L'homélie du dimanche (prochain)

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9 septembre 2015

Prendre sa croix

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Prendre sa croix

Homélie du 24° dimanche du temps ordinaire / Année B
13/09/2015

Cf. également :

Croire ou agir ? La foi ou les oeuvres ?

De l’art du renoncement

C’est l’outrage et non pas la douleur

Prendre sa croix chaque jour

  

Prendre sa croix

C’est sans doute une expression centrale du christianisme : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive » (Mc 8,34).

Prendre sa croix dans Communauté spirituelle Lapinbleu206C-Mc8_34-copie-1Malheureusement, des siècles de dolorisme ont obscurci l’interprétation de cette invitation du Christ à devenir son disciple. Dans le langage courant, prendre sa croix est devenu synonyme de résignation, d’acceptation du malheur innocent, voire de glorification de l’épreuve injuste qui soi-disant nous ferait ressembler au Christ. Quand on dit : chacun sa croix, c’est pour consoler quelqu’un en lui montrant que les autres aussi sont accablés par l’adversité. Dans cette ligne, la croix suprême pour des parents par exemple, c’est l’handicap ou la mort prématurée de leur enfant ; pour un salarié, ce sera un collègue ou un chef supportable ; pour un adulte, la croix prendra la figure d’un défaut récurrent inamissible (addiction, trait de caractère, disgrâce physique…) etc.

On n’en est même venu à glorifier ces épreuves imposées par le hasard, la méchanceté ou la nature en y voyant un peu trop vite la volonté de Dieu, qui nous unirait ainsi la Croix du Christ en nous faisant souffrir injustement

L’Évangile d’aujourd’hui s’inscrit en faux contre ces interprétations aux relents malsains.
La croix n’est pas d’abord la douleur mais la solidarité avec les exclus.
La croix n’est pas une théorie sur le malheur innocent, mais le signe de la dépossession de soi.

Regardez Pierre : il veut passer devant Jésus, c’est-à-dire décider par lui-même comment le royaume de Dieu va arriver. Au lieu de se laisser conduire, il veut être maître de sa réussite. Au lieu de lâcher prise sur ses objectifs et ses combats, il veut les imposer à Jésus :« qu’à Dieu ne plaise, cela ne t’arrivera pas », récrimine-t-il contre Jésus annonçant sa Passion. Le fameuxVade retro Satanas est très clair : tu es un obstacle Pierre à la réalisation de l’amour divin si tu veux passer devant et tout décider à ta manière.
Passer derrière le Christ veut dire : arrête d’imaginer le succès à la manière des hommes, accepte que Dieu te conduise vers lui par des chemins que tu n’imagines même pas.

pda coran dans Communauté spirituellePrendre sa croix, c’est donc renoncer à sa volonté propre, au sens où je déciderais de tout, et accepter de me laisser guider. Jésus sera encore plus explicite lorsqu’il précisera sa mission à Pierre : « quand tu étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture, et tu allais où tu voulais ; quand tu auras vieilli, tu étendras les mains, et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudrais pas. Il signifiait, en parlant  ainsi, le genre de mort par lequel Pierre devait glorifier Dieu. Ayant dit cela, il lui dit: « Suis-moi. » » (Jn 21,18-19)

Prendre sa croix pour Pierre l’amènera à Rome, lui qui était au départ en charge de Jérusalem, et sa mort sur la croix dans le cirque romain du Vatican sera l’aboutissement d’une vie finalement donnée aux païens où il ne se possédait plus lui-même.
Pour Paul également,
prendre sa croix n’est pas souffrir ou se résigner, mais laisser le Christ guider ses pas, uni à lui : « Je suis crucifié avec le Christ. Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi »  (Ga 2, 19-20).

 

Ne plus se posséder soi-même : cet idéal spirituel peut sembler étrange à une époque qui vante l’individualisme et l’auto-réalisation de soi. Dépendre des autres passe pour un signe de faiblesse. Ne pas décider de sa vie passe pour un signe d’impuissance. Paradoxalement, en même temps, la mondialisation de l’économie nous rend de plus en plus interdépendants, et les sciences humaines nous ramènent sans cesse à notre histoire personnelle qui nous façonne, à notre lien avec l’univers qui fait de nous la résultante de tant d’autres liens.

Nul n’est une île… mais on voudrait nous faire croire que la grandeur est de s’assumer tout seul, ou que la sagesse est d’être maître de soi.

Prendre sa croix à la suite du Christ résonne d’abord comme un immense lâcher-prise : vivre est d’abord un passif, même si cette passivité devient extraordinairement active par la suite.

Je suis désiré avant de désirer.

Je suis parlé avant de parler.

Je suis aimé avant de pouvoir aimer.

Redécouvrir ce passif structurant ma liberté et mon action est l’essence de la croix chrétienne.

 

Recevoir de se recevoir

Accepter de recevoir, c’est déjà beaucoup. Mais la croissance humaine de Jésus nous entraîne encore plus loin. Il ne reçoit pas seulement la vie. Il se reçoit lui-même, sans cesse. Jésus n’a jamais voulu se suffire à lui-même ; il ne croit pas à la sacro-sainte indépendance d’aujourd’hui, qui tourne si vite à l’individualisme ou à la solitude. Lui sait que pour devenir un homme, une femme, il faut accepter de se recevoir des autres, de ceux que l’on rencontre, qui nous façonnent, qui nous blessent, qui nous font grandir en humanité. Lui sait que recevoir de Dieu son identité la plus intime n’est pas humiliant, bien au contraire : il a l’humilité de recevoir de Dieu sa vocation, sa mission, son existence, le but de sa vie, sa raison de vivre la plus vraie (cf. Jn 4,34 ; 14,10 ; 16,32 …). Il demande à ses disciples qui il est, non pas pour leur faire passer un examen, mais pour l’aider lui-même à recevoir son identité et sa mission de ses amis (Mc 8, 27-35).

C’est pour cela qu’il ose appeler Dieu « Abba » = Père, papa ! C’est pour cela que par analogie nous l’appelons « Fils de Dieu » parce qu’il se reçoit continuellement d’un Autre que lui-même, et qu’il puise sa joie à devenir lui-même en se recevant d’un Autre qui l’aime. Tout le contraire du repli sur soi ! Tout le contraire de l’in-dépendance où je voudrais ne rien devoir à personne. L’enfant de la crèche – tout comme le crucifié abandonné – sait qu’il y a des liens d’amour sans lesquels nous ne pourrions pas devenir ce que nous sommes.

