L'homélie du dimanche (prochain)

15 février 2015

Mercredi des cendres : de Grenouille à l’Apocalypse, un parfum d’Évangile

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 13 h 59 min

Mercredi des cendres :
de Grenouille à l’Apocalypse, un parfum d’Évangile

Homélie du Mercredi 18 Février 2015
Mercredi des Cendres

cf. également :
La radieuse tristesse du Carême
Carême : quand le secret humanise
Mercredi des Cendres : 4 raisons de jeûner
Le symbolisme des cendres

Mercredi des cendres :  de Grenouille à l’Apocalypse, un parfum d’Évangile dans Communauté spirituelleConnaissez-vous « Le Parfum », de Patrick Süskind ? C’est un roman assez extraordinaire, où le héros nous fait découvrir le monde de l’odorat, comme un 5ème continent oublié.

Grenouille, ce héros, a un nez extraordinaire. Il devient parfumeur ; il apprend à tirer la quintessence olfactive des fleurs, des choses, et même des êtres humains (hélas ! car il en deviendra meurtrier).

Au-delà de l’aventure romanesque de ce personnage qui capte l’odeur des autres pour en faire la sienne, l’auteur nous entraîne dans un univers étonnant de communication non verbale.

Beaucoup de choses sont dites, ressenties et perçues grâce et à travers les parfums de nos vies : la fragrance d’un concentré de lavande, l’épice d’un musc ambré, la sensualité d’un mélange aromatique exotique… Vous savez bien que l’odeur corporelle de quelqu’un est capable d’attirer ou de repousser plus fortement que ses paroles. Chacun de nous a une empreinte olfactive, comme une empreinte digitale, unique. Elle est souvent liée à notre identité spirituelle. Chacun de nous a une « odeur spirituelle » qui nous fait laisser une trace odoriférante derrière nous, suave ou puante …

Bref, il existe dans le parfum un pouvoir relationnel, pour le meilleur et pour le pire, dont nous sommes largement inconscients, et qui pourtant influence fortement nos relations.

J’imagine facilement Jésus lui-même écarquillant les narines pour sentir le monde à plein nez.

Il a du goûter les odeurs du bois de charpentier dans l’atelier de Joseph, les effluves des champs autour de Nazareth, la senteur des soldats romains ou celle des esclaves, le souffle presque marin du Lac de Tibériade, la puanteur de la vallée de la Géhenne, le mélange des essences au marché de Jérusalem etc.…

Il a appris que la relation de l’homme à l’univers et aux autres humains passe aussi par l’odorat.

Aussi, quand il nous dit aujourd’hui : « Quand tu jeûnes, parfume-toi la tête », il nous invite à communiquer notre joie de Carême par une autre forme de présence que la parole : le parfum de notre vie.

Paradoxalement, au lieu d’être une privation, le jeûne devient une exhalaison pour les autres.

Au lieu d’afficher le manque, notre visage diffuse une bonne odeur de joie.
Au lieu de promener une « face de Carême », notre tête rayonne d’une odeur subtile d’Évangile.
Comme on dit de quelqu’un qu’il est mort « en odeur de sainteté », le Carême nous appelle alors à vivre « en odeur de joie » !

Femme-au-parfum.jpg* Rappelez-vous la femme qui avait gaspillé 300 deniers pour acheter du parfum précieux et le répandre sur les pieds de Jésus : « et la maison s’emplit de la senteur du parfum » dit Jean (12, 3).
L’annonce prophétique de la Passion du Christ est passée par cette odeur de nectar précieux.

* Rappelez-vous l’autel des parfums que Dieu demanda à Moïse : « Procure-toi des essences parfumées : storax, ambre, galbanum, encens. Tu es feras un parfum mélangé, travail de parfumeur : salé, pur, sacré »(Ex 30). Et ces parfums fumaient sur l’autel, et ils devenaient des « parfums d’apaisement » pour Yahvé.
La prière peut émaner de nous comme une baguette d’encens brûle sur l’autel…

* Rappelez-vous le chant d’amour du Cantique des Cantiques : « L’arôme de tes parfums est exquis… » « Qui est celle-là qui monte du désert, vapeur de myrrhe et d’encens et de tous parfums exotiques ? » « Le parfum de tes vêtements est comme le parfum du Liban… »
Notre désir d’aimer s’exhale de nous, inconsciemment, et les autres le perçoivent alors clairement, plus qu’un discours…

Dans le livre de l'Apocalypse, 7 anges tiennent 7 fléaux ou 7 plaies dans les 7 coupes pleins de la colère de Dieu. Leur pouvoir de destruction est immense. La colère de Dieu s'accomplit par eux. * Rappelez-vous encore la grande liturgie odoriférante de l’Apocalypse, où l’encens fume à flots, où les 4 vivants tiennent dans leurs mains des coupes d’or pleines de parfums qui sont, précise St Jean, « les prières des saints »(Ap 5, 8). Et à l’ouverture du 7ème sceau, l’Ange fait monter devant Dieu la fumée des parfums qu’il offre « avec les prières de tous les saints », sur l’autel des parfums placé devant le trône (Ap 8,2 4).
Notre communion des saints se reconnaît à la colonne de parfum qui monte de nous-mêmes…

Alors se parfumer la tête pour jeûner en Carême, ce n’est pas seulement répandre quelques gouttes d’Instant de Guerlain ou J’adore de Dior, c’est répandre en tous lieux la bonne odeur du Christ, diffuser des effluves de joie, laisser s’exhaler à travers soi des senteurs pleines de vie, mystérieuses de profondeur, envoûtantes d’énigmes.

