Christ-Roi : Comme larrons en foire
Christ-Roi : Comme larrons en foire
Homélie pour la fête du Christ-Roi / Année C
20/11/2022
Cf. également :
Le préfet le plus célèbre
Christ-Roi : Reconnaître l’innocent
La violence a besoin du mensonge
Non-violence : la voie royale
Le Christ-Roi, Barbara et les dinosaures
Roi, à plus d’un titre
Divine surprise
Le Christ Roi fait de nous des huiles
D’Anubis à saint Michel
Faut-il être humble ou jupitérien pour gouverner ?
Roi, à plus d’un titre
Les trois tentations du Christ en croix
Entre le pont et l’eau
C’est le curé d’Ars qui a cette formule pleine d’espoir, devenue presque proverbiale : « entre le pont et l’eau, il y a la miséricorde ». Lors d’une messe matinale le 18 mars 2019, le Pape François raconte : « Souvenons-nous de cette pauvre veuve qui est allée se confesser au Curé d’Ars (son mari s’était suicidé ; il s’était jeté d’un pont dans un fleuve). Et elle pleurait, disant : “… Mon pauvre mari ! Il est en enfer ! Il s’est suicidé et le suicide est un péché mortel. Il est en enfer”. Et le Curé d’Ars lui dit : “Mais, attendez Madame, entre le pont et l’eau, il y a la miséricorde de Dieu”. Jusqu’à la fin, la toute fin, il y a la miséricorde de Dieu ».
En cette fête du Christ Roi, l’Évangile (Lc 23,35-43) met le focus sur la Crucifixion du Roi des Juifs. Entre la suspension au gibet et la descente de croix, il y a la miséricorde dont bénéficie pleinement le bon larron. Au dernier moment, in extremis, tout malfaiteur peut donc s’entendre dire : « aujourd’hui, tu seras avec moi en paradis » [1].
C’est l’une des raisons majeures de l’opposition de l’Église catholique à la peine de mort [2] : il faut laisser le temps au pécheur de se convertir, car rien n’est jamais perdu tant que le dernier souffle n’est pas rendu. Formidable espérance, qui scandalise les justes, subjugue les coupables et soulève les gueux !
Bon larron ou mafieux repenti ?
Nulle part dans l’Évangile il n’est écrit que ce bandit est « bon ». Ni même à la droite de Jésus comme les apocryphes le prétendent [3]. On sait seulement qu’il comprend de l’intérieur la souffrance de Jésus crucifié, et qu’il en est bouleversé. Condamné à « la même peine » (Lc 23,40) que lui, il mesure la déchéance, l’abaissement, l’ignominie de cette mort infamante infligée à Jésus. Coupable (de quels méfaits ? Mystère…), il s’indigne que l’innocent soit assimilé à la racaille, que la justice romaine commette la pire des injustices : assassiner celui qui n’a rien fait de mal.
Nous devrions écouter davantage les protestations des moins-que-rien de notre société lorsqu’ils dénoncent avec colère les injustices commises contre les innocents, couvertes par le système judiciaire et les appareils politiques !
La démarche de conversion in extremis de ce larron repenti est en trois étapes, qui demeurent structurantes de notre propre conversion : reconnaître le mal commis (« nous avons ce que nous méritons »), dire la vérité sur les innocents (« lui n’a rien fait de mal »), implorer la miséricorde avec confiance (« souviens-toi de moi »).
Si l’on veut actualiser cette démarche, il suffit de penser au processus qui permet à un mafieux de quitter la Cosa Nostra : avouer ses propres crimes, dire qui est innocent et qui est coupable et de quoi (et donc dénoncer les autres membres mafieux par son témoignage), demander la protection de l’État (la fameuse protection des témoins) pour pouvoir ensuite se réinsérer comme citoyen ordinaire. Le bon larron ressemble plus à un mafieux repenti qu’à une icône de sainteté… Rappelons qu’aucun des quatre Évangiles ne l’appelle « bon » : il a fait le mal (et sans doute beaucoup !), il s’en détourne, et il espère le pardon.
Notons au passage que ce larron fait voler en éclats la doctrine de la rétribution morale chère aux pharisiens de toutes les époques !
Celui qui n’a rien fait a été condamné, le tout-innocent est exécuté comme un bandit. Si celui qui n’a rien fait est puni, peut-on encore dire qu’il est juste de punir les coupables ?
