L'homélie du dimanche (prochain)

6 mars 2010

Les résistances de Moïse… et les nôtres

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Les résistances de Moïse… et les nôtres

 

Homélie du troisième dimanche de carême / Année C

07/03/2010

 

Ce célébrissime épisode du buisson ardent contient une multitude de pistes : le symbole du buisson ; la révélation de la transcendance ; le tétragramme (Y. H. W. H.) ; le « détour » de Moïse pour voir ; le lien entre la vision de Moïse, celle de Dieu (« j’ai vu ») et la libération de l’esclavage etc…

 

Je vous propose encore un autre fil d’Ariane à suivre tout au long de ce récit : les refus que Moïse oppose à Dieu, ou plutôt ses résistances à se laisser envoyer vers ses frères et vers Pharaon.

  

Quand on regarde l’ensemble du texte (Exode 3,1-22), on peut compter le nombre de fois où Moïse résiste, se regimbe, et négocie avec Dieu : 5 fois.

Cinq est le chiffre symbolique de la loi (la loi = Tora compte cinq livres : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome : c’est le « Pentateuque » = les cinq livres).

Cette même loi que Moïse donnera plus tard au peuple, pour l’instant il y résiste de toutes ses forces.

Voyons comment.

 

Première résistance

« Qui suis-je pour aller vers Pharaon et faire sortir d’Égypte les fils d’Israël ? » (3,11)

En positif, c’est le signe d’une grande humilité, car « Moïse était l’homme le plus humble que la terre ait porté » (Nb 12,3).

Mais derrière cette humilité peut se cacher une forme de refus de faire confiance à Dieu alors que lui nous  fait confiance ! « Qui suis-je pour que tu m’envoies ? » peut signifier très vite : « tu es fou d’avoir pensé à moi ; tu as du te tromper ; prends conscience de ton erreur sur moi et laisse-moi tranquille »…

Cette résistance à l’appel de Dieu est bien la nôtre : sous prétexte d’avoir conscience de notre indignité, nous nous défilons, nous disons : « ce n’est pas pour moi ; c’est pour ceux qui sont mieux que moi »… Et on ne fait pas confiance au choix de Dieu lorsqu’il nous appelle, par une médiation ou par une autre (de l’humble buisson à l’appel en fin de messe… !)

 

Deuxième résistance

« S’ils me disent : quel est le nom du Dieu qui t’envoie, que leur dirai-je ? » (3,13) ».

La tactique de Moïse pour échapper à sa mission varie. « Je ne sais même pas qui tu es. J’aurais l’air malin de venir en ton nom alors que je ne connais pas ton Nom ! ».


De bonne grâce, Dieu reconnaît que l’argument est valable, et du coup il se dévoile : « Je suis Y. H. W. H. ». Ces quatre lettres imprononçables ont fait couler beaucoup d’encre, mais ce qui nous intéresse ici est la pédagogie que Dieu suggére à Moïse pour vaincre sa résistance : « tu diras aux fils d’Israël : « Je Suis » (Y. H.) m’a envoyé vers vous ». Il suggére à Moïse de tronquer son Nom devant le peuple, pour ne pas l’effrayer avec le futur qui l’attend (W. H. = « qui je serai » = l’Exode, les exils ultérieurs etc…).

 

Dans notre combat avec Dieu où nous négocions terme à terme les conditions de notre mission, nous avons le droit de lui opposer des arguments recevables, à condition de nous laisser guider et enseigner  par sa pédagogie en réponse à nos objections.

 

Troisième résistance

« Ils ne me croiront pas » (4,1).

On perçoit le doute et la lassitude de Moïse par avance : ce peuple a la nuque raide, ils vont me renvoyer sans m’écouter.

C’est la tentation défaitiste, du genre : « c’est fichu d’avance, pas la peine d’essayer ».

Tentation qui guette bon nombre de nos communautés chrétiennes : « faut pas rêver, ça marchera pas ».

Les résistances de Moïse... et les nôtres dans Communauté spirituelle image020Résistance à l’appel de Dieu qui nous traverse tous : « annoncer Dieu aujourd’hui, c’est trop difficile ; personne ne m’écoutera. Je cours à l’échec ».