La communion d’amour trinitaire à laquelle nous sommes tous appelés n’est-elle pas le dynamisme le plus intime à la vie de Dieu : se recevoir ?

Et si l’appel à la vie divine passait par l’appel à se recevoir, ce que la Croix du Christ incarne au plus haut point ?

 

Le déni de la croix dans le Coran


On sait que pour Mohamed, la mort de Jésus – prophète d’Allah, et le plus saint de tous - sur la croix est inconcevable. Aussi Mohamed change-t-il le récit de la Passion du Christ pour un happy end – l’ascension au ciel – qui ne passe pas par la case honteuse de la crucifixion :

Coran 4, 157-158 : et à cause leur parole:  » Nous avons vraiment tué le Christ, Jésus, fils de Marie, le Messager d’Allah  » .. Or, ils ne l’ont ni tué ni crucifié ; mais ce n’était qu’un faux semblant ! Et ceux qui ont discuté sur son sujet sont vraiment dans l’incertitude: ils n’en ont aucune connaissance certaine, ils ne font que suivre des conjectures et ils ne l’ont certainement pas tué. Mais Allah l’a élevé vers Lui. Et Allah est Puissant et Sage.

À la lumière de ce que nous avons dit plus haut, c’est somme toute logique. Parce que Dieu est communion d’amour trinitaire, les chrétiens découvrent en Jésus celui dont l’identité profonde est de faire la volonté du Père, qui est d’aller chercher et sauver ceux qui étaient perdus, dans la force de l’Esprit qui ressuscite les morts. Sans cette dynamique trinitaire, se laisser conduire par un autre redevient incompréhensible. Si Jésus ne fait pas un avec son Père, renoncer à soi, prendre sa Croix n’a aucun sens. Mohamed ressemble à Pierre traité par le Christ traité par le Christ de Satan lorsqu’il s’insurge contre la croix de Jésus. Il n’admet pas que le salut puisse venir de cette impuissance. Alors le Coran invente un prophète à sa manière, échappant à la mort infamante de la Croix, réussissant à la manière des hommes par une victoire éclatante, sans ce supplice déshonorant réservé aux esclaves et aux sans-Dieu. La croix fait d’ailleurs partie des châtiments infligés par les musulmans eux-mêmes aux mécréants :

Coran 5,33 :  La récompense de ceux qui font la guerre contre Allah et Son messager, et qui s’efforcent de semer la corruption sur la terre, c’est qu’ils soient tués, ou crucifiés, ou que soient coupées leur main et leur jambe opposées, ou qu’ils soient expulsés du pays. Ce sera pour eux l’ignominie ici-bas ; et dans l’au-delà, il y aura pour eux un énorme châtiment.

On comprend mieux pourquoi un Messie crucifié est inacceptable pour l’islam.

 

Comment renoncer à soi-même et se laisser conduire ?

Prendre sa croix est décidément au cœur de l’identité chrétienne. Non comme une résignation ni une glorification malsaine du malheur, mais comme le désir le plus fort de se laisser aimer jusqu’à se laisser conduire là où nous n’aurions pas pensé aller, par amour pour les exclus de notre temps.

Porter sa croix ne se réfère pas en premier lieu aux épreuves que nous appelons des croix, mais à un abandon de sa vie journellement répété  – à la mort à soi-même qui doit marquer le chrétien. Même si cela me dépasse, et nous dépasse, ce ne sont pas les situations les plus douloureuses qui sont pour l’être humain les plus difficiles à vivre. Le plus difficile pour vous et pour moi, est de décider chaque jour et même à chaque minute, de lâcher le gouvernail de notre vie et de le donner et de le redonner sans cesse à Jésus, le Christ qui habite en nous, pour qu’il nous conduise. Souffrir, même et surtout si c’est injuste, est un grand défi, mais accepter de ne plus être maîtres chez nous, en est un plus grand encore.

 

Comment renoncer à soi-même et se laisser conduire ?

En écoutant ce qui est dit à travers les événements, les rencontres, les lectures etc. qui jalonnent notre route.

En contemplant en soi et autour de soi les signes qui nous indiquent des directions à prendre, insoupçonnés.

En étant attentif à ce qui nous dé-route, ce qui nous surprend et nous emmène ailleurs.

En discernant à travers le bruit et la fureur de l’ordinaire ce léger bruissement, ce fin murmure ou l’Esprit de Dieu nous parle, où son souffle gonfle nos voiles vers des rivages inconnus…

 

 

 

1ère lecture : « J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient » (Is 50, 5-9a)
Lecture du livre du prophète Isaïe

Le Seigneur mon Dieu m’a ouvert l’oreille, et moi, je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé. J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient, et mes joues à ceux qui m’arrachaient la barbe. Je n’ai pas caché ma face devant les outrages et les crachats. Le Seigneur mon Dieu vient à mon secours ; c’est pourquoi je ne suis pas atteint par les outrages, c’est pourquoi j’ai rendu ma face dure comme pierre : je sais que je ne serai pas confondu. Il est proche, Celui qui me justifie. Quelqu’un veut-il plaider contre moi ? Comparaissons ensemble ! Quelqu’un veut-il m’attaquer en justice ? Qu’il s’avance vers moi ! Voilà le Seigneur mon Dieu, il prend ma défense ; qui donc me condamnera ?

Psaume : Ps 114 (116 A), 1-2, 3-4, 5-6, 8-9

R/ Je marcherai en présence du Seigneur
sur la terre des vivants.
ou : Alléluia ! (Ps 114, 9)

J’aime le Seigneur :
il entend le cri de ma prière ;
il incline vers moi son oreille :
toute ma vie, je l’invoquerai.

J’étais pris dans les filets de la mort,
retenu dans les liens de l’abîme,
j’éprouvais la tristesse et l’angoisse ;
j’ai invoqué le nom du Seigneur :
« Seigneur, je t’en prie, délivre-moi ! »

Le Seigneur est justice et pitié,
notre Dieu est tendresse.
Le Seigneur défend les petits :
j’étais faible, il m’a sauvé.

Il a sauvé mon âme de la mort,
gardé mes yeux des larmes
et mes pieds du faux pas.
Je marcherai en présence du Seigneur
sur la terre des vivants.

