L'homélie du dimanche (prochain)

11 novembre 2015

Lire les signes des temps

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Lire les signes des temps

Homélie du 33° dimanche du temps ordinaire / Année B
15/11/2015

Comment Dieu intervient-il dans notre histoire ?
À quoi pouvons-nous reconnaître son action, son passage ?

La météo appliquée à l’histoire

Lorsque Jésus parle de sa venue, il emploie les images de son temps. Et notamment celle du figuier dans l’Évangile de ce dimanche :

« Laissez-vous instruire par la comparaison du figuier : dès que ses branches deviennent tendres et que sortent les feuilles, vous savez que l’été est proche. De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte. »

Ailleurs, il précise encore cette comparaison du figuier :

« Voyez le figuier et les autres arbres. Dès qu’ils bourgeonnent, vous comprenez de vous-mêmes, en les regardant, que désormais l’été est proche. Ainsi vous, lorsque vous verrez cela arriver, comprenez que le Royaume de Dieu est proche. » (Lc 21, 29-31).

Il s’appuie sur la science météo empirique de son époque pour inviter à une science historique équivalente :

« Le soir venu vous dites ‘Beau temps, car le ciel est rouge’, et au matin ‘aujourd’hui tempête, car le ciel est rouge sombre’. Le visage du ciel, vous savez l’interpréter, mais les signes des temps, vous ne le pouvez » (Mt 16,2 3).

 

Vatican II et les signes des temps

Dans les années 80, et encore davantage lors du concile Vatican II, les théologiens ont vu dans ces passages d’évangile une clé de lecture de l’histoire. Si nous croyons vraiment que l’Esprit du Christ est à l’oeuvre en ce monde, alors nous pourrons discerner les traces de son travail dans certains événements, certaines personnes inspirées qui nous rapprochent du royaume de Dieu venant au-devant de nous.

C’est ce qu’on a appelé la théologie des signes des temps, en référence au texte de Vatican II décrivant cette lecture croyante de l’histoire habitée par l’Esprit de Dieu :

Afficher l'image d'origine« … L’Église a le devoir, à tout moment de scruter les signes des temps et de les interpréter à la lumière de l’Évangile, de telle sorte qu’elle puisse répondre, d’une manière adaptée à chaque génération, aux questions éternelles des hommes sur le sens de la vie présente et future et sur leurs relation réciproques » (Gaudium et Spes 4,1).
« Mû par la foi, se sachant conduit par l’Esprit du Seigneur qui remplit l’univers, le peuple de Dieu s’efforce de discerner dans les événements, les exigences et les requêtes de notre temps, auxquels il participe avec les autres hommes, quels sont les signes véritables de la présence du dessin de Dieu » (GS 11).

Cette lecture des événements permet à l’Église d’éviter la posture de prophètes de malheur dénoncé par Jean XXIII dans le célèbre discours d’ouverture du concile :

« Il arrive souvent que dans l’exercice quotidien de notre ministère apostolique nos oreilles soient offensées en apprenant ce que disent certains qui, bien qu’enflammés de zèle religieux, manquent de justesse de jugement et de pondération dans leur façon de voir les choses. Dans la situation actuelle de la société, ils ne voient que ruines et calamités; ils ont coutume de dire que notre époque a profondément empiré par rapport aux siècles passés; ils se conduisent comme si l’histoire, qui est maîtresse de vie, n’avait rien à leur apprendre et comme si du temps des Conciles d’autrefois tout était parfait en ce qui concerne la doctrine chrétienne, les moeurs et la juste liberté de l’Église. Il nous semble nécessaire de dire notre complet désaccord avec ces prophètes de malheur, qui annoncent toujours des catastrophes, comme si le monde était près de sa fin. Dans le cours actuel des événements, alors que la société humaine semble à un tournant, il vaut mieux reconnaître les desseins mystérieux de la Providence divine qui, à travers la succession des temps et les travaux des hommes, la plupart du temps contre toute attente, atteignent leur fin et disposent tout avec sagesse pour le bien de l’Église, même les événements contraires. »

D’ailleurs, Jean-Paul II a clairement fixé l’ordre des priorités de la doctrine sociale de l’Église : annoncer d’abord, dénoncer ensuite, jamais l’inverse ! Car ce n’est qu’en relation à une promesse que l’on peut mesurer les écarts actuels.