Le Christ est à l’œuvre pour sauver les coupables, et la morale de convention de Dismas, le bon larron, explose à jamais dans le désaveu évangélique. Étonnamment, Jésus sur la croix rend caduques les condamnations, comme si sa propre condamnation avait levé toute accusation, sur les justes comme sur les coupables. Comment dès lors condamner quelqu’un, puisque Jésus est le Roi des pires ? Pourquoi continuer à chanter que c’est la morale qui sauve, alors que la foi fait entrer le criminel en premier au paradis ?
Reste que les trois étapes de la techouva (retournement) de ce larron vers Jésus sont aussi les nôtres : confesser nos péchés, dire la vérité, demander miséricorde. Les icônes et les peintures de la Crucifixion montrent presque toutes le larron de droite tournant son visage vers Jésus au centre, alors que celui de gauche regarde ostensiblement ailleurs, ou en bas.
Faire techouva, c’est bien se tourner vers le Christ, confiant en sa miséricorde [4].
« Voyez-vous la confession parfaite ? Voyez-vous comment sur la croix il s’est déchargé de ses fautes ? Car il est écrit : Commence par confesser toi-même tes fautes afin que tu sois justifié. (Is. 43,26.) Personne ne l’a forcé, personne ne lui a fait violence, mais il s’est fait connaître volontairement en disant : Nous du moins nous sommes punis justement, puisque nous souffrons la peine que nos crimes ont méritée ; mais lui n’a fait aucun mal (Lc 23,41-42), et il ajoute ensuite : Souviens-toi de moi, Seigneur, dans ton royaume. Il n’a pas osé dire : Souviens-toi de moi dans ton royaume avant d’avoir déposé par la confession, le fardeau de ses péchés. Comprenez-vous maintenant le prix de la confession ? Le larron se confessa et il ouvrit le ciel; il se confessa et il acquit une telle confiance qu’ayant à peine cessé d’être voleur il demanda le ciel. De quels biens la croix n’a-t-elle pas été pour nous la source ? Vous prétendez à un royaume, mais qu’est-ce qui l’indique ? Des clous, une croix, voilà ce qui nous apparaît; mais cette croix est désormais un signe de royauté. J’appelle Jésus-Christ roi, parce que je le vois crucifié car c’est le propre d’un roi de mourir pour ses sujets. Lui-même a dit : Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis (Jn 10,11), donc aussi le bon roi donne sa vie pour ses sujets. Et parce qu’il a donné sa vie, je l’appelle roi. Souviens-toi de moi, Seigneur, dans ton royaume ».
Homélie de saint Jean Chrysostome (+ 407) sur la croix et le larron.
Mauvais larron ou disciple déçu ?
Un jésuite espagnol, Ariel Alvarez Valdès, bibliste à l’université pontificale de Salamanque, avance une hypothèse assez audacieuse au sujet des deux larrons : ils seraient probablement des disciples de Jésus, arrêtés avec lui, et non des malfaiteurs sans rapport avec lui [5].
Les arguments en faveur de sa thèse sont nombreux :
– La croix était le châtiment romain réservé, non aux malfaiteurs de droit commun, mais aux criminels politiques : esclaves révoltés (cf. Spartacus), rebelles coupables d’émeute, de sédition, de refus de l’autorité de César. Il est vraisemblable que les deux agitateurs politiques crucifiés en même temps que Jésus aient un lien direct avec lui.
– Il est peu probable par contre que différentes personnes condamnées le même jour, à la même heure, en un même lieu, pour la même raison, par le même gouverneur à une même peine n’aient aucun lien entre elles. Par ailleurs, on n’assistait pas non plus tous les jours à des soulèvements politiques en Judée, ce qui permettrait de supposer qu’il s’agissait de trublions de l’ordre public appartenant à une révolte différente de celle de Jésus. Tous deux subissent « la même peine » que Jésus, et lui sont donc associés, car le terme « peine » (krima, en grec) désigne l’ensemble du procès et de la condamnation, pas seulement le supplice.
– La grande peur de Pierre devant la servante du grand prêtre est d’être reconnu comme un disciple de Jésus, ce qui lui vaudrait la Crucifixion à lui aussi. D’ailleurs, la servante dit : « N’es-tu pas, toi aussi, l’un des disciples de cet homme ? » (Jn 18,17), en employant le pluriel comme si Jésus avait été arrêté avec quelques-uns de ses complices : « N’es-tu pas, toi aussi, l’un des disciples de cet homme ? ». Et quand les gardes disent : « toi aussi… » (Jn 18,25), n’est-ce pas parce qu’ils sont plusieurs à avoir été arrêtés ?
