L'homélie du dimanche (prochain)

10 avril 2020

Vendredi saint : les soldats, libres d’obéir

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Vendredi saint : les soldats, libres d’obéir

Homélie du Vendredi saint / Année A
09/04/2020

Cf. également :

Vendredi Saint : la Passion musicale
Comme un agneau conduit à l’abattoir
Vendredi Saint : paroles de crucifié
Vendredi Saint : La vilaine mort du Christ
Vendredi Saint : les morts oubliés
Vendredi Saint : la déréliction de Marie
Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?
La Passion du Christ selon Mel Gibson

Johann Chapoutot, Libres d’obéir. Le management du nazisme à aujourd’hui. HöhnAvez-vous lu le dernier livre de l’historien Johann Chapoutot (spécialiste du nazisme) ? Son titre est un oxymore (association de deux contraires) provocateur :« Libres d’obéir » ; et son sous-titre l’est encore davantage : « Le management, du nazisme à aujourd’hui ». Chapoutot montre comment les nazis ont utilisé le management de leur époque pour enthousiasmer le peuple allemand à leur suite et organiser les militaires pour une efficacité maximum en temps de guerre.

Un des ressorts de l’implication qu’ils arrivaient à susciter chez les sous-gradés étaient ce que Peter Drucker a appelé dans les années 50 le management par objectifs. Hitler disait à ses généraux qui le répétaient à leurs subordonnés : ‘c’est moi qui fixe les objectifs. Vous n’avez pas à dire votre mot là-dessus. Par contre, je vous donne carte blanche pour atteindre vos objectifs, par quelque moyen que vous choisirez. Peu importe que l’objectif soit la conquête de l’Ukraine, l’extermination des juifs, l’administration des territoires conquis ou la maîtrise spatiale, à vous d’imaginer tous les moyens possibles pour atteindre cet objectif. Je vous donne un budget, des équipes, et c’est à vous de jouer. Faites comme vous pouvez avec ce que vous avez : le seul impératif est de réussir sans solliciter inutilement la hiérarchie, qui ne s’intéresse nullement à vos problèmes’.  

Cette part d’autonomie concédée aux sous-gradés les galvanisait. Sans s’apercevoir qu’on les rendait ainsi responsables des succès comme des échecs, surtout lorsque les objectifs fixés devinrent follement inatteignables. Le régime accordait d’incroyables libéralités à ceux qui jouaient le jeu, et ils furent nombreux jusqu’à la fin. Ces libéralités se traduisaient par des loisirs, promus par la KdF (Kraft durch Freude = la force par la joie), l’organisme d’État chargé de proposer des loisirs aux Allemands (l’ancêtre des Chief happyness officers…pourrait-on dire). Sorties au théâtre, au cinéma, balades en forêt et, pour les plus chanceux, l’accès à des croisières sur des paquebots construits par la KdF et des vacances sur l’île de Rügen – l’équivalent de l’Île de Ré en Allemagne. La KdF y a construit un immense hôtel, de 6 km de long. C’était une véritable usine de loisirs. Le but de ces initiatives n’était évidemment pas philanthropique : tout comme aujourd’hui, il s’agissait d’accroître la productivité et la rentabilité de l’agent productif. Un salarié heureux travaille mieux…

La mise en concurrence des exécutants les uns avec les autres sur l’atteinte de leurs objectifs maintenait une pression permanente. Partisans du darwinisme social, les nazis confiaient d’ailleurs les mêmes objectifs à plusieurs équipes, plusieurs Agences (polycratie) et récompensaient l’équipe plus efficace en finale. D’où le paradoxe : vous n’êtes pas libres de fixer les buts à poursuivre, les cibles à atteindre, mais vous êtes libres des moyens à choisir pour y arriver. Libres d’obéir donc… Pour les individus qui constituent les rouages du système, seule compte l’exécution des instructions données, et « le travail c’est la liberté » (disent-ils, en voulant nous convaincre du bonheur au travail…).  Une ‘auto-uberisation’, pourrait-on dire !

Le théoricien de ce management, Reinhard Höhn (1904-2000), a tranquillement prospéré après-guerre en enseignant cette méthode de manipulation dans un institut de formation au management (l’Akademie fur Führungskrafte, l’équivalent de l’Insead en France) à Bad Harzburg. Au fil des décennies, il a formé l’élite économique et patronale de la République Fédérale : quelque 600 000 cadres issus des principales sociétés allemandes, sans compter 100 000 inscrits en formation à distance, y ont appris, grâce à ses séminaires et à ses nombreux manuels à succès, la gestion des hommes déjà utilisée en temps de guerre [1].

Il reste pas mal de traces de cette Menschenfürhung (conduite des hommes) dans le management entrepreneurial encore aujourd’hui, hélas ! [2]

Étrangement, quand on lit la Passion du Christ dans les Évangiles, on voit des soldats instrumentalisés par Judas, par Pilate, tellement impliqués dans leur mission qu’ils rajoutent de la haine au châtiment, de la cruauté à la sanction. Comment en sont-ils arrivés là, si ce n’est par la ruse de leurs supérieurs qui les empêchent de discuter des objectifs, mais leur laissent carte blanche pour arriver au résultat ?

Intéressons-nous donc aux soldats dans la Passion du Christ.
Une multitude de personnages grouille dans ce récit, et l’on peut s’y perdre. Comme un tissu entrelacé de mille fils, la Passion du Christ fait se croiser des notables et des gueux, des ultrareligieux et des sans Dieu, des servantes soupçonneuses et des femmes courageuses… Suivons donc un des fils qui parcourent ce tissu, en nous plaçant du point de vue des soldats. Le texte liturgique les mentionne 7 fois, en 4 épisodes.

·      La cohorte avec Judas (Jn 18,2)

Judas s’est transformé en guide pour conduire une cohorte de gardes juifs de soldats romains au jardin de Gethsémani. A-t-on expliqué à ces soldats qui ils allaient arrêter ? qui était ce Jésus de Nazareth devenu une menace pour l’ordre romain ? À vrai dire ils n’en ont pas besoin pour obéir aux ordres. On leur assigne une mission ; ils exécutent. Point barre. Avoir Judas à leur tête aurait peut-être dû les alerter, car il est peu fréquent de voir un des suspects retourner sa veste à ce point. Mais c’est le problème de leurs supérieurs, pas le leur.

Voilà un premier piège de l’obéissance aveugle : sous couvert de professionnalisme, nous pouvons être amenés à faire confiance à des Juda modernes. Au nom de l’efficacité militaire (ou économique), nous pouvons utiliser la délation et la traîtrise pour éliminer les adversaires désignés par le pouvoir.

·      La dérision inutile (Jn 19,2)

La deuxième fois où les soldats interviennent explicitement, c’est pour fouetter Jésus sur ordre de Pilate. Jean ne s’y attarde pas, mais la scène a dû être atroce. Mel Gibson l’a reconstituée en fidélité à ce que l’histoire des supplices romains nous en fait connaître. Même un soldat aguerri ne peut éviter un haut-le-cœur en voyant la loque humaine qui est extraite de cette torture. Eh bien, ils en rajoutent ! avec cette couronne dérisoire et sanglante, ce manteau pourpre d’opérette, et ces gifles humiliantes.

Quel besoin avons-nous, comme cette soldatesque, d’ajouter la dérision au châtiment, l’humiliation à la justice officielle, la haine à la sanction ?

 

·      Le butin paradoxal (Jn 19, 23-24)

© PFARRKIRCHEN STIFTUNG ST. LAMBERT SEEONDans toutes les armées du monde, les soldats pillent, volent – et pire encore - une fois remportée la victoire. Point de victoire ici mais une exécution publique, et la loi romaine permet à ces soldats de dépouiller la victime de ses biens et de se les approprier. Maigre butin en ce qui concerne Jésus : ses habits doivent être en morceaux et tachés de sang, sa tunique n’est qu’une assez grossière pièce de lin d’un seul tenant.

Cette coutume de soldats est légale, mais est-elle juste ?

Nous sommes tellement habitués à des pratiques communément admises que nous ne voyons plus aucun mal, comme les soldats, à prendre aux plus faibles, à nous servir sans nous poser de questions, à profiter des failles légales pour voler le bien commun…

Jean réussit cependant à retourner ce butin en faveur de Jésus : sans le savoir, les soldats accomplissent les Écritures (Ps 22, 18-19) et contribue ainsi à démontrer la messianité de Jésus.