2ème lecture : « La foi, si elle n’est pas mise en œuvre, est bel et bien morte » (Jc 2, 14-18)
Lecture de la lettre de saint Jacques

Mes frères, si quelqu’un prétend avoir la foi, sans la mettre en œuvre, à quoi cela sert-il ? Sa foi peut-elle le sauver ? Supposons qu’un frère ou une sœur n’ait pas de quoi s’habiller, ni de quoi manger tous les jours ; si l’un de vous leur dit : « Allez en paix ! Mettez-vous au chaud, et mangez à votre faim ! » sans leur donner le nécessaire pour vivre, à quoi cela sert-il ? Ainsi donc, la foi, si elle n’est pas mise en œuvre, est bel et bien morte. En revanche, on va dire : « Toi, tu as la foi ; moi, j’ai les œuvres. Montre-moi donc ta foi sans les œuvres ; moi, c’est par mes œuvres que je te montrerai la foi. »

Evangile : « Passe derrière moi… » (Mc 8, 27-35)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. 
Que la croix du Seigneur soit ma seule fierté !
Par elle, le monde est crucifié pour moi, et moi pour le monde.
Alléluia. (Ga 6, 14)

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc

En ce temps-là, Jésus s’en alla, ainsi que ses disciples, vers les villages situés aux environs de Césarée-de-Philippe. Chemin faisant, il interrogeait ses disciples : « Au dire des gens, qui suis-je ? » Ils lui répondirent : « Jean le Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres, un des prophètes. » Et lui les interrogeait : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Pierre, prenant la parole, lui dit : « Tu es le Christ. » Alors, il leur défendit vivement de parler de lui à personne. Il commença à leur enseigner qu’il fallait que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, trois jours après, il ressuscite. Jésus disait cette parole ouvertement. Pierre, le prenant à part, se mit à lui faire de vifs reproches. Mais Jésus se retourna et, voyant ses disciples, il interpella vivement Pierre : « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. » Appelant la foule avec ses disciples, il leur dit : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. Car celui qui veut sauver sa vie la perdra ; mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Évangile la sauvera. »
Patrick BRAUD

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10 août 2015

Assomption : Ne vous faites pas voler votre espérance

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Assomption : Ne vous faites pas voler votre espérance

Cf. également :

Assomption : les sentinelles de l’invisible

L’Assomption de Marie, étoile de la mer

L’Assomption de Marie : une femme entre en Résistance

Marie, parfaite image de l’Église à venir

Marie en son Assomption : une femme qui assume !


En 2013, le Pape François avait centré son homélie de l’Assomption sur trois mots-clés caractérisant la foi et l’attitude de Marie : lutte, résurrection, espérance.

Relisons cette méditation, qui n’a pas vieilli, au contraire !

  

Homélie du pape François pour la fête de l’Assomption 2013

Chers frères et sœurs,

À la fin de la Constitution sur l’Église, le concile Vatican II nous a laissé une très belle méditation sur la Très Sainte Vierge Marie. Je relève simplement les expressions qui se réfèrent au mystère que nous célébrons aujourd’hui.

La première est celle-ci :

« Enfin la Vierge immaculée, préservée par Dieu de toute souillure de la faute originelle, ayant accompli le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire du ciel, et exaltée par le Seigneur comme la Reine de l’univers » (n. 59).

Et ensuite, vers la fin, il y a aussi celle-ci :

« Cependant, tout comme dans le ciel où elle est déjà glorifiée corps et âme, la Mère de Jésus représente et inaugure l’Église en son achèvement dans le siècle futur, de même sur cette terre, en attendant la venue du jour du Seigneur, elle brille déjà devant le Peuple de Dieu en pèlerinage comme un signe d’espérance assurée et de consolation » (n. 68).

À la lumière de cette très belle icône de notre Mère, nous pouvons considérer le message contenu dans les lectures bibliques que nous venons d’entendre. Nous pouvons nous concentrer sur trois mots-clés : lutte, résurrection, espérance.

 

Lutte, résurrection, espérance

Lutte

Le passage de l’Apocalypse présente la vision de la lutte entre la femme et le dragon. La figure de la femme, qui représente l’Église, est d’un côté glorieuse, triomphante, et de l’autre encore dans les douleurs. C’est en effet comme cela qu’est l’Église : si, au Ciel, elle est déjà associée à la gloire de son Seigneur, dans l’histoire, elle vit continuellement les épreuves et les défis que comporte le conflit entre Dieu et le malin, l’ennemi de toujours. Et dans cette lutte que les disciples de Jésus doivent affronter – nous tous, nous, tous les disciples de Jésus, nous devons affronter cette lutte – Marie ne nous laisse pas seuls ; la Mère du Christ et de l’Église est toujours avec nous. Toujours, elle marche avec nous, elle est avec nous. Elle marche toujours avec nous.

Marie aussi, dans un certain sens, partage cette double condition. Naturellement, elle est désormais entrée dans la gloire du ciel une fois pour toutes. Mais cela ne signifie pas qu’elle est loin, qu’elle est détachée de nous ; au contraire, Marie nous accompagne, elle lutte avec nous, elle soutient les chrétiens dans le combat contre les forces du mal. La prière avec Marie, en particulier le chapelet, a aussi cette dimension « agonistique », c’est-à-dire de lutte, une prière qui soutient dans la bataille contre le malin et contre ses complices. Le chapelet aussi nous soutient dans la bataille.

 

Résurrection

La seconde Lecture nous parle de la résurrection. L’apôtre Paul, écrivant aux Corinthiens, insiste sur le fait qu’être chrétien signifie croire que le Christ est vraiment ressuscité des morts. Toute notre foi se base sur cette vérité fondamentale qui n’est pas une idée mais un événement. Et le mystère de l’assomption de Marie dans son corps et dans son âme est aussi tout entier inscrit dans la résurrection du Christ. L’humanité de la Mère a été « attirée » par son Fils dans son passage à travers la mort. Jésus est entré une fois pour toutes dans la vie éternelle avec toute son humanité, celle qu’il avait prise de Marie ; et ainsi, elle, la Mère qui l’a fidèlement suivi pendant toute sa vie, qui l’a suivi par le cœur, est entrée avec lui dans la vie éternelle, que nous appelons aussi le ciel, le paradis, la maison du Père.

Marie aussi a connu le martyre de la croix : le martyre de son cœur, le martyre de l’âme. Elle a beaucoup souffert, dans son cœur, tandis que Jésus souffrait sur la croix. La Passion de son fils, elle l’a vécue au plus profond de son âme. Elle a été pleinement unie à lui dans la mort, et c’est pour cela que lui a été fait le don de la résurrection. Le Christ est prémices  des ressuscités et Marie est prémices des rachetés, la première de « ceux qui sont au Christ ». Elle est notre Mère, mais nous pouvons aussi dire qu’elle est notre représentante, elle est notre sœur, notre sœur aînée, elle est la première des rachetés qui soit arrivée au ciel.