« L’accomplissement du ministère de l’évangélisation dans le domaine social, qui fait partie de la fonction prophétique de l’Église, comprend aussi la dénonciation des maux et des injustices. Mais il convient de souligner que l’annonce est toujours plus importante que la dénonciation, et celle-ci ne peut faire abstraction de celle-là qui lui donne son véritable fondement et la force de la motivation la plus haute. » (Sollicitudo Rei Socialis n° 41).

Au lieu de souligner tous les dysfonctionnements des sociétés humaines, la mission de l’Église est d’abord de s’attacher à valoriser tout ce qui est inspiré par un esprit de justice, de liberté, de fraternité, largement au-delà de ses frontières visibles.

Jean XXIII mentionnait ainsi les signes des temps qui émergeaient sur lui dans les années 60 : une régulation mondiale sur le plan politique (l’ONU, les droits de l’homme), la décolonisation, l’émancipation des femmes…

Jean Paul II n’a eu aucun mal à prolonger cette liste : l’effondrement du communisme en 1989, une certaine mondialisation porteuse d’espérance, le recul de la pauvreté dans le monde…

Cette lecture est toujours à poursuivre.

C’est peut-être une critique que l’on peut adresser à la belle encyclique du pape François sur l’écologie, Laudato si. Il insiste tellement sur les catastrophes écologiques à venir si on ne fait rien qu’on risquerait presque d’oublier tous les efforts déjà porteurs de renouveau et d’espérance en la matière.

 

Quels sont les signes des temps actuels ?

Rappelons encore une fois que dans le langage de Vatican II, il s’agit d’événements positifs manifestant la venue du royaume de Dieu, déjà parmi nous.

On peut alors repérer les évolutions porteuses de cette dimension eschatologique :

Afficher l'image d'origine- la libération des femmes, dans les cultures où elles sont encore opprimées, particulièrement dans les pays musulmans.

- la révolution numérique car, même si elle a des aspects inquiétants, elle contient un formidable potentiel pouvant servir le projet divin : rapprocher les peuples, augmenter les capacités humaines, transformer le travail pour qu’il soit plus humain, moins pénible et moins mécanique.

- l’aspiration écologique, car elle peut conduire à une plus grande sagesse dans la consommation (la sobriété heureuse), dans le rapport au temps, dans la solidarité entre pays et générations.

- la fin des dictatures : l’effondrement du mur de Berlin en 1989 nous a redit que tout système fermé sur lui-même finit par imploser. Les révolutions des printemps arabes ont pris le relais : même si elles ont été confisquées ensuite, pour un temps, par des pouvoirs religieux intégristes, elles finiront par porter des fruits au Maghreb et ailleurs. Et la Corée du Nord s’ouvrira un jour. Et la liberté religieuse parviendra à gagner sur l’intolérance musulmane, hindoue ou athée. Etc. 

Repérer ces forces de l’Esprit à l’oeuvre dans notre histoire ne relève ni de la naïveté ni de l’optimisme. Cela s’accompagne d’ailleurs du combat contre les régressions de toutes sortes qui s’opposent violemment à ces évolutions. Cela ne dispense pas, au contraire, de dénoncer les risques majeurs encourus par l’humanité dans ces profondes mutations sociales. Mais cette lecture des signes des temps nous oblige à parler sur fond de bienveillance, au sens premier du terme : voir d’abord le bien à l’oeuvre avant que de manifester ce qui s’y oppose. Nous n’avons vraiment pas vocation à être des prophètes de malheur, mais des sentinelles d’espérance.

Ajoutons que cette lecture des signes des temps vaut sur le plan individuel également. Notre histoire personnelle est une histoire sainte, où l’Esprit de Dieu est à l’oeuvre. Si nous prenons le temps de relire les événements qui nous marquent, si nous savons rendre grâce pour les personnes qui sont pour nous de vrais cadeaux, nous pourrons nous écrier comme Jacob à Béthel : « Dieu était là, et je ne le savais pas ! »

Il y a bien des figuiers qui produisent des fruits dans notre histoire personnelle et collective : ils annoncent la venue du Christ, dans cette ‘fin’ des temps qui est l’accomplissement aujourd’hui de la plénitude promise.