– Pourquoi mettre Jésus au milieu des deux autres ? Sinon parce qu’il était leur chef de bande, comme l’attestent toutes les symboliques royales, bibliques et romaines. Au I° siècle, par exemple, Philon d’Alexandrie mentionne le cas d’un fou nommé Carabas que des gens voulaient ridiculiser et qu’ils déguisèrent en roi, tandis que quelques jeunes gens se plaçaient à sa droite et à sa gauche, en simulacre de suite royale.
« La place d’un médiateur est au milieu…
Sur le Calvaire, Il apparaît au milieu de deux voleurs, et du bon (larron), il se fait connaître pour Dieu » (St Éphrem).
La place de Jésus au milieu pourrait bien indiquer qu’il était le chef des deux autres.
– En l’appelant Messie, le larron injurieux montre qu’il connaît bien la prétention messianique de Jésus. Si cet homme est un délinquant ordinaire, on ne comprend pas son propos. Comment un simple voleur qui ne connaissait pas Jésus pourrait-il croire qu’il est le Messie ? Et pourquoi attendrait-il que ce Messie, l’envoyé de Dieu, le sauve, lui et le complice de ses mauvais coups ? On a donc l’impression que cet homme connaît Jésus, qu’il a participé à son projet messianique et qu’il a été traduit en justice pour l’avoir suivi en tant que Messie. Ainsi, l’on comprend qu’avec son compagnon, il attende le salut, puisqu’ils ont cru en lui.…
– À l’inverse, l’autre larron l’appelle Jésus, ce qui est assez rare dans les Évangiles, et démontre une certaine familiarité entre eux. Ce qui est illogique dans la bouche d’un délinquant qui le verrait pour la première fois. Ce qui s’explique s’il le connaissait avant et avait un certain lien avec lui. D’autre part cet homme est persuadé que Jésus est roi et qu’il a le pouvoir de le faire entrer dans son Royaume. Cela signifie qu’il avait accepté ses enseignements et lui demeurait fidèle, malgré son échec apparent.
- Nous savons qu’en plus des Douze, Jésus avait un groupe de disciples plus nombreux qui l’accompagnaient et coopéraient au sein de son mouvement. Luc mentionne les 72 (Lc 10,1) disciples envoyés deux par deux. Quelques-uns l’aidèrent même pendant les derniers jours à Jérusalem, notamment ceux qui lui prêtèrent l’âne sur lequel il entra dans la ville (Mc 11,1-6), ou qui préparèrent la chambre pour le dernier repas (Mc 14,12-16). C’est peut-être à ce groupe élargi de collaborateurs anonymes que devaient appartenir les deux hommes arrêtés et crucifiés avec Jésus en ce Vendredi saint funeste.
On peut cependant faire deux objections à cette thèse :
– Pourquoi les évangiles n’ont-ils jamais précisé que les hommes crucifiés avec Jésus étaient ses disciples ?
Alvarez Valdès propose une explication : très tôt, la conception de la mort salvatrice de Jésus devint centrale chez les premiers chrétiens. En d’autres termes, on élabora la thèse selon laquelle Jésus avait donné sa vie pour nous, que sa mort sur la croix était rédemptrice et que son sang avait été versé pour le pardon des péchés. Ainsi, la crucifixion devint l’évènement central de sa vie et on lui attribua une valeur salvatrice unique et incomparable. Dans ce contexte, un Jésus mourant pour le Royaume en compagnie de deux autres disciples diminuait la centralité et l’exclusivité de sa mort. C’est pourquoi la tradition a rapidement oublié l’identité de ces deux disciples et le silence se fit à leur sujet, pour conforter la conviction que Jésus est le seul juste à mourir pour nous.
– S’il est disciple, pourquoi le bon larron reconnaît-t-il qu’il a commis le mal et qu’il n’a que ce qu’il mérite (Lc 23,41) ?
