L'homélie du dimanche (prochain)

9 novembre 2013

Aimer Dieu comme on aime une vache ?

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Aimer Dieu comme on aime une vache ?

Homélie du 32ème Dimanche / Année C
Dimanche 10 Novembre 2013

Si la Résurrection d’entre les morts n’existait pas, est-ce que cela changerait quelque chose dans votre vie ?

Prenez le temps d’y réfléchir…

Les résultats ne seront sans doute pas les mêmes pour tous.

- Certains découvriront que finalement ils croient suffisamment en l’homme pour se passer d’un au-delà.

- D’autres s’apercevront qu’ils ne se sont jamais posé en vérité la question de « l’après », laissant volontairement dans le flou cette question embarrassante : « on verra bien quand on y sera ! »

- D’autres encore reliront leur histoire, et découvriront que l’espérance en l’amour plus fort que la mort est l’une des clés les plus importantes de leur existence.

Que de choix, que de pardons, que de bifurcations de vies, que de décisions qui en fin de compte reposent sur cette folle certitude : « les morts doivent ressusciter », comme l’exprime Jésus dans notre évangile !

En tout cas les Sadducéens eux, avaient résolu le problème, du temps de Jésus. Pour eux, « pas de résurrection ». Et pourtant ce sont des Juifs, croyants, pratiquants. Pourquoi sont-ils ainsi ?

- Peut-être parce qu’ils imaginent l’autre monde à la manière de celui-ci. Un monde où l’on boit, on mange, on se marie. Un paradis comme un copier-coller des meilleurs moments de la vie humaine. Et du coup cela leur paraît peu probable.

Jésus les renvoie au caractère inimaginable, indicible, de la nouvelle création. Le monde à venir est autre, on ne peut l’imaginer à partir de celui-ci. Même le mariage, sacrement de l’amour divin, sera complètement transformé, transfiguré, à travers le passage de la mort, la Pâque de la Résurrection. « Dans le monde à venir on ne se marie pas », dit Jésus. Il n’y aura plus ni l’homme ni la femme, dira St Paul, qui prendra aussi les comparaisons de la graine et de la plante, du foetus et du nouveau-né, pour évoquer la radicale différence entre ce monde-ci et le monde à venir.

Il nous faut donc renoncer à projeter sur l’au-delà nos représentations d’ici-bas.

Sans renoncer à dire l’essentiel : les morts ressusciteront, ils seront fils de Dieu, ils participeront à la nature même de Dieu. C’est sans doute pour cela d’ailleurs qu’on ne se marie pas dans le monde à venir ; car se marier, c’est privilégier une relation et une seule (normalement !) au point que cette communion entre un homme et une femme est unique. Alors qu’en Dieu qui est amour, toutes les relations sont privilégiées sans qu’une seule doive exclure les autres. Une des significations du célibat des prêtres latins s’enracine là : annoncer dès maintenant ce monde à venir où nous n’aurons plus besoin d’exclure ou de privilégier pour aimer…

Allons plus loin.

- Si les Sadducéens ne croient pas en la Résurrection, à quoi leur sert alors leur foi ? Que leur apporte-t-elle puisque d’après eux tout s’arrête à la mort ?

La réponse est à chercher du côté de la doctrine juive de la rétribution

Selon cette doctrine, chacun est très vite rétribué en fonction de ses actes : le croyant est béni par Dieu qui le fait réussir, les injustes et les méchants sont punis et échouent. Pendant des siècles, le peuple hébreu a cru que sa foi en Dieu lui apporterait bénédictions et richesses sur cette terre, puisqu’il n’y aurait rien après. Il n’y avait rien à attendre dans l’au-delà, mais tout à gagner dès ici-bas : le salaire de la foi, c’était la réussite, la prospérité, la santé, la richesse, une grande et puissante famille.

Bon nombre d’églises protestantes ont d’ailleurs repris ce credo : si Dieu me bénit, alors je serai épargné par le malheur, la maladie et la pauvreté. Si je réussis dans mon business, c’est que je suis béni de Dieu.

Le marxisme s’est inspiré de ce même réalisme en en sécularisant l’espérance : puisqu’il n’y a rien après, construisons dès ici-bas le paradis terrestre, la société sans classes, l’homme nouveau enfin préoccupé de la seule chose qui vaille, cette vie, et elle seule. 

Vous voyez la dérive : supprimez l’espérance en la résurrection, et vous risquez très vite d’instrumentaliser la foi en Dieu, c’est-à-dire de l’utiliser pour ce monde-ci seulement, et de se servir de Dieu pour mes affaires au lieu de le servir Lui.

Maître Eckhart stigmatisait avec un humour féroce ceux qui utilisent la foi pour leurs objectifs purement terrestres :

 » Celui qui aime Dieu en vue de son propre intérêt
l’aime comme il aime sa vache…
pour le lait et le fromage qu’elle lui donne…
Ainsi font toutes les personnes qui aiment Dieu pour l’extérieur
ou la consolation intérieure…
ils n’aiment pas vraiment Dieu …
mais leur propre avantage… »

(sermon 16b)

Beaucoup de gens utilisent Dieu non pas pour aller vers lui, mais pour résoudre leurs problèmes. Ils aiment Dieu comme on aime une vache : pour son lait, sa viande, son cuir. Peu de gens aiment une vache pour elle-même… Ils utilisent Dieu comme thérapie personnelle, comme technique de bien-être, comme motivation dans leurs affaires. Ils croient que la foi résout les problèmes, éloigne le malheur, permet de traverser la vie dans de meilleures conditions. C’est presque la doctrine de la rétribution qui revient, sécularisée : peu importe ce qu’il y a après la mort, ce qui compte, c’est que ça me fasse du bien maintenant.