Un jeûne de Carême produit des chrétiens qui respirent la confiance, qui fleurent la bonté, qui sentent bon dans leur manière d’être…

Être chrétien, ça se sent ! Ça ne fait pas que se voir, se dire, se goûter ou se toucher : ça se sent !

Le Christ, qui nous appelle au « secret » du Carême, nous invite en même temps au « parfum » du Carême : cette bonne odeur du Christ qui, au-delà des mots, communique à tous un message sans parole, rien que par les « arômes spirituels » qui émanent d’une présence.

« Quand tu jeûnes, parfume-toi la tête » : que l’Esprit du Christ soit notre ‘huile essentielle’, notre concentré de senteurs, pour que ce Carême diffuse un parfum d’Évangile à ceux qui croisent notre route.

 

1ère lecture : « Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements » (Jl 2, 12-18)
Lecture du livre du prophète Joël

Maintenant – oracle du Seigneur – revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil ! Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment. Qui sait ? Il pourrait revenir, il pourrait renoncer au châtiment, et laisser derrière lui sa bénédiction : alors, vous pourrez présenter offrandes et libations au Seigneur votre Dieu. Sonnez du cor dans Sion : prescrivez un jeûne sacré, annoncez une fête solennelle, réunissez le peuple, tenez une assemblée sainte, rassemblez les anciens, réunissez petits enfants et nourrissons ! Que le jeune époux sorte de sa maison, que la jeune mariée quitte sa chambre ! Entre le portail et l’autel, les prêtres, serviteurs du Seigneur, iront pleurer et diront : « Pitié, Seigneur, pour ton peuple, n’expose pas ceux qui t’appartiennent à l’insulte et aux moqueries des païens ! Faudra- t-il qu’on dise : “Où donc est leur Dieu ?” »  Et le Seigneur s’est ému en faveur de son pays, il a eu pitié de son peuple.

Psaume : 50 (51), 3-4, 5-6ab, 12-13, 14.17

R/ Pitié, Seigneur, car nous avons péché ! (cf. 50, 3)

Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
Lave- moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.

Oui, je connais mon péché,
ma faute est toujours devant moi.
Contre toi, et toi seul, j’ai péché,
ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait.

Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint

Rends- moi la joie d’être sauvé ;
que l’esprit généreux me soutienne.
Seigneur, ouvre mes lèvres,
et ma bouche annoncera ta louange.

2ème lecture : « Laissez- vous réconcilier avec Dieu. Voici maintenant le moment favorable » (2 Co 5, 20 – 6, 2)
Lecture de la deuxième lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens

Frères, nous sommes les ambassadeurs du Christ, et par nous c’est Dieu lui- même qui lance un appel : nous le demandons au nom du Christ, laissez- vous réconcilier avec Dieu. Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché, afin qu’en lui nous devenions justes de la justice même de Dieu. En tant que coopérateurs de Dieu, nous vous exhortons encore à ne pas laisser sans effet la grâce reçue de lui. Car il dit dans l’Écriture : Au moment favorable je t’ai exaucé,au jour du salut je t’ai secouru. Le voici maintenant le moment favorable, le voici maintenant le jour du salut.

Evangile : « Ton Père qui voit dans le secret te le rendra » (Mt 6, 1-6.16-18)

Acclamation : Ta Parole, Seigneur, est vérité,et ta loi, délivrance.Aujourd’hui, ne fermez pas votre coeur, mais écoutez la voix du Seigneur. Ta Parole, Seigneur, est vérité,et ta loi, délivrance. (cf. Ps 94, 8a.7d)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

En ce temps- là, Jésus disait à ses disciples : « Ce que vous faites pour devenir des justes, évitez de l’accomplir devant les hommes pour vous faire remarquer. Sinon, il n’y a pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux.
 Ainsi, quand tu fais l’aumône, ne fais pas sonner la trompette devant toi, comme les hypocrites qui se donnent en spectacle dans les synagogues et dans les rues, pour obtenir la gloire qui vient des hommes. Amen, je vous le déclare : ceux- là ont reçu leur récompense. Mais toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père qui voit dans le secret te le rendra.
 Et quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites : ils aiment à se tenir debout dans les synagogues et aux carrefours pour bien se montrer aux hommes quand ils prient. Amen, je vous le déclare : ceux- là ont reçu leur récompense. Mais toi, quand tu pries, retire-toi dans ta pièce la plus retirée, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père qui voit dans le secret te le rendra.
 Et quand vous jeûnez, ne prenez pas un air abattu, comme les hypocrites : ils prennent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu’ils jeûnent. Amen, je vous le déclare : ceux- là ont reçu leur récompense. Mais toi, quand tu jeûnes, parfume- toi la tête et lave- toi le visage ; ainsi, ton jeûne ne sera pas connu des hommes, mais seulement de ton Père qui est présent au plus secret ; ton Père qui voit au plus secret te le rendra. »
Patrick BRAUD

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3 mars 2014

La radieuse tristesse du Carême

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

La radieuse tristesse du Carême

Homélie du Mercredi des Cendres / Année A
05/03/2014

Homélie pour entrer en Carême : 