Eh bien Dieu se fâche tout rouge devant ce doute défaitiste de Moïse : il lui montre sa puissance avec le signe du bâton-serpent (4,4) et le frappe un instant de la lettre (4,6) comme il frappera de la lèpre pendant sept jours sa soeur Myriam lorsqu’elle osera critiquer Moïse (Nb 12,10) par jalousie.

 

 

 

Quatrième résistance

« Je suis pas doué pour la parole ». (4,10)

Moïse ne s’avoue pas vaincu. Il enchaîne avec une autre objection : il n’a aucun talent oratoire, comment pourrait-il convaincre ce peuple ? Certains commentaires suggèrent qu’il pourrait être bègue, d’autres qu’il  ne peut que baragouiner l’hébreu avec un fort accent égyptien car il connaît mal sa langue maternelle etc…

Quoi qu’il en soit, Moïse croit que c’est à lui d’avoir du talent. Alors que Dieu lui répond : « je serai sur tes lèvres ; je te soufflerai ce que tu as à dire. Aie confiance en moi au lieu de trembler en ne comptant que sur toi !

C’est à cette même résistance que Jésus s’adressera lorsqu’il invitera ses disciples à avoir confiance dans l’inspiration que l’Esprit leur donnera : « Mettez-vous donc bien dans l’esprit que vous n’avez pas à préparer d’avance votre défense: car moi je vous donnerai un langage et une sagesse, à quoi nul de vos adversaires ne pourra résister ni contredire. » (Lc  21,14-15)

 

Cinquième résistance (et même refus catégorique)

« Envoie-le dire par qui tu voudras ! » (4,13)

Mo%C3%AFse buisson dans Communauté spirituelle« N’importe qui, mais pas moi ! Je ne veux pas ».

Là, il n’y a même plus d’arguments, seulement le refus obstiné de Moïse à se laisser envoyer.

Là encore, la colère de Dieu lui revient comme un boomerang en plein visage : « j’en ai assez de ton marchandage et de tes refus. Je t’offre une dernière concession : ton frère Aaron parlera pour toi. Alors maintenant, arrête de faire l’enfant capricieux : prends ton bâton-signe, ton frère-parole, crois que je suis  dans ton coeur et sur tes lèvres, et arrête de te plaindre et de gémir : va, je t’envoie ! Cette fois-ci c’est un ordre. »

« Et Moïse s’en alla » (4,18) vers l’Égypte, vers ses frères…

 


Que chacun s’examine.

Le carême est la période du combat spirituel. Dans les cinq résistances que Moïse oppose à Dieu, quelle est la nôtre actuellement ? Quel est notre refus de nous laisser envoyer ? Vers quel Pharaon ? Vers quel  peuple en esclavage ? Comment laisser la pédagogie de Dieu vaincre nos refus et nos résistances à son appel ?…

 

 

1ère lecture : Le buisson ardent (Ex 3, 1-8a.10.13-15)

Lecture du livre de l’Exode (Exode  3,1 -4,18)

  Moïse faisait paître le petit bétail de Jéthro, son beau-père, prêtre de Madiân; il l’emmena par-delà le désert et parvint à la montagne de Dieu, l’Horeb.  L’Ange de Yahvé lui apparut, dans une flamme de feu, du milieu d’un buisson. Moïse regarda: le buisson était embrasé mais le buisson ne se consumait pas.  Moïse dit: « Je vais faire un détour pour voir cet étrange spectacle, et pourquoi le buisson ne se consume pas. »  Yahvé vit qu’il faisait un détour pour voir, et Dieu l’appela du milieu du buisson. « Moïse, Moïse », dit-il, et il répondit: « Me voici. »  Il dit: « N’approche pas d’ici, retire tes sandales de tes pieds car le lieu où tu te tiens est une terre sainte. »  Et il dit: « Je suis le Dieu de tes pères, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob. » Alors Moïse se voila la face, car il craignait de fixer son regard sur Dieu.