Assomption : Ne vous faites pas voler votre espérance dans Communauté spirituelle dormition1 

Espérance 

L’évangile nous suggère le troisième mot : espérance. L’espérance est la vertu de celui qui, faisant l’expérience du conflit, de la lutte quotidienne entre la vie et la mort, entre le bien et le mal, croit dans la résurrection du Christ, dans la victoire de l’amour. Nous avons entendu le chant de Marie, le « Magnificat » : c’est le cantique de l’espérance, c’est le cantique du peuple de Dieu en marche dans l’histoire. C’est le cantique de tant de saints et de saintes, certains connus, d’autres, très nombreux, inconnus, mais bien connus de Dieu : des mamans, des papas, des catéchistes, des missionnaires, des prêtres, des sœurs, des jeunes, et même des enfants, des grands-pères, des grands-mères : ils ont affronté la lutte de la vie, portant dans leur cœur l’espérance des petits et des humbles. Marie dit : « Mon âme exalte le Seigneur » – aujourd’hui aussi, l’Église chante cela et elle le chante partout dans le monde.

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Ce cantique est particulièrement intense là où le Corps du Christ souffre aujourd’hui la Passion. 

Là où il y a la Croix, pour nous chrétiens, il y a l’espérance, toujours. S’il n’y a pas l’espérance, nous ne sommes pas chrétiens. C’est pour cette raison que j’aime dire : ne vous faites pas voler l’espérance. Que personne ne nous vole l’espérance, parce que cette force est une grâce, un don de Dieu qui nous fait avancer en regardant le Ciel. Et Marie est toujours là, proche de ces communautés, qui sont nos frères, elle marche avec eux, elle souffre avec eux, et elle chante avec eux le « Magnificat » de l’espérance.

Chers frères et sœurs, nous aussi, unissons-nous de tout notre cœur à ce cantique de patience et de victoire, de lutte et de joie, qui unit l’Église triomphante à l’Église pérégrinante que nous sommes ; qui unit la terre et le ciel, qui unit notre histoire à l’éternité vers laquelle nous marchons. Ainsi soit-il.

Messe du jour

1ère lecture : La Femmede l’Apocalypse, image de l’Église comme Marie (Ap 11, 19a ; 12, 1-6a.10ab)

Lecture de l’Apocalypse de saint Jean

Le Temple qui est dans le ciel s’ouvrit, et l’arche de l’Alliance du Seigneur apparut dans son Temple.
Un signe grandiose apparut dans le ciel : une Femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles.
Elle était enceinte et elle criait, torturée par les douleurs de l’enfantement.
Un autre signe apparut dans le ciel : un énorme dragon, rouge feu, avec sept têtes et dix cornes,et sur chaque tête un diadème.
Sa queue balayait le tiers des étoiles du ciel, et les précipita sur la terre. Le Dragon se tenait devant la femme qui allait enfanter, afin de dévorer l’enfant dès sa naissance.Or, la Femme mit au monde un fils, un enfant mâle, celui qui sera le berger de toutes les nations, les menant avec un sceptre de fer. L’enfant fut enlevé auprès de Dieu et de son Trône, et la Femme s’enfuit au désert, où Dieu lui a préparé une place.
Alors j’entendis dans le ciel une voix puissante, qui proclamait : « Voici maintenant le salut, la puissance et la royauté de notre Dieu, et le pouvoir de son Christ ! »

Psaume : 44, 11-12a, 12b-13, 14-15a, 15b-16

R/ Heureuse es-tu, Vierge Marie, dans la gloire de ton Fils.

Écoute, ma fille, regarde et tends l’oreille ;
oublie ton peuple et la maison de ton père :
le roi sera séduit par ta beauté. 

Il est ton Seigneur : prosterne-toi devant lui.
Alors, les plus riches du peuple,
chargés de présents, quêteront ton sourire. 

Fille de roi, elle est là, dans sa gloire,
vêtue d’étoffes d’or ;
on la conduit, toute parée, vers le roi. 

Des jeunes filles, ses compagnes, lui font cortège ;
on les conduit parmi les chants de fête :
elles entrent au palais du roi.

2ème lecture : Le Christ nous entraîne tous dans la vie éternelle ( 1 Co 15, 20-27a)

Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères, le Christ est ressuscité d’entre les morts, pour être parmi les morts le premier ressuscité. Car, la mort étant venue par un homme, c’est par un homme aussi que vient la résurrection. En effet, c’est en Adam que meurent tous les hommes ; c’est dans le Christ que tous revivront, mais chacun à son rang : en premier, le Christ ; et ensuite, ceux qui seront au Christ lorsqu’il reviendra. Alors, tout sera achevé, quand le Christ remettra son pouvoir royal à Dieu le Père, après avoir détruit toutes les puissances du mal. C’est lui en effet qui doit régner jusqu’au jour où il aura mis sous ses pieds tous ses ennemis. Et le dernier ennemi qu’il détruira, c’est la mort, car il a tout mis sous ses pieds.

Evangile : « Heureuse celle qui a cru ! » (Lc 1, 39-56)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Aujourd’hui s’est ouverte la porte du paradis : Marie est entrée dans la gloire de Dieu ; exultez dans le ciel, tous les anges ! Alléluia.

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

En ces jours-là, Marie se mit en route rapidement vers une ville de la montagne de Judée.
Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth. Or, quand Élisabeth entendit la salutation de Marie, l’enfant tressaillit en elle. Alors, Élisabeth fut remplie de l’Esprit Saint, et s’écria d’une voix forte :
« Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni.
Comment ai-je ce bonheur que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ?
Car, lorsque j’ai entendu tes paroles de salutation, l’enfant a tressailli d’allégresse au-dedans de moi.
Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. »

Marie dit alors :
« Mon âme exalte le Seigneur,
mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur.
Il s’est penché sur son humble servante ; désormais tous les âges me diront bienheureuse.
Le Puissant fit pour moi des merveilles ; Saint est son nom !
Son amour s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent.
Déployant la force de son bras, il disperse les superbes.
Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles.
Il comble de bien les affamés, renvoie les riches les mains vides.
Il relève Israël son serviteur, il se souvient de son amour,
de la promesse faite à nos pères, en faveur d’Abraham et de sa race à jamais. »

Marie demeura avec Élisabeth environ trois mois, puis elle s’en retourna chez elle.
Patrick BRAUD

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29 juillet 2015

La capacité d’étonnement

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

La capacité d’étonnement


Homélie du 18° dimanche du temps ordinaire / Année B

02/08/2015

Cf. également :

Éveiller à d’autres appétits


« Mann hou ? »
Qu’est-ce que c’est ?

