L'homélie du dimanche (prochain)

27 décembre 2014

Fêter la famille, multiforme et changeante

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 1 h 00 min

Fêter la famille, multiforme et changeante

 

cf. également La vieillesse est un naufrage ? Honore la !

Une famille réfugiée politique

Familles, je vous aime ?

Homélie pour la fête de la Sainte Famille / Année B
28/12/2014

 

Quelques statistiques

Fêter la Sainte Famille en France en 2015 relève un peu de la provocation…

Car s’il est une réalité sociale aujourd’hui chahutée et en pleine mutation, c’est bien la vie familiale !

Il suffit de rappeler quelques chiffres clés de cette évolution en France :

1 enfant sur 2 naît hors mariage.

Plus d’1 mariage sur 2 se termine par un divorce (1 Pacs sur 3 par une séparation)

1 avortement pour 4 naissances, ce qui fait qu’1 femme sur 3 aura connu une IVG avant la fin de sa vie.

1 couple sur 4 vit en concubinage (hors mariage, hors Pacs).

1 famille sur 5 est monoparentale, essentiellement des femmes seules avec enfant (avec la précarité que cela engendre).

 

On le voit : vivre à deux avec des enfants peut aujourd’hui se faire de multiples façons, et évoluer tout au long d’une existence. Et pourtant, paradoxe bien français, la famille reste en tête de toutes les valeurs préférées des Français dans les sondages d’opinion. Et c’est une bonne nouvelle ! Cela veut dire que, quelque que soit la forme revêtue par la vie commune, on attend d’elle qu’elle soit source de chaleur, d’affection, de solidarité entre les générations (et en temps de crise, cela compte), de ressourcement personnel pour chacun de ses membres.

Recomposée ou non, pacsée ou non, homoparentale, monoparentale ou non, nos contemporains attendent beaucoup de la famille qu’ils s’obstinent à construire, à géométrie variable, malgré tous les aléas des séparations successives.

Il y a certes un prix à payer à cette liberté actuelle.

Fêter la famille, multiforme et changeante dans Communauté spirituelle solitude


Si autrefois on ne se sentait pas assez libre vis-à-vis de la pression familiale et sociale pour divorcer, cette liberté chèrement acquise se traduit actuellement par une montée en puissance de la précarité (familles  monoparentales) et de la solitude.

1 adulte sur 10 dit souffrir de la solitude, et plus d’un logement parisien sur deux est occupé par une personne seule. Paris, capitale de la solitude…

Face à ce constat singulièrement contrasté, quelle vision de la famille nous propose la Bible ?

 

Une réalité « mélangée »

Dès le livre de la Genèse, la famille apparaît comme une réalité ambiguë (permixta, comme aimait dire Saint Augustin). Elle est capable du meilleur, c’est-à-dire du divin, à travers l’union entre l’homme et la femme qui est un signe privilégié – un sacrement – de la communion d’amour existant en Dieu même, constituant l’identité (trinitaire) du Créateur.

Elle est également capable du pire, dès le conflit entre Ève et Adam au sujet de ce qui est bien, dès le premier homicide où un frère tue son frère, et Caïn continue de tuer Abel depuis des siècles.

Dès l’origine, la Bible nous avertit : ne sacralisez pas la famille, éduquez-la pour qu’elle corresponde à sa vocation la plus haute (la divinisation de l’homme).

Cette ambiguïté va courir tout au long de l’Ancien Testament : incestes, adultères, meurtres, trahisons et haines tenaces ne cessent de traverser les familles royales, de tenter la fidélité du peuple, de décomposer le tissu social. Joseph sera vendu par ses frères, comme Jésus par Judas.

Et en même temps, des couples célèbres montrent que la foi au dieu unique s’incarne dans leur amour : Abraham et Sarah, Samson et Dalila, le bien-aimé et la bien-aimée du Cantique des cantiques… Des mères de famille admirables voient leur fils mourir sous le supplice et les encouragent pourtant à ne pas renier leur foi. Le foyer familial devient le premier lieu de la liturgie juive, unissant parents et enfants dans un culte et un témoignage au Dieu d’Israël etc.

 

Dans le Nouveau Testament, le moins qu’on puisse dire est que cette ambiguïté de la famille est omniprésente.

C’est Hérodiade, la belle-fille d’Hérode, qui obtient de lui la tête de Jean-Baptiste. C’est Zacharie, le père de Jean-Baptiste, qui a tellement de mal à accepter que son fils soit différent de lui (il veut lui imposer le même prénom que lui) qu’il en perd la parole !

Jésus lui-même relativise aussi l’emprise familiale.

- Il montre son indépendance dès son plus jeune âge.
Une fois les jours écoulés, alors qu’ils s’en retournaient, l’enfant Jésus resta à Jérusalem à l’insu de ses parents.  Le croyant dans la caravane, ils firent une journée de chemin, puis ils se mirent à le rechercher parmi leurs parents et connaissances.  Ne l’ayant pas trouvé, ils revinrent, toujours à sa recherche, à Jérusalem. Et il advint, au bout de trois jours, qu’ils le trouvèrent dans le Temple, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant;  et tous ceux qui l’entendaient étaient stupéfaits de son intelligence et de ses réponses. À sa vue, ils furent saisis d’émotion, et sa mère lui dit: « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela? Vois! ton père et moi, nous te cherchons, angoissés. »  Et il leur dit: « Pourquoi donc me cherchiez-vous? Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père? »  Mais eux ne comprirent pas la parole qu’il venait de leur dire. (Lc 2,41-52)

Sa « fugue » vers l’âge de 12 ans est restée célèbre ! Il y a donc des ‘transgressions’ familiales positives…

- La foi en Christ divisera les familles.
Je suis venu opposer l’homme à son père, la fille à sa mère et la bru à sa belle-mère : on aura pour ennemis les gens de sa famille.  Qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi. Qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi.(Mt  10,35-39)

- En temps de persécution, beaucoup seront capables de vendre père et mère pour échapper aux problèmes…
Le frère livrera son frère à la mort, et le père son enfant; les enfants se dresseront contre leurs parents et les feront mourir. (Mt  10,21)

- Il faut quitter son père et sa mère pour aimer. C’est-à-dire faire du neuf à deux, en s’appuyant sur le passé familial de chacun, mais sans le répéter ni le fuir…
L’homme quittera son père et sa mère,  et les deux ne feront qu’une seule chair. Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair. (Mc  10,7-8)