  Yahvé dit: « J’ai vu, j’ai vu la misère de mon peuple qui est en Egypte. J’ai entendu son cri devant ses oppresseurs; oui, je connais ses angoisses.  Je suis descendu pour le délivrer de la main des Egyptiens et le faire monter de cette terre vers une terre plantureuse et vaste, vers une terre qui ruisselle de lait et de miel, vers la demeure des Cananéens, des Hittites, des Amorites, des Perizzites, des Hivvites, et des Jébuséens.  Maintenant, le cri des Israélites est venu jusqu’à moi, et j’ai vu l’oppression que font peser sur eux les Egyptiens.  Maintenant va, je t’envoie auprès de Pharaon, fais sortir d’Egypte mon peuple, les Israélites. »

  Moïse dit à Dieu: « Qui suis-je pour aller trouver Pharaon et faire sortir d’Egypte les Israélites? »  Dieu dit: « Je serai avec toi, et voici le signe qui te montrera que c’est moi qui t’ai envoyé. Quand tu feras sortir le peuple d’Egypte, vous servirez Dieu sur cette montagne. »  Moïse dit à Dieu: « Voici, je vais trouver les Israélites et je leur dis: Le Dieu de vos pères m’a envoyé vers vous. Mais s’ils me disent: Quel est son nom?, que leur dirai-je? »  Dieu dit à Moïse: « Je suis celui qui est. » Et il dit: « Voici ce que tu diras aux Israélites: Je suis m’a envoyé vers vous. »  Dieu dit encore à Moïse: « Tu parleras ainsi aux Israélites: Yahvé, le Dieu de vos pères, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob m’a envoyé vers vous. C’est mon nom pour toujours, c’est ainsi que l’on m’invoquera de génération en génération.  « Va, réunis les anciens d’Israël et dis-leur: Yahvé, le Dieu de vos pères, m’est apparu –  le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob –  et il m’a dit: Je vous ai visités et j’ai vu ce qu’on vous fait en Egypte,  alors j’ai dit: Je vous ferai monter de l’affliction d’Egypte vers la terre des Cananéens, des Hittites, des Amorites, des Perizzites, des Hivvites et des Jébuséens, vers une terre qui ruisselle de lait et de miel.  Ils écouteront ta voix et vous irez, toi et les anciens d’Israël, trouver le roi d’Egypte et vous lui direz: Yahvé, le Dieu des Hébreux, est venu à notre rencontre. Toi, permets-nous d’aller à trois jours de marche dans le désert pour sacrifier à Yahvé notre Dieu.  Je sais bien que le roi d’Egypte ne vous laissera aller que s’il y est contraint par une main forte.  Aussi j’étendrai la main et je frapperai l’Egypte par les merveilles de toute sorte que j’accomplirai au milieu d’elle; après quoi, il vous laissera partir.  « Je ferai gagner à ce peuple la faveur des Egyptiens, et quand vous partirez, vous ne partirez pas les mains vides.  La femme demandera à sa voisine et à celle qui séjourne dans sa maison des objets d’argent, des objets d’or et des vêtements. Vous les ferez porter à vos fils et à vos filles et vous en dépouillerez les Egyptiens. »  Moïse reprit la parole et dit: « Et s’ils ne me croient pas et n’écoutent pas ma voix, mais me disent: Yahvé ne t’est pas apparu? »  Yahvé lui dit: « Qu’as-tu en main? –  Un bâton, dit-il. –  Jette-le à terre », lui dit Yahvé. Moïse le jeta à terre, le bâton se changea en serpent et Moïse fuit devant lui.  Yahvé dit à Moïse: « Avance la main et prends-le par la queue. » Il avança la main, le prit, et dans sa main il redevint un bâton.  « Afin qu’ils croient que Yahvé t’est apparu, le Dieu de leurs pères, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob. »  Yahvé lui dit encore: « Mets ta main dans ton sein. » Il mit la main dans son sein, puis la retira, et voici que sa main était lépreuse, blanche comme neige.  Yahvé lui dit: « Remets ta main dans ton sein. » Il remit la main dans son sein et la retira de son sein, et voici qu’elle était redevenue comme le reste de son corps.  « Ainsi, s’ils ne te croient pas et ne sont pas convaincus par le premier signe, ils croiront à cause du second signe.  Et s’ils ne croient pas, même avec ces deux signes, et qu’ils n’écoutent pas ta voix, tu prendras de l’eau du Fleuve et tu la répandras par terre, et l’eau que tu auras puisée au Fleuve se changera en sang sur la terre sèche. »  Moïse dit à Yahvé: « Excuse-moi, mon Seigneur, je ne suis pas doué pour la parole, ni d’hier ni d’avant-hier, ni même depuis que tu adresses la parole à ton serviteur, car ma bouche et ma langue sont pesantes. »  Yahvé lui dit: « Qui a doté l’homme d’une bouche? Qui rend muet ou sourd, clairvoyant ou aveugle? N’est-ce pas moi, Yahvé?  Va maintenant, je serai avec ta bouche et je t’indiquerai ce que tu devras dire. »  Moïse dit encore: « Excuse-moi, mon Seigneur, envoie, je t’en prie, qui tu voudras. »  La colère de Yahvé s’enflamma contre Moïse et il dit: « N’y a-t-il pas Aaron, ton frère, le lévite? Je sais qu’il parle bien, lui; le voici qui vient à ta rencontre et à ta vue il se réjouira en son coeur.  Tu lui parleras et tu mettras les paroles dans sa bouche. Moi, je serai avec ta bouche et avec sa bouche, et je vous indiquerai ce que vous devrez faire.  C’est lui qui parlera pour toi au peuple; il te tiendra lieu de bouche et tu seras pour lui un dieu.  Quant à ce bâton, prends-le dans ta main, c’est par lui que tu accompliras les signes. »  Moïse s’en alla?