La « radieuse tristesse » de ces 40 jours

La radieuse tristesse du Carême dans Communauté spirituelle saint-careme2 « Radieuse tristesse »
C’est par cette belle et énigmatique expression que nos frères orthodoxes saluent ces 40 jours du Carême qui commencent.
« Radieuse tristesse » : en français, on appelle cela un oxymore, c’est-à-dire une association de deux contraires logiquement incompatibles (comme ?aigre-doux’ ou ?clair-obscur’). Mais Dieu n’est-il pas justement dans l’union des contraires ?
« Radieuse tristesse » : on y entend d’abord la tristesse, en écho à la lecture du prophète Joël : « Revenez à moi de tout votre coeur, dans le jeûne, les larmes, et le deuil ! Entre le portail et l’autel, les prêtres iront pleurer : ‘pitié Seigneur pour ton peuple’? » (Jl 2,12-18)

Impossible de rayer la tristesse de cette période de Carême sous prétexte que ce ne serait pas à  la mode, ou commercialement peu attractif !

Cette tristesse parcourt toute la Bible en fait :

- celle de Marie-Madeleine pleurant sur ses nombreux péchés,

- celle de David se couvrant de cendres en découvrant qu’il a commis un adultère et un meurtre,

- la tristesse de l’enfant prodigue qui revient poussé par la faim,

- ou encore la tristesse de Pierre qui s’entend dire par 3 fois : « M’aimes-tu ? »?

- c’est notre propre tristesse, le front marqué de cendres, conscient de la conversion que nous avons à vivre…

Saint André de Crète a composé un très bel hymne qui est chanté par l’Église orthodoxe pendant le Carême. Olivier Clément l’appelle « le chant des larmes ». Il constitue une confession publique, dans un élan de sincérité religieuse absolue, après repentance.

« Viens donc, âme endurcie, revêtue de ta chair,
confesse-toi au Créateur de toutes choses ;
rejette loin de toi ton délire et offre à Dieu des larmes de pénitence.

Comme David, je suis tombé dans la folie. Et je me suis roulé dans la boue.
Mais lave-moi, ô mon Sauveur, par mes larmes.

Ne t’abandonne pas au désespoir, ô mon âme.
Médite la foi de la Cananéenne, dont la fille fut guérie par une seule parole de Dieu, et avec elle, crie du fond de ton coeur : « Fils de David, sauve-moi !’ »
 

 

Ainsi s’exprime la liturgie orthodoxe dans le chant des larmes du Carême…

Mais cette tristesse est radieuse, parce qu’elle est déjà illuminée de l’évènement pascal.

De même qu’à Noël nous ne faisons pas semblant de faire naître l’enfant Jésus dans la crèche, car cela est accompli une fois pour toutes, de même pendant le Carême nous ne faisons pas semblant de vivre la Passion sans avoir déjà la force de la Résurrection en nous. Comme le dit Paul, il s’agit de « le connaître, lui, le Christ, avec la puissance de sa résurrection et la communion à ses souffrances, afin de parvenir si possible à ressusciter d’entre les morts » (Ph 3, 10). 

Dans cet ordre: la Résurrection d’abord (celle du Christ), puis la Passion, puis la Résurrection ensuite (la nôtre) !

Parce que nous sommes d’après Pâques, la tristesse du Carême est radieuse de cette promesse de vie déjà accomplie en Christ.

Les lamentations de la Semaine Sainte sont rayonnantes de la consolation pascale.

L’office des Ténèbres du Vendredi Saint lui-même est diaphane de la victoire du Christ sur le mal et la mort.

Une beauté intérieure illumine ces jours de tristesse, comme les premiers rayons de l’aurore illuminent l’au-delà de l’horizon courbe des marins alors qu’ils naviguent dans la nuit noire?

« Radieuse tristesse » : tristesse de notre exil, du gâchis que nous faisons parfois de notre vie ; radieuse espérance de retrouver par là même le désir de chercher Dieu, le goût de sa présence, la paix du domicile retrouvé…

« Radieuse tristesse »  est donc bien le climat liturgique de ce Carême.

Les orthodoxes, explorant cette piste de l’union des contraires en Dieu, disent aussi : « douloureuse joie », car la joie de la renaissance passe par les douleurs de l’enfantement, ou encore : « triste clarté » car la clarté de Pâques dévoile les ombres de notre existence que nous découvrons alors avec tristesse, au moment même où elles sont dissipées.

Une traduction musicale de cette étonnante tristesse pourrait s’entendre dans l’oeuvre d’Arnold Schoenberg : la « nuit transfigurée » : un pèlerinage nocturne magnifique à travers l’épreuve d’un couple qui réussit à surmonter la nuit de sa désunion…


Nuit transfigurée,

triste clarté,

douloureuse joie …: 

que ce Carême nous donne d’expérimenter la radieuse tristesse des enfants de Dieu que nous sommes, pécheurs et aimés, pardonnés et encore en chemin vers la liberté parfaite !