Mais c’est oublier que dans la Bible il y a Job. Job, ou le malheur innocent. Job, le juste qui perd tout, à cause justement de sa foi inébranlable.

C’est oublier encore les martyrs d’Israël et de l’Église.

Ces martyrs dont le 1ère lecture nous racontait le sacrifice : parce qu’ils espéraient en la Résurrection, ils n’ont pas eu peur de tout perdre, refusant d’utiliser Dieu pour s’assurer une vie douillette? Rien à voir avec les kamikazes japonais qui s’écrasaient sur les portes avions américains pour tuer. Rien à voir non plus avec les terroristes musulmans ou autres fanatiques religieux qui se font exploser en pleine ville pour tuer. Non : les martyrs ne tuent pas, ils veulent sauver la vie de leur bourreau, ils aiment leurs ennemis, ils espèrent même les retrouver, frères enfin réconciliés, dans le monde à venir.

Peut-être certains soldats ? nous pouvons l’évoquer, puisque c’est bientôt le 11 Novembre ? ont-ils pu offrir le sacrifice de leur vie pour défendre leur pays dans un esprit semblable ? En espérant un monde réconcilié où cette « foutue guerre » enfin serait définitivement derrière nous !

« Si nous avons mis notre espérance dans ce monde-ci seulement, nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes »  (1 Co 13,9).

Que la foi de Jésus, qui est aussi la foi du peuple juif actuel, devienne la nôtre : « Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants ».

Alors nous pourrons aimer Dieu pour rien, sans lui demander ni richesse ni pauvreté, mi santé ni maladie, mais la sainte indifférence chère à Ignace de Loyola ou à maître Eckhart :

 » Aime Dieu aussi volontiers dans la pauvreté que dans la richesse,
aime le autant dans la maladie que quand tu es en bonne santé,
aime le autant dans la tentation que sans tentation,
aime le autant dans la souffrance que sans souffrance ».
(Maître Eckhart, sermon 30)

 

1ère lecture : Sept frères meurent martyrs dans l’espérance de la résurrection (2M 7, 1-2.9-14)
Lecture du second livre des Martyrs d’Israël

Sept frères avaient été arrêtés avec leur mère. À coups de fouet et de nerf de b?uf, le roi Antiochus voulut les contraindre à manger du porc, viande interdite.
L’un d’eux déclara au nom de tous : « Que cherches-tu à savoir de nous ? Nous sommes prêts à mourir plutôt que de transgresser les lois de nos pères. »
Le deuxième frère lui dit, au moment de rendre le dernier soupir : « Tu es un scélérat, toi qui nous arraches à cette vie présente, mais puisque nous mourons par fidélité à ses lois, le Roi du monde nous ressuscitera pour une vie éternelle. »
Après celui-là, le troisième fut mis à la torture. Il tendit la langue aussitôt qu’on le lui ordonna, et il présenta les mains avec intrépidité, en déclarant avec noblesse : « C’est du Ciel que je tiens ces membres, mais à cause de sa Loi je les méprise, et c’est par lui que j’espère les retrouver. »
Le roi et sa suite furent frappés du courage de ce jeune homme qui comptait pour rien les souffrances.
Lorsque celui-ci fut mort, le quatrième frère fut soumis aux mêmes tortures.
Sur le point d’expirer, il parla ainsi : « Mieux vaut mourir par la main des hommes, quand on attend la résurrection promise par Dieu, tandis que toi, tu ne connaîtras pas la résurrection pour la vie éternelle. »

Psaume : Ps 16, 1.3ab, 5-6, 8.15

R/ Le jour viendra, Seigneur, où je m’éveillerai en ta présence

Seigneur, écoute la justice !
Entends ma plainte, accueille ma prière.
Tu sondes mon coeur, tu me visites la nuit,
tu m’éprouves, sans rien trouver.

J’ai tenu mes pas sur tes traces,
jamais mon pied n’a trébuché.
Je t’appelle, toi, le Dieu qui répond :
écoute-moi, entends ce que je dis.

Garde-moi comme la prunelle de l’?il ;
à l’ombre de tes ailes, cache-moi.
Et moi, par ta justice, je verrai ta face :
au réveil, je me rassasierai de ton visage.

2ème lecture : Exhortation à la persévérance (2 Th 2, 16-17; 3, 1-5)

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens

Frères,
laissez-vous réconforter par notre Seigneur Jésus Christ lui-même et par Dieu notre Père, lui qui nous a aimés et qui, dans sa grâce, nous a pour toujours donné réconfort et joyeuse espérance ; qu’ils affermissent votre c?ur dans tout ce que vous pouvez faire et dire de bien.
Priez aussi pour nous, frères, afin que la parole du Seigneur poursuive sa course, et qu’on lui rende gloire partout comme chez vous. Priez pour que nous échappions à la méchanceté des gens qui nous veulent du mal, car tout le monde n’a pas la foi. Le Seigneur, lui, est fidèle : il vous affermira et vous protégera du Mal. Et, dans le Seigneur, nous avons pleine confiance en vous : vous faites et vous continuerez à faire ce que nous vous ordonnons. Que le Seigneur vous conduise à l’amour de Dieu et à la persévérance pour attendre le Christ.