Butin paradoxal donc, à l’image de nos rapines légales qui finalement démontrent l’innocence de ceux que nous dépossédons…

 

·      la fin de mission (Jn 19, 32-34)

crucifixion. andrea di bartolo solaria (xvie siècle)
Ils font le job jusqu’au bout, ces soldats à qui leurs supérieurs ont demandé un résultat net et incontestable. Pour être sûr que les condamnés vont bien mourir, ils leur brisent leurs jambes, les empêchant ainsi de s’appuyer dessus pour respirer, ce qui provoque l’asphyxie quasi immédiate. Avec intelligence, l’un des soldats voit que Jésus exténué a déjà succombé. Plutôt que d’appliquer la consigne, il l’adapte, la transforme en un coup de lance désormais célèbre. Un peu d’humanité en fin de mission… Comme quoi il est toujours possible d’interpréter un ordre, d’en varier l’application selon le contexte.

À nouveau l’Écriture s’accomplit à travers ces soldats, à leur insu (Ps 34,20). De quoi nous réconforter, car même nos missions les plus cruelles pourront finalement servir au bien commun, même si nous ne savons pas comment ni quand !

Revenons à la thèse de Yohann Chapoutot : si nous ne nous posons jamais de questions sur les objectifs que l’on nous fixe, nous deviendrons comme ces soldats, privilégiant l’efficacité au sens, l’obéissance aveugle à la liberté de conscience. Nous serons motivés et impliqués dans des besognes à la finalité douteuse. Nous nous contenterons avec bonheur de la part d’autonomie qui nous est concédée dans leur mise en œuvre et nous oublierons la raison d’être de notre travail, de nos familles, de la croissance économique etc.

La véritable obéissance est celle du Christ dans la deuxième lecture (He 4, 14 16 ; 5, 7 9). « Bien qu’il soit le Fils, il apprit par ses souffrances l’obéissance ». Il ne fait qu’un avec l’objectif de son Père qu’il épouse de tout son être : aller chercher et sauver ceux qui étaient perdus, et les faire participer à la nature divine. La différence est là : Jésus choisit le but ultime de son action d’un commun accord avec son Père. C’est sur les moyens qu’au contraire il apprend à obéir : passer par la croix (et non le succès populaire, ou l’honorable mort par lapidation comme les prophètes) n’est pas son choix premier. À Gethsémani, il se bat pour rester fidèle à son but ultime en ne refusant pas de passer par une voie inimaginable pour lui auparavant. Sa perspective est à l’exact opposé des subalternes du management nazi : choisir le but, se laisser conduire pour y arriver.

Rien d’antimilitariste dans ces propos ! Jésus a d’ailleurs loué la foi du centurion romain (Mt 8, 5-13), et c’est un autre centurion qui en Mt 27,54 proclame que ce crucifié était vraiment fils de Dieu. Mais les évangélistes savent bien que de tout temps porter un uniforme a pu couvrir les pires exactions, être vainqueur les pires inhumanités. Obéir sans savoir à qui ni pourquoi engendre des monstres d’efficacité, croyant être libres alors qu’ils sont manipulés par ceux qui les commandent.

Jésus n’est pas le soldat de Dieu, mais son fils.
Et nous, à qui obéissons nous avec tant d’empressement et de conscience professionnelle ?…
Sommes-nous soldats ou fils/filles ?

 


[1]. Précisons que l’auteur ne dit pas que les nazis ont inventé le management. Le management préexiste au nazisme. Mais ils ont élaboré une doctrine qui prend racine dans le darwinisme social qui est l’un des piliers du nazisme (la vie est une lutte, un combat à mort) et qui imprègne une bonne partie des techniques de management actuelles.

[2]. Chapoutot cite notamment l’exemple du management appliqué à France Telecom vers 2008-09, avec 35 suicides au travail à la clé…

 

 

Lectures

Première lecture
« C’est à cause de nos fautes qu’il a été broyé » (Is 52, 13 – 53, 12)

Lecture du livre du prophète Isaïe

Mon serviteur réussira, dit le Seigneur ; il montera, il s’élèvera, il sera exalté ! La multitude avait été consternée en le voyant, car il était si défiguré qu’il ne ressemblait plus à un homme ; il n’avait plus l’apparence d’un fils d’homme. Il étonnera de même une multitude de nations ; devant lui les rois resteront bouche bée, car ils verront ce que, jamais, on ne leur avait dit, ils découvriront ce dont ils n’avaient jamais entendu parler.
Qui aurait cru ce que nous avons entendu ? Le bras puissant du Seigneur, à qui s’est-il révélé ? Devant lui, le serviteur a poussé comme une plante chétive, une racine dans une terre aride ; il était sans apparence ni beauté qui attire nos regards, son aspect n’avait rien pour nous plaire. Méprisé, abandonné des hommes, homme de douleurs, familier de la souffrance, il était pareil à celui devant qui on se voile la face ; et nous l’avons méprisé, compté pour rien. En fait, c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous pensions qu’il était frappé, meurtri par Dieu, humilié. Or, c’est à cause de nos révoltes qu’il a été transpercé, à cause de nos fautes qu’il a été broyé. Le châtiment qui nous donne la paix a pesé sur lui : par ses blessures, nous sommes guéris. Nous étions tous errants comme des brebis, chacun suivait son propre chemin. Mais le Seigneur a fait retomber sur lui nos fautes à nous tous.
Maltraité, il s’humilie, il n’ouvre pas la bouche : comme un agneau conduit à l’abattoir, comme une brebis muette devant les tondeurs, il n’ouvre pas la bouche. Arrêté, puis jugé, il a été supprimé. Qui donc s’est inquiété de son sort ? Il a été retranché de la terre des vivants, frappé à mort pour les révoltes de son peuple. On a placé sa tombe avec les méchants, son tombeau avec les riches ; et pourtant il n’avait pas commis de violence, on ne trouvait pas de tromperie dans sa bouche. Broyé par la souffrance, il a plu au Seigneur. S’il remet sa vie en sacrifice de réparation, il verra une descendance, il prolongera ses jours : par lui, ce qui plaît au Seigneur réussira.
Par suite de ses tourments, il verra la lumière, la connaissance le comblera. Le juste, mon serviteur, justifiera les multitudes, il se chargera de leurs fautes. C’est pourquoi, parmi les grands, je lui donnerai sa part, avec les puissants il partagera le butin, car il s’est dépouillé lui-même jusqu’à la mort, et il a été compté avec les pécheurs, alors qu’il portait le péché des multitudes et qu’il intercédait pour les pécheurs.

Psaume
(30 (31), 2ab.6, 12, 13-14ad, 15-16, 17.25)
R/ Ô Père, en tes mains je remets mon esprit.
(cf. Lc 23, 46)

En toi, Seigneur, j’ai mon refuge ;
garde-moi d’être humilié pour toujours.
En tes mains je remets mon esprit ;
tu me rachètes, Seigneur, Dieu de vérité.

Je suis la risée de mes adversaires
et même de mes voisins ;
je fais peur à mes amis,
s’ils me voient dans la rue, ils me fuient.

On m’ignore comme un mort oublié,
comme une chose qu’on jette.
J’entends les calomnies de la foule :
ils s’accordent pour m’ôter la vie.

Moi, je suis sûr de toi, Seigneur,
je dis : « Tu es mon Dieu ! »
Mes jours sont dans ta main : délivre-moi
des mains hostiles qui s’acharnent.

Sur ton serviteur, que s’illumine ta face ;
sauve-moi par ton amour.
Soyez forts, prenez courage,
vous tous qui espérez le Seigneur !

Deuxième lecture
Il apprit l’obéissance et il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent la cause du salut éternel (He 4, 14-16 ; 5, 7-9)

Lecture de la lettre aux Hébreux

Frères, en Jésus, le Fils de Dieu, nous avons le grand prêtre par excellence, celui qui a traversé les cieux ; tenons donc ferme l’affirmation de notre foi. En effet, nous n’avons pas un grand prêtre incapable de compatir à nos faiblesses, mais un grand prêtre éprouvé en toutes choses, à notre ressemblance, excepté le péché. Avançons-nous donc avec assurance vers le Trône de la grâce, pour obtenir miséricorde et recevoir, en temps voulu, la grâce de son secours. Le Christ, pendant les jours de sa vie dans la chair, offrit, avec un grand cri et dans les larmes, des prières et des supplications à Dieu qui pouvait le sauver de la mort, et il fut exaucé en raison de son grand respect. Bien qu’il soit le Fils, il apprit par ses souffrances l’obéissance et, conduit à sa perfection, il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent la cause du salut éternel.