 

Psaume : Ps 102, 1-2, 3-4, 6-7, 8.11

R/ Le Seigneur est tendresse et pitié

Bénis le Seigneur, ô mon âme,
bénis son nom très saint, tout mon être !
Bénis le Seigneur, ô mon âme,
n’oublie aucun de ses bienfaits !

Car il pardonne toutes tes offenses
et te guérit de toute maladie ;
il réclame ta vie à la tombe
et te couronne d’amour et de tendresse.

Le Seigneur fait oeuvre de justice,
il défend le droit des opprimés.
Il révèle ses desseins à Moïse,
aux enfants d’Israël ses hauts faits.

Le Seigneur est tendresse et pitié,
lent à la colère et plein d’amour ;
Comme le ciel domine la terre,
fort est son amour pour qui le craint.

 

2ème lecture : Les leçons de l’exode : appel à la conversion (1Co 10, 1-6.10-12)

Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères, je ne voudrais pas vous laisser ignorer ce qui s’est passé lors de la sortie d’Égypte. Nos ancêtres ont tous été sous la protection de la colonne de nuée, et tous ils ont passé la mer Rouge.
Tous, ils ont été pour ainsi dire baptisés en Moïse, dans la nuée et dans la mer ;
tous, ils ont mangé la même nourriture, qui était spirituelle ;
tous, ils ont bu à la même source, qui était spirituelle ; car ils buvaient à un rocher qui les accompagnait, et ce rocher, c’était déjà le Christ.
Cependant, la plupart n’ont fait que déplaire à Dieu, et ils sont tombés au désert.
Ces événements étaient destinés à nous servir d’exemple, pour nous empêcher de désirer le mal comme l’ont fait nos pères.
Cessez de récriminer contre Dieu comme l’ont fait certains d’entre eux : ils ont été exterminés.
Leur histoire devait servir d’exemple, et l’Écriture l’a racontée pour nous avertir, nous qui voyons arriver la fin des temps.
Ainsi donc, celui qui se croit solide, qu’il fasse attention à ne pas tomber.

 

Evangile : Sans cesse, Dieu nous invite à nous convertir (Lc 13, 1-9)

Un jour, des gens vinrent rapporter à Jésus l’affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer pendant qu’ils offraient un sacrifice.
Jésus leur répondit : « Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort ?
Eh bien non, je vous le dis ; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous comme eux.
Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu’elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ?
Eh bien non, je vous le dis ; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière. »
Jésus leur disait encore cette parabole : « Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n’en trouva pas.
Il dit alors à son vigneron : ‘Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le. A quoi bon le laisser épuiser le sol ?’
Mais le vigneron lui répondit : ‘Seigneur, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier.
Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir. Sinon, tu le couperas.’ »
Patrick BRAUD

Mots-clés : , , , ,

20 février 2010

Et plus si affinité…

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

ET PLUS SI AFFINITÉ ?