Evangile : Les morts ressusciteront (brève : 27…38) (Lc 20, 27-38)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Jésus Christ, premier-né d’entre les morts, à toi gloire et puissance pour les siècles. Alléuluia. (cf. Ap 1, 5-6)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Des sadducéens ? ceux qui prétendent qu’il n’y a pas de résurrection ? vinrent trouver Jésus, et ils l’interrogèrent : « Maître, Moïse nous a donné cette loi : Si un homme a un frère marié mais qui meurt sans enfant, qu’il épouse la veuve pour donner une descendance à son frère.
Or, il y avait sept frères : le premier se maria et mourut sans enfant ; le deuxième, puis le troisième épousèrent la veuve, et ainsi tous les sept : ils moururent sans laisser d’enfants. Finalement la femme mourut aussi. Eh bien, à la résurrection, cette femme, de qui sera-t-elle l’épouse, puisque les sept l’ont eue pour femme ? »
Jésus répond : « Les enfants de ce monde se marient. Mais ceux qui ont été jugés dignes d’avoir part au monde à venir et à la résurrection d’entre les morts ne se marient pas,
car ils ne peuvent plus mourir : ils sont semblables aux anges, ils sont fils de Dieu, en étant héritiers de la résurrection. Quant à dire que les morts doivent ressusciter, Moïse lui-même le fait comprendre dans le récit du buisson ardent, quand il appelle le Seigneur : ‘le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob’. Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants ; tous vivent en effet pour lui. »
Patrick Braud

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20 juillet 2013

Le je de l’ouie

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Le je de l’ouie

 

Homélie du 16° Dimanche du temps ordinaire
Année C   21/07/13 

Connaissez-vous le sketch de Raymond de Devos sur le verbe « ouïr » ?

Il y a des verbes qui se conjuguent très irrégulièrement.
Par exemple, le verbe OUÏR.
Le verbe ouïr, au présent, ça fait J’ois… j’ois…
Si au lieu de dire « j’entends », je dis « j’ois », les gens vont penser que ce que j’entends est joyeux alors que ce que j’entends peut être particulièrement triste. Il faudrait préciser : ?Dieu, que ce que j’ois est triste !’
Si au lieu de dire « l’oreille », on dit « l’ouïe », et qu’on pense à une oie, alors on peut dire que l’ouïe de l’oie a ouï.
Pour peu que l’oie appartienne à Louis, cela donne :
- L’ouïe de l’oie de Louis a ouï.
- Ah oui ? Et qu’a ouï l’ouïe de l’oie de Louis ?
- Elle a ouï ce que toute oie oit…
Au passé, ça fait : J’ouïs… J’ouïs !
Il n’y a vraiment pas de quoi !

 


Au-delà de ces superbes jeux de mots, c’est presque un sketch « à la Devos » que Jésus nous interprète ici devant Marthe et Marie 
:

 

« Toute ouïe »

- Marie écoute; elle est « toute ouïe », l’oreille et le coeur tendus vers la parole de Jésus.
À sa soeur qui fait un tas de choses, Marie dit: « J’ouïs », c’est-à-dire : j’écoute, pour jouir de cette relation, pour savourer cette communion de parole.

- C’est comme un reproche implicite, où Jésus interpelle Marthe : arrête de te noyer dans les choses à faire, viens, et jouis de la Parole.

Or Marthe ne veut pas ouïr ;
elle ne veut pas jouir de la Parole du Christ, et voudrait même interdire ce plaisir à sa soeur?

Qui a dit que le christianisme était fâché avec la jouissance ?

Joue, oui

- Jésus insiste alors : « Joue, oui ! » c’est-à-dire : mets du jeu dans ta vie, réintroduis des degrés et des moments de liberté, au lieu de te laisser absorber complètement (par le travail, la famille, les soucis de tous ordres). Par cette ouverture à l’autre qu’est l’écoute, retrouve le goût du jeu avec ce qui n’est pas prévu, ni rentable.

La dimension ludique et artistique est essentielle à la foi chrétienne.

 

« Toute oui »

- « Joue ta vie sur le oui », en réponse à cette Parole d’un Autre.

Marie est « toute ouïe », toute écoute, et du coup, elle devient « toute oui », un oui intense à la Parole du Christ. Joue ta vie sur cette Parole, au lieu de préférer les choses à la relation, la cuisine à l’invité, le devoir au plaisir?


- Si bien que le jeu de l’écoute permet à Marie de dire « je », de découvrir son désir le plus vrai.

Le « je » de Marie lui est donné dans l »ouïe » de la Parole qu’est Jésus lui-même.
C’est la « part unique » qu’elle a choisie :
préférer la relation vivante à l’enfermement dans les choses; recevoir son identité la plus profonde de l’écoute de la parole d’un autre, du Tout-Autre.

Comme Jésus d’ailleurs, qui est le premier à écouter Celui dont il se reçoit, et qu’il appelle à cause de cela son Père. Il ne parle pas de lui-même, mais il parle de ce qu’il a d’abord écouté auprès de son Père (Jn 8,28 ; 12,49)

Le je de l'ouie dans Communauté spirituelle jesus-chez-marthe-et-marie 

Jouis

Vous voyez: l’écoute est première.
Ouïr est un vrai plaisir, un vrai « oui » à la vie.
Les Juifs nous le rappellent en priant 3 fois par jour (comme Jésus l’a fait toute sa vie) :
« Écoute Israël : le Seigneur est notre Dieu, le Seigneur est Un ».