1ère lecture : Appel à la pénitence (Jl 2, 12-18)

Lecture du livre Joël

Parole du Seigneur : « Revenez à moi de tout votre coeur, dans le jeûne, les larmes et le deuil ! »
Déchirez vos coeurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment.
Qui sait ? Il pourrait revenir, il pourrait renoncer au châtiment, et vous combler de ses bienfaits : ainsi vous pourrez offrir un sacrifice au Seigneur votre Dieu.
Sonnez de la trompette dans Jérusalem : prescrivez un jeûne sacré, annoncez une solennité, réunissez le peuple, tenez une assemblée sainte, rassemblez les anciens, réunissez petits enfants et nourrissons ! Que le jeune époux sorte de sa maison, que la jeune mariée quitte sa chambre !
Entre le portail et l’autel, les prêtres, ministres du Seigneur, iront pleurer et diront : « Pitié, Seigneur, pour ton peuple, n’expose pas ceux qui t’appartiennent à l’insulte et aux moqueries des païens ! Faudra-t-il qu’on dise : ‘Où donc est leur Dieu ?’ »

Et le Seigneur s’est ému en faveur de son pays, il a eu pitié de son peuple.

Psaume : Ps 50, 3-4, 5-6ab, 12-13, 14.17

R/ Pitié, Seigneur, car nous avons péché.

Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.

Oui, je connais mon péché,
ma faute est toujours devant moi.
Contre toi, et toi seul, j’ai péché,
ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait.

Crée en moi un c?ur pur, ô mon Dieu, 
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. 
Ne me chasse pas loin de ta face, 
ne me reprends pas ton esprit saint. 

Rends-moi la joie d’être sauvé ; 
que l’esprit généreux me soutienne. 
Seigneur, ouvre mes lèvres, 
et ma bouche annoncera ta louange.

2ème lecture : « Laissez-vous réconcilier avec Dieu » (2 Co 5, 20-21; 6, 1-2)

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères,
nous sommes les ambassadeurs du Christ, et par nous c’est Dieu lui-même qui, en fait, vous adresse un appel. Au nom du Christ, nous vous le demandons, laissez-vous réconcilier avec Dieu.
Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché des hommes, afin que, grâce à lui, nous soyons identifiés à la justice de Dieu.
Et puisque nous travaillons avec lui, nous vous invitons encore à ne pas laisser sans effet la grâce reçue de Dieu.
Car il dit dans l’Écriture : Au moment favorable je t’ai exaucé, au jour du salut je suis venu à ton secours. Or, c’est maintenant le moment favorable, c’est maintenant le jour du salut.

Evangile : L’aumône, la prière et le jeûne comme Dieu les aime(Mt 6,1-6.16-18)

Acclamation : Ta Parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance. « Convertissez-vous, dit le Seigneur, car le Royaume des cieux est proche. » Ta Parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance. (Mt 4, 17)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

 Comme les disciples s’étaient rassemblés autour de Jésus, sur la montagne, il leur disait :
« Si vous voulez vivre comme des justes, évitez d’agir devant les hommes pour vous faire remarquer. Autrement, il n’y a pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux.
Ainsi, quand tu fais l’aumône, ne fais pas sonner de la trompette devant toi, comme ceux qui se donnent en spectacle dans les synagogues et dans les rues, pour obtenir la gloire qui vient des hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra.
Et quand vous priez, ne soyez pas comme ceux qui se donnent en spectacle : quand ils font leurs prières, ils aiment à se tenir debout dans les synagogues et les carrefours pour bien se montrer aux hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu pries, retire-toi au fond de ta maison, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra.
Et quand vous jeûnez, ne prenez pas un air abattu, comme ceux qui se donnent en spectacle : ils se composent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu’ils jeûnent. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ; ainsi, ton jeûne ne sera pas connu des hommes, mais seulement de ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra. »
Patrick BRAUD

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12 février 2013

Carême : quand le secret humanise

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Carême : quand le secret humanise

Homélie du Mercredi des Cendres  Année C
13/02/2013

         6 fois le mot secret revient dans cette page d’évangile, ou plutôt 3 fois 2 fois ; comme un leitmotiv :

         « Ton Père est là, dans le secret

         Ton Père voit ce que tu fais en secret ».

N’agis donc pas pour la façade, essaie plutôt de mettre ce qui est caché dans ta vie en conformité avec ce que tu crois.

 

Le secret…

. Il y a des secrets qui détruisent.

Est secret ce que nous avons écarté de notre vue et de celle des autres pour le laisser dans l’ombre, ou bien ce qui à l’insu de notre volonté s’est caché de lui-même dans notre inconscient.

Devant les autres, nous donnons souvent le change. Nous jouons un rôle, nous avons des masques comme les masques du Carnaval d’avant Carême.

Seul dans notre chambre, déjà beaucoup de choses changent. On sait bien qu’il y a des secrets de couples, heureux ou terribles, que personne ne peut deviner de l’extérieur.

Chacun de nous peut se retrouver, grâce à la solitude, face à ses secrets.

Il y a les secrets qu’on n’ose pas regarder en face, ceux que l’on porte comme un fardeau.

Il y a des secrets auxquels on s’est habitué et qui nous font accepter une double vie pourtant peu glorieuse.

Il y a des secrets de famille, si lourds à porter qu’ils empoisonnent ceux qui en sont tenus à l’écart (ex : des avortement cachés, manifestés des années après…).

Il y a des secrets d’État, au nom desquels on emprisonne ou élimine des gens, arbitrairement.

Et puis il y a ces secrets qui nous échappent à nous-mêmes, ces vagues silhouettes impossibles à nommer qui traversent notre histoire, et qui tirent des ficelles cachées…

 

. Il y a également des secrets qui humanisent.

Le secret d’un aveu qui permet une parole libératrice.