La question des hébreux devant cette fine rosée recouvrant leur camp reflète leur étonnement. À tel point que l’interrogation est devenue le nom de la chose étonnante : la manne. Au lieu d’avoir peur, au lieu de se jeter dessus goulûment, au lieu d’ignorer le phénomène, les hébreux restent devant cette couche de givre inconnue et s’interrogent.

La capacité d'étonnement dans Communauté spirituelle moise31

Il y va pourtant d’un enjeu de taille : leur survie, tout simplement, dans ce désert hostile où la nourriture est rare et peu nombreuse. C’est donc que la condition première pour se nourrir de l’imprévu est d’abord de savoir s’étonner, et de se questionner.

Rainer Maria Rilke conseille cette posture à un jeune apprenti poète :

lettresaunjeunepoete émerveillement dans Communauté spirituelle« Si vous vous accrochez à la nature, à ce qu’il y a de simple en elle, de petit, à quoi presque personne ne prend garde, qui, tout à coup, devient l’infiniment grand, l’incommensurable, si vous étendez votre amour à tout ce qui est, si très humblement vous cherchez à gagner en serviteur la confiance de ce qui semble misérable, – alors tout vous deviendra plus facile, vous semblera plus harmonieux et, pour ainsi dire, plus conciliant. Votre entendement restera peut-être en arrière, étonné : mais votre conscience la plus profonde s’éveillera et saura. Vous êtes si jeune, si neuf devant les choses, que je voudrais vous prier, autant que je sais le faire, d’être patient en face de tout ce qui n’est pas résolu dans votre cœur. Efforcez-vous d’aimer vos questions elles-mêmes, chacune comme une pièce qui vous serait fermée, comme un livre écrit dans une langue étrangère. Ne cherchez pas pour le moment des réponses qui ne peuvent vous être apportées, parce que vous ne sauriez pas les mettre en pratique, les « vivre ». Et il s’agit précisément de tout vivre.

Ne vivez pour l’instant que vos questions.
Peut-être, simplement en les vivant, finirez-vous par entrer insensiblement, un jour, dans les réponses. »

Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète, Lettre n° 4 du 16/07/1903.

Savoir s’étonner est indispensable si l’on veut recueillir le don de Dieu. Chaque jour poser la question : qu’est-ce que c’est ? permet de ne pas passer à côté de ce qui a été déposé à notre porte, à notre insu, pour nous en nourrir.

L’étonnement, dit-on, « c’est l’enfance qui se cultive au quotidien ».

La capacité d’étonnement est la qualité première du philosophe : pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? s’interrogeait Leibniz [1]. Et les psaumes en écho prolongent cette interrogation jusqu’à l’homme lui-même : « qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui ? Le fils d’un homme que tu en prennes souci ? »

« S’étonner », nous dit Platon, « voilà un sentiment tout à fait philosophique. La philosophie n’a pas d’autre origine ». S’étonner est chez le philosophe « le premier symptôme de l’ignorance » ; c’est le moteur du besoin de comprendre.

Les scientifiques sont tout aussi prompts à s’étonner, et curieux eux aussi : « Celui qui ne peut plus trouver ni étonnement, ni surprise, est pour ainsi dire mort, ses yeux sont fermés », écrivait Albert Einstein [2].

Celui qui ne s’étonne pas devient vite blasé, voire cynique.
Celui qui s’habitue ne voit plus l’exceptionnel.
Celui qui ne s’arrête pas pour déceler l’inhabituel passe à côté d’un trésor sans le voir.

Prenez les foules suite à la multiplication des pains dans notre évangile : il y a ceux qui n’ont rien remarqué, satisfaits seulement d’avoir mangé à satiété. Il y a ceux qui ne voient que le produit matériel et en redemandent encore. Quelques-uns prendront du recul et se demanderont : qu’est-ce que cela ? Qui est celui qui nourrit ainsi tant de gens ? Cet étonnement les emmènera ailleurs. Habiter leur questionnement sur Jésus les conduira à le suivre pour en savoir plus sur lui.

Dans son homélie pour la fête de Pâques 2015, le Pape François murmurait :
« On ne peut vivre la Pâque sans entrer dans le mystère.
Ce n’est pas un fait intellectuel, ce n’est pas seulement connaître, lire… C’est plus, c’est beaucoup plus !
“Entrer dans le mystère”, signifie capacité d’étonnement, de contemplation; capacité d’écouter le silence et d’entendre le murmure d’un fin silence sonore dans lequel Dieu nous parle.
Entrer dans le mystère nous demande de ne pas avoir peur de la réalité: de ne pas se fermer sur soi-même, de ne pas fuir devant ce que nous ne comprenons pas, de ne pas fermer les yeux devant les problèmes, de ne pas les nier, de ne pas éliminer les points d’interrogation… »

 

Les trois enfants de l’étonnement

 

L’émerveillement

Celui qui sait s’arrêter sur l’inattendu et s’interroger : qu’est-ce que c’est ? n’est pas loin de pouvoir ensuite s’émerveiller du don de Dieu accordé à travers cette manne de chaque jour. Ne pas s’habituer aux petits miracles quotidiens donne une joie de vivre invincible, car s’alimentant sans cesse des mannes jalonnant notre route. Sainte Thérèse d’Avila disait : « Vous trouverez Dieu au fond de la casserole » !

Le fond de la casserole, c’est peut-être un matin où le ciel est irisé de couleurs improbables. C’est le sourire chaleureux d’un inconnu dans la foule du métro. C’est le coup de fil surprise de quelqu’un qui nous touche. C’est une opportunité insoupçonnée qui se présente au travail etc.

« Le Seigneur a fait pour moi des merveilles » chante Marie dans son Magnificat. C’est parce qu’elle a transformé son étonnement en émerveillement que Marie est remplie de l’allégresse de l’Esprit. Nous aussi nous pouvons enfanter le Verbe en nous si nous savons nous étonner des visites et des annonces qui nous sont faites…

 

L’action de grâces

eucharistie-125447_2 étonnementRendre grâce est dans le droit fil de l’émerveillement : une vie eucharistique est une attention de tous les instants à ce je ne sais quoi qui m’est donné à travers les autres et le monde.