La liste de tout ce qui n’y va pas s’allonge chaque jour dans les journaux télévisés, les débats sociaux ou autour de la machine à café au bureau.

Sachons apporter à ces débats la juste espérance à laquelle nous invite la lecture des signes des temps chère à Vatican II.

 

 

1ère lecture : « En ce temps-ci, ton peuple sera délivré » (Dn 12, 1-3)
Lecture du livre du prophète Daniel

En ce temps-là se lèvera Michel, le chef des anges, celui qui se tient auprès des fils de ton peuple. Car ce sera un temps de détresse comme il n’y en a jamais eu depuis que les nations existent, jusqu’à ce temps-ci. Mais en ce temps-ci, ton peuple sera délivré, tous ceux qui se trouveront inscrits dans le Livre. Beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour la honte et la déchéance éternelles. Ceux qui ont l’intelligence resplendiront comme la splendeur du firmament, et ceux qui sont des maîtres de justice pour la multitude brilleront comme les étoiles pour toujours et à jamais.

Psaume : Ps 15 (16), 5.8, 9-10, 11
R/ Garde-moi, mon Dieu, j’ai fait de toi mon refuge. (Ps 15, 1)

Seigneur, mon partage et ma coupe :
de toi dépend mon sort.
Je garde le Seigneur devant moi sans relâche ;
il est à ma droite : je suis inébranlable.

Mon cœur exulte, mon âme est en fête,
ma chair elle-même repose en confiance :
tu ne peux m’abandonner à la mort
ni laisser ton ami voir la corruption.

Tu m’apprends le chemin de la vie :
devant ta face, débordement de joie !
À ta droite, éternité de délices !

2ème lecture : « Par son unique offrande, il a mené pour toujours à leur perfection ceux qu’il sanctifie » (He 10, 11-14.18)
Lecture de la lettre aux Hébreux

Dans l’ancienne Alliance, tout prêtre, chaque jour, se tenait debout dans le Lieu saint pour le service liturgique, et il offrait à maintes reprises les mêmes sacrifices, qui ne peuvent jamais enlever les péchés.
Jésus Christ, au contraire, après avoir offert pour les péchés un unique sacrifice, s’est assis pour toujours à la droite de Dieu. Il attend désormais que ses ennemis soient mis sous ses pieds. Par son unique offrande, il a mené pour toujours à leur perfection ceux qu’il sanctifie.
Or, quand le pardon est accordé, on n’offre plus le sacrifice pour le péché.

Evangile : « Il rassemblera les élus des quatre coins du monde » (Mc 13, 24-32)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. 
Restez éveillés et priez en tout temps :
ainsi vous pourrez vous tenir debout devant le Fils de l’homme.
Alléluia. (cf. Lc 21, 36)

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc

En ce temps-là, Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « En ces jours-là, après une grande détresse, le soleil s’obscurcira et la lune ne donnera plus sa clarté ; les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées. Alors on verra le Fils de l’homme venir dans les nuées avec grande puissance et avec gloire. Il enverra les anges pour rassembler les élus des quatre coins du monde, depuis l’extrémité de la terre jusqu’à l’extrémité du ciel.
Laissez-vous instruire par la comparaison du figuier : dès que ses branches deviennent tendres et que sortent les feuilles, vous savez que l’été est proche. De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte. Amen, je vous le dis : cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive. Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. Quant à ce jour et à cette heure-là, nul ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais seulement le Père. »
Patrick Braud

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26 novembre 2014

Se laisser façonner

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Se laisser façonner

Homélie du premier dimanche de l’Avent / Année B
30/11/2014

cf. également : L’absence réelle

 

« Nous sommes l’argile, c’est toi qui nous façonnes : nous sommes tous l’ouvrage de tes mains. » (cf. Is 63,16-64,7)

L’atelier d’un sculpteur

Un atelier d’artiste est toujours un pèlerinage à accomplir.