- Bien plus, alors qu’il est incompris de sa propre famille, Jésus n’a pas peur de les remettre à leur place.
Il vient à la maison et de nouveau la foule se rassemble, au point qu’ils ne pouvaient pas même manger de pain.  Et les siens, l’ayant appris, partirent pour se saisir de lui, car ils disaient: « Il a perdu le sens.  (Mc 3,20-21)

- Il sait que les familles humaines sont possessives, et ont besoin d’être converties à l’amour gratuit.
Sa mère et ses frères arrivent et, se tenant dehors, ils le firent appeler.  Il y avait une foule assise autour de lui et on lui dit: « Voilà que ta mère et tes frères et tes sœurs sont là dehors qui te cherchent. »  Il leur répond: « Qui est ma mère? Et mes frères? »  Et, promenant son regard sur ceux qui étaient assis en rond autour de lui, il dit: « Voici ma mère et mes frères.  Quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là m’est un frère et une sœur et une mère. » (Mc 3,31-35)

- Il se méfie par exemple de l’attachement maternel trop envahissant.
Jésus aussi fut invité à ces noces, ainsi que ses disciples.  Or il n’y avait plus de vin, car le vin des noces était épuisé. La mère de Jésus lui dit: « Ils n’ont pas de vin. »  Jésus lui dit: « Que me veux-tu, femme? Mon heure n’est pas encore arrivée. » (Jn 2,3-5)

Alors la mère des fils de Zébédée s’approcha de lui, avec ses fils, et se prosterna pour lui demander quelque chose. « Que veux-tu? » Lui dit-il. Elle lui dit: « Ordonne que mes deux fils que voici siègent, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, dans ton Royaume. »  Jésus répondit: « Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire? » (Mt 20,20-23)

En même temps, le Christ ne cesse de rappeler la vocation humanisante – c’est-à-dire divinisante ! – de la famille :

- Il réaffirme l’importance de la famille, en rappelant notamment le Décalogue, où le 5° commandement porte sur le respect des parents.
Il leur répondit: Et vous, pourquoi transgressez-vous le commandement de Dieu au profit de votre tradition?  Car Dieu a dit: Honore ton père et ta mère; et: Celui qui maudira son père ou sa mère sera puni de mort.  Mais vous, vous dites: Celui qui dira à son père ou à sa mère: Ce dont j’aurais pu t’assister est une offrande à Dieu, n’est pas tenu d’honorer son père ou sa mère. Vous annulez ainsi la parole de Dieu au profit de votre tradition. (Mt 15,1-9)

- L’appel de Jésus retentit dans la famille humaine qui est un lieu privilégié pour y répondre. On peut ainsi s’aider entre frères et sœurs à suivre le Christ !
Comme il cheminait sur le bord de la mer de Galilée, il vit deux frères, Simon, appelé Pierre, et André son frère, qui jetaient l’épervier dans la mer; car c’étaient des pêcheurs. Et il leur dit: « Venez à ma suite, et je vous ferai pêcheurs d’hommes. »  Eux, aussitôt, laissant les filets, le suivirent. Et avançant plus loin, il vit deux autres frères, Jacques, fils de Zébédée, et Jean son frère, dans leur barque, avec Zébédée leur père, en train d’arranger leurs filets; et il les appela.  Eux, aussitôt, laissant la barque et leur père, le suivirent.(Mt  4,18-21, pour Simon et André, Jacques et Jean)

 

Finalement, c’est à la famille de ressembler à l’Église, et non l’inverse !

Ce rapide parcours biblique doit au moins nous amener être très prudents : adorer ou brûler la famille n’est pas très évangélique. La réduire à une seule forme de lien, un seul modèle historique n’est pas très fidèle non plus…

L’Esprit Saint a fait surgir à travers Marie, Joseph et Jésus une cellule familiale complètement nouvelle, atypique, non reproductible à l’identique. C’est donc à chaque génération de chrétiens de recevoir de ce même Esprit Saint la capacité d’imaginer des liens entre générations qui servent la vocation humaine.

Freeshipping-Cartoon-Plush-Family-Puppet-Baby-Plush-Toy-Finger-Puppets-Hand-Talking-Props-6-designs-group divorce dans Communauté spirituelle


Dans sa doctrine sociale, l’Église catholique insiste sur quelques points clés que la vie familiale a pour vocation de servir :

 

- la gratuité.

Loin de toute possession parentale ou affective, l’éducation familiale doit permettre de faire cette expérience bouleversante : être aimé pour rien, simplement parce qu’on est fils/fille de ses parents. Être accueilli et soutenu quoi qu’il arrive.

La gratuité de l’amour parental reste un des fondements pour devenir adulte et aimer à son tour. C’est un signe fort, une icône de la gratuité de l’amour de Dieu, à la fois père et mère.

- le pardon.

Puisque les tensions, les conflits, voire les violences sont inéluctables au sein de nos familles, un des enjeux des chrétiens sera de convertir cette vie partagée à la pédagogie du pardon. Pas seulement des enfants demandant pardon aux adultes ! Un lien où l’on réapprendre à vivre ensemble au-delà des inévitables blessures qui arrivent quand on vit côte à côte sans s’être choisis.

- le service des autres.

Une famille repliée sur elle-même devient mortifère, régressive. Une famille ne cherchant que son intérêt propre finit par devenir une mafia, et l’on sait ce que la mafia fait à ceux qui ne se soumettent pas à sa loi inique.

L’éducation familiale qui s’inspire de l’Esprit de l’Évangile cherchera à ouvrir ses membres au service désintéressé des autres, et d’abord des plus défavorisés. Cela passe par la vie associative, culturelle, sportive, par l’apprentissage de la solidarité (scoutisme, aumôneries, humanitaire, engagements divers) etc.

Quelle que soit votre famille, demandez-vous si, telle qu’elle est, vous pouvez l’orienter vers davantage de gratuité, de pardon, de service des autres.

 

Si vous désirez réellement progresser sur l’un de ces trois points, alors fêtez la Sainte-Famille avec un cœur léger !