Suivre Jésus n’est pas un crime pour lui, et il n’a aucune raison de s’en accuser…
Peut-être Luc, lorsqu’il imagine ce dialogue, que les trois autres évangélistes ne racontent pas, veut-il forcer le contraste entre l’innocence de Jésus et le péché de tout homme ? Il changerait alors le disciple fidèle en larron repenti, pour mieux montrer que Jésus est le seul innocent capable de racheter les coupables. Isaïe l’annonçait : « mon serviteur s’est dépouillé lui-même jusqu’à la mort, et il a été compté avec les pécheurs, alors qu’il portait le péché des multitudes et qu’il intercédait pour les pécheurs » (Is 53,12).
Quoiqu’il en soit, l’intérêt de cette thèse d’Alvarez Valdès est de nous montrer combien l’arrestation de Jésus désarçonne et déçoit, même ses proches. Le mauvais larron – qui n’est ni mauvais, ni délinquant ordinaire – est en colère contre Jésus, car son échec est l’échec de ses disciples, qui avaient tout misé sur lui. Sa colère présente est à la mesure de son espérance passée : plus on aimait, plus on est déçu, et plus on est violent envers celui qui a déçu. Les fans brûlent vite ce qu’ils ont adoré si leur idole les déçoit. Les supporters de football descendent sur la pelouse le 1er octobre 2022 et font 125 morts en Indonésie lorsque leur équipe les déçoit en perdant le match…
La colère du « mauvais » larron est à la mesure de son amour pour le Christ : immense, mais déçu. Pourtant, lui aussi dit la vérité sur Jésus : « N’es-tu pas le Messie ? » Lui aussi implore sa miséricorde : « Sauve-nous avec toi ». N’est-ce pas là également une prière adressée au crucifié ?
Il est presque plus altruiste que l’autre larron, puisqu’il demande le salut pour les trois (« Sauve-nous »), alors que l’autre ne demande que son salut personnel (« souviens-toi de moi ») !
Pourquoi Jésus n’a-t-il pas exaucé cette prière d’un ancien disciple ? Parce que cela lui demanderait de se renier lui-même. En effet, sans le savoir (mais Luc le sait !), ce disciple déçu utilise le raisonnement tentateur par lequel Satan incite Jésus à se donner à lui-même le salut. « Si tu es… alors… » (Lc 4,1-13). D’ailleurs, Luc fait exprès de mentionner par trois fois cette ultime tentation de Jésus sur la croix : ici avec le larron, avec les chefs du peuple, avec les soldats. La mention par trois fois de ce « sauve-toi toi-même » fait donc explicitement référence aux trois tentations de Jésus au désert. Sur la croix, Jésus combat la tentation ultime d’être à lui-même sa propre source, ce qui le détournerait de son identité fondamentale de fils de Dieu, se recevant tout entier d’un Autre. Le salut vient de l’autre… Jésus ne peut ainsi exaucer le mauvais larron sans se renier lui-même.
La tentation occidentale de l’individualisme forcené, de l’auto-rédemption, de l’autonomie absolue, n’est donc pas nouvelle ! C’est toujours notre combat de réfuter cette vision trop libérale de l’être humain comme individu et non comme personne, comme indépendant et non en relation, comme seule source de sa loi et non allié avec Dieu, comme affranchi de toute transcendance et non créature aimée par plus grande qu’elle…
Ajoutons que ce larron, qui décidément n’est pas mauvais en soi, n’est pas promis à l’enfer comme l’autre est promis au paradis. Le texte ne dit pas où il a été après sa mort. Nous n’en savons rien, c’est bien ainsi. Entre le pont et l’eau…
La trace de cette dissymétrie entre les deux larrons est la dissymétrie que l’Église catholique maintient entre le ciel et l’enfer : nous savons que l’un est rempli de multitudes, et nous espérons que l’autre soit vide [6]. Nous canonisons Jean-Paul II, sûrs de le savoir en paradis, mais nous ne diabolisons pas Staline, incapables d’affirmer qu’il serait en enfer. Le deuxième larron nous oblige à ne jamais condamner définitivement quelqu’un, même s’il semble s’obstiner. Car en fait, il est peut-être ce disciple attendant trop du Christ, déçu de son impuissance apparente, qui voudrait réveiller l’efficacité magique qu’il lui attribuait. Comme Jésus le constatait pour les soldats le clouant au bois, « il ne sait pas ce qu’il fait », et manifeste à son insu que la tentation ultime est de ne compter que sur soi…
Comme larrons en foire
L’expression vient du Moyen Âge, où les foires au bétail sur les places publiques des villages attiraient les voleurs de tout genre. Ils opéraient souvent par paire, comme les enfants Roms détroussant les voyageurs du métro : l’un détourne l’attention, l’autre glisse la main dans le sac ou subtilise le portefeuille. S’entendre comme larrons en foire est le signe d’une complicité manifeste, et efficace, pour le mal en l’occurrence. Jésus et l’un des criminels s’entendent comme larrons en foire, mais cette fois-ci pour faire le bien. En cette fête du Christ Roi, le Golgotha pourrait bien être cette Foire du Trône ou le Roi de gloire, sur son trône paradoxal, s’entend à merveille avec les criminels qui se tournent vers lui.