Si cette musique inconnue m’a littéralement ravi hors de moi-même, si cette parole a si fort raisonné en moi, si cette main tendue a été à ce point providentielle, alors il y a de quoi rendre grâce ! Alors l’eucharistie devient la reconnaissance étonnée et émerveillée d’un amour qui me fait vivre à travers mille et une attentions  déroutantes.

 

La révolte

756107 eucharistieL’étonnement peut également conduire à la révolte.

Comment, cette silhouette emmitouflée dans un duvet qui m’a intrigué sur le trottoir est un être humain ? Alors il ne faut pas s’habituer, et sonner  l’insurrection de la bonté comme le criait l’Abbé Pierre, pour que les SDF ne soient pas des milliers, toujours plus nombreux.

Comment, la dette de la France est de 2 000 milliards, l’équivalent de la richesse produite chaque année ? Et personne ne s’en alarme outre mesure ? Mais pourquoi plus personne ne s’en étonne ? Pourquoi ne pas se révolter contre ces nuages noirs  s’amoncelant sur la tête de nos enfants ?

Comment, une grossesse sur cinq n’arrive plus à terme, et cela n’étonne personne ?

Ne pas s’habituer peut conduire à une réaction salutaire. Le mouvement des indignés de Stéphane Hessel est né de ce regard étonné sur une réalité injuste.

En posant la question : « Mann hou ? », qu’est-ce que c’est ? le peuple hébreu au désert s’est ouvert la voie d’une attitude spirituelle toujours actuelle. Sortir de son camp pour aller voir de plus près ce qui intrigue, prendre le temps d’habiter la question surgie de l’étonnement, puis recueillir humblement chaque jour ce qui nous est donné pour avancer sur la route…

 

La manne est une figure de l’eucharistie en ce sens qu’elle nous apprend à recevoir sans nous habituer, à rendre grâce sans cesser de marcher…


[1]. Principes de la nature et de la grâce, 1714.

[2]. dans : Comment je vois ce monde, publié en 1934.

 

 

 

 

1ère lecture : « Du ciel, je vais faire pleuvoir du pain pour vous » (Ex 16, 2-4.12-15)
Lecture du livre de l’Exode

En ces jours-là,      dans le désert, toute la communauté des fils d’Israël  récriminait contre Moïse et son frère Aaron.      Les fils d’Israël leur dirent : « Ah ! Il aurait mieux valu mourir  de la main du Seigneur, au pays d’Égypte,  quand nous étions assis près des marmites de viande,  quand nous mangions du pain à satiété !  Vous nous avez fait sortir dans ce désert  pour faire mourir de faim tout ce peuple assemblé ! »     Le Seigneur dit à Moïse : « Voici que, du ciel, je vais faire pleuvoir du pain pour vous.  Le peuple sortira pour recueillir chaque jour sa ration quotidienne,  et ainsi je vais le mettre à l’épreuve : je verrai s’il marchera, ou non, selon ma loi.     J’ai entendu les récriminations des fils d’Israël.  Tu leur diras : ‘Au coucher du soleil, vous mangerez de la viande  et, le lendemain matin, vous aurez du pain à satiété.  Alors vous saurez que moi, le Seigneur, je suis votre Dieu.’ »

    Le soir même, surgit un vol de cailles qui recouvrirent le camp ;  et, le lendemain matin,  il y avait une couche de rosée autour du camp.      Lorsque la couche de rosée s’évapora,  il y avait, à la surface du désert, une fine croûte,  quelque chose de fin comme du givre, sur le sol.      Quand ils virent cela,  les fils d’Israël se dirent l’un à l’autre : « Mann hou ? » (ce qui veut dire : Qu’est-ce que c’est ?),  car ils ne savaient pas ce que c’était.  Moïse leur dit : « C’est le pain que le Seigneur vous donne à manger. »

Psaume : Ps 77 (78), 3.4ac, 23-24, 25.52a.54a

R/ Le Seigneur donne le pain du ciel !  (cf. 77, 24b)

Nous avons entendu et nous savons
ce que nos pères nous ont raconté :
et nous le redirons à l’âge qui vient,
les titres de gloire du Seigneur.

Il commande aux nuées là-haut,
il ouvre les écluses du ciel :
pour les nourrir il fait pleuvoir la manne,
il leur donne le froment du ciel.

Chacun se nourrit du pain des Forts,
il les pourvoit de vivres à satiété.
Tel un berger, il conduit son peuple.
Il le fait entrer dans son domaine sacré.

2ème lecture : « Revêtez-vous de l’homme nouveau, créé selon Dieu » (Ep 4, 17.20-24)
Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Éphésiens

Frères,     je vous le dis, j’en témoigne dans le Seigneur : vous ne devez plus vous conduire comme les païens  qui se laissent guider par le néant de leur pensée.     Mais vous, ce n’est pas ainsi  que l’on vous a appris à connaître le Christ,      si du moins l’annonce et l’enseignement que vous avez reçus à son sujet  s’accordent à la vérité qui est en Jésus.      Il s’agit de vous défaire de votre conduite d’autrefois,  c’est-à-dire de l’homme ancien corrompu par les convoitises  qui l’entraînent dans l’erreur.      Laissez-vous renouveler  par la transformation spirituelle de votre pensée.      Revêtez-vous de l’homme nouveau,  créé, selon Dieu, dans la justice et la sainteté conformes à la vérité.

Évangile : « Celui qui vient à moi n’aura jamais faim, celui qui croit en moi n’aura jamais soif » (Jn 6, 24-35)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. 
L’homme ne vit pas seulement de pain,
mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.
Alléluia.  (Mt 4, 4b)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

En ce temps-là,     quand la foule vit que Jésus n’était pas là,  ni ses disciples,  les gens montèrent dans les barques  et se dirigèrent vers Capharnaüm  à la recherche de Jésus.      L’ayant trouvé sur l’autre rive, ils lui dirent : « Rabbi, quand es-tu arrivé ici ? »      Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : vous me cherchez,  non parce que vous avez vu des signes,  mais parce que vous avez mangé de ces pains  et que vous avez été rassasiés.      Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd,  mais pour la nourriture qui demeure  jusque dans la vie éternelle,  celle que vous donnera le Fils de l’homme,  lui que Dieu, le Père, a marqué de son sceau. »      Ils lui dirent alors : « Que devons-nous faire pour travailler aux œuvres de Dieu ? »      Jésus leur répondit : « L’œuvre de Dieu,  c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. »      Ils lui dirent alors : « Quel signe vas-tu accomplir  pour que nous puissions le voir, et te croire ?  Quelle œuvre vas-tu faire ?      Au désert, nos pères ont mangé la manne ;  comme dit l’Écriture : Il leur a donné à manger le pain venu du ciel. »  Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : ce n’est pas Moïse  qui vous a donné le pain venu du ciel ;  c’est mon Père  qui vous donne le vrai pain venu du ciel.      Car le pain de Dieu,  c’est celui qui descend du ciel  et qui donne la vie au monde. »     Ils lui dirent alors : « Seigneur, donne-nous toujours de ce pain-là. »     Jésus leur répondit : « Moi, je suis le pain de la vie.  Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ;  celui qui croit en moi n’aura jamais soif. »
Patrick BRAUD