C’est donc qu’il y a un lien entre l’écoute et l’unicité de l’être.

Écouter permet de progresser dans l’unité.

L’appel que le Christ nous lance dans cet évangile est donc à l’inverse du puritanisme, et de tous ceux qui voudraient faire de la religion un rabat-joie !

Le Christ semble nous dire :

« remet du plaisir dans ta relation aux autres, dans ta relation à Dieu.
Goûte particulièrement le plaisir d’écouter la parole, la parole de l’autre, la Parole de Dieu.
Pour cela, ne te laisse pas absorber par les choses ni par le seul devoir.
Remet du jeu dans ta vie. »

Accorde-toi quelque degré de liberté et de gratuité, pour jouir de la beauté de l’écoute, à l’image de Marie de Béthanie assise aux pieds de Jésus.


L’été est une période favorable pour cela.
Écouter la Parole que Dieu nous adresse à travers la nature splendide : mer, montagne, campagne…
Jouir de sa parole à travers une halte dans un monastère, une lecture tranquille des textes du Dimanche, ou un silencieux rendez-vous avec sa présence en nous…

Si nous réduisons la foi chrétienne à une accumulation de choses à faire, nous serons les plus malheureux de tous les croyants. Car on n’en fait jamais assez, ni assez bien ! Et puis, cela risque de nous priver de la rencontre avec Celui pour qui nous voulons faire ces choses.

l+ouie+louis amour dans Communauté spirituelle

Les mères de famille – ou les célibataires – connaissent bien cette agitation où il faut tout préparer pour qu’un dîner avec des invités se passe bien. Elles connaissent également la frustration de Marthe qui est dans la cuisine, et qui enrage de ne pouvoir prendre part à la conversation qui a lieu à côté.

Alors, plutôt que de se réjouir du bonheur de sa soeur qui écoute, plutôt que de se réjouir de lui permettre ce bonheur, elle veut l’en priver.

Comme si le bonheur de l’autre, tout proche, était insupportable, parce que justement ce n’est pas le mien.

C’est une vieille tentation de vouloir piétiner le bonheur que je ne peux ou ne veux pas atteindre. Marthe nie la différence entre elle et sa soeur, ne supporte pas qu’elle soit heureuse, et d’une autre manière qu’elle.

Être jaloux de la joie de ses proches au point de vouloir les en priver : cela arrive souvent dans nos familles, dans les communautés religieuses même !

C’est la réaction de l’enfant qui, voyant un beau jouet dans les bras de son frère, lui arrache, le casse et le piétine pour qu’aucun des deux ne soit heureux. Comme si l’égalité dans le malheur était un soulagement !

Cette violence, nous l’éprouvons tous lorsque, jaloux et nous comparant sans cesse, nous voulons ramener l’autre à notre état d’insatisfaction, au lieu de renoncer au comparatif et de nous réjouir de son bonheur.

C’est préférer casser un CD plutôt que voir un autre l’écouter.

C’est la folie de tous les crimes passionnels, où l’amour ne peut plus supporter le bonheur de l’autre, et préfère le détruire plutôt que de le voir s’éloigner…

 

Ouïr la Parole de Dieu…

Jouir de cette Parole.

Et ainsi devenir soi-même dans ce « Jeu / Je de l’ouïe »…

Que Marthe et Marie de Béthanie nous inspirent cet été de vrais moments où savourer la goûteuse présence de Dieu en nous…

1ère lecture : Abraham donne l’hospitalité à Dieu, qui lui promet un fils (Gn 18, 1-10a)
Lecture du livre de la Genèse

Aux chênes de Mambré, le Seigneur apparut à Abraham, qui était assis à l’entrée de la tente. C’était l’heure la plus chaude du jour.
Abraham leva les yeux, et il vit trois hommes qui se tenaient debout près de lui. Aussitôt, il courut à leur rencontre, se prosterna jusqu’à terre et dit: « Seigneur, si j’ai pu trouver grâce à tes yeux, ne passe pas sans t’arrêter près de ton serviteur. On va vous apporter un peu d’eau, vous vous laverez les pieds, et vous vous étendrez sous cet arbre. Je vais chercher du pain, et vous reprendrez des forces avant d’aller plus loin, puisque vous êtes passés près de votre serviteur ! »
Ils répondirent : « C’est bien. Fais ce que tu as dit. »
Abraham se hâta d’aller trouver Sara dans sa tente, et il lui dit : « Prends vite trois grandes mesures de farine, pétris la pâte et fais des galettes. »
Puis Abraham courut au troupeau, il prit un veau gras et tendre, et le donna à un serviteur, qui se hâta de le préparer. Il prit du fromage blanc, du lait, le veau qu’on avait apprêté, et les déposa devant eux ; il se tenait debout près d’eux, sous l’arbre, pendant qu’ils mangeaient.
Ils lui demandèrent : « Où est Sara, ta femme ? » Il répondit : « Elle est à l’intérieur de la tente. »
Le voyageur reprit : « Je reviendrai chez toi dans un an, et à ce moment-là, Sara, ta femme, aura un fils. »

Psaume : Ps 14, 1a.2, 3bc-4ab, 5

R/ Tu es proche, Seigneur : fais-nous vivre avec toi.

Seigneur, qui séjournera sous ta tente ?
Celui qui se conduit parfaitement,
qui agit avec justice
et dit la vérité selon son coeur.