Sinon, refermez l’Évangile en le traitant de naïf et d’irréaliste, et essayez d’oublier la promesse familiale qu’il contient…

 

1ère lecture : « Ton héritier sera quelqu’un de ton sang » (Gn 15, 1-6 ; 21, 1-3)

Lecture du livre de la Genèse

En ces jours-là,

la parole du Seigneur fut adressée à Abram dans une vision :  « Ne crains pas, Abram !  Je suis un bouclier pour toi.  Ta récompense sera très grande. » Abram répondit :  « Mon Seigneur Dieu, que pourrais-tu donc me donner ?  Je m’en vais sans enfant,  et l’héritier de ma maison, c’est Élièzer de Damas. »  Abram dit encore : « Tu ne m’as pas donné de descendance,  et c’est un de mes serviteurs qui sera mon héritier. » Alors cette parole du Seigneur fut adressée à Abram : « Ce n’est pas lui qui sera ton héritier,  mais quelqu’un de ton sang. » Puis il le fit sortir et lui dit :  « Regarde le ciel,  et compte les étoiles, si tu le peux… »  Et il déclara :  « Telle sera ta descendance ! » Abram eut foi dans le Seigneur  et le Seigneur estima qu’il était juste. Le Seigneur visita Sara  comme il l’avait annoncé ;  il agit pour elle comme il l’avait dit.  Elle devint enceinte,  et elle enfanta un fils pour Abraham dans sa vieillesse,  à la date que Dieu avait fixée.  Et Abraham donna un nom  au fils que Sara lui avait enfanté :  il l’appela Isaac.

Psaume : 104 (105), 1-2, 3-4, 5-6, 8-9

R/ Le Seigneur, c’est lui notre Dieu ; il s’est toujours souvenu de son alliance. 104, 7a.8a 

Rendez grâce au Seigneur, proclamez son nom,
annoncez parmi les peuples ses hauts faits ;
chantez et jouez pour lui,
redites sans fin ses merveilles.

Glorifiez-vous de son nom très saint :
joie pour les cœurs qui cherchent Dieu !
Cherchez le Seigneur et sa puissance,
recherchez sans trêve sa face.

Souvenez-vous des merveilles qu’il a faites,
de ses prodiges, des jugements qu’il prononça,
vous, la race d’Abraham son serviteur,
les fils de Jacob, qu’il a choisis.

Il s’est toujours souvenu de son alliance,
parole édictée pour mille générations :
promesse faite à Abraham,
garantie par serment à Isaac.

2ème lecture : La foi d’Abraham, de Sara et d’Isaac (He 11, 8.11-12.17-19)

Lecture de la lettre aux Hébreux

Frères, grâce à la foi, Abraham obéit à l’appel de Dieu :  il partit vers un pays  qu’il devait recevoir en héritage,  et il partit sans savoir où il allait.  Grâce à la foi, Sara, elle aussi, malgré son âge,  fut rendue capable d’être à l’origine d’une descendance  parce qu’elle pensait que Dieu est fidèle à ses promesses.  C’est pourquoi, d’un seul homme, déjà marqué par la mort,  a pu naître une descendance aussi nombreuse  que les étoiles du ciel  et que le sable au bord de la mer,  une multitude innombrable.  Grâce à la foi, quand il fut soumis à l’épreuve,  Abraham offrit Isaac en sacrifice.  Et il offrait le fils unique,  alors qu’il avait reçu les promesses  et entendu cette parole : C’est par Isaac qu’une descendance portera ton nom. Il pensait en effet  que Dieu est capable même de ressusciter les morts ;  c’est pourquoi son fils lui fut rendu :  il y a là une préfiguration.

Evangile : « L’enfant grandissait et se fortifiait, rempli de sagesse » (Lc 2, 22-40)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. À bien des reprises, Dieu, dans le passé, a parlé à nos pères par les prophètes ; à la fin, en ces jours où nous sommes,  il nous a parlé par son Fils. Alléluia. (He 1, 1-2)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Quand fut accompli le temps prescrit par la loi de Moïse  pour la purification,  les parents de Jésus l’amenèrent à Jérusalem  pour le présenter au Seigneur,  selon ce qui est écrit dans la Loi :  Tout premier-né de sexe masculin  sera consacré au Seigneur.  Ils venaient aussi offrir  le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur :  un couple de tourterelles  ou deux petites colombes.   Or, il y avait à Jérusalem un homme appelé Syméon.  C’était un homme juste et religieux,  qui attendait la Consolation d’Israël,  et l’Esprit Saint était sur lui.  Il avait reçu de l’Esprit Saint l’annonce  qu’il ne verrait pas la mort  avant d’avoir vu le Christ, le Messie du Seigneur.  Sous l’action de l’Esprit, Syméon vint au Temple.  Au moment où les parents présentaient l’enfant Jésus  pour se conformer au rite de la Loi qui le concernait,  Syméon reçut l’enfant dans ses bras, et il bénit Dieu en disant : « Maintenant, ô Maître souverain,  tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole. Car mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples : lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël. » Le père et la mère de l’enfant  s’étonnaient de ce qui était dit de lui.  Syméon les bénit,  puis il dit à Marie sa mère :  « Voici que cet enfant  provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël.  Il sera un signe de contradiction  – et toi, ton âme sera traversée d’un glaive – :  ainsi seront dévoilées les pensées qui viennent du cœur d’un grand nombre. »   Il y avait aussi une femme prophète,  Anne, fille de Phanuel, de la tribu d’Aser.  Elle était très avancée en âge ;  après sept ans de mariage,  demeurée veuve,  elle était arrivée à l’âge de quatre-vingt-quatre ans.  Elle ne s’éloignait pas du Temple,  servant Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière.  Survenant à cette heure même,  elle proclamait les louanges de Dieu  et parlait de l’enfant  à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem.  Lorsqu’ils eurent achevé tout ce que prescrivait la loi du Seigneur,  ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth. L’enfant, lui, grandissait et se fortifiait,  rempli de sagesse,  et la grâce de Dieu était sur lui.
Patrick BRAUD

Mots-clés : , , , , , , , , , ,

13 juin 2014

Trinité : ne faire qu’un à plusieurs

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Trinité : ne faire qu’un à plusieurs

Homélie pour la fête de la Trinité / Année A
15/06/2014

Même la famille a du mal?

Trinité : ne faire qu'un à plusieurs dans Communauté spirituelle bd35feca-201d-11e1-b53a-82616b81bcadUn repas de famille comme toutes les familles en vivent, à l’occasion de Noël, d’un anniversaire, d’une communion? La discussion à table en arrive aux impôts : la fameuse pression fiscale. Une des soeurs présentes part dans une longue diatribe véhémente sur le thème :

- regardez tout ce qu’on nous prend !

Je vois le visage d’une autre soeur se durcir et ses yeux se remplir de colère :

- tu as de la chance de payer des impôts. Nous on aimerait bien en payer, mais on n’est pas assez riches pour cela.

Le débat avec tout le monde enfle, s’envenime, au point que l’une des soeurs quitte la table en pleurant :

- on n’est vraiment pas du même monde !

Silence gêné et consterné évidemment après ce coup d’éclat : la fête est gâchée ; la joie de se retrouver en famille s’est évaporée à l’épreuve des différences trop grandes entre les modes de vie de chacun.