 

Homélie du  1° Dimanche de Carême / Année C

21/01/10

 

Les trois tentations de notre page d’évangile sont construites autour de la même structure:

chapiteau de Chauvigny

SI    tu es le fils de Dieu,          Alors     ordonne à cette pierre de devenir du pain

         tu te prosternes devant moi,             tu auras tout cela

         tu es le fils de Dieu,                         jette-toi en bas.

 

Comme quoi cela peut être particulièrement « diabolique » d’utiliser nous aussi cette structure de langage ! C’est ce que nous faisons hélas lorsque nous disons à nos proches ou à nos collaborateurs :

- Si tu es mon enfant, alors tu dois réussir en classe.

- Si tu m’obéis aveuglement, tu auras de l’avancement.

- Si tu es chrétien, tu dois tout partager…

 

On perçoit l’ombre du chantage qui pèse sur ces déclarations radicales.

Si tu es ce que tu prétends être, je te prends au mot, et tu es coincé : tu dois correspondre à l’image que je me fais de cette identité.

 

C’est presque à un débat sur l’identité nationale que nous assistons entre le démon est Jésus !

Le démon lui parle de son identité filiale pour amener Jésus à tomber dans la folie du pouvoir, démesuré, magique, tout-puissant : transformer les pierres en pain, voler dans le vide sans se faire mal…

Et Jésus lui répond justement à partir de son identité la plus intime : être fils, c’est se recevoir, et non faire tout ce dont j’ai envie.

- Recevoir sa nourriture, la vraie : la Parole qui sort de la bouche d’un Autre.

- Recevoir la gloire des mains de Dieu, à sa manière, et non pas magouiller pour obtenir une gloire trop humaine (« la gloire de ces royaumes »).

- Recevoir sans maîtriser, ce qui implique de ne pas mettre Dieu à l’épreuve en l’utilisant pour faire du spectaculaire.

 

L’identité, qu’elle soit française ou filiale, ne s’obtient pas à l’issue d’un chantage ou d’un marchandage.

Elle résulte d’un don gratuit : la nation donne à un enfant de faire partie de la communauté française, ou bien Dieu donne à celui qui croit – et qui le proclame – d’être sauvé et de devenir enfant de Dieu.

 

La deuxième lecture utilise elle aussi une structure conditionnelle : si tu crois… si tu affirmes de ta bouche… alors tu seras sauvé. Mais ce n’est pas ici pour faire pression, ce n’est pas un chantage, ce n’est pas une instrumentalisation de l’identité de l’autre, c’est au contraire une invitation à recevoir gratuitement le salut offert sans condition ! Il suffit de vouloir le recevoir pour qu’il soit réel.

Tout l’inverse du démon qui voudrait pousser Jésus à conquérir par lui-même une identité contestée : si tu es le fils de Dieu, montre-le moi, et à tous !

 

Le travail de sape des tentations est donc de nous faire croire que l’amour serait toujours au conditionnel, suspendu à telle ou telle performance.

Si tu fais cela, alors je croirai en toi : avouons que nous mettons souvent Dieu à l’épreuve de cette manière !

- Si tu m’épargnes la maladie, alors j’irai à pied à Saint-Jacques-de-Compostelle…

- Si tu es Dieu, tu dois m’éviter ce licenciement.

- Si tu es Dieu, tu aurais dû éviter au peuple haïtien ce terrible tremblement de terre…

 

Du coup, nous reproduisons ce chantage au conditionnel avec nos collègues de travail :

- Si tu apportes de bons résultats, tu auras ta place parmi nous ;

ou avec nos familles :

- Si tu es mon mari / ma femme, tu dois m’apporter tout ce qui me manque ;

ou avec notre Église :

- Si tu es vraiment évangélique, tu dois être meilleure que les autres… (sinon je te quitte !)

 

Alors que Jésus renverse la perspective :

- Tu es enfant de Dieu… nourris-toi de sa Parole.

- Tu as déjà le salut et la vie : pourquoi te prosterner devant des idoles qui ne peuvent rien pour toi ?

- Tu es déjà aimé de Dieu : pourquoi en voudrais-tu des preuves magiques et extraordinaires ?