Il ne fait pas de tort à son frère
et n’outrage pas son prochain.
À ses yeux, le réprouvé est méprisable
mais il honore les fidèles du Seigneur.

Il prête son argent sans intérêt,
n’accepte rien qui nuise à l’innocent.
L’homme qui fait ainsi
demeure inébranlable.

2ème lecture : Le mystère du Christ s’accomplit dans la vie de l’Apôtre (Col 1, 24-28)
Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens

Frère,
je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous, car ce qu’il reste à souffrir des épreuves du Christ, je l’accomplis dans ma propre chair, pour son corps qui est l’Église.
De cette Église, je suis devenu ministre, et la charge que Dieu m’a confiée, c’est d’accomplir pour vous sa parole, le mystère qui était caché depuis toujours à toutes les générations, mais qui maintenant a été manifesté aux membres de son peuple saint.
Car Dieu a bien voulu leur faire connaître en quoi consiste, au milieu des nations païennes, la gloire sans prix de ce mystère : le Christ est au milieu de vous, lui, l’espérance de la gloire !
Ce Christ, nous l’annonçons : nous avertissons tout homme, nous instruisons tout homme avec sagesse, afin d’amener tout homme à sa perfection dans le Christ.

Evangile : Marthe et Marie accueillent Jésus chez elles (Lc 10, 38-42)
Acclamation : Alléluia. Alléluia. Heureux qui entend la voix du Seigneur et lui ouvre sa porte : il a trouvé son bonheur et sa joie. Alléluia. (cf. Ap 3, 20)
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Alors qu’il était en route avec ses disciples, Jésus entra dans un village. Une femme appelée Marthe le reçut dans sa maison.
Elle avait une soeur nommée Marie qui, se tenant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.
Marthe était accaparée par les multiples occupations du service. Elle intervint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien ? Ma s?ur me laisse seule à faire le service. Dis-lui donc de m’aider. »
Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part : elle ne lui sera pas enlevée. »
Patrick Braud

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13 juillet 2013

Aime ton Samaritain !

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Aime ton Samaritain !

Homélie du Dimanche 14 Juillet 2013 /
15° Dimanche Année C

Tout le monde connaît la figure du  » bon Samaritain « . La pointe du christianisme serait de lui ressembler, dit-on couramment.
Est-ce si sûr ? Et si l’amour du prochain était l’amour pour les Samaritains de nos vies, avant d’aimer les blessés sur notre route ?…

La lecture que je vous propose de cette page d’évangile est inspirée par Françoise Dolto *. Elle tourne autour d’une question centrale en psychologie, qui est la question de la dette et de la reconnaissance.

En regardant le texte de près, on est tout d’abord obligé de rejeter l’interprétation courante qui en est fait très moralisante, du genre : « Faites du bien aux autres quand ils sont dans le besoin. » Car d’une part c’est d’une banalité à pleurer (pas besoin d’être chrétien pour cela), et ensuite le texte ne dit pas du tout cela, au contraire !

La perspective est inverse !

Quelle est en effet la question ? C’est : « Qui est mon prochain ? »
Et à la fin de la parabole, la réponse tombe : lequel a été le prochain ? C’est le Samaritain.
« Aime ton prochain » => « aime le Samaritain ».
Aimer mon prochain, c’est donc aimer ceux qui pour moi ont joué ce rôle de tendresse et de salut qu’a joué le Samaritain.
Autrement dit Jésus nous invite à nous identifier au blessé et non au Samaritain.

Le Christ nous demande d’aimer les personnes qui nous ont sauvé à un moment donné dans notre vie où nous étions blessés à mort.
Il s’agit finalement de reconnaître notre dette vis à vis des autres, vis-à-vis des Samaritains de notre vie, ceux qui nous ont épaulés à un moment où ? seuls - nous n’aurions pas pu continuer notre chemin. Que nous le connaissions ou pas, nous sommes en dette vis-à-vis de celui ou celle qui nous secourt dans la détresse.

Mais ce qui est très fort dans l’Évangile, c’est que cette dette n’est pas remboursable auprès de l’intéressé ! Car le Samaritain de l’évangile se retire, disparaît. Il laisse l’autre libre. Il s’évanouit de notre chemin et continue le sien sans attendre ni permettre un retour, une reconnaissance.

Aime ton Samaritain ! dans Communauté spirituelle Samaritain

Ce qui veut dire que cette dette d’amour, nous ne pouvons la régler qu’en devenant à notre tour sauveur d’un autre. C’est un courant d’amour qui ne boucle jamais.

Dans certaines ethnies d’Afrique, on ne doit jamais remercier quand on reçoit un cadeau ; sinon c’est que je ne veux rien devoir et que je réduis la relation humaine à une relation marchande.

Aimer notre prochain ici, c’est découvrir ce que je dois à ceux qui m’ont secouru, sans pouvoir les remercier, sans même parfois qu’ils en aient conscience, et ne pas oublier ces sauveurs. Mais plus encore, c’est ne pas m’attacher à ces sauveurs, pour qu’ils puissent continuer leur chemin et moi le mien, en donnant à mon tour gratuitement ce que j’ai reçu gratuitement, sans m’attacher moi-même au bien que je pourrai faire, consciemment ou non.

La pointe de la parabole, dans cette ligne d’interprétation, c’est d’aimer celui ou celle qui a été proche de nous quand nous étions à terre.