 

L’être humain est trinitaire

Dieu que c’est dur d’être unis en étant différents !

Dieu que c’est difficile de s’aimer alors que tout nous sépare !

C’est pourtant l’enjeu de cette fête de la Trinité : Dieu ne fait qu’un à trois, et il nous introduit dans cette intimité-là.

trinite2 amour dans Communauté spirituelleTrois personnes distinctes, une circulation d’amour entre elles les liant indissolublement : l’unité trinitaire est ce à quoi nous aspirons le plus profondément, parce que à son image nous avons été créés. Nous sommes faits pour vivre par de tels liens d’échanges réciproques où l’un et l’autre deviennent inséparables. Nous portons-nous la trace de cette communion divine, comme la cire garde en creux l’empreinte du sceau royal qui lui a donné sa forme.

Entre le Père et le Fils, dans l’Esprit, circule une telle intensité de relations que l’un n’est pas sans l’autre, et que chacun se reçoit et se donne en même temps, ne faisant plus qu’un dans ce don mutuel (les chrétiens grecs appellent périchorèse  cette joyeuse danse où l’amour circule entre les trois).

 

Ne faire qu’un à plusieurs : c’est bien cela notre vocation la plus fondamentale. Nous l’approchons lorsque l’amitié nous fait vibrer à l’unisson.

Nous la pressentons lorsque la ferveur sportive nous entraîne dans un même enthousiasme (la coupe du monde de football en témoigne !).

Nous la devinons lorsque la musique nous fait expérimenter une harmonie indicible. Nous l’expérimentons avec émotion devant la beauté de la création dont nous sommes issus.

Rien à voir avec la poupée de sel qui se dissout dans l’océan ! Non : l’unité trinitaire respecte le jeu de chacun. Distinguer pour mieux unir (Jacques Maritain) reste une maxime authentiquement chrétienne. Le Père n’est pas le Fils, l’Esprit est distinct des deux, et pourtant les trois ne font qu’un.

C’est en devenant profondément soi-même qu’on s’ouvre à la communion avec l’autre, et réciproquement. La communion divine exalte l’individualité de chacun en la mettant en relation avec la sienne.

L’adjectif chrétien est d’ailleurs synonyme de trinitaire en fait. Le Christ (chrestos en grec = oint) est l’oint, c’est-à-dire celui qui a reçu de Dieu le Père de l’onction de l’Esprit Saint. Le chrétien est donc celui qui, en suivant Jésus-Christ, reçoit du Père la force de l’Esprit pour vivre sa vie d’homme en communion (avec Dieu / les autres / lui-même / la nature…).

Pourquoi alors est-il si difficile d’être unis et différents ? Pourquoi tant de couples ne peuvent-ils pas durer jusqu’au bout sur ce chemin de communion (qui est trinitaire, au fond) ? Pourquoi tant de familles se déchirent-elles entre personnes de même sang ? Et les familles des peuples répercutent à l’infini ces divisions anti-trinitaires : entre catholiques et protestants autrefois, entre Hutus et Tutsis  récemment, entre palestiniens et israéliens toujours, hindous et musulmans encore…

Nous avons perdu la capacité de nous réjouir de ce que l’autre est vraiment autre. Au lieu de nous émerveiller de ce qu’il a et que je n’ai pas, nous jalousons, nous voulons lui ressembler à tout prix (cf. la violence mimétique analysée par René Girard). Au lieu de louer Dieu pour les talents et la personnalité de l’autre, nous cherchons à lui prendre, à le dominer, à le dévorer. Nous travestissons nos différences en inégalités, nous avons peur qu’elles soient source de domination.

 

reiser Dieu 

La Trinité au travail !

Fêter la Trinité est donc un sacré antidote à notre violence inhumaine, et un beau rappel de l’avenir qui nous est promis. Si on y réfléchit, tout notre univers est façonné par cette structure trinitaire. On a parlé de l’amitié, du couple, du sport, de la musique, de la beauté du monde. Parlons aussi de notre univers au travail.

‘Que vient faire la Trinité au travail ?’ railleront certains, en rajoutant avec cynisme : ?en entreprise, on n’est pas dans le monde des Bisounours’.

Pourtant, à moins d’être un ultralibéral partisan de la concurrence à mort, où l’un des derniers marxistes exaltant la lutte des classes, la plupart des travailleurs aspirent à des relations professionnelles faites de collaboration, de solidarité, d’estime, de reconnaissance mutuelle.

Tous les sondages réalisés auprès des salariés français ou européens redisent que l’attente des travailleurs tourne bien sûr autour de la rémunération, mais aussi de la considération, du respect, de l’ambiance et de la qualité des relations au travail.

 

Le secret de l’unité trinitaire réside dans le mouvement : se recevoir/se donner. Cette dynamique de l’échange à la manière divine peut transformer toute activité professionnelle.

Pas question alors d’imposer son autorité hiérarchique à une équipe en faisant claquer ses galons : l’autorité se reçoit, avec humilité, de bas en haut, d’une équipe qui reconnaît à quelqu’un le rôle et la mission de la conduire à sa réussite.

schema_robbes différence

 

Plus question entre collègues de rivaliser par la force ou la tromperie : la coopération fera gagner tous ensemble (ce qui ne supprime pas l’émulation, mais la met au service de la réussite commune). Se recevoir inclura également la relation client/usagers/élèves : un grand professionnel est d’abord reconnu comme tel par ses clients, un bon fonctionnaire par les usagers du service public, un professeur génial dans l’admiration de ses élèves.

Se donner marquera en retour l’activité professionnelle du sceau du service. Le grand commerçant est celui qui veut d’abord le meilleur service pour son client (qualité, prix, délai…). Il fait son métier par passion. C’est la passion de se donner qui anime également le scientifique qui cherche et expérimente, le professeur qui déploie des trésors de pédagogie etc.. Même les travaux apparemment les plus ingrats peuvent être vécus dans cet état d’esprit de service. Refaire des centaines de fois les mêmes gestes devant une machine ne peut pas se vivre sans solidarité avec les autres opérateurs, avec ceux de la maintenance des machines, avec le souci de la qualité finale pour le client etc. La manière d’accomplir sa tâche lui donne un autre sens, une dimension plus humaine parce que reliée à d’autres. Cela ne supprime pas la pénibilité physique, le côté mécanique, répétitif – voire abrutissant – de certaines tâches. Cela permet de résister à la déshumanisation qui guette toujours le monde du travail. Mais peut-être aussi d’éviter que des traders deviennent fous, des patrons arrogants, des équipes démotivées parce que divisées et sans aventure commune.