Une amie sculptant l’argile m’a fait visiter le sien récemment, et l’enchantement ne m’a pas quitté pendant une heure de voyage à travers les univers émergeant de ses mains.

Tout commence par la brique de terre argileuse, compacte, dense, empaquetée comme un pain de plastic prêt à libérer sa charge. Puis il y a les multiples couteaux, en bois ou en acier, les estèques, ébauchoirs, fils à découper, mirettes et autres outils qui permettent de trancher l’argile, de le rouler en boudins, pour les assembler, leur donner figures et formes. Parfois quelques pigments sont à mélanger pour obtenir les reflets désirés. Certaines créations demandent des semaines avant d’atteindre leur maturité. Précieusement préservées de la dessiccation, humidifiées avec délicatesse, elles évoluent au gré de l’inspiration de l’artiste et du travail de ses mains. Puis vient le four et sa cuisson dosée avec soin, en durée et en température, par paliers. Moment de vérité où les défauts incrustés peuvent faire éclater la composition, où la jambe d’une girafe peut prendre une mauvaise position dans laquelle l’animal va se figer, déséquilibré à jamais. Reste enfin à mettre en scène la sculpture ainsi réalisée : faire asseoir tel gamin sur un bout de bois, accrocher tel pivert à son arbre, mettre la famille des hérissons en file indienne pour traverser la route…

Les chevaliers réglables en hauteur témoignent dans l’atelier du face-à-face argile  / artiste, d’où émergent le regard, la silhouette, le vêtement de la sculpture.

« Liens d’argile » : le nom choisi pour l’atelier convenait idéalement aux créations ocres, blanches ou grises assises sur les étagères. Un père faisant la lecture à ses deux garçons ; deux jeunes filles partageant une tablette numérique ; une grand-mère à lunettes en bonne compagnie de son roman sur un banc public… L’argile était ici mise au service de la relation entre les âges, les rôles, les êtres.

Se laisser façonner dans Communauté spirituelle modelage-sculpture-argile


Les évènements nous façonnent

Dans un tel atelier de sculpture, les paroles d’Isaïe résonnent avec une force extraordinaire :
« Nous sommes l’argile, c’est toi qui nous façonnes : nous sommes tous l’ouvrage de tes mains. »

Isaïe médite sur les déboires d’Israël. Exilé à Babylone, il est quasiment en voie de disparition à son époque. Il lui serait naturel de se croire abandonné. Isaïe invite Israël à se découvrir façonné.
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Façonné par les événements qui viennent de le marquer : l’orgueil des élites de Jérusalem oubliant l’Alliance, l’injustice sociale grandissante, la catastrophe de la prise de la ville par Nabuchodonosor, la déportation douloureuse et humiliante comme toutes les déportations…

À travers tout cela, Isaïe voit Dieu agir à la manière d’un potier : obligé de tenir compte de l’argile telle qu’elle est, avec ses impuretés et ses imperfections, mais obstiné pour en tirer quelque chose, quitte à s’y reprendre à plusieurs fois.
Du coup, le creuset de la déportation qui sonne d’abord comme l’échec de l’orgueil d’Israël peut devenir l’annonce d’une cuisson à travers le feu de l’épreuve. Ce qui est d’emblée une catastrophe va devenir l’expérience de la renaissance, pour peu que le petit reste des croyants se laisse façonner par le feu de l’espérance.

Et de fait, dépouillé de sa volonté de puissance, le germe d’Israël reviendra sur sa terre parce qu’il aura laissé Dieu revenir au coeur de son identité.
Parce qu’il ne pouvait plus appuyer ni sur son roi, ni sur son temple, ni sur sa terre, le peuple est revenu à ce qui le caractérise le mieux : l’Alliance avec Dieu, telle que les textes bibliques la racontent.

Pour l’argile, se laisser façonner demande souplesse, consentement, malléable et ferme à la fois. Pour le croyant, se laisser façonner demande d’abandonner sa seule volonté pour vouloir avec Dieu, de décrypter les événements pour en épouser le sens, de passer à travers le feu pour incarner avec force l’élan désiré par son créateur.