Évangile
Passion de notre Seigneur Jésus Christ (Jn 18, 1 – 19, 42)
Le Christ s’est anéanti, prenant la condition de serviteur.
Pour nous, le Christ est devenu obéissant, jusqu’à la mort, et la mort de la croix. C’est pourquoi Dieu l’a exalté : il l’a doté du Nom qui est au-dessus de tout nom. Le Christ s’est anéanti, prenant la condition de serviteur. (cf. Ph 2, 8-9)

La Passion de notre Seigneur Jésus Christ selon saint Jean

Indications pour la lecture dialoguée : les sigles désignant les divers interlocuteurs sont les suivants :
X = Jésus ; L = Lecteur ; D = Disciples et amis ; F = Foule ; A = Autres personnages.

L. En ce temps-là, après le repas, Jésus sortit avec ses disciples et traversa le torrent du Cédron ; il y avait là un jardin, dans lequel il entra avec ses disciples. Judas, qui le livrait, connaissait l’endroit, lui aussi, car Jésus et ses disciples s’y étaient souvent réunis. Judas, avec un détachement de soldats ainsi que des gardes envoyés par les grands prêtres et les pharisiens, arrive à cet endroit. Ils avaient des lanternes, des torches et des armes. Alors Jésus, sachant tout ce qui allait lui arriver, s’avança et leur dit : X « Qui cherchez-vous? » L. Ils lui répondirent : F. « Jésus le Nazaréen. » L. Il leur dit : X « C’est moi, je le suis. » L. Judas, qui le livrait, se tenait avec eux. Quand Jésus leur répondit : « C’est moi, je le suis », ils reculèrent, et ils tombèrent à terre. Il leur demanda de nouveau : X « Qui cherchez-vous? » L. Ils dirent : F. « Jésus le Nazaréen. » L. Jésus répondit : X « Je vous l’ai dit : c’est moi, je le suis. Si c’est bien moi que vous cherchez, ceux-là, laissez-les partir. » L. Ainsi s’accomplissait la parole qu’il avait dite : « Je n’ai perdu aucun de ceux que tu m’as donnés. » Or Simon-Pierre avait une épée ; il la tira, frappa le serviteur du grand prêtre et lui coupa l’oreille droite. Le nom de ce serviteur était Malcus. Jésus dit à Pierre : X « Remets ton épée au fourreau. La coupe que m’a donnée le Père, vais-je refuser de la boire ? » L. Alors la troupe, le commandant et les gardes juifs se saisirent de Jésus et le ligotèrent. Ils l’emmenèrent d’abord chez Hanne, beau-père de Caïphe, qui était grand prêtre cette année-là. Caïphe était celui qui avait donné aux Juifs ce conseil : « Il vaut mieux qu’un seul homme meure pour le peuple. » Or Simon-Pierre, ainsi qu’un autre disciple, suivait Jésus. Comme ce disciple était connu du grand prêtre, il entra avec Jésus dans le palais du grand prêtre. Pierre se tenait près de la porte, dehors. Alors l’autre disciple – celui qui était connu du grand prêtre – sortit, dit un mot à la servante qui gardait la porte, et fit entrer Pierre. Cette jeune servante dit alors à Pierre : A. « N’es-tu pas, toi aussi, l’un des disciples de cet homme ? » L. Il répondit : D. « Non, je ne le suis pas ! » L. Les serviteurs et les gardes se tenaient là ; comme il faisait froid, ils avaient fait un feu de braise pour se réchauffer. Pierre était avec eux, en train de se chauffer. Le grand prêtre interrogea Jésus sur ses disciples et sur son enseignement. Jésus lui répondit : X « Moi, j’ai parlé au monde ouvertement. J’ai toujours enseigné à la synagogue et dans le Temple, là où tous les Juifs se réunissent, et je n’ai jamais parlé en cachette. Pourquoi m’interroges-tu ? Ce que je leur ai dit, demande-le à ceux qui m’ont entendu. Eux savent ce que j’ai dit. » L. À ces mots, un des gardes, qui était à côté de Jésus, lui donna une gifle en disant : A. « C’est ainsi que tu réponds au grand prêtre ! » L. Jésus lui répliqua : X « Si j’ai mal parlé, montre ce que j’ai dit de mal. Mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? » L. Hanne l’envoya, toujours ligoté, au grand prêtre Caïphe. Simon-Pierre était donc en train de se chauffer. On lui dit : A. « N’es-tu pas, toi aussi, l’un de ses disciples ? » L. Pierre le nia et dit : D. « Non, je ne le suis pas ! » L. Un des serviteurs du grand prêtre, parent de celui à qui Pierre avait coupé l’oreille, insista : A. « Est-ce que moi, je ne t’ai pas vu dans le jardin avec lui ? » L. Encore une fois, Pierre le nia. Et aussitôt un coq chanta. Alors on emmène Jésus de chez Caïphe au Prétoire. C’était le matin. Ceux qui l’avaient amené n’entrèrent pas dans le Prétoire, pour éviter une souillure et pouvoir manger l’agneau pascal. Pilate sortit donc à leur rencontre et demanda : A. « Quelle accusation portez-vous contre cet homme ? » L. Ils lui répondirent : F. « S’il n’était pas un malfaiteur, nous ne t’aurions pas livré cet homme. » L. Pilate leur dit : A. « Prenez-le vous-mêmes et jugez-le suivant votre loi. » L. Les Juifs lui dirent : F. « Nous n’avons pas le droit de mettre quelqu’un à mort. » L. Ainsi s’accomplissait la parole que Jésus avait dite pour signifier de quel genre de mort il allait mourir. Alors Pilate rentra dans le Prétoire ; il appela Jésus et lui dit : A. « Es-tu le roi des Juifs ? » L. Jésus lui demanda : X « Dis-tu cela de toi-même, Ou bien d’autres te l’ont dit à mon sujet ? » L. Pilate répondit : A. « Est-ce que je suis juif, moi ? Ta nation et les grands prêtres t’ont livré à moi : qu’as-tu donc fait ? » L. Jésus déclara : X « Ma royauté n’est pas de ce monde ; si ma royauté était de ce monde, j’aurais des gardes qui se seraient battus pour que je ne sois pas livré aux Juifs. En fait, ma royauté n’est pas d’ici. » L. Pilate lui dit : A. « Alors, tu es roi ? » L. Jésus répondit : X « C’est toi-même qui dis que je suis roi. Moi, je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix. » L. Pilate lui dit : A. « Qu’est-ce que la vérité ? » L. Ayant dit cela, il sortit de nouveau à la rencontre des Juifs, et il leur déclara : A. « Moi, je ne trouve en lui aucun motif de condamnation. Mais, chez vous, c’est la coutume que je vous relâche quelqu’un pour la Pâque : voulez-vous donc que je vous relâche le roi des Juifs ? » L. Alors ils répliquèrent en criant : F. « Pas lui ! Mais Barabbas ! » L. Or ce Barabbas était un bandit. Alors Pilate fit saisir Jésus pour qu’il soit flagellé. Les soldats tressèrent avec des épines une couronne qu’ils lui posèrent sur la tête ; puis ils le revêtirent d’un manteau pourpre. Ils s’avançaient vers lui et ils disaient : F. « Salut à toi, roi des Juifs ! » L. Et ils le giflaient. Pilate, de nouveau, sortit dehors et leur dit : A. « Voyez, je vous l’amène dehors pour que vous sachiez que je ne trouve en lui aucun motif de condamnation. » L. Jésus donc sortit dehors, portant la couronne d’épines et le manteau pourpre. Et Pilate leur déclara : A. « Voici l’homme. » L. Quand ils le virent, les grands prêtres et les gardes se mirent à crier : F. « Crucifie-le! Crucifie-le! » L. Pilate leur dit : A. « Prenez-le vous-mêmes, et crucifiez-le ; moi, je ne trouve en lui aucun motif de condamnation. » L. Ils lui répondirent : F. « Nous avons une Loi, et suivant la Loi il doit mourir, parce qu’il s’est fait Fils de Dieu. » L. Quand Pilate entendit ces paroles, il redoubla de crainte. Il rentra dans le Prétoire, et dit à Jésus : A. « D’où es-tu? » L. Jésus ne lui fit aucune réponse. Pilate lui dit alors : A. « Tu refuses de me parler, à moi ? Ne sais-tu pas que j’ai pouvoir de te relâcher, et pouvoir de te crucifier ? » L. Jésus répondit : X « Tu n’aurais aucun pouvoir sur moi si tu ne l’avais reçu d’en haut ; c’est pourquoi celui qui m’a livré à toi porte un péché plus grand. » L. Dès lors, Pilate cherchait à le relâcher ; mais des Juifs se mirent à crier : F. « Si tu le relâches, tu n’es pas un ami de l’empereur. Quiconque se fait roi s’oppose à l’empereur. » L. En entendant ces paroles, Pilate amena Jésus au-dehors; il le fit asseoir sur une estrade au lieu dit le Dallage – en hébreu : Gabbatha. C’était le jour de la Préparation de la Pâque, vers la sixième heure, environ midi. Pilate dit aux Juifs : A. « Voici votre roi. » L. Alors ils crièrent : F. « À mort ! À mort ! Crucifie-le ! » L. Pilate leur dit : A. « Vais-je crucifier votre roi ? » L. Les grands prêtres répondirent : F. « Nous n’avons pas d’autre roi que l’empereur. » L. Alors, il leur livra Jésus pour qu’il soit crucifié. Ils se saisirent de Jésus. Et lui-même, portant sa croix, sortit en direction du lieu dit Le Crâne (ou Calvaire), qui se dit en hébreu Golgotha. C’est là qu’ils le crucifièrent, et deux autres avec lui, un de chaque côté, et Jésus au milieu. Pilate avait rédigé un écriteau qu’il fit placer sur la croix ; il était écrit : « Jésus le Nazaréen, roi des Juifs. » Beaucoup de Juifs lurent cet écriteau, parce que l’endroit où l’on avait crucifié Jésus était proche de la ville, et que c’était écrit en hébreu, en latin et en grec. Alors les grands prêtres des Juifs dirent à Pilate : F. « N’écris pas : “Roi des Juifs” ; mais : “Cet homme a dit : Je suis le roi des Juifs.” » L. Pilate répondit : A. « Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit. » L. Quand les soldats eurent crucifié Jésus, ils prirent ses habits ; ils en firent quatre parts, une pour chaque soldat. Ils prirent aussi la tunique ; c’était une tunique sans couture, tissée tout d’une pièce de haut en bas. Alors ils se dirent entre eux : A. « Ne la déchirons pas, désignons par le sort celui qui l’aura. » L. Ainsi s’accomplissait la parole de l’Écriture : Ils se sont partagé mes habits ; ils ont tiré au sort mon vêtement. C’est bien ce que firent les soldats. Or, près de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la sœur de sa mère, Marie, femme de Cléophas, et Marie Madeleine. Jésus, voyant sa mère, et près d’elle le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : X « Femme, voici ton fils. » L. Puis il dit au disciple : X « Voici ta mère. » L. Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui. Après cela, sachant que tout, désormais, était achevé pour que l’Écriture s’accomplisse jusqu’au bout, Jésus dit : X « J’ai soif. » L. Il y avait là un récipient plein d’une boisson vinaigrée. On fixa donc une éponge remplie de ce vinaigre à une branche d’hysope, et on l’approcha de sa bouche. Quand il eut pris le vinaigre, Jésus dit : X « Tout est accompli. » L. Puis, inclinant la tête, il remit l’esprit. (Ici on fléchit le genou, et on s’arrête un instant.) Comme c’était le jour de la Préparation (c’est-à-dire le vendredi), il ne fallait pas laisser les corps en croix durant le sabbat, d’autant plus que ce sabbat était le grand jour de la Pâque. Aussi les Juifs demandèrent à Pilate qu’on enlève les corps après leur avoir brisé les jambes. Les soldats allèrent donc briser les jambes du premier, puis de l’autre homme crucifié avec Jésus. Quand ils arrivèrent à Jésus, voyant qu’il était déjà mort, ils ne lui brisèrent pas les jambes, mais un des soldats avec sa lance lui perça le côté ; et aussitôt, il en sortit du sang et de l’eau. Celui qui a vu rend témoignage, et son témoignage est véridique ; et celui-là sait qu’il dit vrai afin que vous aussi, vous croyiez. Cela, en effet, arriva pour que s’accomplisse l’Écriture : Aucun de ses os ne sera brisé. Un autre passage de l’Écriture dit encore : Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé. Après cela, Joseph d’Arimathie, qui était disciple de Jésus, mais en secret par crainte des Juifs, demanda à Pilate de pouvoir enlever le corps de Jésus. Et Pilate le permit. Joseph vint donc enlever le corps de Jésus. Nicodème – celui qui, au début, était venu trouver Jésus pendant la nuit – vint lui aussi ; il apportait un mélange de myrrhe et d’aloès pesant environ cent livres. Ils prirent donc le corps de Jésus, qu’ils lièrent de linges, en employant les aromates selon la coutume juive d’ensevelir les morts. À l’endroit où Jésus avait été crucifié, il y avait un jardin et, dans ce jardin, un tombeau neuf dans lequel on n’avait encore déposé personne. À cause de la Préparation de la Pâque juive, et comme ce tombeau était proche, c’est là qu’ils déposèrent Jésus.
Patrick BRAUD