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15 avril 2015

Le premier cri de l’Église

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 1 h 01 min

Le premier cri de l’Église

 

Homélie du 3° Dimanche de Pâques / Année B
19/04/15

 cf. également :  Le cognac de la foi

Bon foin ne suffit pas

Le cri primal

Le premier cri de l'Église dans Communauté spirituelle 18815341Vous souvenez-vous du premier cri d’un bébé juste sorti du ventre de sa mère ?

Lorsque les eaux refluent de ses poumons, et que la dilatation subite de ses alvéoles le fait  crier sous l’effet de la pression de l’air ?

Nous interprétons à juste titre ce premier cri comme un heureux signe, joie et douleur mêlées, car c’est le cri de la vie naissante.

        

Le kérygme

Eh bien, ce matin vous entendez le 1° cri du bébé-Église !

Près du Temple de Jérusalem, au Portique de Salomon – lieu symbolique ! – Pierre laisse sortir du groupe des Douze ce cri qui déchire la foule en attente : « Lui, le serviteur Jésus, le chef des vivants, vous l’avez tué, mais Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, nous en sommes témoins » (Ac 3, 13-19).

Cette annonce de la Résurrection, c’est le premiercri de l’Église naissante, c’est le cœur de son message.

Droit au but : Pierre annonce l’essentiel, sans se perdre en fioritures ou détails accessoires. « Ce Jésus, Dieu l’a ressuscité, il est vivant dans la force de l’Esprit. Nous en sommes témoins. C’est notre espérance pour toute l’humanité ».

Et il y a dans les Actes des Apôtres une vingtaine de cris de ce type (qu’on appelle le ‘kérygme’ en termes exégétiques) : comme une maternité où les nouveaux-nés s’entraînent mutuellement à crier pour tester leur souffle vital, le Moyen-Orient bruisse dans les Actes des Apôtres de ces communautés chrétiennes proclamant à pleins poumons l’essentiel de leur foi : « Dieu l’a ressuscité. Nous en sommes témoins. Et c’est pour tous ! ».

Ne faudrait-il pas aujourd’hui en France retrouver le courage de cette première annonce ? L’audace d’un premier cri sur la Résurrection du Christ ? 

 

Pour une pastorale de la première annonce

Prenons acte des changements de la société française : 1 enfant sur 2 seulement sera baptisé, 1 sur 4 à peine sera catéchisé, 1 sur 10 aura un contact réel avec des chrétiens en Église. 

2052318_graphe annonce dans Communauté spirituelle

Les données actualisées sont issues d’un cumul d’enquêtes réalisées par l’institut CSA au premier semestre 2012
auprès d’échantillons représentatifs de la population française âgée de 18 ans et plus.
22.101 personnes ont été interrogées,
dont 12.340 individus se déclarant de religion catholique.

Source © Le Télégramme

http://www.letelegramme.fr/ig/generales/france-monde/france/france-dans-20-ou-30-ans-les-sans-religion-seront-majoritaires-29-03-2013-2052297.php

Au lieu de s’en lamenter, au lieu de pleurer sur les anciennes coutumes qui ne seront plus connues, regardons autrement cette réalité en face : pour beaucoup de nos contemporains – et de plus en plus – la foi chrétienne sera une idée neuve, l’Évangile une nouvelle complètement inconnue, Jésus un homme à découvrir absolument.

Voyez les touristes qui passent dans nos églises tout l’été : plutôt que de se plaindre de leur manque de culture chrétienne, on peut se passionner pour leur livrer avec la beauté de nos édifices l’essentiel de notre espérance telle qu’elle gravée sur la pierre comme dans notre cœur.

Ils ne connaissent pas la signification de la Croix ? Réjouissons de leur faire découvrir pour la première fois !

Ils n’ont jamais entendu parles des 4 évangiles ? Réjouissons-nous de leur en faire découvrir quelques pages, et déchiffrons avec eux nos façades romanes ou gothiques !

Ils ont plein d’idées préconçues ? Raison de plus pour débattre, argumenter, annoncer le cœur de la foi… !

Un adulte n’est pas baptisé ? Mais c’est l’appel à lui proposer une première découverte du Christ, une première expérience de l’amour de Dieu…

Nous autres, « vieux chrétiens », faisons souvent « comme si » les autres devaient déjà savoir qui est le Christ, comment prier, comment interpréter le patrimoine chrétien etc… D’où une certaine amertume lorsque la réalité contraire s’impose à nous. Il vaudrait mieux prendre acte de cette ignorance, et saisir la chance d’une première invitation à découvrir le Christ. Beaucoup de gens chez nous ne sont plus ni hostiles, ni indifférents ; tout simplement, ils ne connaissent pas, ils n’ont jamais vraiment entendu parler de l’Évangile. Ils n’ont au mieux que des images médiatiques, pour le meilleur et pour le pire. Mais du coup ils sont vierges sur le plan spirituel. Et même curieux. Et même intéressés lorsqu’on leur propose de découvrir le cœur de la foi.

Les fiancés qui se plongent dans la lecture de la Bible pour préparer leur mariage en ressortent des perles inconnues (qui nous étonnent, nous les ‘vieux chrétiens’).

Les enfants qui marchent vers le baptême se plongent avec délice dans leurs premières expériences de prière.

Les touristes curieux de beauté et d’histoire sont prêts à entendre un témoignage de foi qui parle de l’art sacré.

Bref, avant la catéchèse qui en sera la prolongation, avant la pratique sacramentelle qui viendra nourrir la suite, il nous faut redécouvrir en France l’importance et l’urgence de la première annonce de l’Évangile, à la manière des Actes des Apôtres.

Il nous faut susciter un intérêt pour l’Évangile : « la première annonce fait naître dans le cœur du non-croyant, de l’indifférent, ou du membre d’une autre religion un intérêt pour l’Évangile, sans qu’il s’agisse encore d’une décision ferme » (Directoire Général pour la Catéchèse n° 56).