Le secret d’une intimité partagée, où chacun se reçoit de l’autre.

Le secret d’un don fait à l’autre qui ignore qui lui a fait ce don (cf. la parabole du bon Samaritain).

La joie secrète et si personnelle de la communion avec la nature, la musique, l’intelligence?

 

Les 3 secrets du Carême

Secrets qui détruisent / humanisent?

. Le Christ nous livre encore 3 secrets qui « divinisent » pourrait-on dire.

Le secret de l’aumône, car c’est reconnaître que je dois tout à Dieu et que je ne possède ma vie.

Le secret de la prière, car c’est l’intimité partagée avec Dieu et en Lui.

Le secret du jeûne, car c’est avoir faim et soif de Dieu avant tout, de Dieu plus que tout.

Ces 3 secrets sont « comme une ancre jetée dans les cieux » (He 6,19) : ils nous enracinent en Dieu, ils nous donnent d’aimer à partir « du Père qui est aux cieux » et non à partir de nous-mêmes.


L’ambivalence du secret

Quel est le statut du secret dans le Nouveau Testament ?

Comme toujours, la réalité du secret est ambivalente, et décrite comme telle par Jésus.

- C’est dans le secret que Marie accueille l’incroyable nouvelle de la vie divine déposée en elle. Malgré son amour pour Joseph, Marie ne lui a rien dit de la transformation secrète de son corps, ni de l’origine étonnante de sa grossesse (Lc 1, 18-25).

Joseph découvre que sa fiancée est enceinte, d’un autre que lui. Et parce qu’il est « juste », il décide de la répudier en secret, « sans bruit ». Ici, la justice et le secret sont donc liés en la personne de Joseph. À l’inverse de la volonté de tout étaler ou presque sur la place publique (qui caractérise bien les réseaux sociaux actuels), Joseph veut préserver la réputation de Marie, et accepte de ne pas dévoiler sa faute apparente.

Mais tout cela l’a tellement travaillé qu’il en rêve la nuit, et un songe lui permet de découvrir la vérité de ce secret. L’Esprit Saint lui-même est à l’oeuvre en Marie, mais c’est « en secret ». Joseph choisit alors de coopérer à ce secret de Dieu agissant en Marie. Il assume la paternité de cet enfant qui n’est pas de lui, en gardant le secret de son origine, jusqu’à ce que Jésus lui-même lève le voile.

- C’est le même secret dont Jésus a entouré cette période de 40 jours qu’est le Carême  pour nous préparer à Pâques : « Ton Père voit ce que tu fais en secret : il te le revaudra » (Mt 6, 4.6.18). Il n’y a que 7 usages du mot « secret » en Mt, 7 étant le chiffre de la Création (les 7 jours de la Genèse) : c’est en secret que la création du monde s’accomplit en nous.

- Il n’y a rien de secret qui ne doive être un jour être proclamé sur les toits (Lc 8,17 ; Mc 4,22 ; 1Co 4,5 ; 14,25). Les paroles prophétiques ne doivent pas être tenues secrètes (Ap 22,10), et Jésus revendique de parler au grand jour (Jn 18,20).

- Mais il y a pourtant des paroles qui doivent rester secrètes (Ap 10,4). Jésus lui-même monte « en secret » à Jérusalem pour une fête de pèlerinage (Jn 7,10), alors qu’on lui demande de se manifester au grand jour, pas « en secret » (Jn 7,4). Et surtout, il y a l’appel de Jésus à agir « dans le secret », que ce soit pour l’aumône, la prière où le jeune : « ton Père est là, dans le secret, il te le revaudra ». (Mt 6,1-18).

Saint François de Sales en tirera la maxime célèbre : « le bien ne fait pas de bruit ; le bruit ne fait pas de bien ». Jésus déjà avait recommandé: « que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite, afin que ton aumône soit secrète…» (Mt 6,3)

C’est donc à un discernement que le Christ se livre : certains secrets sont garants de l’action de Dieu, d’autres doivent impérativement être levés.

 

Secret et discernement

Carême : quand le secret humanise dans Communauté spirituelle 9782853136105Le mot secret vient d’un mot latin qui veut dire « séparé », « écarté ».

Travailler sur la part de secret qui est en soi, en latin cela s’appelle discerner.

C’est la même racine « cenere » : dis-cenere = discerner qui a forgé le terme se-« cenere » = secret.

Le discernement a donc quelque chose à voir avec le secret, avec la mise à jour de nos secrets. Le discernement spirituel aide à mettre la part secrète de nos vies en accord, autant que possible, avec la part publique. Ne pas être un autre, à l’intérieur, de celui/celle qui parait à l’extérieur. L’enjeu de la vie spirituelle passe alors par là : descendre en moi, dans les oubliettes où j’ai rangé des habitudes, des blessures, des sentiments que je ne veux plus voir, alors qu’elles sont bien là. Si, dans ce secret-là, je laisse le Christ m’initier au don (à l’aumône), à la prière et au jeûne, alors le renouveau viendra du plus profond et pas seulement de mes lèvres. « Ton Père voit ce que tu fais dans le secret, et il te le revaudra ».

Au début de ce Carême, Christ nous invite : « travaille sur la part de secret qui est en toi. Dieu mieux que toi connaît les secrets de ton c?ur ; c’est lui qui t’a façonné dans le secret du ventre de ta mère ; c’est lui qui sonde les reins et les c?urs, dévoilant ainsi les secrets que nous voudrions laisser dans l’ombre. »


Que ce Carême nous aide à évangéliser nos profondeurs secrètes !