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2 novembre 2016

Mourir pour une côtelette ?

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Mourir pour une côtelette ?

Homélie pour le 32° dimanche du temps ordinaire / Année C
06/11/2016

Cf. également :

Le devoir de désobéissance civile

Aimer Dieu comme on aime une vache ?

N’avez-vous pas lu dans l’Écriture ?

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Un récent sondage (Sondage du 19/09/2016 réalisé par l’IFOP pour le JDD) a affolé le
s médias : environ 30 % des musulmans de France déclarent que, à leurs yeux, la loi islamique (la charia) est au-dessus de la loi de la République !

Est-ce une spécificité musulmane ? Faut-il en avoir peur ?

La contestation juive de l’idolâtrie politique

Afficher l'image d'origineNotre première lecture (2Ma 7, 1-2.9-14) nous raconte l’histoire d’une famille entière – 7 enfants – qui préfère mourir un par un plutôt que d’obéir aux lois scélérates de l’autorité politique de l’époque. « Nous sommes prêts à mourir plutôt que de transgresser les lois de nos pères ». Le roi voulait les obliger à manger du porc : quelle idée !? Pourquoi s’acharner à faire manger du porc ? Sans doute pour éliminer toute trace de différence au sein du peuple. Pour ne pas avoir des comportements déviants qui donneraient des idées à d’autres. C’est d’ailleurs une des raisons de l’islam au pouvoir pour imposer en terre musulmane l’inverse : en obligeant… à ne pas manger de porc (ou à ne pas boire d’alcool) ! La peur de la différence repose sur l’idée folle d’une unité absolue. Des pratiques différentes, même ultra minoritaires, risquent  fort aux yeux des oulémas actuels comme à ceux du roi perse de notre lecture de fissurer l’unanimité du peuple, de devenir contagieux en répandant l’idée qu’après tout, il y a d’autres manières de croire et de pratiquer que la leur…

Tout pouvoir politique, qu’il vienne de la monarchie, de la démocratie ou du fédéralisme ou du parti unique, a tendance à devenir idolâtre. Il croit qu’il est au-dessus de tout pouvoir, que ses lois sont au-dessus de toutes les lois. Il ne supporte pas la contestation de sa toute-puissance. Et voilà qu’une frêle famille juive, suivie par des milliers de martyrs d’Israël, va mettre en échec cette prétention absolue en résistant, en désobéissant, en osant dire non. Chacun des sept enfants préférera mourir plutôt que d’obéir à la loi inique les obligeant à renier leur foi. Mourir pour une côtelette de porc, ou plutôt pour ne pas en manger : cela peut paraître absurde pour un non-juif, mais pour eux c’est une question d’identité et de fidélité à Dieu, à soi-même [1]. Or le politique ne supporte pas qu’il y ait une autorité au-dessus de lui !

 

Il vaut mieux obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes

La désobéissance civile est inscrite dans la Bible.

Relisez le livre des martyrs d’Israël, mais également celui d’Esther, de Judith, et vous constaterez que la foi juive a toujours voulu empêcher le politique de se prétendre Dieu. Les prophètes avaient commencé ce travail de l’intérieur de la monarchie juive, en la critiquant ouvertement et violemment chaque fois qu’elle s’écartait de la Torah, c’est-à-dire très souvent…

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Les chrétiens ont hérité de ce tempérament rebelle. Avec douceur et amour des ennemis, ils ont préféré pendant trois siècles être déchiquetés par les fauves du cirque romain plutôt que d’obéir à l’empereur en adorant des idoles ou en reniant leur foi. Cela commence dès le lendemain de la résurrection : les apôtres furent roués de coups de bâtons parce qu’ils prêchaient la seigneurie de Jésus. Mais eux continuaient, et se réjouissait d’avoir été dignes de subir le fouet et l’humiliation pour le nom de Jésus. « Mieux vaut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Ac 5,29) : cette phrase est devenue la maxime de la désobéissance civile qui est dans la foi chrétienne le garant de la liberté intérieure de chacun.