Les événements nous façonnent parfois avec bonheur : un mariage, une réussite professionnelle, des amitiés fécondes qui nous influencent…
L’argile vous racontera aussi qu’il est souvent façonné dans la douleur : on le tranche, on lui enlève, on le malaxe, on le tord, sans qu’il sache tout de suite ce qui est en train de naître de lui.

Voilà donc un enjeu spirituel pour ces cinq semaines d’Avent qui commencent : apprenez à vous laisser façonner !

Pour cela il est indispensable de relire son histoire.

Comment décoder ce qui m’arrive si je ne prends pas le temps et les moyens de réaliser quels chocs, quelles rencontres, quelles batailles jalonnent mon histoire ? Certains le font avec un soutien psychologique, utile parce que compétent. D’autres le font avec l’appui d’un accompagnateur spirituel, ou avec les deux. D’autres passent par l’écrit, car les mots tapés au clavier recèlent les combinaisons codées des événements cryptés. D’autres le font en lisant les mots des autres, dans lesquels ils reconnaissent leur propre chemin, et les mots de la Bible en font partie. D’autres encore…

Peu importe en réalité : l’essentiel est de ruminer ce qui nous arrive pour nous ouvrir à l’oeuvre de Dieu en nous, pour coopérer à l’oeuvre de ses mains sur l’argile de nos vies.

emmanuel-mounier-l-evenement-sera-notre-maitre-9782889182848 évènementSe laisser façonner sera alors un intense travail de consentement à ce que nous sommes en train de devenir à travers tout cela.
Sans résignation aucune : con-sentir, c’est sentir avec Dieu ce vers quoi tel événement nous appelle.

C’est s’engager résolument à habiter la forme qui émerge de l’épreuve ou du bonheur.
C’est épouser le nouveau visage, la nouvelle posture qui sort de main de l’artiste nous façonnant.

« L’événement sera votre maître intérieur » (Emmanuel Mounier).

Quel que soit l’événement, quels que soient les événements qui en ce moment vous réjouissent ou vous inquiètent, laissez-vous façonner à travers eux par la main experte du potier.

« Nous sommes l’argile, c’est toi qui nous façonnes : nous sommes tous l’ouvrage de tes mains ».

 

 

1ère lecture : Appel au Seigneur pour qu’il vienne (Is 63, 16b-17.19b; 64, 2b-7)
Lecture du livre d’Isaïe

Tu es, Seigneur, notre Père, notre Rédempteur : tel est ton nom depuis toujours. Pourquoi Seigneur, nous laisses-tu errer hors de ton chemin, pourquoi rends-tu nos cœurs insensibles à ta crainte ? Reviens, pour l’amour de tes serviteurs et des tribus qui t’appartiennent. Ah ! Si tu déchirais les cieux, si tu descendais, les montagnes fondraient devant toi. Voici que tu es descendu, et les montagnes ont fondu devant ta face. Jamais on ne l’a entendu ni appris, personne n’a vu un autre dieu que toi agir ainsi envers l’homme qui espère en lui. Tu viens à la rencontre de celui qui pratique la justice avec joie et qui se souvient de toi en suivant ton chemin. Tu étais irrité par notre obstination dans le péché, et pourtant nous serons sauvés. Nous étions tous semblables à des hommes souillés, et toutes nos belles actions étaient comme des vêtements salis. Nous étions tous desséchés comme des feuilles, et nos crimes, comme le vent, nous emportaient. Personne n’invoquait ton nom, nul ne se réveillait pour recourir à toi. Car tu nous avais caché ton visage, tu nous avais laissés au pouvoir de nos péchés. Pourtant, Seigneur, tu es notre Père. Nous sommes l’argile, et tu es le potier : nous sommes tous l’ouvrage de tes mains. 

Psaume : 79, 2.3bc, 15-16a, 18-19
R/ Dieu, fais nous revenir ; que ton visage s’éclaire, et nous serons sauvés !

Berger d’Israël, écoute,
toi qui conduis, ton troupeau : resplendis !
Réveille ta vaillance
et viens nous sauver.

Dieu de l’univers reviens !
Du haut des cieux, regarde et vois :
visite cette vigne, protège-la,
celle qu’a plantée ta main puissante.