 

Ce renversement de perspective rejaillit donc sur nos propres comportements :

- Tu es mon collaborateur : appuie-toi sur cette confiance pour donner le meilleur de toi-même.

- Tu as mon affection, ma reconnaissance, et ce qui est à moi est à toi : appuie-toi sur ce pouvoir partagé pour te mettre au service des autres.

- Tu es mon enfant / mon conjoint / mon parent : tu n’as rien à prouver, sois libre d’être toi-même, n’écoute pas ce qui veulent te mettre à l’épreuve et Dieu avec…

 

Alors au début de ce carême, ne soyons pas des tentateurs, de ceux qui mettent une pression insupportable sur leurs proches en leur faisant un chantage permanent, comme si tout était « sous condition ».

Combattons cette tendance sournoise à tout marchander.

Car « tous ont le même Seigneur, généreux envers tous ceux qui l’invoquent ».

 

 

 


1ère lecture : La profession de foi du peuple d’Israël (Dt 26, 4-10)

Moïse disait au peuple d’Israël : Lorsque tu présenteras les prémices de tes récoltes, le prêtre recevra de tes mains la corbeille et la déposera devant l’autel du Seigneur ton Dieu.
Tu prononceras ces paroles devant le Seigneur ton Dieu : « Mon père était un Araméen vagabond, qui descendit en Égypte : il y vécut en immigré avec son petit clan. C’est là qu’il est devenu une grande nation, puissante et nombreuse.
Les Égyptiens nous ont maltraités, et réduits à la pauvreté ; ils nous ont imposé un dur esclavage.
Nous avons crié vers le Seigneur, le Dieu de nos pères. Il a entendu notre voix, il a vu que nous étions pauvres, malheureux, opprimés.
Le Seigneur nous a fait sortir d’Égypte par la force de sa main et la vigueur de son bras, par des actions terrifiantes, des signes et des prodiges.
Il nous a conduits dans ce lieu et nous a donné ce pays, un pays ruisselant de lait et de miel.
Et voici maintenant que j’apporte les prémices des produits du sol que tu m’as donné, Seigneur. »

 

Psaume : Ps 90, 1-2, 10-11, 12-13, 14-15ab

R/ Reste avec nous, Seigneur, dans notre épreuve

Quand je me tiens sous l’abri du Très Haut
et repose à l’ombre du Puissant
Je dis au Seigneur:  » Mon Refuge
mon Rempart, mon Dieu, dont je suis sûr ! »

Le malheur ne pourra te toucher
ni le danger approcher de ta demeure
Il donne mission à Ses anges
de te garder sur tous tes chemins

Ils te porteront sur leurs mains
pour que ton pied ne heurte les pierres
tu marcheras sur la vipère et le scorpion
tu écraseras le lion et le dragon

« Puisqu’il s’attache à Moi, Je le délivre
Je le défends car il connaît Mon Nom
il m’appelle et Moi Je lui réponds
Je suis avec lui dans son épreuve « 

2ème lecture : La profession de foi en Jésus Christ (Rm 10, 8-13)

Frère, nous lisons dans l’Ecriture : La Parole est près de toi, elle est dans ta bouche et dans ton coeur. Cette Parole, c’est le message de la foi que nous proclamons.
Donc, si tu affirmes de ta bouche que Jésus est Seigneur, si tu crois dans ton coeur que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, alors tu seras sauvé.
Celui qui croit du fond de son coeur devient juste ; celui qui, de sa bouche, affirme sa foi parvient au salut.
En effet, l’Écriture dit : Lors du jugement, aucun de ceux qui croient en lui n’aura à le regretter.
Ainsi, entre les Juifs et les païens, il n’y a pas de différence : tous ont le même Seigneur, généreux envers tous ceux qui l’invoquent.
Il est écrit en effet, tous ceux qui invoqueront le nom du Seigneur seront sauvés.