Si quelqu’un, un jour, nous a sorti d’un chagrin, d’une dépression, d’une blessure, d’une souffrance, d’une détresse matérielle ou morale, souvenons-nous en toute notre vie.
Mais avec les commandements de la parabole :

- Ne te laisse pas retenir par l’affection de celui qui t’a sauvé.
L’amour rend libre : et pour cela, des routes qui se sont croisées doivent savoir s’éloigner.

Ne sois pas toi-même lié intérieurement par la reconnaissance à manifester à celui qui t’a secouru.
Mais fais comme il a fait : c’est la vraie manière de reconnaître ta dette et de faire circuler l’amour sans jamais recevoir de retour.

- Inversement, si tu as été le Samaritain de quelqu’un, ne te laisse pas arrêter par le souvenir de celui que tu as pu secourir. Souviens-toi que ton propre salut, tu le dois à un autre. Aime cet autre, parti et absent, en ton c?ur, et quand l’occasion s’en présentera, accepte toi aussi de devenir le blessé dépendant d’un autre.

Reconnaître ma dette envers ceux qui se sont fait proches de moi sans m’attacher à eux me permet à mon tour de me faire proche de ceux que je croise en chemin, sans que cela m’empêche de poursuivre ma route, libre de toute possession affective, avec comme seul moteur le souvenir, la trace des tendresses qui m’ont relevé avant de disparaître, plus loin? dans cette absence que seul le retour du Christ en gloire pourra révéler?

« Aime ton prochain », commande la Loi juive. Et Jésus précise : ?aime les Samaritains qui se sont faits proches de toi. Accepte d’être aimé avant que d’aimer’.
Reconnais de quelle tendresse tu es entouré, par Dieu le premier qui s’est approché de toi en Jésus-Christ.
Si tu prends ainsi conscience de l’amour qui te précède, alors, alors seulement, tu pourras devenir le Samaritain d’un autre…

 

* Françoise Dolto, Les évangiles et la foi au risque de la psychanalyse, éd. Gallimard.

 

 

1ère lecture : La loi de Dieu dans le coeur de l’homme (Dt 30, 10-14)

Lecture du livre du Deutéronome

Moïse disait au peuple d »Israël : « Écoute la voix du Seigneur ton Dieu, en observant ses ordres et ses commandements inscrits dans ce livre de la Loi ; reviens au Seigneur ton Dieu de tout ton c?ur et de toute ton âme.
Car cette loi que je te prescris aujourd’hui n’est pas au-dessus de tes forces ni hors de ton atteinte.
Elle n’est pas dans les cieux, pour que tu dises : ’Qui montera aux cieux nous la chercher et nous la faire entendre, afin que nous la mettions en pratique ?’
Elle n’est pas au-delà des mers, pour que tu dises : ’Qui se rendra au-delà des mers nous la chercher et nous la faire entendre, afin que nous la mettions en pratique ?’
Elle est tout près de toi, cette Parole, elle est dans ta bouche et dans ton c?ur afin que tu la mettes en pratique. »

Psaume : Ps 18, 8, 9, 10, 11

R/ Ta parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance !

La loi du Seigneur est parfaite, 
qui redonne vie ; 
la charte du Seigneur est sûre, 
qui rend sages les simples. 

Les préceptes du Seigneur sont droits, 
ils réjouissent le coeur ; 
le commandement du Seigneur est limpide, 
il clarifie le regard. 

La crainte qu’il inspire est pure, 
elle est là pour toujours ; 
les décisions du Seigneur sont justes 
et vraiment équitables : 

plus désirables que l’or, 
qu’une masse d’or fin, 
plus savoureuses que le miel 
qui coule des rayons.

2ème lecture : Primauté du Christ dans la création et dans l’Église (Col 1, 15-20)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens

Le Christ est l’image du Dieu invisible, le premier-né par rapport à toute créature, 
car c’est en lui que tout a été créé dans les cieux et sur la terre, les êtres visibles et les puissances invisibles : tout est créé par lui et pour lui. Il est avant tous les êtres, et tout subsiste en lui. 
Il est aussi la tête du corps, c’est-à-dire de l’Église. Il est le commencement, le premier-né d’entre les morts, puisqu’il devait avoir en tout la primauté. Car Dieu a voulu que dans le Christ toute chose ait son accomplissement total. Il a voulu tout réconcilier par lui et pour lui,sur la terre et dans les cieux,en faisant la paix par le sang de sa croix.

Evangile : La loi d’amour : le bon Samaritain (Lc 10, 25-37)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Voici le commandement nouveau : Celui qui aime Dieu, qu’il aime aussi son frère. Alléluia. (cf. Jn 5, 21)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Pour mettre Jésus à l’épreuve, un docteur de la Loi lui posa cette question : « Maître, que dois-je faire pour avoir part à la vie éternelle ? »
Jésus lui demanda : « Dans la Loi, qu’y a-t-il d’écrit ? Que lis-tu ? »
L’autre répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton c?ur, de toute ton âme, de toute ta force et de tout ton esprit, et ton prochain comme toi-même. »
Jésus lui dit : « Tu as bien répondu. Fais ainsi et tu auras la vie. »
Mais lui, voulant montrer qu’il était un homme juste, dit à Jésus : « Et qui donc est mon prochain ? »
Jésus reprit : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba sur des bandits ; ceux-ci, après l’avoir dépouillé, roué de coups, s’en allèrent en le laissant à moitié mort.
Par hasard, un prêtre descendait par ce chemin ; il le vit et passa de l’autre côté.
De même un lévite arriva à cet endroit ; il le vit et passa de l’autre côté.
Mais un Samaritain, qui était en voyage, arriva près de lui ; il le vit et fut saisi de pitié.
Il s’approcha, pansa ses plaies en y versant de l’huile et du vin ; puis il le chargea sur sa propre monture, le conduisit dans une auberge et prit soin de lui.
Le lendemain, il sortit deux pièces d’argent, et les donna à l’aubergiste, en lui disant : ‘Prends soin de lui ; tout ce que tu auras dépensé en plus, je te le rendrai quand je repasserai.’
Lequel des trois, à ton avis, a été le prochain de l’homme qui était tombé entre les mains des bandits ? »
Le docteur de la Loi répond : « Celui qui a fait preuve de bonté envers lui. » Jésus lui dit : « Va, et toi aussi fais de même. »
Patrick Braud