RO30078665 criDans la mise en oeuvre de la mission de l’Église selon ses modalités les plus habituelles, notamment dans la vie des paroisses et dans la pastorale des sacrements, une transformation du même ordre est en train de se produire. Des institutions ecclésiales « classiques », qui semblaient ne rien réclamer d’autre que la conformité à des procédures bien rodées, réclament aujourd’hui, sous peine de dépérir, d’être incessamment améliorées, vérifiées, relancées. Ce qu’il suffisait naguère d’entretenir doit être aujourd’hui voulu et soutenu. Toutes sortes de démarches qu’une population majoritairement catholique nous demandait, en se coulant dans des automatismes communément admis, doivent être désormais proposées comme l’objet d’un choix. De sorte que la pastorale dite « ordinaire », souvent vécue comme une pastorale de l’accueil, doit de plus en plus devenir aussi une pastorale de la proposition. Cette évolution a quelque chose d’onéreux. Certains la vivent comme une véritable épreuve. Mais de plus en plus nombreux sont les prêtres et les laïcs qui disent s’en trouver mûris et renouvelés dans leur foi. Un nombre croissant de pasteurs et, plus largement, d’acteurs de la pastorale comprennent qu’il y a là une exigence de la mission. Ils se découvrent du même coup appelés à aller davantage au coeur même de la foi.

Lettre aux catholiques de France (les évêques français, 1996)

 

« Malheur à moi si je n’annonce pas l’Évangile ! »

« Ce Jésus que vous avez tué, Dieu l’a ressuscité. Nous en sommes témoins ».

Que cette première annonce par Pierre suscite et encourage nos premières annonces ici chez nous, car là aussi nous sommes témoins de la Résurrection du Christ.

« Si eux se taisent, les pierres crieront » disait Jésus.

Nous ne pouvons pas nous taire.

Avec respect et amour, nous ne pouvons pas ne pas laisser ce cri nous traverser pour aller toucher le cœur de ceux qui ne connaissent pas le Christ, et ils sont nombreux.

 

Criez fort ! Criez bien, avec délicatesse ! Mais ne vous taisez pas….

 

1ère lecture : « Vous avez tué le Prince de la vie, lui que Dieu a ressuscité d’entre les morts » (Ac 3, 13-15.17-19)

Lecture du livre des Actes des Apôtres

En ces jours-là, devant le peuple, Pierre prit la parole : « Hommes d’Israël, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu de nos pères, a glorifié son serviteur Jésus, alors que vous, vous l’aviez livré, vous l’aviez renié en présence de Pilate qui était décidé à le relâcher. Vous avez renié le Saint et le Juste, et vous avez demandé qu’on vous accorde la grâce d’un meurtrier. Vous avez tué le Prince de la vie, lui que Dieu a ressuscité d’entre les morts, nous en sommes témoins. D’ailleurs, frères, je sais bien que vous avez agi dans l’ignorance, vous et vos chefs. Mais Dieu a ainsi accompli ce qu’il avait d’avance annoncé par la bouche de tous les prophètes : que le Christ, son Messie, souffrirait. Convertissez-vous donc et tournez-vous vers Dieu pour que vos péchés soient effacés. »

Psaume : 4, 2, 4.7, 9

R/ Sur nous, Seigneur, que s’illumine ton visage ! ou : Alléluia ! (4, 7b)

Quand je crie, réponds-moi,
Dieu, ma justice !
Toi qui me libères dans la détresse,
pitié pour moi, écoute ma prière !

Sachez que le Seigneur a mis à part son fidèle,
le Seigneur entend quand je crie vers lui.
Beaucoup demandent : « Qui nous fera voir le bonheur ? »
Sur nous, Seigneur, que s’illumine ton visage !

Dans la paix moi aussi,
je me couche et je dors,
car tu me donnes d’habiter, Seigneur,
seul, dans la confiance.

2ème lecture : « C’est lui qui obtient le pardon de nos péchés et de ceux du monde entier » (1 Jn 2, 1-5a)

Lecture de la première lettre de saint Jean

Mes petits enfants, je vous écris cela pour que vous évitiez le péché. Mais si l’un de nous vient à pécher, nous avons un défenseur devant le Père : Jésus Christ, le Juste. C’est lui qui, par son sacrifice, obtient le pardon de nos péchés, non seulement des nôtres, mais encore de ceux du monde entier. Voici comment nous savons que nous le connaissons : si nous gardons ses commandements. Celui qui dit : « Je le connais », et qui ne garde pas ses commandements, est un menteur : la vérité n’est pas en lui. Mais en celui qui garde sa parole, l’amour de Dieu atteint vraiment la perfection.

Evangile : « Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait, qu’il ressusciterait d’entre les morts le troisième jour » (Lc 24, 35-48)

Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Seigneur Jésus, ouvre-nous les Écritures ! Que notre cœur devienne brûlant tandis que tu nous parles.
Alléluia. (cf. Lc 24, 32)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

En ce temps-là, les disciples qui rentraient d’Emmaüs racontaient aux onze Apôtres et à leurs compagnons ce qui s’était passé sur la route, et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain. Comme ils en parlaient encore,  lui-même fut présent au milieu d’eux, et leur dit : « La paix soit avec vous ! » Saisis de frayeur et de crainte, ils croyaient voir un esprit. Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous bouleversés ? Et pourquoi ces pensées qui surgissent dans votre cœur ? Voyez mes mains et mes pieds : c’est bien moi ! Touchez-moi, regardez : un esprit n’a pas de chair ni d’os comme vous constatez que j’en ai. » Après cette parole, il leur montra ses mains et ses pieds. Dans leur joie, ils n’osaient pas encore y croire, et restaient saisis d’étonnement. Jésus leur dit : « Avez-vous ici quelque chose à manger ? » Ils lui présentèrent une part de poisson grillé qu’il prit et mangea devant eux. Puis il leur déclara : « Voici les paroles que je vous ai dites quand j’étais encore avec vous : “Il faut que s’accomplisse tout ce qui a été écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes.” » Alors il ouvrit leur intelligence à la compréhension des Écritures. Il leur dit : « Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait, qu’il ressusciterait d’entre les morts le troisième jour, et que la conversion serait proclamée en son nom, pour le pardon des péchés, à toutes les nations, en commençant par Jérusalem. À vous d’en être les témoins. »
Patrick BRAUD

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