 

Une économie de communion (chère aux Foccolaris) ira puiser dans la Trinité une source d’inspiration pour transformer les relations au travail, et le travail lui-même.

Fêter la Trinité le dimanche permet donc de revenir le lundi matin à son bureau/usine/école/commerce avec le goût de la communion eucharistique (qui est trinitaire) encore dans la bouche. Tout peut devenir matière à se recevoir/se donner. Toute activité (si elle est orientée vers le bien commun) peut engendrer de l’unité entre des gens différents.

Relisons donc nos responsabilités à la lumière de cette vocation trinitaire : ne faire qu’un à plusieurs.

 

 

1ère lecture : Le Dieu tendre et miséricordieux se révèle à son peuple (Ex 34, 4b-6.8-9)

Lecture du livre de l’Exode

Moïse se leva de bon matin, et il gravit la montagne du Sinaï comme le Seigneur le lui avait ordonné.
Le Seigneur descendit dans la nuée et vint se placer auprès de Moïse. Il proclama lui-même son nom ; il passa devant Moïse et proclama :
« YAHVÉ, LE SEIGNEUR, Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de fidélité. »
Aussitôt Moïse se prosterna jusqu’à terre, et il dit :
« S’il est vrai, Seigneur, que j’ai trouvé grâce devant toi, daigne marcher au milieu de nous. Oui, c’est un peuple à la tête dure ; mais tu pardonneras nos fautes et nos péchés, et tu feras de nous un peuple qui t’appartienne. »

Psaume : Ps Dn 3, 52, 53, 54, 55, 56

R/ À toi, louange et gloire éternellement!

Béni sois-tu, Seigneur, Dieu de nos pères :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Béni soit le nom très saint de ta gloire :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Béni sois-tu dans ton saint temple de gloire :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Béni sois-tu sur le trône de ton règne :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Béni sois-tu, toi qui sondes les abîmes :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Toi qui sièges au-dessus des Kéroubim :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Béni sois-tu au firmament, dans le ciel :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

2ème lecture : Dans l’amour trinitaire (2Co 13, 11-13)

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères, soyez dans la joie, cherchez la perfection, encouragez-vous, soyez d’accord entre vous, vivez en paix, et le Dieu d’amour et de paix sera avec vous.
Exprimez votre amitié en échangeant le baiser de paix. Tous les fidèles vous disent leur amitié.
Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu et la communion de l’Esprit Saint soient avec vous tous.

Evangile : « Dieu a tant aimé le monde…» (Jn 3, 16-18)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit : au Dieu qui est, qui était et qui vient ! Alléluia. (cf. Ap 1, 8)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle.
Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé.
Celui qui croit en lui échappe au Jugement, celui qui ne veut pas croire est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu.
Patrick BRAUD 

Mots-clés : , , , , , ,

24 mai 2013

Les bonheurs de Sophie

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Les bonheurs de Sophie

 

Homélie pour la fête de la Trinité / Année C
26/05/13

 

La sagesse personnifiée

Dans la foulée de la fête de Pentecôte de dimanche dernier, la première lecture de ce dimanche de la Trinité nous propose une figure énigmatique : la Sagesse.

Les bonheurs de Sophie dans Communauté spirituelle 9782204051538FSLe chapitre huit du livre des Proverbes a suscité d’innombrables interprétations, et fascine toujours. Qui est la Sagesse, identifiée à une personne vivante en Proverbes 8 ? Comme pour la ramener à quelque chose de connu – et ainsi se rassurer à bon compte – la tradition juive y a souvent vu la Torah, présidant à la création du monde aux côtés de Dieu. Les chrétiens l’ont majoritairement identifiée au Verbe, le fameux Logos du prologue de Jean, préexistant « au commencement », ou bien – plus justement – à l’Esprit Saint, « trouvant ses délices avec les fils des hommes » en les inspirant dès le début de l’humanité. Les musulmans ont hérité de ces débats l’identification de la Sagesse avec leur Coran incréé. Bref, cette figure mystérieuse enfantée avant la création du monde et co-architecte divin n’a pas cessé d’intriguer et de susciter des interprétations infinies. Peut-être renvoie-t-elle également à la sagesse égyptienne, proclamant ainsi que la raison et la technique sont des principes structurants l’émergence de toute vie ?

Quoi qu’il en soit, il est une des caractéristiques de la sagesse qui mérite de s’y arrêter : le jeu. On s’attendrait à un personnage grave et sérieux, à l’image des philosophes barbus et pensants de l’Antiquité et censés incarner cette sagesse. Or voici que le texte biblique ne nous dépeint pas un homme mais un sujet féminin (femme ou petite-fille on ne sait pas), plus occupée à « jouer » et « s’ébattre » qu’à raisonner et mesurer, savourant les « délices » de la compagnie humaine plus que les rigueurs des ouvrages savants.

 

Il faut qu’il y ait du jeu dans la création

Voilà donc une première piste qui nous rejoint tous et chacun dans notre capacité créatrice, que ce soit à travers la culture, le métier, ou la vie sociale. Le jeu et la raison vont bien ensemble : « tracer un cercle à la surface de l’abîme » et « s’ébattre sur la surface de la terre ». Notre sagesse est un maître d’oeuvre, une architecte pleine de gaieté et de mouvement !

Créer à la manière biblique implique donc de marier la rigueur et le jeu.

Regardez les ponts modernes : leur construction prévoit des espaces et des joints de dilatation, pour que justement les variations de température puissent « jouer » au sein de l’oeuvre sans la disloquer. Une certaine souplesse intérieure est nécessaire à la solidité de l’ensemble.

Celui qui ne sait pas « s’ébattre » et jouir avec « délices » de la présence d’autrui ne pourra pas construire quelque chose de solide !

Que ce soit pour bâtir son couple, sa carrière professionnelle ou ses engagements dans la cité, le sens du jeu et des délices est indispensable pour créer comme Dieu crée, pour co-construire avec lui.

Regardez les bébés jouer avec un objet, avec l’absence et la présence de cet objet tantôt caché/perdu, tantôt là/retrouvé : le jeu permet de faire grandir le je de l’enfant, qui ne peut devenir adulte sans passer par cette activité ludique.

Enfant-%C3%A0-la-piscine1 bonheur dans Communauté spirituelle

La Sagesse de Proverbes 8 montre que le jeu n’est pas réservé à l’enfant, et qu’il fait partie de la puissance créatrice que Dieu met en oeuvre à travers elle.

Il s’agit d’allier le jeu (les ébats) et la raison (« moi, la sagesse, j’habite avec le savoir-faire, je possède la science et la réflexion » Pr 8,12).