Catéchisme de l’Église Catholique n°2242 :
Le citoyen est obligé en conscience de ne pas suivre les prescriptions des autorités civiles quand ces préceptes sont contraires aux exigences de l’ordre moral, aux droits fondamentaux des personnes ou aux enseignements de l’Évangile. Le refus d’obéissance aux autorités civiles, lorsque leurs exigences sont contraires à celles de la conscience droite, trouve sa justification dans la distinction entre le service de Dieu et le service de la communauté politique.
« Rendez à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu » (Mt 22,21).
« Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Ac 5,29).

On oublie trop facilement tous ces pays et toutes ces périodes de l’histoire où les chrétiens ont résisté, ont dit non au prince, au tyran, au roi, au président, au parti unique, justement parce qu’il vaut mieux obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes.

Comme l’islam n’est pour l’essentiel qu’une reprise arabe du message juif et chrétien, il n’est pas étonnant qu’il reprenne ce devoir de résistance au pouvoir politique lorsque celui-ci bafoue les droits de Dieu et de l’homme. Mais la particularité de l’islam fait de cette résistance quelque chose d’inquiétant : là où le Christ prône la non-violence (« tendre l’autre joue »), l’islam prône le djihad. Là où Jésus appelle à l’amour des ennemis, le Coran demande de les exterminer et Mohamed ne doit son expansion religieuse qu’à ses victoires militaires. Là où le texte fondateur (la Bible) pour les uns est une question d’interprétation et d’actualisation, le Coran est pour les autres au-dessus de toute discussion humaine qui voudrait l’adapter à aujourd’hui. Là où la Bible sépare le religieux et le politique (« rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu »), le Coran proclame que le politique est toujours soumis (c’est le sens du mot islam) aux prescriptions coraniques qui doivent gouverner toute la vie sociale. Là où les martyrs chrétiens préfèrent perdre la vie pour rester fidèles, les djihadistes veulent tuer l’ennemi infidèle.

Alors oui, la désobéissance civile musulmane à la République peut inquiéter, si elle manifeste une visée intégraliste qui n’a pas renoncé à imposer sa vision du monde, la charia, à tout l’espace public. Tant que l’islam reste minoritaire, il essaie d’imposer sa loi sur de petits espaces géographiques ou culturels : des quartiers, des écoles, des familles. Mais lorsqu’il devient majoritaire, il veut que la charia remplace le Code civil et que le Coran soit au-dessus du vote populaire. Même les rares pays dits laïcs en terre musulmane (Turquie, Algérie) sont rattrapés par cette folie religieuse qui veut imposer à toute la société ce qui devrait rester un choix personnel (ramadan, voile, halal, pureté rituelle etc.).

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Désobéir sans imposer

L’originalité chrétienne (et juive) réside donc dans un entre-deux : ne pas s’aligner sur les modes de vie contemporains sous prétexte qu’ils sont majoritaires, ne pas imposer aux autres ce qu’on choisit pour soi.

Par exemple, un chrétien pourra fort bien ne pas choisir l’avortement si la question se pose dans son couple, mais il n’a pas le droit de l’imposer aux autres, à commencer par son conjoint. Sa seule force de persuasion sera l’amour et la raison. Jamais la violence ou la soumission. Vouloir imposer aux autres telle ligne de conduite est anti-évangélique. Par contre résister soi-même, jusqu’à la désobéissance civile, jusqu’au martyre s’il le faut, est un devoir spirituel et moral.

DésobéirÀ terme, une résistance durable, non violente, fondée, et respectueuse du droit des autres finira par porter du fruit et fera évoluer la législation en cause. On en a une trace dans l’objection de conscience par laquelle la République reconnaît ne pas pouvoir obliger un médecin à accomplir ce qu’il ne veut pas en conscience (une IVG, une euthanasie…), à condition qu’il n’empêche pas la demande de s’exercer ailleurs et autrement dans le cadre légal.

Il vaut mieux obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes.
Les martyrs de tous les temps ont signé cette phrase de leur sang.

On eût aimé plus de désobéissance à la République du temps de Laval et de Pétain, mais aussi du temps du colonialisme français porté par la III° République, du temps des marchands tout-puissants du commerce triangulaire etc…

 

À quoi, à qui devrez-vous dire non pour rester fidèle à vous-même ?

Cela se joue dans les relations de travail en entreprise, dans les jeux de pouvoir en famille, dans les bulletins de vote qui vont bientôt pleuvoir…

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 [1]. Rappelons que l’interdit du porc n’est pas hygiénique, comme veut le croire l’Occident, mais théologique. Le porc, comme une foule d’autres animaux, est impur pour les juifs et  les musulmans parce qu’il contredit la Création en ne respectant pas la séparation des espèces (pieds fourchus mais non ruminant; cf. Dt 14,7-8). Les chrétiens aboliront cette interdiction au nom de la Création nouvelle qui vient de la résurrection du Christ : en lui, un monde nouveau nous est donné, où tout est pur, sauf le mal qui sort du cœur de l’homme.

 

1ère lecture : « Le Roi du monde nous ressuscitera pour une vie éternelle » (2 M 7, 1-2.9-14)
Lecture du deuxième livre des Martyrs d’Israël
En ces jours-là, sept frères avaient été arrêtés avec leur mère. À coups de fouet et de nerf de bœuf, le roi Antiocos voulut les contraindre à manger du porc, viande interdite. L’un d’eux se fit leur porte-parole et déclara : « Que cherches-tu à savoir de nous ? Nous sommes prêts à mourir plutôt que de transgresser les lois de nos pères. » Le deuxième frère lui dit, au moment de rendre le dernier soupir : « Tu es un scélérat, toi qui nous arraches à cette vie présente, mais puisque nous mourons par fidélité à ses lois, le Roi du monde nous ressuscitera pour une vie éternelle. » Après cela, le troisième fut mis à la torture. Il tendit la langue aussitôt qu’on le lui ordonna et il présenta les mains avec intrépidité, en déclarant avec noblesse : « C’est du Ciel que je tiens ces membres, mais à cause de ses lois je les méprise, et c’est par lui que j’espère les retrouver. » Le roi et sa suite furent frappés de la grandeur d’âme de ce jeune homme qui comptait pour rien les souffrances. Lorsque celui-ci fut mort, le quatrième frère fut soumis aux mêmes sévices. Sur le point d’expirer, il parla ainsi : « Mieux vaut mourir par la main des hommes, quand on attend la résurrection promise par Dieu, tandis que toi, tu ne connaîtras pas la résurrection pour la vie. »

Psaume : Ps 16 (17), 1ab.3ab, 5-6, 8.15

R/ Au réveil, je me rassasierai de ton visage, Seigneur. (Ps 16, 15b)

Seigneur, écoute la justice !
Entends ma plainte, accueille ma prière.
Tu sondes mon cœur, tu me visites la nuit,
tu m’éprouves, sans rien trouver.

J’ai tenu mes pas sur tes traces,
jamais mon pied n’a trébuché.
Je t’appelle, toi, le Dieu qui répond :
écoute-moi, entends ce que je dis.

Garde-moi comme la prunelle de l’œil ;
à l’ombre de tes ailes, cache-moi,
Et moi, par ta justice, je verrai ta face :
au réveil, je me rassasierai de ton visage.

2ème lecture : « Que le Seigneur vous affermisse « en tout ce que vous pouvez faire et dire de bien » (2 Th 2, 16 – 3, 5)
Lecture de la deuxième lettre de saint Paul apôtre aux Thessaloniciens
Frères, que notre Seigneur Jésus Christ lui-même, et Dieu notre Père qui nous a aimés et nous a pour toujours donné réconfort et bonne espérance par sa grâce, réconfortent vos cœurs et les affermissent en tout ce que vous pouvez faire et dire de bien.
Priez aussi pour nous, frères, afin que la parole du Seigneur poursuive sa course, et que, partout, on lui rende gloire comme chez vous. Priez pour que nous échappions aux gens pervers et mauvais, car tout le monde n’a pas la foi. Le Seigneur, lui, est fidèle : il vous affermira et vous protégera du Mal. Et, dans le Seigneur, nous avons toute confiance en vous : vous faites et continuerez à faire ce que nous vous ordonnons. Que le Seigneur conduise vos cœurs dans l’amour de Dieu et l’endurance du Christ.