Que ta main soutienne ton protégé,
le fils de l’homme qui te doit sa force.
Jamais plus nous n’irons loin de toi :
fais-nous vivre et invoquer ton nom !

2ème lecture : L’Église est fidèle dans l’attente du Seigneur(1Co 1, 3-9)
Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères,
que la grâce et la paix soient avec vous, de la part de Dieu notre Père et de Jésus Christ le Seigneur. Je ne cesse de rendre grâce à Dieu à votre sujet, pour la grâce qu’il vous a donnée dans le Christ Jésus ; en lui vous avez reçu toutes les richesses, toutes celles de la Parole et toutes celles de la connaissance de Dieu. Car le témoignage rendu au Christ s’est implanté solidement parmi vous. Ainsi, aucun don spirituel ne vous manque, à vous qui attendez de voir se révéler notre Seigneur Jésus Christ. C’est lui qui vous fera tenir solidement jusqu’au bout, et vous serez sans reproche au jour de notre Seigneur Jésus Christ. Car Dieu est fidèle, lui qui vous a appelés à vivre en communion avec son Fils, Jésus Christ notre Seigneur.

Evangile : « Veillez ! » (Mc 13, 33-37)
Acclamation : Alléluia. Alléluia. Montre-nous, Seigneur, ta miséricorde : fais-nous voir le jour de ton salut. Alléluia. (cf. Ps 84, 8)

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc

Jésus parlait à ses disciples de sa venue :
« Prenez garde, veillez : car vous ne savez pas quand viendra le moment.
Il en est comme d’un homme parti en voyage : en quittant sa maison, il a donné tout pouvoir à ses serviteurs, fixé à chacun son travail, et recommandé au portier de veiller. Veillez donc, car vous ne savez pas quand le maître de la maison reviendra, le soir ou à minuit, au chant du coq ou le matin.
Il peut arriver à l’improviste et vous trouver endormis. Ce que je vous dis là, je le dis à tous : Veillez ! »
Patrick BRAUD

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4 décembre 2009

Une foi historique

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 9 h 08 min

Une foi historique

Homélie du 2ème dimanche de l’Avent
Dimanche 6 Décembre 2009 / Année C

Dieu parle dans l’histoire humaine

Imaginez que sur la brique la Cathédrale d’Evry, inaugurée en 1996, on ait représenté la chute du Mur de Berlin de 1989, et vous aurez une idée du caractère historique de la foi…
Et pourtant on aurait raison de graver une telle scène : dans la foi, nous pouvons lire l’évènement de la chute du Mur de Berlin comme une parole de Dieu pour notre monde, comme une action de l’Esprit de Dieu pour plus de liberté et moins de mon songe. Ce mur qui tombait en 1989 nous révèle quelque chose de Dieu lui-même que nous n’avons pas fini de méditer.

nullNous avons fêté donc le 20° anniversaire de la chute du Mur de Berlin cette année. Une immense espérance ! Mais peu de commentateurs ont souligné le rôle actif, irremplaçable, des chrétiens d’Allemagne de l’Est, dans cette révolution pacifique. Les temples protestants et les églises catholiques étaient devenus les seuls lieux de parole libre. L’inspiration évangélique ancrait l’envie de liberté dans la non-violence, et même l’amour des ennemis. La résistance spirituelle, dérisoire au début à force de bougies dans la nuit sur les places de la RDA, est devenue peu à peu une vague populaire que Gorbatchev n’a heureusement pas voulu briser dans le sang. De même qu’en Pologne la foi a fait plier un régime inhumain, la prière et l’attente spirituelle des allemands de l’Est a fini par faire tomber les murailles de Jéricho élevées en 1962 dans Berlin.

C’est donc que la foi transforme l’histoire (avec d’autres facteurs, c’est vrai : mais justement, elle fait système).

 

Dieu parle dans l’histoire humaine

À nous de la déchiffrer !