Quitte à provoquer l’incompréhension des ‘gens bien’, car si même les pires coupables sont les premiers en paradis, à quoi sert de vouloir être ‘impeccable’ ?
Comme le chantait Georges Brassens (L’Assassinat) :
Alors, prise d’un vrai remords Elle eut chagrin du mort
Et, sur lui, tombant à genoux, Ell’ dit : » Pardonne-nous ! «
Quand les gendarm’s sont arrivés En pleurs ils l’ont trouvée
C’est une larme au fond des yeux Qui lui valut les cieux
Et le matin qu’on la pendit Ell’ fut en paradis
Certains dévots, depuis ce temps Sont un peu mécontents
Laissons la scène du Golgotha faire son chemin en nous cette semaine, et la royauté du Christ nous aidera à « espérer pour tous », et d’abord pour nous-même…
« Ils ne se dirent rien d’autre, les deux crucifiés, en ce jour d’angoisse et de souffrance, mais ces quelques paroles, qui jaillissent péniblement de leurs gorges desséchées, se font encore entendre aujourd’hui et elles résonnent toujours comme un signe de confiance et de salut pour celui qui a péché mais qui aussi a cru et espéré, fût-ce à la toute dernière extrémité de sa vie ».
Méditation de Benoît XVI, Onzième Station du chemin de Croix du Vendredi saint 2017.
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[1]. Si on prend les mots du Christ au pied de la lettre, le bon larron est censé avoir précédé de trois jours au Paradis le Christ et les âmes qu’il ramenait avec lui des Enfers. Ce n’est pas la moindre des difficultés de cette version de Luc…
[2]. « On a mis au point des systèmes de détention plus efficaces pour garantir la sécurité à laquelle les citoyens ont droit, et qui n’enlèvent pas définitivement au coupable la possibilité de se repentir. C’est pourquoi l’Église enseigne, à la lumière de l’Évangile, que la peine de mort est inadmissible car elle attente à l’inviolabilité et à la dignité de la personne, et elle s’engage de façon déterminée en vue de son abolition partout dans le monde » (Catéchisme de l’Église catholique, n° 2267).
[3]. Les quatre Évangiles ne précisent ni le nom des larrons, ni l’emplacement de leurs croix. Mais l’Évangile de Nicodème (apocryphe) au IV° siècle baptise le Bon et le Mauvais Larron Dysmas et Gestas, et les place respectivement à droite et à gauche du Christ, en position d’honneur et en position d’infamie traditionnelles pour les cours des rois de ce monde, ainsi que pour le Jugement dernier (Mt 25).
[4]. Cf. un très bon article sur les deux larrons dans la peinture : https://artifexinopere.com/blog/interpr/iconographie/la-croix-du-bon-larron/1-distinguer-les-larrons/
[5]. Cf. https://www.choisir.ch/religion/bible/item/3114-qui-etaient-les-hommes-crucifies-avec-jesus
[6]. Cf. Hans Urs von Balthasar, Espérer pour tous, DDB, 1993.
Le mauvais larron
Paroles et musique de Georges Moustaki
J’aurais pu être celui-là
Qui t’a vu mourir sous la croix,
Un de tes derniers compagnons,
Le mauvais larron.
Bien sûr, j’ai mérité la corde
Plutôt que la miséricorde.
Je suis du gibier des prisons,
Le mauvais larron – mauvais larron – mauvais larron.
Bref, j’étais capable de tout
à part de tendre l’autre joue.
Je n’ai pas demandé pardon
D’être un larron.
J’ai pris ce que je pouvais prendre,
Les coups, l’argent, les filles tendres.
Elles trouvaient bien assez bon
Le mauvais larron – mauvais larron – mauvais larron.
Aujourd’hui je suis comme toi,
Quand tu n’avais dessus ta croix
Pour ultime fréquentation
Que les deux larrons.