Alors nous découvrirons l’autre sens du mot secret : le secret d’amour du Père, qui est inépuisable, infini, au-delà des mots : le secret de la vie éternelle, à partir de nos secrets réduits en cendres aujourd’hui?.

 

 1ère lecture : Appel à la pénitence (Jl 2, 12-18)

Lecture du livre de Joël

Parole du Seigneur : « Revenez à moi de tout votre coeur, dans le jeûne, les larmes et le deuil ! »
Déchirez vos coeurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment.
Qui sait ? Il pourrait revenir, il pourrait renoncer au châtiment, et vous combler de ses bienfaits : ainsi vous pourrez offrir un sacrifice au Seigneur votre Dieu.
Sonnez de la trompette dans Jérusalem : prescrivez un jeûne sacré, annoncez une solennité, réunissez le peuple, tenez une assemblée sainte, rassemblez les anciens, réunissez petits enfants et nourrissons ! Que le jeune époux sorte de sa maison, que la jeune mariée quitte sa chambre !
Entre le portail et l’autel, les prêtres, ministres du Seigneur, iront pleurer et diront : « Pitié, Seigneur, pour ton peuple, n’expose pas ceux qui t’appartiennent à l’insulte et aux moqueries des païens ! Faudra-t-il qu’on dise : ‘Où donc est leur Dieu?’»
Et le Seigneur s’est ému en faveur de son pays, il a eu pitié de son peuple.

Psaume : Ps 50, 3-4, 5-6ab, 12-13, 14.17

R/ Donne-nous, Seigneur, un coeur nouveau,
mets en nous, Seigneur, un esprit nouveau.

Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.

Oui, je connais mon péché,
ma faute est toujours devant moi.
Contre toi, et toi seul, j’ai péché,
ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait.

Crée en moi un c?ur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint.

Rends-moi la joie d’être sauvé ;
que l’esprit généreux me soutienne.
Seigneur, ouvre mes lèvres,
et ma bouche annoncera ta louange.

2ème lecture : « Laissez-vous réconcilier avec Dieu » (2 Co 5, 20-21; 6, 1-2)

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères, nous sommes les ambassadeurs du Christ, et par nous c’est Dieu lui-même qui, en fait, vous adresse un appel. Au nom du Christ, nous vous le demandons, laissez-vous réconcilier avec Dieu. Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché des hommes, afin que, grâce à lui, nous soyons identifiés à la justice de Dieu.
Et puisque nous travaillons avec lui, nous vous invitons encore à ne pas laisser sans effet la grâce reçue de Dieu.

Car il dit dans l’Écriture : Au moment favorable je t’ai exaucé, au jour du salut je suis venu à ton secours. Or, c’est maintenant le moment favorable, c’est maintenant le jour du salut.

Evangile : Les trois secrets du Carême (Mt 6,1-6.16-18)

Acclamation : Ta parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance.
Fais-nous revenir à toi, Seigneur,
jamais plus nous n’irons loin de toi :
fais-nous revenir, et nous serons sauvés.
Ta parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance. (Ps 79, 8.19-20)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Comme les disciples s’étaient rassemblés autour de Jésus, sur la montagne, il leur disait :
« Si vous voulez vivre comme des justes, évitez d’agir devant les hommes pour vous faire remarquer. Autrement, il n’y a pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux.
Ainsi, quand tu fais l’aumône, ne fais pas sonner de la trompette devant toi, comme ceux qui se donnent en spectacle dans les synagogues et dans les rues, pour obtenir la gloire qui vient des hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra.
Et quand vous priez, ne soyez pas comme ceux qui se donnent en spectacle : quand ils font leurs prières, ils aiment à se tenir debout dans les synagogues et les carrefours pour bien se montrer aux hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu pries, retire-toi au fond de ta maison, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra.
Et quand vous jeûnez, ne prenez pas un air abattu, comme ceux qui se donnent en spectacle : ils se composent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu’ils jeûnent. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ; ainsi, ton jeûne ne sera pas connu des hommes, mais seulement de ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra. »
Patrick Braud

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8 mars 2011

Mercredi des Cendres : 4 raisons de jeûner

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Mercredi des Cendres : 4 raisons de jeûner

 

Homélie pour le Mercredi des Cendres / Année A

Mercredi 09 Mars 2011

 

Pourquoi l’Église nous demande-t-elle de jeûner vraiment pendant ce Carême ? Dans quel esprit ? Bien sûr, il y a l’exemple du Christ lui-même qui a jeûné 40 jours au désert. Dans l’Évangile d’aujourd’hui, il nous recommande bien de jeûner, certes sans se donner en spectacle, mais de jeûner en vérité, simplement.

Avec le moine bénédictin Anselm Grün [1], évoquons au moins 4 raisons de jeûner.

1. Un remède pour le corps et l’esprit

·       Il y a un lien réel entre le corps et l’esprit. Quand le corps s’épaissit trop, l’esprit devient épais lui aussi. Trop de nourriture diminue la vigilance spirituelle de l’homme ; la santé physique et spirituelle constitue une unité. Or le jeûne corporel opère une élimination des substances toxiques. Le corps est désintoxiqué, et cela peut l’aider à être libéré de beaucoup de maladies. Par ce nettoyage de printemps, le jeûne a un effet régénérateur sur l’ensemble des cellules du corps. C’est pourquoi beaucoup de sagesses médicales anciennes recommandent de jeûner pour guérir.