Les textes de ce Dimanche nous invitent à voir l’histoire autrement : pas seulement les faits divers le journal télévisée de 20h, pas d’abord l’histoire des puissants de ce monde, pas uniquement une histoire de drames et de violence.
Non : une histoire habitée par Dieu lui-même. Des évènements à déchiffrer. Des gestes collectifs à travers lesquels Dieu parle…

Quelle est votre théologie de l’histoire ?…

Écoutez le prophète Baruch qui relit le prophète Isaïe : « Débout Jérusalem ! vois tes enfants rassemblés. Tu les avais vu partir à pied, emmenés par des ennemis, et Dieu te les ramène portés en triomphe ! » Parce qu’il se souvient du retour à Jérusalem, après les 60 ans d’Exil à Babylone, Baruch annonce aux Juifs que leurs diaspora un jour se terminera.

nullIl aura fallu attendre 22 siècles, jusqu’en 1948, pour que ce texte de Baruch s’accomplisse, avec le retenir des Juifs à Jérusalem? De même que l’Exil à Babylone avait un sens ainsi que le retour d’Exil, l’exil du temps de Baruch et la dispersion de l’an 70 sont également des évènements de leur histoire que les juifs ne cessent de méditer (et nous chrétiens avec eux).

Ainsi la Shoah, cette catastrophe épouvantable de la 2° guerre mondiale, et ensuite la création de l’État moderne d’Israël, continuent d’être une histoire où Dieu se révèle?

L’histoire est également très présente dans l’Evangile d’aujourd’hui, qui fourmille de noms et de lieux historiques :Tibère, Ponce Pilate, Hérode, Philippe, Lysanias, Anne et Caiphe, Jean le Baptiste… Autant dire que les actes de ces personnages sont le théâtre où Dieu va se révéler.

C’est ce que la tradition chrétienne appelle « l’économie du salut » : à travers les évènements et les personnes de notre histoire, Dieu se révèle, en communiquant son salut.
Le Concile Vatican II précise :
« Pareille économie de la Révélation comprend des événements et des paroles intimement unis entre eux. Les oeuvres, réalisées par Dieu dans l’histoire du salut, attestent et corroborent (…) les paroles, tandis que les paroles (…) éclairent le mystère que les oeuvres contiennent. » (Dei Verbum n° 2)

« Dieu se révéla, en paroles et en actes, au peuple de son choix, comme l’unique Dieu véritable et vivant. L’économie du salut, (…) racontée et expliquée par les auteurs sacrés, apparaît donc dans les livres de l’Ancien Testament comme la vraie parole de Dieu. (Dei Verbum n° 13)

Notre histoire est une histoire du salut. Dieu ne se révèle pas seulement dans la Bible.
« Dieu ne se révèle pas seulement dans la liturgie.
Il se communique également lui-même à travers les évènements de notre histoire.

Plus encore que dans la création, Dieu parle dans l’histoire de l’humanité. Il révèle sa présence dans les événements du monde, en établissant à diverses reprises un dialogue avec les hommes créés à son image, pour créer avec chacun une communion de vie et d’amour. L’histoire devient ainsi un chemin de connaissance réciproque entre le Créateur et l’être humain, un dialogue qui a pour but ultime de nous conduire de l’esclavage du péché à la liberté de l’amour.
Ainsi vécue, l’histoire devient un chemin vers la liberté.
Voulez-vous parcourir ce chemin?
Voulez-vous participer vous aussi à cette aventure? »
JEAN PAUL II à Lviv (Ukraine) Mardi 26 Juin 2001

 

Dieu parle dans l’histoire humaine
Ce 2ème Dimanche de l’Avent interroge ainsi notre conception de l’histoire.
Histoire collective :
- pouvons-nous en Eglise nous entraider à lire les « signes des temps » (Vatican II) ?
- à interpréter les bouleversements et les progrès actuels ?
- à discerner la parole de Dieu qui nous est adressée à travers l’actualité ? les évènements présents ? les échéances à venir ?

Histoire personnelle également :
– désirons-nous apprendre à relire notre histoire individuelle ?
– à en repérer les tournants décisifs, les lignes de force, les points de rupture ?…
Le traditionnel « examen de conscience » du soir de St Ignace et des jésuites par exemple, repose sur le caractère historique de notre foi : ne pas laisser passer une journée sans recueillir le nouveau visage de Dieu qui s’y révèle, à travers les rencontres, les gestes, les paroles d’une journée ordinaire ou extraordinaire.