Evangile : « Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants »(Lc 20, 27-38)
Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Jésus Christ, le premier-né d’entre les morts, à lui, la gloire et la souveraineté pour les siècles des siècles.
Alléluia. (Ap 1, 5a.6b)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là, quelques sadducéens – ceux qui soutiennent qu’il n’y a pas de résurrection – s’approchèrent de Jésus et l’interrogèrent : « Maître, Moïse nous a prescrit : Si un homme a un frère qui meurt en laissant une épouse mais pas d’enfant, il doit épouser la veuve pour susciter une descendance à son frère. Or, il y avait sept frères : le premier se maria et mourut sans enfant ; de même le deuxième, puis le troisième épousèrent la veuve, et ainsi tous les sept : ils moururent sans laisser d’enfants. Finalement la femme mourut aussi. Eh bien, à la résurrection, cette femme-là, duquel d’entre eux sera-t-elle l’épouse, puisque les sept l’ont eue pour épouse ? »

Jésus leur répondit : « Les enfants de ce monde prennent femme et mari. Mais ceux qui ont été jugés dignes d’avoir part au monde à venir et à la résurrection d’entre les morts ne prennent ni femme ni mari, car ils ne peuvent plus mourir : ils sont semblables aux anges, ils sont enfants de Dieu et enfants de la résurrection. Que les morts ressuscitent, Moïse lui-même le fait comprendre dans le récit du buisson ardent, quand il appelle le Seigneur le Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob. Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants. Tous, en effet, vivent pour lui. »
Patrick BRAUD

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19 août 2015

Voulez-vous partir vous aussi ?

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Voulez-vous partir vous aussi ?

 

Homélie du 21° Dimanche du temps ordinaire / Année B
23/08/2015

Cf. également : La liberté de partir ou de rester

 

« Voulez-vous partir vous aussi ? » (cf. Jn 6, 60-69)

Cette question, beaucoup d’entre nous l’ont posée ou ont du y répondre à un moment crucial de leur vie.

« Veux-tu partir ? » : c’est l’interrogation angoissée dans un couple où l’un des deux ne supporte plus la vie commune.

 « Voulez-vous partir ? » : c’est le constat amer des parents qui s’aperçoivent que leurs enfants veulent quitter la maison dès que possible.

 « Voulez-vous partir vous aussi ? » : c’est l’appel au secours de celui devant qui on se détourne, à cause d’un événement infamant, d’une déroute financière ou d’une maladie trop longue…

Le Christ a lui-même été exposé à ce mouvement contagieux qui fait le vide autour de soi, plus ou moins massivement, plus ou moins rapidement, mais sûrement.

Voulez-vous partir vous aussi ? dans Communauté spirituelle Lapinbleu358C-Jn6_67 

Oser libérer la liberté des proches

Lorsqu’il ose poser cette question à ses intimes – les 12 – Jésus prend un risque réel. Le risque de la solitude. Car l’incompréhension de la grande majorité (« cette parole est trop dure, partons ») commencer à gagner le cercle des disciples. Eux aussi ne comprennent rien à ce discours sur le pain de vie de Jean 6. Eux aussi sont troublés par la radicalité des propos de Jésus : manger son corps, boire son sang, c’est scandaleux ! Inadmissible pour un juif !

Alors, plutôt que de les laisser filer en douce, sans rien dire, Jésus crève l’abcès et prend le risque de provoquer la débandade de la petite troupe qu’il a pourtant laborieusement constituée depuis des mois.

Voilà donc un virage auquel nous sommes confrontés tôt ou tard : me faut-il attendre pour savoir si tel collègue, tel  ami, tel proche est en train de se détourner de moi ? Ou dois-je au contraire poser franchement la question : es-tu toujours avec moi ? Au risque de brusquer et de froisser. Au risque également de susciter une liberté qui peut se retourner contre celui qui la provoque.

Le Christ a cet art du discernement qui lui donne de savoir quand il faut patienter (ex : le bon grain et l’ivraie) et quand il faut trancher (« que votre oui soit oui, que votre non soit non »).
Ici, après un succès populaire (la multiplication des pains) il entend le murmure réprobateur enfler autour de lui après ses paroles sur le pain vivant descendu du ciel. Il voit bien que les rangs s’éclaircissent et que l’enthousiasme n’est plus là. Avant que cette vague de désaffection ne désagrège le collège des 12, Jésus les met devant leur liberté, les appelle à faire un choix personnel, au lieu de suivre le flux majoritaire.

amour_nonpartag%C3%A9 détachement dans Communauté spirituelleCe faisant il s’expose réellement à un abandon de la part des siens. Il ne sait pas ce qu’ils vont répondre. Il n’anticipe pas la réponse de Pierre. Il prend le risque réel de se retrouver seul, ce qui de toute façon arrivera avec le procès devant les tribunaux juif puis romain, et avec la croix : tous s’en iront, tous le fuiront, à l’exception notable de quelques femmes et de Jean. Quand nous remettons ainsi entre les mains  de l’autre sa capacité de décision pour ou contre nous, nous ressentons le même vertige de celui qui est sur la ligne de crête entre soutien et isolement. Dieu ne veut pas la soumission de serviteurs contraints de lui obéir.

Parce que Jésus vit le détachement intérieur (cher à la mystique rhénane), il refuse de posséder ses disciples, de les instrumentaliser. Il est prêt à les laisser partir. Il s’expose à les perdre, avec douleur. Car leur liberté importe plus que leur attachement.

Parce que sa nature est d’aimer, il préfère s’exposer au refus plutôt que de contraindre à le suivre.

En cela, le Christ révèle un Dieu humble, infiniment humble. Le père François Varillon décrivait l’humilité de Dieu comme le secret de son amour pour nous : « Il faut appeler divin l’amour qui est assez fort pour ne pas exiger la réciprocité comme condition de sa constance ».

Ainsi celui qui continue d’aimer celui qui a voulu partir, que ce soit un conjoint, un enfant, un ami ou un collègue, participe à l’être même de Dieu. Il en est divinisé, pourrait-on dire, alors qu’aux yeux du monde c’est une attitude folle. Mieux vaudrait refaire sa vie, oublier l’absent, que de continuer à laisser la porte ouverte, nous disent nos mœurs habituelles.

Oser poser à l’autre la question de son départ, sans le manipuler, sans faire de chantage, demande donc un courage, un amour venant de plus loin que nous-mêmes.

Libérer la liberté de l’autre permet pourtant d’éclaircir la situation, de purifier le trouble : le départ de tel collaborateur vaut peut-être mieux que son maintien forcé dans une ambiance de travail détestable.
La séparation d’avec un conjoint vaut peut-être mieux qu’un enfer quotidien où le non-dit s’accumule.
Et si le collaborateur veut rester, il réaffirmera le projet commun.
Et si le conjoint veut rester, il devra trouver les mots pour dire sur quoi reconstruire.

 

Répondre à la question du Christ

Nous pouvons également nous identifier à Pierre dans ce passage d’évangile. Avouons que sa réponse est mitigée, pas très glorieuse en fait.

« À qui irions-nous ? » sonne comme une résignation peu enthousiaste. Sous-entendu : nous n’avons pas de plan B. Si on te quitte, on ne sait pas quoi faire…

33632686_p disciplesNe méprisons donc pas nos propres réponses lorsqu’elles sont aussi mitigées que celle de Pierre. Pas besoin d’avoir de grands élans intérieurs pour répondre au Christ / à l’autre. Cela commence par un examen lucide explorant des alternatives. Cela peut aussi susciter quelques belles découvertes : « tu as les paroles de la vie éternelle » se surprend à crier Pierre, comme s’il se jetait à l’eau sans savoir nager !

Répondre à la question libère en nous des énergies insoupçonnées. Prendre résolument position pour ou contre nous aide à nous trouver nous-mêmes, à savoir qui nous sommes (« fils de Jonas » pour Pierre), à creuser en nous la source intérieure de notre liberté (« ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux »).
Filer à l’anglaise est une tentation récurrente : ne pas avoir de problèmes, ne pas faire scandale, rester discret…

Oser dire oui ou non est pourtant libérateur.

 

Nous sommes tantôt dans la position de celui qui doit poser la question décisive à l’autre, tantôt à la place de celui qui doit répondre sans détour.

Que l’Esprit du Christ nous apprenne à discerner quand cela arrive, et à quelle liberté, à quel détachement nous sommes ainsi appelés.