Allier et le jeu et la raison : au minimum, c’est ne pas se prendre trop au sérieux lorsque l’on crée, sachant que tout vient d’un Autre et y ramène. C’est savoir faire preuve de souplesse, d’adaptation pour laisser un jeu possible entre tous les éléments mis en place. C’est plus encore savoir prendre du recul pour savourer ce qui avance, pour jouir de ce qui est fait et de ceux qui l’ont fait. C’est – sans doute grâce à l’humour – être capable par ses « ébats » de secouer ce bel ordonnancement et de le faire trembler devant une certaine espièglerie sans craindre de le déstabiliser.

C’est donc maintenir une distance critique entre soi et son oeuvre, ne figeant rien, tel un chat jouant avec la pelote de laine qu’il est en train de rembobiner ou de dévider…

Créer sans tension, être rigoureux sans tuer la joie, réussir avec un éclat de rire intérieur : la Sagesse de Proverbes 8 met le jeu au coeur de l’activité créatrice. Et ce n’est pas une parabole pour l’enfance : c’est véritablement une des clés de notre capacité à être co-créateurs du monde !

 

Le chantier des délices

Beaucoup de maîtres flamands ont peint le « jardin des délices » promis par l’espérance chrétienne. On y voit un univers de plaisirs : fruits, fleurs, musique, costumes éblouissants, hommes et femmes transfigurés, censés annoncer le monde de la résurrection. Le Coran s’imagine pareillement la vie future dans un monde de délices très sensuels.

Notre sagesse de Proverbes 8 nous dit que ces délices font partie de la création du monde : c’est avec délice que la Sagesse s’ébat en présence de Dieu comme en compagnie des êtres humains. Avec le jeu, voilà donc une deuxième composante de l’activité authentiquement créatrice : les délices d’être aux côtés de l’autre.

Patrick Braud

Il y a comme un principe de plaisir qui structure l’acte de co-créer. Pas au sens freudien du terme (« tout, tout de suite ») : ce principe de plaisir philosophique lie la présence à l’autre et la joie de créer avec lui, le compagnonnage et la maîtrise d’oeuvre.

C’est donc un chantier des délices plus qu’un jardin !

Le travail créateur, s’il n’est que pénible ou douloureux, ne participe pas à la création divine. Il lui faut pour cela cette étincelle de plaisir, ce bonheur partagé qui transcende la seule réalisation technique.

Allier la création et le plaisir, au minimum savoir se réjouir, savoir fêter la victoire avec ses collaborateurs, valoriser le travail de chacun, savoir raconter l’aventure d’une équipe qui vient de réussir etc. C’est plus encore trouver ses délices en l’autre plus que en soi ou dans des choses, alimenter « jour après jour » sa capacité d’émerveillement et pas seulement dans les grandes occasions, apprendre à « être là », simplement, quand l’autre crée, à être « à ses côtés comme un maître d’oeuvre ».

On voit toutes les conséquences que l’on peut tirer de cette attitude ?délicieuse’ : pour un parent auprès de ses enfants, pour un leader auprès de son équipe, pour un bénévole au sein de son association etc.

 

Les bonheurs de Sophie

Autrefois, le livre de la comtesse de Ségur : les malheurs de Sophie, était un incontournable de la littérature enfantine, au même titre qu’Harry Potter ou le Seigneur des Anneaux aujourd’hui. Puisque la sagesse de Proverbes 8 est personnifiée, on peut l’appeler de son prénom grec (Sophia) et prédire que ce ne sont plus les malheurs mais les bonheurs de Sophie (ses ébats, ses délices) qui devront réapprendre à l’Occident l’art de créer de manière divine…

Puisque Sophie est un nom féminin, comme est féminin le nom hébreu donné à l’Esprit Saint (la ruah YHWH), notre Sagesse de Proverbes 8 nous invite à rapatrier une certaine part de féminité dans l’activité créatrice comme en Dieu même. L’Occident a trop masculinisé Dieu (au point que en latin, même l’Esprit est masculin, Spiritus, ainsi que le Père, Pater, et le Fils, Filius). Il est temps, à travers l’Esprit de Pentecôte, comme à travers la Sagesse créatrice, de retrouver la féminité de Dieu qui s’exprime si bien dans notre première lecture par les ébats et les délices de son compagnonnage avec Dieu et avec les hommes. Mais ceci est une autre histoire…

Puissions nous retrouver notre vocation humaine à être co-créateurs de notre monde, dans un Esprit de sagesse où le jeu et le plaisir sauront se marier avec la raison et la technique !

 

 

1ère lecture : La Sagesse est avec Dieu dès le commencement (Pr 8, 22-31)

Lecture du livre des Proverbes
Écoutez ce que déclare la Sagesse : « Le Seigneur m’a faite pour lui au commencement de son action, avant ses ?uvres les plus anciennes.
Avant les siècles j’ai été fondée, dès le commencement, avant l’apparition de la terre.
Quand les abîmes n’existaient pas encore, qu’il n’y avait pas encore les sources jaillissantes, je fus enfantée.
Avant que les montagnes ne soient fixées, avant les collines, je fus enfantée.
Alors que Dieu n’avait fait ni la terre, ni les champs, ni l’argile primitive du monde,
lorsqu’il affermissait les cieux, j’étais là. Lorsqu’il traçait l’horizon à la surface de l’abîme,
chargeait de puissance les nuages dans les hauteurs et maîtrisait les sources de l’abîme,
lorsqu’il imposait à la mer ses limites, pour que les eaux n’en franchissent pas les rivages, lorsqu’il établissait les fondements de la terre, j’étais à ses côtés comme un maître d’?uvre. J’y trouvais mes délices jour après jour, jouant devant lui à tout instant, jouant sur toute la terre, et trouvant mes délices avec les fils des hommes. »

Psaume : Ps 8, 4-5, 6-7, 8-9

R/ O Seigneur, notre Dieu, qu’il est grand, ton nom, par tout l’univers !

À voir ton ciel, ouvrage de tes doigts,
la lune et les étoiles que tu fixas,
qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui,
le fils d’un homme, que tu en prennes souci ? 

Tu l’as voulu un peu moindre qu’un dieu, 
le couronnant de gloire et d’honneur ; 
tu l’établis sur les ?uvres de tes mains, 
tu mets toute chose à ses pieds.

Les troupeaux de b?ufs et de brebis, 
et même les bêtes sauvages, 
les oiseaux du ciel et les poissons de la mer, 
tout ce qui va son chemin dans les eaux.