Dieu parle dans l’histoire humaine… :
que l’Avent nous éveille à une foi authentiquement historique
.

 

Lectures du 2° Dimanche de l’Avent / Année C

Ba 5, 1-9
Jérusalem, quitte ta robe de tristesse et de misère, et revêts la parure de la gloire de Dieu pour toujours, enveloppe-toi dans le manteau de la justice de Dieu, mets sur ta tête le diadème de la gloire de l’Éternel. Dieu va déployer ta splendeur partout sous le ciel, car Dieu pour toujours te donnera ces noms : « Paix-de-la-justice » et « Gloire-de-la-piété-envers-Dieu ». Debout, Jérusalem ! Tiens-toi sur la hauteur, et regarde vers l’orient : vois tes enfants rassemblés du levant au couchant par la parole du Dieu Saint ; ils se réjouissent parce que Dieu se souvient. Tu les avais vus partir à pied, emmenés par les ennemis, et Dieu te les ramène, portés en triomphe, comme sur un trône royal. Car Dieu a décidé que les hautes montagnes et les collines éternelles seraient abaissées, et que les vallées seraient comblées :ainsi la terre sera aplanie, afin qu’Israël chemine en sécurité dans la gloire de Dieu. Sur l’ordre de Dieu, les forêts et leurs arbres odoriférants donneront à Israël leur ombrage ; car Dieu conduira Israël dans la joie, à la lumière de sa gloire, lui donnant comme escorte sa miséricorde et sa justice.
Ps 125 (126), 1-2ab, 2cd-3, 4-5, 6
Le Seigneur a fait merveille : nous voici dans la joie
Quand le Seigneur ramena les captifs à Sion,
nous étions comme en rêve !
Alors notre bouche était pleine de rires,
nous poussions des cris de joie.Alors on disait parmi les nations :

« Quelles merveilles fait pour eux le Seigneur ! »
Quelles merveilles le Seigneur fit pour nous :
nous étions en grande fête !

Ramène, Seigneur, nos captifs,
comme les torrents au désert.
Qui sème dans les larmes
moissonne dans la joie.

Il s’en va, il s’en va en pleurant,
il jette la semence ;
il s’en vient, il s’en vient dans la joie,
il rapporte les gerbes.

Ph 1, 4-6.8-11
Frères, chaque fois que je prie pour vous tous, c’est toujours avec joie, à cause de ce que vous avez fait pour l’Évangile en communion avec moi, depuis le premier jour jusqu’à maintenant. Et puisque Dieu a si bien commencé chez vous son travail, je suis persuadé qu’il le continuera jusqu’à son achèvement au jour où viendra le Christ Jésus.
Oui, Dieu est témoin de mon attachement pour vous tous dans la tendresse du Christ Jésus. Et, dans ma prière, je demande que votre amour vous fasse progresser de plus en plus dans la connaissance vraie et la parfaite clairvoyance
qui vous feront discerner ce qui est plus important. Ainsi, dans la droiture, vous marcherez sans trébucher vers le jour du Christ ; et vous aurez en plénitude la justice obtenue grâce à Jésus Christ, pour la gloire et la louange de Dieu.

Lc 3, 1-6
L’an quinze du règne de l’empereur Tibère, Ponce Pilate étant gouverneur de la Judée, Hérode prince de Galilée, son frère Philippe prince du pays d’Iturée et de Traconitide, Lysanias prince d’Abilène, les grands prêtres étant Anne et Caïphe, la parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean, fils de Zacharie. Il parcourut toute la région du Jourdain ; il proclamait un baptême de conversion pour le pardon des péchés, comme il est écrit dans le livre du prophète Isaïe :A travers le désert, une voix crie : Préparez le chemin du Seigneur,aplanissez sa route. Tout ravin sera comblé,toute montagne et toute colline seront abaissées ; les passages tortueux deviendront droits,les routes déformées seront aplanies ; et tout homme verra le salut de Dieu.
Patrick BRAUD
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