 

 

1ère lecture : « Nous voulons servir le Seigneur, car c’est lui notre Dieu » (Jos 24, 1-2a.15-17.18b)
Lecture du livre de Josué

En ces jours-là, Josué réunit toutes les tribus d’Israël à Sichem ; puis il appela les anciens d’Israël, avec les chefs, les juges et les scribes ; ils se présentèrent devant Dieu. Josué dit alors à tout le peuple : « S’il ne vous plaît pas de servir le Seigneur, choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir : les dieux que vos pères servaient au-delà de l’Euphrate, ou les dieux des Amorites dont vous habitez le pays. Moi et les miens, nous voulons servir le Seigneur. » Le peuple répondit : « Plutôt mourir que d’abandonner le Seigneur pour servir d’autres dieux ! C’est le Seigneur notre Dieu qui nous a fait monter, nous et nos pères, du pays d’Égypte, cette maison d’esclavage ; c’est lui qui, sous nos yeux, a accompli tous ces signes et nous a protégés tout le long du chemin que nous avons parcouru, chez tous les peuples au milieu desquels nous sommes passés. Nous aussi, nous voulons servir le Seigneur, car c’est lui notre Dieu. »

Psaume : Ps 33 (34), 2-3, 16-17, 20-21, 22-23

R/ Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur ! (cf. Ps 33, 9)

Je bénirai le Seigneur en tout temps,
sa louange sans cesse à mes lèvres.
Je me glorifierai dans le Seigneur :
que les pauvres m’entendent et soient en fête !

Le Seigneur regarde les justes,
il écoute, attentif à leurs cris.
Le Seigneur affronte les méchants
pour effacer de la terre leur mémoire.

Malheur sur malheur pour le juste,
mais le Seigneur chaque fois le délivre.
Il veille sur chacun de ses os :
pas un ne sera brisé.

Le mal tuera les méchants ;
ils seront châtiés d’avoir haï le juste.
Le Seigneur rachètera ses serviteurs :
pas de châtiment pour qui trouve en lui son refuge.

2ème lecture : « Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église » (Ep 5, 21-32)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Éphésiens

Frères,
par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres ; les femmes, à leur mari, comme au Seigneur Jésus ; car, pour la femme, le mari est la tête, tout comme, pour l’Église, le Christ est la tête, lui qui est le Sauveur de son corps. Eh bien ! puisque l’Église se soumet au Christ, qu’il en soit toujours de même pour les femmes à l’égard de leur mari.

 Vous, les hommes, aimez votre femme à l’exemple du Christ : il a aimé l’Église, il s’est livré lui-même pour elle, afin de la rendre sainte en la purifiant par le bain de l’eau baptismale, accompagné d’une parole ; il voulait se la présenter à lui-même, cette Église, resplendissante, sans tache, ni ride, ni rien de tel ; il la voulait sainte et immaculée. C’est de la même façon que les maris doivent aimer leur femme : comme leur propre corps. Celui qui aime sa femme s’aime soi-même. Jamais personne n’a méprisé son propre corps : au contraire, on le nourrit, on en prend soin.
C’est ce que fait le Christ pour l’Église, parce que nous sommes les membres de son corps. Comme dit l’Écriture :
À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’un. Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église. 

Evangile : « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle » (Jn 6, 60-69)

Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Tes paroles, Seigneur, sont esprit et elles sont vie ; tu as les paroles de la vie éternelle.
Alléluia. (cf. Jn 6, 63c.68c)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

En ce temps-là, Jésus avait donné un enseignement dans la synagogue de Capharnaüm. Beaucoup de ses disciples, qui avaient entendu, déclarèrent : « Cette parole est rude ! Qui peut l’entendre ? » Jésus savait en lui-même que ses disciples récriminaient à son sujet. Il leur dit : « Cela vous scandalise ? Et quand vous verrez le Fils de l’homme monter là où il était auparavant !… C’est l’esprit qui fait vivre, la chair n’est capable de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et elles sont vie. Mais il y en a parmi vous qui ne croient pas. » Jésus savait en effet depuis le commencement quels étaient ceux qui ne croyaient pas, et qui était celui qui le livrerait. Il ajouta : « Voilà pourquoi je vous ai dit que personne ne peut venir à moi si cela ne lui est pas donné par le Père. » 

 À partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s’en retournèrent et cessèrent de l’accompagner. Alors Jésus dit aux Douze : « Voulez-vous partir, vous aussi ? » Simon-Pierre lui répondit : « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Quant à nous, nous croyons, et nous savons que tu es le Saint de Dieu. »
Patrick BRAUD

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14 janvier 2015

Libres ricochets…

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 1 h 00 min

Libres ricochets…

Homélie du 2° Dimanche Année du temps ordinaire / Année B 
18/01/2015

cf. également :  Quel Éli élirez-vous ?

·         Avez-vous déjà médité sur ce jeu que les enfants adorent au bord d’un lac : les ricochets… ?

Vous choisissez un caillou bien plat. Normalement, il doit couler. Normalement, il ne peut pas traverser le lac. Mais si vous lui imprimez une vitesse de rotation assez grande, grâce à un coup de poignet astucieux – auquel enfant je m’exerçais pendant des heures ! – et si vous le propulsez au ras de l’eau avec une trajectoire tangentielle et une force bien choisies, alors vous avez la surprise de voir ce caillou voler… rebondir… et de ricochet en ricochet accomplir l’impensable : traverser l’eau, aller d’une rive à l’autre…

·         C’est un peu ce qui se passe dans l’évangile d’aujourd’hui (Jn 1, 35-42) : l’appel à suivre le Christ ricoche des uns aux autres, les entraînant là où ils n’auraient jamais pensé pouvoir aller. Jean-Baptiste « lance » ses deux disciples à la suite de Jésus (et Dieu sait si pour un prophète comme Jean- Baptiste c’était dur à l’époque de « donner » ses disciples à un autre maître). L’un de ces deux, André, va chercher son frère Simon, et le propulse ainsi dans l’aventure où il deviendra Pierre (c’est-à-dire l’aventure de l’Église). Juste après, Philippe va chercher Nathanaël…

Libres ricochets… dans Communauté spirituelle 102awebIl en est souvent ainsi dans l’évangile de Jean : c’est par ricochets que l’appel se transmet d’une personne à une autre, constituant l’Église, de proche en proche. Et cet appel donnera à ces hommes et à ces femmes de traverser toutes les épreuves, de traverser la mort même, comme le caillou tout surpris de voler de rebond en rebond vers l’autre rive…

·         Si nous pratiquions cet appel « par ricochets », n’aurions-nous pas plus de chrétiens motivés ? plus de prêtres, de religieuses ? Demandez aux prêtres et religieuses que vous connaissez : c’est souvent grâce à telle rencontre, telle discussion, telle retraite avec d’autres, que le Christ leur a dit : « viens ». C’est rarement en direct !

Comme l’appel de Samuel (1° lecture), il y a toujours un Élie, un visage ami qui révèle ce que je porte en moi confusément et que je n’arrive pas à entendre du premier coup.

De ricochet en ricochet, Dieu fait feu de tout bois pour, patiemment, m’appeler à le rejoindre…

 

·   Mais si cet appel est une invitation très ferme : « viens », il est en même temps infiniment respectueux de la liberté : « viens et vois ». Plus encore : il suscite la liberté, il l’informe (au double sens de lui donner des informations pour décider oui  ou non, et de lui donner une formation pour l’éduquer à répondre).

.  La « Lettre aux catholiques de France » (1996) sur la « proposition de la foi » décrivait ainsi cette transformation de la pastorale de l’Eglise :

Dans la mise en œuvre de la mission de l’Église selon ses modalités les plus habituelles, notamment dans la vie des paroisses et dans la pastorale des sacrements, une transformation du même ordre est en train de se produire. Des institutions ecclésiales « classiques », qui semblaient ne rien réclamer d’autre que la conformité à des procédures bien rodées, réclament aujourd’hui, sous peine de dépérir, d’être incessamment améliorées, vérifiées, relancées. Ce qu’il suffisait naguère d’entretenir doit être aujourd’hui voulu et soutenu. Toutes sortes de démarches qu’une population majoritairement catholique nous demandait, en se coulant dans des automatismes communément admis, doivent être désormais proposées comme l’objet d’un choix.

De sorte que la pastorale dite « ordinaire », souvent vécue comme une pastorale de l’accueil, doit de plus en plus devenir aussi une pastorale de la proposition. Cette évolution a quelque chose d’onéreux. Certains la vivent comme une véritable épreuve. Mais de plus en plus nombreux sont les prêtres et les laïcs qui disent s’en trouver mûris et renouvelés dans leur foi. Un nombre croissant de pasteurs et, plus largement, d’acteurs de la pastorale comprennent qu’il y a là une exigence de la mission. Ils se découvrent du même coup appelés à aller davantage au cœur même de la foi. (n° 2)

.    Proposer la foi n’est pas l’imposer.

