien celle de la parabole : servir, inlassablement, en développant nos talents reçus.

 

 

1ère lecture : La femme vaillante fait fructifier ses talents (Pr 31, 10-13.19-20.30-31)

Lecture du livre des Proverbes

La femme vaillante, qui donc peut la trouver ? Elle est infiniment plus précieuse que les perles. Son mari peut avoir confiance en elle : au lieu de lui coûter, elle l’enrichira. Tous les jours de sa vie, elle lui épargne le malheur et lui donne le bonheur. Elle a fait provision de laine et de lin, et ses mains travaillent avec entrain. Sa main saisit la quenouille, ses doigts dirigent le fuseau. Ses doigts s’ouvrent en faveur du pauvre, elle tend la main au malheureux.

Décevante est la grâce, et vaine la beauté ; la femme qui craint le Seigneur est seule digne de louange. Reconnaissez les fruits de son travail : sur la place publique, on fera l’éloge de son activité.

Psaume : 127, 1-2, 3, 4.5c.6a

R/ Heureux le serviteur fidèle : Dieu lui confie sa maison !

Heureux qui craint le Seigneur
et marche selon ses voies !
Tu te nourriras du travail de tes mains :
Heureux es-tu ! À toi, le bonheur !

Ta femme sera dans ta maison
comme une vigne généreuse,
et tes fils, autour de la table,
comme des plants d’olivier.

Voilà comment sera béni
l’homme qui craint le Seigneur.
Que le Seigneur te bénisse tous les jours de ta vie,
et tu verras les fils de tes fils

2ème lecture : Soyons vigilants pour attendre la venue du Seigneur (1Th 5, 1-6)

Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens

Frères,

au sujet de la venue du Seigneur, il n’est pas nécessaire qu’on vous parle de délais ou de dates. Vous savez très bien que le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit. Quand les gens diront : « Quelle paix ! quelle tranquillité ! », c’est alors que, tout à coup, la catastrophe s’abattra sur eux, comme les douleurs sur la femme enceinte : ils ne pourront pas y échapper. Mais vous, frères, comme vous n’êtes pas dans les ténèbres, ce jour ne vous surprendra pas comme un voleur. En effet, vous êtes tous des fils de la lumière, des fils du jour ; nous n’appartenons pas à la nuit et aux ténèbres. Alors, ne restons pas endormis comme les autres, mais soyons vigilants et restons sobres.

Evangile : La venue du Fils de l’homme. Faire fructifier les dons du Seigneur (brève : 14-15.19-21) (Mt 25, 14-30)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Voici qu’il vient sans tarder, le Seigneur : il apporte avec lui le salaire, pour donner à chacun selon ce qu’il aura fait. Alléluia. (cf. Ap 22, 12)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Jésus parlait à ses disciples de sa venue ; il disait cette parabole : « Un homme, qui partait en voyage, appela ses serviteurs et leur confia ses biens. À l’un il donna une somme de cinq talents, à un autre deux talents, au troisième un seul, à chacun selon ses capacités. Puis il partit.

Aussitôt, celui qui avait reçu cinq talents s’occupa de les faire valoir et en gagna cinq autres. De même, celui qui avait reçu deux talents en gagna deux autres. Mais celui qui n’en avait reçu qu’un creusa la terre et enfouit l’argent de son maître.

Longtemps après, leur maître revient et il leur demande des comptes. Celui qui avait reçu les cinq talents s’avança en apportant cinq autres talents et dit : ‘Seigneur, tu m’as confié cinq talents ; voilà, j’en ai gagné cinq autres. — Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton maître.’

Celui qui avait reçu deux talents s’avança ensuite et dit : ‘Seigneur, tu m’as confié deux talents ; voilà, j’en ai gagné deux autres. — Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton maître.’

Celui qui avait reçu un seul talent s’avança ensuite et dit : ‘Seigneur, je savais que tu es un homme dur : tu moissonnes là où tu n’as pas semé, tu ramasses là où tu n’as pas répandu le grain. J’ai eu peur, et je suis allé enfouir ton talent dans la terre. Le voici. Tu as ce qui t’appartient.’

Son maître lui répliqua : ‘Serviteur mauvais et paresseux, tu savais que je moissonne là où je n’ai pas semé, que je ramasse le grain là où je ne l’ai pas répandu. Alors, il fallait placer mon argent à la banque ; et, à mon retour, je l’aurais retrouvé avec les intérêts. Enlevez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui en a dix. Car celui qui a recevra encore, et il sera dans l’abondance. Mais celui qui n’a rien se fera enlever même ce qu’il a. Quant à ce serviteur bon à rien, jetez-le dehors dans les ténèbres ; là il y aura des pleurs et des grincements de dents !’ »
Patrick BRAUD

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