 

·       Le remède pour le corps est en même temps un remède pour l’esprit. Car nous n’avons pas seulement un corps : nous sommes notre corps, qui interagit sur notre santé spirituelle, qui parle pour nous, nous met en relation? En refusant de se laisser toujours gaver de nourriture, le jeûne nous empresse de satisfaire notre désir ailleurs, auprès des êtres humains ou des beautés de ce monde. Il nous garde de toute précipitation à couvrir nos blessures, à les remplir de compensations. Jeûner oblige à chercher la vraie relation à l’autre.

 

·       Vis-à-vis de Dieu, le jeûne nous fait sentir physiquement que Dieu est autre, qu’il n’est pas à consommer. Je ne peux mettre la main sur lui comme sur un aliment. Nous sommes en route vers Dieu, et Dieu seul peut aiguiser notre faim vers une humanité plus profonde.  « L’homme ne vit pas seulement de pain,  mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » : comment me le rappeler si l’abondance de pain me masque les autres faims qui sont en moi ?

 

2. Une lutte contre les tentations

·       Un moine écrivait : « Quand un roi vient prendre une ville ennemie, il s’empare d’abord de l’eau dont il coupe l’adduction, et une fois qu’elle est affamée, elle se soumet. Il en va ainsi des désirs de la chair. Quand un moine part en campagne en jeûnant et en se mettant à la diète, les ennemis sont désarmés contre son âme ».

Voilà la seule guerre qui soit sainte : la guerre contre les mauvaises habitudes, les lâchetés, les négligences, les manques d’amour qui se sont installés dans ma vie. Et qui se manifestent dans les tentations de tous ordres.

Qui peut dire qu’il n’est jamais tenté ? Tenté de dire du mal, d’être infidèle, de frauder au passage, de se replier sur soi, de tout abandonner ? Chacun peut avec courage faire sa propre liste en identifiant les tentations qui l’assaillent. Le Christ lui-même n’a pas refusé d’être tenté au désert. Jeûne et désert vont de pair.

Jeûner est un combat, pour lutter contre les inévitables tentations de la vie, et nous aider à rechoisir le Christ, rechoisir d’avoir faim et soif de lui plus que des choses.

 

 

3. Une démarche de prière

·       Le jeûne intensifie la prière. Dans l’expérience de faiblesse corporelle qu’est la faim, il nous fait sentir avec tout notre être que nous ne pouvons nous appuyer sur nos seules forces : le jeûne nous invite à nous tourner vers Dieu, à compter sur lui d’abord.

St Bernard disait : « Le jeûne encourage l’oraison et la rend ardente. L’oraison obtient la force de jeûner, et le jeûne confère la grâce de prier. Le jeûne renforce l’oraison, l’oraison renforce le jeûne et la présence au Seigneur ». 

La nourriture assouvit et assoupit. La petite sieste après le repas de midi fait des ravages en entreprise? c’est l’indice que trop de nourriture endort et empêche de rester vigilant. Le jeûne nous rend vigilant et disponible au spirituel, plus perméable à l’Esprit de Dieu.  On prie mal avec le ventre plein, car l’oraison prend alors l’aspect d’autosuffisance. Les moines le savent, et se lèvent dans le jeûne de la nuit pour veiller en présence de Dieu ? Jeûner et attendre la venue de Dieu vont ensemble.

 

Gandhi disait du jeûne qu’il produit en nous « la prise de conscience de ce que nous ne pouvons nous approcher de Dieu avec arrogance, mais seulement avec l’humble douceur du faible qui se livre ».

A l’inverse,  Kierkegaard  caricaturait l’attitude des repus de la vie : « l’amour de Dieu des petits bourgeois intervient quand leur vie végétative est en pleine action, quand leurs mains se joignent confortablement sur leur estomac et que, la tête appuyée contre le dossier d’un fauteuil moelleux ils lèvent au plafond un regard ivre de sommeil »? Est-ce encore aimer Dieu que de vouloir toujours être gavé ?

 

 

4. Une voie d’illumination

·       La Didachè invitait les chrétiens des premiers siècles à jeûner pour leurs persécuteurs.

« Il y a deux voies, l’une de la vie, l’autre de la mort ; mais la différence est grande entre ces deux voies.

Or la voie de la vie est la suivante : «  D’abord, tu aimeras Dieu qui t’a fait ; en second lieu, ton prochain comme toi-même (Mt. 22, 37-39 ; cf. Dt. 6, 5), et tout ce que tu ne voudrais pas qu’il t’advienne, toi non plus, ne le fais pas à autrui  » (cf. Mt. 7, 12 ; Tb. 4, 15).
La doctrine exprimée par ces mots est la suivante : «  Bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour vos ennemis et
jeûnez «  pour ceux qui vous persécutent ; car si vous aimez ceux qui vous aiment, quel gré vous en saura-t-on ? Même les païens n’en font-ils pas autant ? Mais vous, aimez ceux qui vous haïssent  », et vous n’aurez pas d’ennemi (cf. Mt. 5, 44-47 ; Lc 6, 27s, 32).