 

Evangile : La tentation de Jésus (Lc 4, 1-13)

Après son baptême, Jésus, rempli de l »Esprit Saint, quitta les bords du Jourdain ; il fut conduit par l »Esprit à travers le désert
où, pendant quarante jours, il fut mis à l’épreuve par le démon. Il ne mangea rien durant ces jours-là, et, quand ce temps fut écoulé, il eut faim.
Le démon lui dit alors : « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne à cette pierre de devenir du pain. »
Jésus répondit : « Il est écrit : Ce n’est pas seulement de pain que l’homme doit vivre. »
Le démon l’emmena alors plus haut, et lui fit voir d’un seul regard tous les royaumes de la terre.
Il lui dit : « Je te donnerai tout ce pouvoir, et la gloire de ces royaumes, car cela m’appartient et je le donne à qui je veux.
Toi donc, si tu te prosternes devant moi, tu auras tout cela. »
Jésus lui répondit : « Il est écrit : Tu te prosterneras devant le Seigneur ton Dieu, et c’est lui seul que tu adoreras. »
Puis le démon le conduisit à Jérusalem, il le plaça au sommet du Temple et lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas ;
car il est écrit : Il donnera pour toi à ses anges l’ordre de te garder ;
et encore : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. »
Jésus répondit : « Il est dit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. »
Ayant ainsi épuisé toutes les formes de tentations, le démon s’éloigna de Jésus jusqu’au moment fixé.
Patrick BRAUD

Mots-clés : , ,

16 février 2010

Le symbolisme des cendres

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Mercredi des cendres 17 Février 2010

 

L’imposition des cendres

« L’imposition des cendres met en évidence, en particulier, notre condition de créatures, en totale et reconnaissante dépendance du Créateur. L’humble acte de recevoir les cendres sacrées sur le front s’oppose au geste orgueilleux d’Adam et d’Eve qui, par leur désobéissance, détruisirent le rapport d’amitié qui existait avec Dieu Créateur ».

 


Jean-Paul II
audience générale du Mercredi des Cendres, 25 février 1998


 

La symbolique des cendres dans la Bible

La cendre, dont la signification originelle est fort discutée, bien que son usage soit répandu dans la plupart des religions antiques, est souvent associée à la poussière[1], et symbolise à la fois le péché et la fragilité de l’homme.

 

I. Le coeur du pécheur, d’abord, est semblable à la cendre : le prophète Isaïe appelle l’idolâtre un « amateur de cendres[2] », et le Sage dit de lui : « Cendres, que son coeur ! Plus misérable que la poussière, sa vie ![3] » C’est pourquoi le salaire du péché ne peut être que cendre : les orgueilleux se verront « réduits en cendre sur la terre[4] », et les méchants seront piétinés comme cendre par les justes[5]. D’ailleurs le pécheur qui, au lieu de s’endurcir dans son orgueil[6], prend conscience de sa faute, confesse précisément qu’il n’est que « poussière et cendre[7] » ; et pour signifier aux autres et à lui-même qu’il en est convaincu, il s’assoit sur la cendre[8] et s’en couvre la tête[9].

2. Mais ce même symbole de pénitence sert aussi à exprimer la tristesse de l’homme anéanti par le malheur, sans doute parce qu’on suppose un lien entre le malheur et le péché. Thamar méprisée se couvre de cendre[10] ; de même les Juifs menacés de mort[11]. L’homme veut ainsi montrer l’état auquel il a été réduit[12] et va même jusqu’à se nourrir de cendre[13]. Mais c’est avant tout quand un deuil le frappe qu’il expérimente son néant, et il l’exprime alors en se couvrant de poussière et de cendre : « Fille de Sion, revêts le sac, roule-toi dans la cendre, fais un deuil[14]. »

Se couvrir de cendre, c’est donc réaliser une sorte de confession publique mimée, ce que représente encore la liturgie du Mercredi des cendres : par le langage de cette matière sans vie qui retourne en poussière, I’homme se reconnait pécheur et fragile, prévenant par 1à le jugement de Dieu et attirant sa miséricorde. A celui qui avoue ainsi son néant, se fait entendre la promesse du Messie qui vient triompher du péché et de la mort, « consoler les affligés et leur donner, au lieu de cendre, un diadème[15]. »

[1] Les Septante traduisent plus d’une fois « poussière » par « cendre ».

[2] Isaïe, XLIV 20.

[3] Livre de la Sagesse, XV 10.

[4] Ezéchiel, XXVIII 18.

[5] Malachie, III 21.

[6] Ecclésiastique, X 9.

[7] Genèse, XVIII 27 ; Ecclésiastique, XVII 32.