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27 octobre 2012

Bartimée et Jésus : les deux fois deux fils

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Bartimée et Jésus : les deux fois deux fils

Homélie du 30° dimanche ordinaire Année B
28/10/12

 

Le fils de Timée et le Fils de David

L’épisode de la rencontre de Jésus et de Bartimée à la sortie de Jéricho est célèbre (Mc 10,46-52). On y voit souvent une preuve de la puissance du Christ. Ou son désir de réintégrer socialement tous les exclus qui comme cet aveugle restent au bord de la route au sens propre comme au sens figuré. Ou on y lit avec raison le symbole du baptisé qui quitte ses aveuglement pour suivre Jésus sur la voie de l’évangile.

On peut aussi y voir la rencontre de deux fils, l’un donnant à l’autre d’assumer sa filiation.
Voyons comment.

Les noms bibliques ont une signification.

Ils ne sont jamais là par hasard dans un texte de la Bible, comme les chiffres d’ailleurs.

Bartimée et Jésus : les deux fois deux fils dans Communauté spirituelleJéricho par exemple, vient du nom hébreu : lune (« jareah »). Jéricho est donc la ‘ville de la lune’ en hébreu. Or la lune croît et décroît, elle change sans cesse (par opposition au soleil) : elle est devenue dans le monde de Jésus le symbole de la disparition et du déclin. L’évangéliste Marc précise bien que Jésus sort de Jéricho avec ses disciples : symboliquement c’est l’invitation à sortir de nos déclins, à ne pas se résigner à la disparition.

       Sortir d’une logique dépressive du déclin, c’est par exemple reconnaître que notre Église est bien vivante, et se renouvelle en profondeur. Nous sommes à l’image de cette foule « assez nombreuse » (traduction plus exacte du texte) qui entoure Jésus dans le passage d’aujourd’hui : ni majoritaire, ni marginale. Une foule qui va apprendre à être instrument du salut en transmettant l’appel du Christ à l’aveugle.

         Sortir de Jéricho est aussi l’invitation à quitter nos déclins intérieurs : lorsque décline notre soif de Dieu, notre soif de vivre ; lorsque baisse l’intensité de notre amour pour Dieu, l’intensité de notre amour pour les autres, sortons de ces Jérichos-là avec le Christ ! Quittons nos logiques dépressives…

D’autant plus que Jésus se met en route vers Jérusalem : autre nom symbolique.

Yerou-shalaïm : la ville de la paix (shalom) ou de la plénitude (shelemout). Jésus passe de Jéricho à Jérusalem : il nous fait passer avec lui du déclin à la paix, de la disparition à la plénitude.

       Deux autres noms ont toute leur importance dans ce texte : « Bar-timée » et « fils de David ».

C’est tellement important que Marc précise : « Bar-Timée » c’est le fils de Timée. Or Timée vient d’une racine grecque qui signifie : « châtiment ». Bar-Timée est donc le fils du châtiment ; ce que traduit bien hélas sa condition d’aveugle, puisqu’à l’époque beaucoup croyaient que la cécité était un châtiment de Dieu (ce que Jésus ne cessera de dénoncer).

Le fils de Timée croise le « fils de David ». Et David veut dire : « Bien Aimé ». Voici donc que le fils du châtiment rencontre le fils Bien Aimé !

Choc terrible : qui va l’emporter : la peur du châtiment ou la foi en la puissance de l’amour ?

La peur ou la foi ? : dilemme terriblement actuel !

Lorsque des intégristes religieux de tous bords voudraient revenir à la peur comme moteur de la conversion vers Dieu.

Lorsque les questions de violence sociale (dans nos écoles ou nos cités) risquent d’être instrumentalisées dans les débats politiques.

Les Évêques français appellent depuis longtemps à revaloriser la famille comme lieu primordial  d’éducation à la confiance : « la famille est le premier lieu où les hommes et les femmes apprennent la confiance en eux-mêmes et la confiance dans les autres » (Message du 18/10/2006). On croirait entendre la « foule – Église » de notre évangile, qui finalement transmet au fils de Timée l’appel du Fils de David : « confiance, lève-toi, il t’appelle ».

20030919142921_medium amour dans Communauté spirituelle         La rencontre des 2 fils d’aujourd’hui nous fait passer de la peur du châtiment à la confiance en l’amour : « ta foi t’a sauvé » constate Jésus, dont le nom signifie justement : « Dieu sauve ». A la fin du récit, l’aveugle n’est plus le fils de Timée mendiant assis au bord de la route, mais un homme – enfin ! – qui suit Jésus sur la route. Il a changé de filiation.