2ème lecture : Dans l’Esprit nous sommes en paix avec Dieu par le Christ (Rm 5, 1-5)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Frères, Dieu a fait de nous des justes par la foi ; nous sommes ainsi en paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ, qui nous a donné, par la foi, l’accès au monde de la grâce dans lequel nous sommes établis ; et notre orgueil à nous, c’est d’espérer avoir part à la gloire de Dieu.
Mais ce n’est pas tout : la détresse elle-même fait notre orgueil, puisque la détresse, nous le savons, produit la persévérance ; la persévérance produit la valeur éprouvée ; la valeur éprouvée produit l’espérance ; et l’espérance ne trompe pas, puisque l’amour de Dieu a été répandu dans nos c?urs par l’Esprit Saint qui nous a été donné.

Evangile : L’Esprit nous conduira vers le mystère de Dieu (Jn 16, 12-15)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit : au Dieu qui est, qui était et qui vient! Alléluia. (cf. Ap 1, 8)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « J’aurais encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous n’avez pas la force de les porter.
Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous guidera vers la vérité tout entière. En effet, ce qu’il dira ne viendra pas de lui-même : il redira tout ce qu’il aura entendu ; et ce qui va venir, il vous le fera connaître.
Il me glorifiera, car il reprendra ce qui vient de moi pour vous le faire connaître.
Tout ce qui appartient au Père est à moi ; voilà pourquoi je vous ai dit : Il reprend ce qui vient de moi pour vous le faire connaître. »
Patrick Braud

Mots-clés : , ,

17 mai 2013

Le marché de Pentecôte : 12 fruits, 7 dons

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Le marché de Pentecôte : 12 fruits, 7 dons

Homélie pour la fête de Pentecôte / Année C
19/05/2013


Parmi les innombrables pistes possibles pour savourer cette belle fête de Pentecôte, je vous propose de revisiter ce que la tradition chrétienne rapporte comme spécifique à  l’Esprit Saint : les fameux 7 dons de l’Esprit, et les 12 fruits qui y sont liés.

 

Les fruits de l’Esprit Saint

Paul décrit en Ga 5,23 ce qu’il est convenu d’appeler les fruits de l’Esprit. « Voici ce que produit l’Esprit : amour, joie, paix, patience, sens du service, bonté, confiance dans les autres, douceur, maîtrise de soi : contre de telles choses il n’y a pas de loi. »

Le marché de Pentecôte : 12 fruits, 7 dons dans Communauté spirituelle 12-fruits-of-the-spirit 

La tradition catholique s’est arrangée pour compléter la liste et identifier symboliquement 12 fruits de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, longanimité, bienveillance, mansuétude, fidélité, modestie, continence, chasteté (CEC 1832).

La joie : pas l’élan superficiel, mais la plénitude de celui qui se sait en accord avec lui-même, et qui se sent aimé de Dieu.

Paix, patience,?longanimité : savoir endurer le mal ou l’offense sans répondre du tac au tac (être longanime = être long à la vengeance, à la colère).

Bonté, bienveillance (ah !, le regard : voir ce qui est bien chez l’autre, dire du bien de l’autre, sans jalousie, c’est vraiment un fruit de l’Esprit !)

Mansuétude = miséricorde affectueuse.

Fidélité (surtout lorsqu’elle est difficile par ses seules forces).

Modestie, continence (savoir s’abstenir quand cela est bien, et pas seulement sur le plan physique).

Chasteté = respecter l’autre sans l’utiliser pour son propre plaisir?

 

Quels sont les fruits de l’Esprit que porte l’arbre de mon existence ?


Les dons de l’Esprit Saint

* À ces 12 fruits de l’Esprit auquel on reconnaît si l’arbre de nos choix est bon ou non, s’ajoutent les 7 dons de l’Esprit, que l’effusion de Pentecôte nous offre largement à travers le baptême la confirmation et l’Eucharistie tout particulièrement ; ces 7 dons sont : la sagesse, l’intelligence, le conseil, la force, la science, la piété et la crainte de Dieu (CEC 1831).

Rassurez-vous, la crainte de Dieu, ce n’est pas avoir peur de Dieu (l’amour parfait chasse la peur, comme le répète inlassablement St Jean), mais c’est la crainte de ne pas aimer assez, craindre de passer à côté de la grandeur de Dieu. Quelquefois, la crainte est le commencement de la sagesse (cf. la crainte du gendarme et la sagesse routière !) Mais le 7° don de l’Esprit, c’est de mesurer que Dieu est sans mesure, et ne pas rester en repos tant que cette immense soif d’infini me taraude.

Comment pourrais-je ne pas craindre de passer à côté de l’amour ?

 

Des repères simples pour le discernement spirituel

Avec ces 7 dons et ces 12 fruits, nous avons là une règle de discernement essentielle, et finalement très simple :  » On juge l’arbre à ses fruits «  comme disait Jésus.

* Voulez-vous savoir si vous êtes à la bonne place dans l’existence ?

Avez-vous des envies de changer ?

Vous posez-vous des questions sur des choix importants à faire ou à refaire ?

L’Esprit de Pentecôte peut vous aider à prendre du recul, à faire le tri : qu’est-ce qui dans ma vie vient de Dieu ? Qu’est-ce qui ne vient pas de lui ?

Appliquez la règle de discernement que Paul vient de nous donner : si cela vient de l’Esprit, cela produit à la longue des fruits de l’Esprit : amour, paix, joie, patience, bonté. Sinon…

Lorsque s’installe dans ma vie la tristesse, l’amertume, c’est que je ne vis plus dans l’Esprit du Christ. Lorsqu’une décision, même douloureuse produit à la longue paix et humilité, elle est l’?uvre de l’Esprit en moi.

* Nous avons tous connu des femmes qui ont renoncé à un amant, des hommes qui ont renoncé à une amante, passionnément aimé(e), parce qu’ils percevaient à la longue qu’ils n’étaient plus en paix avec eux-mêmes devant Dieu, devant leur famille. Ils reconnaissent après cette rupture combien cette décision chirurgicale a été source de leur salut.

* Nous avons tous connu des gens de tous âges qui ont brusquement changé complètement d’orientation professionnelle parce qu’ils avaient au fond d’eux-mêmes un malaise : l’absence de paix, de joie, de bonté, que même des gros salaires ou de belles carrières ne pouvaient combler.


* Nous avons tous connu aussi des gens qui souffraient d’un travail imposé, non choisi, et qui les usait matin après matin. Il a parfois suffi qu’ils décident de vivre autrement, en le choisissant au lieu de le subir, pour que le même travail soit vécu  » dans l’Esprit « , c’est à dire comme une source d’amour, de joie, de paix, de patience?