[8] Job, XLII 6 ; Jonas, III 6 ; S. Matthieu, XI 21.

[9] Judith, IV 11-15 & IX 1; Ezéchiel, XXVII 30.

[10] Deuxième livre de Samuel, XIII 19.

[11] Esther, IV 1-4.

[12] Job, XXX 19.

[13] Psaume CII 10 ; Lamentations, III 16.

[14] Jérémie, VI 26.

[15] Isaïe, LXI et suivants.


source: http://missel.free.fr/Annee_C/careme/cendres_4.html

 


1ère lecture : Appel à la pénitence (Jl 2, 12-18)

Parole du Seigneur : « Revenez à moi de tout votre coeur, dans le jeûne, les larmes et le deuil ! »
Déchirez vos coeurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment.
Qui sait ? Il pourrait revenir, il pourrait renoncer au châtiment, et vous combler de ses bienfaits : ainsi vous pourrez offrir un sacrifice au Seigneur votre Dieu.
Sonnez de la trompette dans Jérusalem : prescrivez un jeûne sacré, annoncez une solennité, réunissez le peuple, tenez une assemblée sainte, rassemblez les anciens, réunissez petits enfants et nourrissons ! Que le jeune époux sorte de sa maison, que la jeune mariée quitte sa chambre !
Entre le portail et l’autel, les prêtres, ministres du Seigneur, iront pleurer et diront : « Pitié, Seigneur, pour ton peuple, n’expose pas ceux qui t’appartiennent à l’insulte et aux moqueries des païens ! Faudra-t-il qu’on dise : ‘Où donc est leur Dieu ?’ »
Et le Seigneur s’est ému en faveur de son pays, il a eu pitié de son peuple.

 

Psaume : Ps 50, 3-4, 5-6ab, 12-13, 14.1

R/ Donne-nous, Seigneur, un coeur nouveau,
mets en nous, Seigneur, un esprit nouveau.

 

Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.

Oui, je connais mon péché,
ma faute est toujours devant moi.
Contre toi, et toi seul, j’ai péché,
ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait.

Crée en moi un coeur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint.

Rends-moi la joie d’être sauvé ;
que l’esprit généreux me soutienne.
Seigneur, ouvre mes lèvres,
et ma bouche annoncera ta louange.

 

2ème lecture : ?Laissez-vous réconcilier avec Dieu? (2Co 5, 20-21; 6, 1-2)

Frères, nous sommes les ambassadeurs du Christ, et par nous c’est Dieu lui-même qui, en fait, vous adresse un appel. Au nom du Christ, nous vous le demandons, laissez-vous réconcilier avec Dieu. Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché des hommes, afin que, grâce à lui, nous soyons identifiés à la justice de Dieu.
Et puisque nous travaillons avec lui, nous vous invitons encore à ne pas laisser sans effet la grâce reçue de Dieu.

Car il dit dans l’Écriture :

Au moment favorable je t’ai exaucé, au jour du salut je suis venu à ton secours. Or, c’est maintenant le moment favorable, c’est maintenant le jour du salut.

 

Evangile : L’aumône, la prière et le jeûne comme Dieu les aime (Mt 6,1-6.16-18)

Comme les disciples s’étaient rassemblés autour de Jésus, sur la montagne, il leur disait :
« Si vous voulez vivre comme des justes, évitez d’agir devant les hommes pour vous faire remarquer. Autrement, il n’y a pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux.
Ainsi, quand tu fais l’aumône, ne fais pas sonner de la trompette devant toi, comme ceux qui se donnent en spectacle dans les synagogues et dans les rues, pour obtenir la gloire qui vient des hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra.
Et quand vous priez, ne soyez pas comme ceux qui se donnent en spectacle : quand ils font leurs prières, ils aiment à se tenir debout dans les synagogues et les carrefours pour bien se montrer aux hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu pries, retire-toi au fond de ta maison, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra.
Et quand vous jeûnez, ne prenez pas un air abattu, comme ceux qui se donnent en spectacle : ils se composent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu’ils jeûnent. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ; ainsi, ton jeûne ne sera pas connu des hommes, mais seulement de ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra. »
 

Patrick BRAUD

Mots-clés : ,
1...89101112