Nous ne sommes pas des témoins de Jéhovah ou des sectes cherchant à manipuler l’adhésion de leurs membres. Plusieurs fois le Christ a pris le risque de la libre réponse de ses amis : « voulez-vous partir vous aussi ? » demande-t-il aux 12 lorsque la foule le quitte, déçue par ses paroles trop fortes sur l’eucharistie. Sans cesse il appelle :« si tu veux… ». Le jeune homme riche d’ailleurs s’en va, librement (même s’il en est tout triste).

Autrement dit, le fait d’appeler quelqu’un suscite et fait grandir sa liberté.

C’est le débat – quelque fois difficile – que nous avons souvent avec des parents qui demandent le baptême de leur enfant.

« Voudrez-vous lui parler du Christ et de l’Évangile, l’inscrire au caté en CE2 pour qu’il puisse découvrir ce qu’il y a dans son baptême ? »

« Mais nous on ne veut rien lui imposer, il choisira plus tard… »

« Comment voulez-vous qu’il choisisse si vous ne l’appelez pas à choisir ? comment choisir de faire du rugby si jamais les parents ne l’inscrivent au club ? idem pour la danse, la musique, le tennis… Allez-vous violer sa liberté quand vous lui imposerez l’école obligatoire ? quand vous lui apprendrez à être propre ? à respecter les règles de politesse et de vie en commun ?… »

 

·         C’est une fausse conception de la liberté de croire qu’on pourrait choisir dans le vide. Ne rien proposer, c’est enfermer l’autre dans l’impuissance, dans le non-choix. Appeler quelqu’un librement, c’est lui donner les moyens de dire oui ou non, et respecter sa réponse.

 

* appeler-au-mariage-de-dinechin-olivier-de-885878209_ML appel dans Communauté spirituelleC’est ce que nous essayons de faire au caté lorsque nous demandons aux enfants d’écrire une lettre, très personnelle, au moment où ils sont appelés à faire leur 1° communion. Ce n’est pas automatique de faire sa 1° communion : c’est la réponse à un appel, qui fonde et garantit leur liberté. S’ils ne le veulent pas cette année, alors ce sera peut-être l’année prochaine, ou dans 15 ans… Dieu est patient ! Il est également tenace, voire têtu, et ne renonce pas facilement à appeler chacun à vivre davantage…

 

* C’est ce que nous essayons de faire avec les futurs mariés : il n’est pas rare que, grâce à la préparation sérieuse qui s’étale sur plusieurs mois (1 an en pratique), ils réfléchissent et découvrent d’eux-mêmes qu’ils ne sont pas prêts ou pas volontaires pour le sacrement de mariage. Librement, ils peuvent alors dire oui ou non à l’appel que leur lance l’Église pour être dans le mariage sacrements de l’amour de Dieu, avec tout ce que cela comporte.

 

·         Vous voyez : lancer des ricochets au bord de l’eau peut nous entraîner très très loin ! De visage en visage, d’appels en rencontres, de discussions en événements intérieurs, nous nous surprendrons nous-mêmes à voler de rive en rive.

Caillou lancé avec force et agilité, tournoyant sans cesse sur lui-même, chacun pourra non seulement ne pas se laisser engloutir par les flots à traverser, mais aller de l’avant, vers son avenir, vers lui-même, au-delà…

 

·         Que ces libres ricochets continuent de nourrir la pratique de l’appel en Église : appel pour devenir catéchiste, pour fleurir l’église, pour accompagner les familles en deuil etc… Si nous transmettons à d’autres cette invitation, c’est pour que nos paroisses, nos communautés  soient de plus en plus invitantes, à l’école même du Christ : « venez, et vous verrez »

 

1ère lecture : Vocation de Samuel (1S 3, 3b-10.19)

Lecture du premier livre de Samuel

Samuel couchait dans le temple du Seigneur, où se trouvait l’arche de Dieu. Le Seigneur appela Samuel, qui répondit : « Me voici ! » Il courut vers le prêtre Éli, et il dit : « Tu m’as appelé, me voici. » Éli répondit : « Je ne t’ai pas appelé. Retourne te coucher. » L’enfant alla se coucher. De nouveau, le Seigneur appela Samuel. Et Samuel se leva. Il alla auprès d’Éli, et il dit : « Tu m’as appelé, me voici. » Éli répondit : « Je ne t’ai pas appelé, mon fils. Retourne te coucher. » Samuel ne connaissait pas encore le Seigneur, et la parole du Seigneur ne lui avait pas encore été révélée.
Une troisième fois, le Seigneur appela Samuel. Celui-ci se leva. Il alla auprès d’Éli, et il dit : « Tu m’as appelé, me voici. » Alors Éli comprit que c’était le Seigneur qui appelait l’enfant, et il lui dit : « Retourne te coucher, et si l’on t’appelle, tu diras : ‘Parle, Seigneur, ton serviteur écoute.’ » Samuel retourna se coucher. Le Seigneur vint se placer près de lui et il appela comme les autres fois : « Samuel ! Samuel ! » et Samuel répondit : « Parle, ton serviteur écoute. »
Samuel grandit. Le Seigneur était avec lui, et aucune de ses paroles ne demeura sans effet.

Psaume : 39, 2abc.4ab, 7-8a, 8b-9, 10cd.11cd

R/ Me voici, Seigneur, je viens faire ta volonté.

D’un grand espoir j’espérais le Seigneur :
il s’est penché vers moi.
En ma bouche il a mis un chant nouveau,
une louange à notre Dieu.

Tu ne voulais ni offrande ni sacrifice,
tu as ouvert mes oreilles ;
tu ne demandais ni holocauste ni victime,
alors j’ai dit : « Voici, je viens. »

Dans le livre, est écrit pour moi
ce que tu veux que je fasse.
Mon Dieu, voilà ce que j’aime :
ta loi me tient aux entrailles.

Vois, je ne retiens pas mes lèvres,
Seigneur, tu le sais.
J’ai dit ton amour et ta vérité
à la grande assemblée.

2ème lecture : Notre corps appartient au Seigneur (1Co 6, 13b-15a.17-20)

Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères,
notre corps n’est pas fait pour la débauche, il est pour le Seigneur Jésus, et le Seigneur est pour le corps ; et Dieu, par sa puissance, a ressuscité le Seigneur et nous ressuscitera nous aussi. Ne le savez-vous pas ? Vos corps sont les membres du Christ. Quand on s’unit au Seigneur, cela ne fait qu’un seul esprit. Fuyez la débauche. Tous les péchés que l’homme peut commettre sont extérieurs à son corps ; mais la débauche est un péché contre le corps lui-même.
Ne le savez-vous pas ? Votre corps est le temple de l’Esprit Saint, qui est en vous et que vous avez reçu de Dieu ; vous ne vous appartenez plus à vous-mêmes, car le Seigneur a payé le prix de votre rachat. Rendez donc gloire à Dieu dans votre corps.

Evangile : Vocation des trois premiers disciples (Jn 1, 35-42)

Acclamation : Alléluia. Alléluia.
En Jésus Christ, nous avons reconnu le Messie : par lui nous viennent grâce et vérité. Alléluia. (cf. Jn 1, 41.17)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

Jean Baptiste se trouvait avec deux de ses disciples. Posant son regard sur Jésus qui allait et venait, il dit :
« Voici l’Agneau de Dieu. »
Les deux disciples entendirent cette parole, et ils suivirent Jésus. Celui-ci se retourna, vit qu’ils le suivaient, et leur dit :
« Que cherchez-vous ? »
Ils lui répondirent : « Rabbi (c’est-à-dire : Maître), où demeures-tu ? »
Il leur dit : « Venez, et vous verrez. »
Ils l’accompagnèrent, ils virent où il demeurait, et ils restèrent auprès de lui ce jour-là.
C’était vers quatre heures du soir.
André, le frère de Simon-Pierre, était l’un des deux disciples qui avaient entendu Jean Baptiste et qui avaient suivi Jésus. Il trouve d’abord son frère Simon et lui dit : « Nous avons trouvé le Messie (autrement dit : le Christ).
André amena son frère à Jésus. Jésus posa son regard sur lui et dit : « Tu es Simon, fils de Jean ; tu t’appelleras Képha » (ce qui veut dire : pierre).
Patrick BRAUD

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