C’est dire que, dans le jeûne et la prière, les persécuteurs apparaissent autrement : enfants  de Dieu, pour qui le Christ est mort, et pas seulement bourreaux.

 

·       Jeûner ouvre les yeux sur une autre manière de voir les êtres et les choses.

L’estomac toujours plein est dans l’impossibilité de voir les choses secrètes ; le jeûne familiarise avec Dieu, avec les manières de Dieu, Lui qui n’a pas besoin de nourriture, comme nous plus tard au-delà de la mort.

Le jeûne aiguise les sens, il augmente le goût de Dieu, il nous conduit à l’espérance du royaume de Dieu en nous, il nous fait participer dès ici-bas à la vie nouvelle de la résurrection qui n’est plus sous le mode de la consommation mais de la communion.

 

·       Un remède pour le corps et l’esprit, une lutte contre les tentations, une démarche de prière, une voie d’illumination : le Carême est d’abord un jeûne réel, un jeûne du corps et de l’esprit. En écoutant mieux notre corps, il nous aide à mieux  écouter Dieu lui-même : nous confessons avec notre corps que nous le désirons plus que tout, que sans lui nous sommes vides, que nous dépendons de sa grâce, que nous vivons de son amour, et que notre vraie faim ne peut s’apaiser par des aliments terrestres?

 

« Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l’aube. Mon âme a soif de toi ; après toi languit ma chair, terre aride, altérée, sans eau? » (Ps 62,2). 

Que le jeûne de ce Carême nous rende plus ouvert à nous-mêmes, à Dieu, et nous aurons alors plus d’amour pour notre prochain.


[1]Le jeûne. Prier avec le corps et l’esprit, Ed. Médiaspaul, 1997.


1ère lecture : Appel à la pénitence (Jl 2, 12-18)

Lecture du livre Joël

Parole du Seigneur :« Revenez à moi de tout votre coeur, dans le jeûne, les larmes et le deuil !»
Déchirez vos coeurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment.
Qui sait ? Il pourrait revenir, il pourrait renoncer au châtiment, et vous combler de ses bienfaits :ainsi vous pourrez offrir un sacrifice au Seigneur votre Dieu.
Sonnez de la trompette dans Jérusalem : prescrivez un jeûne sacré, annoncez une solennité, réunissez le peuple, tenez une assemblée sainte, rassemblez les anciens, réunissez petits enfants et nourrissons ! Que le jeune époux sorte de sa maison, que la jeune mariée quitte sa chambre !
Entre le portail et l’autel, les prêtres, ministres du Seigneur, iront pleurer et diront :« Pitié, Seigneur, pour ton peuple, n’expose pas ceux qui t’appartiennentà l’insulte et aux moqueries des païens ! Faudra-t-il qu’on dise :’Où donc est leur Dieu ?’ »
Et le Seigneur s’est ému en faveur de son pays, il a eu pitié de son peuple.

Psaume : Ps 50, 3-4, 5-6ab, 12-13, 14.17

R/ Pitié, Seigneur, car nous avons péché.

Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.

Oui, je connais mon péché,
ma faute est toujours devant moi.
Contre toi, et toi seul, j’ai péché,
ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait.

Crée en moi un coeur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. 
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint. 

Rends-moi la joie d’être sauvé ;
que l’esprit généreux me soutienne.
Seigneur, ouvre mes lèvres,
et ma bouche annoncera ta louange.

2ème lecture : Laissez-vous réconcilier avec Dieu (2Co 5, 20-21; 6, 1-2) 

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères,
nous sommes les ambassadeurs du Christ, et par nous c’est Dieu lui-même qui, en fait, vous adresse un appel. Au nom du Christ, nous vous le demandons, laissez-vous réconcilier avec Dieu.
Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché des hommes, afin que, grâce à lui, nous soyons identifiés à la justice de Dieu.
Et puisque nous travaillons avec lui, nous vous invitons encore à ne pas laisser sans effet la grâce reçue de Dieu.
Car il dit dans l’Écriture : Au moment favorable je t’ai exaucé, au jour du salut je suis venu à ton secours. Or, c’est maintenant le moment favorable, c’est maintenant le jour du salut.

 

Evangile : L’aumône, la prière et le jeûne comme Dieu les aime (Mt 6,1-6.16-18)

 

Acclamation : Ta Parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance. « Convertissez-vous, dit le Seigneur, car le Royaume des cieux est proche. » Ta Parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance.

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Comme les disciples s’étaient rassemblés autour de Jésus, sur la montagne, il leur disait :
« Si vous voulez vivre comme des justes, évitez d’agir devant les hommes pour vous faire remarquer. Autrement, il n’y a pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux.
Ainsi, quand tu fais l’aumône, ne fais pas sonner de la trompette devant toi, comme ceux qui se donnent en spectacle dans les synagogues et dans les rues, pour obtenir la gloire qui vient des hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra.

Et quand vous priez, ne soyez pas comme ceux qui se donnent en spectacle : quand ils font leurs prières, ils aiment à se tenir debout dans les synagogues et les carrefours pour bien se montrer aux hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu pries, retire-toi au fond de ta maison, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra.

Et quand vous jeûnez, ne prenez pas un air abattu, comme ceux qui se donnent en spectacle : ils se composent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu’ils jeûnent. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ;
ainsi, ton jeûne ne sera pas connu des hommes, mais seulement de ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra.
Patrick BRAUD

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