         Et vous : êtes-vous fils de Timée ou de David ?

C’est si important de savoir de qui on est le fils / la fille…

Dans la préparation au mariage, c’est toujours une étape capitale du dialogue avec les fiancés : de qui êtes-vous l’enfant ? Comment ces 2 filiations vont-elles pouvoir se rencontrer ? Au prix de quelle conversions personnelles ? Moyennant quelles guérisons du passé familial de chacun ?

Le fils du châtiment croise le fils du Bien Aimé, et la confiance d’emporte alors sur la peur.

Souvenez-vous des 2 autres fils de Mc 10,35-45 (juste avant notre passage sur Bartimée) : les fils de Zébédée, dont le nom signifie « mon cadeau » étaient en train de renier leur père puisque justement ils voulaient s’approprier les 1° places, au lieu de recevoir « comme un cadeau » la place que Jésus leur donnerait.

Que dois-je assumer dans la filiation qui est la mienne, à l’image des fils de Zébédée ?

Quelle guérison y a-t-il à entreprendre dans cette filiation, à l’image du fils de Timée ?

Quelle promesse ma filiation contient-elle, à l’image du Fils de David ?

         Impossible de nous rencontrer en vérité, sans violence, si nous ne savons pas de qui nous sommes le fils / la fille !

         Que l’Esprit du Christ, qui continue d’agir dans son Église comme autrefois dans la foule, nous donne d’entendre chacun personnellement, l’appel du Christ transmis par la foule : « Confiance ! Que tu sois fils de l’amour ou du hasard, de la promesse ou de la peur, confiance, lève-toi, il t’appelle ».

 

 

 

1ère lecture : Retour joyeux des rescapés d’Israël (Jr 31, 7-9)

Lecture du livre de Jérémie

Ainsi parle le Seigneur : Poussez des cris de joie pour Jacob, acclamez la première des nations ! Faites résonner vos louanges et criez tous : « Seigneur, sauve ton peuple, le reste d’Israël ! »
Voici que je les fais revenir du pays du Nord, et que je les rassemble des extrémités du monde. Il y a même parmi eux l’aveugle et le boiteux, la femme enceinte et la jeune accouchée ; c’est une grande assemblée qui revient.
Ils étaient partis dans les larmes, dans les consolations je les ramène ; je vais les conduire aux eaux courantes par un bon chemin où ils ne trébucheront pas. Car je suis un père pour Israël, Éphraïm est mon fils aîné. Parole du Seigneur.

Psaume : 125, 1-2ab, 2cd-3, 4-5, 6

R/ Le Seigneur a fait merveille : nous voici dans la joie.

Quand le Seigneur ramena les captifs à Sion,
nous étions comme en rêve !
Alors notre bouche était pleine de rires,
nous poussions des cris de joie ; 

Alors on disait parmi les nations : 
« Quelles merveilles fait pour eux le Seigneur ! » 
Quelles merveilles le Seigneur fit pour nous : 
nous étions en grande fête ! 

Ramène, Seigneur, nos captifs, 
comme les torrents au désert. 
Qui sème dans les larmes 
moissonne dans la joie. 

Il s’en va, il s’en va en pleurant, 
il jette la semence ; 
il s’en vient, il s’en vient dans la joie, 
il rapporte les gerbes.

2ème lecture : Jésus, grand prêtre à la manière de Melkisédek (He 5, 1-6)

Lecture de la lettre aux Hébreux

Le grand prêtre est toujours pris parmi les hommes, et chargé d’intervenir en faveur des hommes dans leurs relations avec Dieu ; il doit offrir des dons et des sacrifices pour les péchés. Il est en mesure de comprendre ceux qui pèchent par ignorance ou par égarement, car il est, lui aussi, rempli de faiblesse ; et, à cause de cette faiblesse, il doit offrir des sacrifices pour ses propres péchés comme pour ceux du peuple. On ne s’attribue pas cet honneur à soi-même, on le reçoit par appel de Dieu, comme Aaron.
Il en est bien ainsi pour le Christ : quand il est devenu grand prêtre, ce n’est pas lui-même qui s’est donné cette gloire ; il l’a reçue de Dieu, qui lui a dit : Tu es mon Fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré, et qui déclare dans un autre psaume : Tu es prêtre pour toujours selon le sacerdoce de Melkisédek.

Evangile : Guérison d’un aveugle à Jéricho (Mc 10, 46-52)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Béni soit le Seigneur notre Dieu : sur ceux qui habitent les ténèbres, il a fait resplendir sa lumière. Alléluia.(cf. Lc 1, 68.79)

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc

Tandis que Jésus sortait de Jéricho avec ses disciples et une foule nombreuse, un mendiant aveugle, Bartimée, le fils de Timée, était assis au bord de la route.
Apprenant que c’était Jésus de Nazareth, il se mit à crier : « Jésus, fils de David, aie pitié de moi ! »
Beaucoup de gens l’interpellaient vivement pour le faire taire, mais il criait de plus belle : « Fils de David, aie pitié de moi ! »
Jésus s’arrête et dit : « Appelez-le. » On appelle donc l’aveugle, et on lui dit : « Confiance, lève-toi ; il t’appelle. »
L’aveugle jeta son manteau, bondit et courut vers Jésus.
Jésus lui dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? ? Rabbouni, que je voie. »
Et Jésus lui dit : « Va, ta foi t’a sauvé. » Aussitôt l’homme se mit à voir, et il suivait Jésus sur la route.
Patrick Braud

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