Je n’ai plus rien qui me console.
Peut-être, en guise d’auréole,
On verra briller sur mon front
Le mauvais larron – mauvais larron – mauvais larron.
C’était peut-être un vendredi
Qu’il est allé au paradis
Par le chemin de la Passion
Des mauvais larrons.
Abandonné entre deux mondes
Jusqu’à sa dernière seconde,
Ainsi chantait de sa prison
Le mauvais larron – mauvais larron – mauvais larron.
LECTURES DE LA MESSE
PREMIÈRE LECTURE
« Ils donnèrent l’onction à David pour le faire roi sur Israël » (2 S 5, 1-3)
Lecture du deuxième livre de Samuel
En ces jours-là, toutes les tribus d’Israël vinrent trouver David à Hébron et lui dirent : « Vois ! Nous sommes de tes os et de ta chair. Dans le passé déjà, quand Saül était notre roi, c’est toi qui menais Israël en campagne et le ramenais, et le Seigneur t’a dit : ‘Tu seras le berger d’Israël mon peuple, tu seras le chef d’Israël.’ » Ainsi, tous les anciens d’Israël vinrent trouver le roi à Hébron. Le roi David fit alliance avec eux, à Hébron, devant le Seigneur. Ils donnèrent l’onction à David pour le faire roi sur Israël.
PSAUME
(Ps 121 (122), 1-2, 3-4, 5-6)
R/ Dans la joie, nous irons à la maison du Seigneur. (cf. Ps 121, 1)
Quelle joie quand on m’a dit :
« Nous irons à la maison du Seigneur ! »
Maintenant notre marche prend fin
devant tes portes, Jérusalem !
Jérusalem, te voici dans tes murs :
ville où tout ensemble ne fait qu’un !
C’est là que montent les tribus, les tribus du Seigneur,
là qu’Israël doit rendre grâce au nom du Seigneur.
C’est là le siège du droit,
le siège de la maison de David.
Appelez le bonheur sur Jérusalem :
« Paix à ceux qui t’aiment ! »
DEUXIÈME LECTURE
« Dieu nous a placés dans le Royaume de son Fils bien-aimé » (Col 1, 12-20)
Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Colossiens
Frères, rendez grâce à Dieu le Père, qui vous a rendus capables d’avoir part à l’héritage des saints, dans la lumière. Nous arrachant au pouvoir des ténèbres, il nous a placés dans le Royaume de son Fils bien-aimé : en lui nous avons la rédemption, le pardon des péchés. Il est l’image du Dieu invisible, le premier-né, avant toute créature : en lui, tout fut créé, dans le ciel et sur la terre. Les êtres visibles et invisibles, Puissances, Principautés, Souverainetés, Dominations, tout est créé par lui et pour lui. Il est avant toute chose, et tout subsiste en lui. Il est aussi la tête du corps, la tête de l’Église : c’est lui le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin qu’il ait en tout la primauté. Car Dieu a jugé bon qu’habite en lui toute plénitude et que tout, par le Christ, lui soit enfin réconcilié, faisant la paix par le sang de sa Croix, la paix pour tous les êtres sur la terre et dans le ciel.
ÉVANGILE
« Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume » (Lc 23, 35-43)
Alléluia. Alléluia. Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. Béni soit le Règne qui vient, celui de David notre père. Alléluia. (cf. Mc 11, 9b.10a)
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là, on venait de crucifier Jésus, et le peuple restait là à observer. Les chefs tournaient Jésus en dérision et disaient : « Il en a sauvé d’autres : qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu ! » Les soldats aussi se moquaient de lui ; s’approchant, ils lui présentaient de la boisson vinaigrée, en disant : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même ! »
Il y avait aussi une inscription au-dessus de lui : « Celui-ci est le roi des Juifs. » L’un des malfaiteurs suspendus en croix l’injuriait : « N’es-tu pas le Christ ? Sauve-toi toi-même, et nous aussi ! » Mais l’autre lui fit de vifs reproches : « Tu ne crains donc pas Dieu ! Tu es pourtant un condamné, toi aussi ! Et puis, pour nous, c’est juste : après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons. Mais lui, il n’a rien fait de mal. » Et il disait : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume. » Jésus lui déclara : « Amen, je te le dis : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. »
Patrick BRAUD
Mots-clés : croix, larron, roi