 

Les exemples sont nombreux ! Si je suis attentif aux fruits que produit en moi ma vie de famille, mon travail, ma vie spirituelle… alors je pourrai progresser : en repérant ce qui produit en moi les attitudes du c?ur dont parle St Paul, je pourrai aller de ce côté-là. Et au contraire me détourner de ce qui produit en moi du verjus, comme disent les artisans de la vigne devant un fruit décevant et amer.


* Faites attention aux émotions, aux sentiments profonds qui s’installent en vous lorsque vous faites tel choix ou telle activité. Si vous ressentez l’un des 12 fruits de l’Esprit, c’est bon signe ! Sinon, méfiez-vous : soit il faut reconsidérer votre choix, soit il faut vivre autrement. Sinon vous tournez le dos à l’Esprit de Pentecôte? car il s’agit d’unifier sa vie, et l’unité, c’est le travail de l’Esprit, depuis toujours en Dieu jusqu’à toujours entre l’homme et Dieu.


7 dons, 12 fruits : faites votre marché de Pentecôte !

Ayez surtout le courage de réexaminer votre existence actuelle à la lumière de ces critères de discernement.

Vous en serez  » soufflés « , du souffle de la Pentecôte.

 

 

Fête de Pentecôte / Messe du jour

1ère lecture : La venue de l’Esprit Saint sur les disciples (Ac 2, 1-11)

Lecture du livre des Actes des Apôtres

Quand arriva la Pentecôte (le cinquantième jour après Pâques), ils se trouvaient réunis tous ensemble. Soudain il vint du ciel un bruit pareil à celui d’un violent coup de vent : toute la maison où ils se tenaient en fut remplie. Ils virent apparaître comme une sorte de feu qui se partageait en langues et qui se posa sur chacun d’eux. Alors ils furent tous remplis de l’Esprit Saint : ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit.

Or, il y avait, séjournant à Jérusalem, des Juifs fervents, issus de toutes les nations qui sont sous le ciel. Lorsque les gens entendirent le bruit, ils se rassemblèrent en foule. Ils étaient dans la stupéfaction parce que chacun d’eux les entendait parler sa propre langue.
Déconcertés, émerveillés, ils disaient : « Ces hommes qui parlent ne sont-ils pas tous des Galiléens ? Comment se fait-il que chacun de nous les entende dans sa langue maternelle ? Parthes, Mèdes et Élamites, habitants de la Mésopotamie, de la Judée et de la Cappadoce, des bords de la mer Noire, de la province d’Asie, de la Phrygie, de la Pamphylie, de l’Égypte et de la Libye proche de Cyrène, Romains résidant ici, Juifs de naissance et convertis, Crétois et Arabes, tous nous les entendons proclamer dans nos langues les merveilles de Dieu. »

Psaume : Ps 103, 1ab.24ac, 29bc-30, 31.34

R/ O Seigneur, envoie ton Esprit qui renouvelle la face de la terre !

Bénis le Seigneur, ô mon âme ;
Seigneur mon Dieu, tu es si grand !
Quelle profusion dans tes ?uvres, Seigneur !
La terre s’emplit de tes biens.

Tu reprends leur souffle, il expirent
et retournent à leur poussière.
Tu envoies ton souffle : ils sont créés ;
tu renouvelles la face de la terre.

Gloire au Seigneur à tout jamais !
Que Dieu se réjouisse en ses ?uvres !
Que mon poème lui soit agréable ;
moi, je me réjouis dans le Seigneur.

2ème lecture : « L’Esprit fait de nous des fils » (Rm 8, 8-17)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Frères, sous l’emprise de la chair, on ne peut pas plaire à Dieu. Or, vous, vous n’êtes pas sous l’emprise de la chair, mais sous l’emprise de l’Esprit, puisque l’Esprit de Dieu habite en vous. Celui qui n’a pas l’Esprit du Christ ne lui appartient pas. Mais si le Christ est en vous, votre corps a beau être voué à la mort à cause du péché, l’Esprit est votre vie, parce que vous êtes devenus des justes. Et si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous.
Ainsi donc, frères, nous avons une dette, mais ce n’est pas envers la chair : nous n’avons pas à vivre sous l’emprise de la chair. Car si vous vivez sous l’emprise de la chair, vous devez mourir ; mais si, par l’Esprit, vous tuez les désordres de l’homme pécheur, vous vivrez.
En effet, tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu. L’Esprit que vous avez reçu ne fait pas de vous des esclaves, des gens qui ont encore peur ; c’est un Esprit qui fait de vous des fils ; poussés par cet Esprit, nous crions vers le Père en l’appelant : « Abba ! »
C’est donc l’Esprit Saint lui-même qui affirme à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Puisque nous sommes ses enfants, nous sommes aussi ses héritiers ; héritiers de Dieu, héritiers avec le Christ, si nous souffrons avec lui pour être avec lui dans la gloire.

Séquence de Pentecôte

Viens, Esprit-Saint, en nos c?urs,
et envoie du haut du ciel
un rayon de ta lumière.

Viens en nous, père des pauvres.
Viens, dispensateur des dons.
Viens, lumière en nos c?urs.

Consolateur souverain,
hôte très doux de nos âmes,
adoucissante fraîcheur.

Dans le labeur, le repos ;
dans la fièvre, la fraîcheur ;
dans les pleurs, le réconfort.

O lumière bienheureuse,
viens remplir jusqu’à l’intime
le c?ur de tous tes fidèles.

Sans ta puissance divine,
il n’est rien en aucun homme,
rien qui ne soit perverti.

Lave ce qui est souillé,
baigne ce qui est aride,
guéris ce qui est blessé.

Assouplis ce qui est raide,
réchauffe ce qui est froid,
rends droit ce qui est faussé.

A tous ceux qui ont la foi
et qui en toi se confient,
donne tes sept dons sacrés.

Donne mérite et vertu
donne le salut final
donne la joie éternelle.

Evangile : « L’Esprit Saint vous enseignera tout » (Jn 14, 15-16.23b-26)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Viens, Esprit Saint ! Pénètre le c?ur de tes fidèles ! Qu’ils soient brûlés au feu de ton amour! Alléluia.

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « Si vous m’aimez, vous resterez fidèles à mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : l’Esprit de vérité.
Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui. Celui qui ne m’aime pas ne restera pas fidèle à mes paroles. Or, la parole que vous entendez n’est pas de moi : elle est du Père, qui m’a envoyé. Je vous dis tout cela pendant que je demeure encore avec vous ; mais le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit. »
 Patrick Braud 

Mots-clés : , ,
1...1011121314