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13 juin 2014

Trinité : ne faire qu’un à plusieurs

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Trinité : ne faire qu’un à plusieurs

Homélie pour la fête de la Trinité / Année A
15/06/2014

Même la famille a du mal?

Trinité : ne faire qu'un à plusieurs dans Communauté spirituelle bd35feca-201d-11e1-b53a-82616b81bcadUn repas de famille comme toutes les familles en vivent, à l’occasion de Noël, d’un anniversaire, d’une communion? La discussion à table en arrive aux impôts : la fameuse pression fiscale. Une des soeurs présentes part dans une longue diatribe véhémente sur le thème :

- regardez tout ce qu’on nous prend !

Je vois le visage d’une autre soeur se durcir et ses yeux se remplir de colère :

- tu as de la chance de payer des impôts. Nous on aimerait bien en payer, mais on n’est pas assez riches pour cela.

Le débat avec tout le monde enfle, s’envenime, au point que l’une des soeurs quitte la table en pleurant :

- on n’est vraiment pas du même monde !

Silence gêné et consterné évidemment après ce coup d’éclat : la fête est gâchée ; la joie de se retrouver en famille s’est évaporée à l’épreuve des différences trop grandes entre les modes de vie de chacun.

 

L’être humain est trinitaire

Dieu que c’est dur d’être unis en étant différents !

Dieu que c’est difficile de s’aimer alors que tout nous sépare !

C’est pourtant l’enjeu de cette fête de la Trinité : Dieu ne fait qu’un à trois, et il nous introduit dans cette intimité-là.

trinite2 amour dans Communauté spirituelleTrois personnes distinctes, une circulation d’amour entre elles les liant indissolublement : l’unité trinitaire est ce à quoi nous aspirons le plus profondément, parce que à son image nous avons été créés. Nous sommes faits pour vivre par de tels liens d’échanges réciproques où l’un et l’autre deviennent inséparables. Nous portons-nous la trace de cette communion divine, comme la cire garde en creux l’empreinte du sceau royal qui lui a donné sa forme.

Entre le Père et le Fils, dans l’Esprit, circule une telle intensité de relations que l’un n’est pas sans l’autre, et que chacun se reçoit et se donne en même temps, ne faisant plus qu’un dans ce don mutuel (les chrétiens grecs appellent périchorèse  cette joyeuse danse où l’amour circule entre les trois).

 

Ne faire qu’un à plusieurs : c’est bien cela notre vocation la plus fondamentale. Nous l’approchons lorsque l’amitié nous fait vibrer à l’unisson.

Nous la pressentons lorsque la ferveur sportive nous entraîne dans un même enthousiasme (la coupe du monde de football en témoigne !).

Nous la devinons lorsque la musique nous fait expérimenter une harmonie indicible. Nous l’expérimentons avec émotion devant la beauté de la création dont nous sommes issus.

Rien à voir avec la poupée de sel qui se dissout dans l’océan ! Non : l’unité trinitaire respecte le jeu de chacun. Distinguer pour mieux unir (Jacques Maritain) reste une maxime authentiquement chrétienne. Le Père n’est pas le Fils, l’Esprit est distinct des deux, et pourtant les trois ne font qu’un.

C’est en devenant profondément soi-même qu’on s’ouvre à la communion avec l’autre, et réciproquement. La communion divine exalte l’individualité de chacun en la mettant en relation avec la sienne.

L’adjectif chrétien est d’ailleurs synonyme de trinitaire en fait. Le Christ (chrestos en grec = oint) est l’oint, c’est-à-dire celui qui a reçu de Dieu le Père de l’onction de l’Esprit Saint. Le chrétien est donc celui qui, en suivant Jésus-Christ, reçoit du Père la force de l’Esprit pour vivre sa vie d’homme en communion (avec Dieu / les autres / lui-même / la nature…).

Pourquoi alors est-il si difficile d’être unis et différents ? Pourquoi tant de couples ne peuvent-ils pas durer jusqu’au bout sur ce chemin de communion (qui est trinitaire, au fond) ? Pourquoi tant de familles se déchirent-elles entre personnes de même sang ? Et les familles des peuples répercutent à l’infini ces divisions anti-trinitaires : entre catholiques et protestants autrefois, entre Hutus et Tutsis  récemment, entre palestiniens et israéliens toujours, hindous et musulmans encore…

Nous avons perdu la capacité de nous réjouir de ce que l’autre est vraiment autre. Au lieu de nous émerveiller de ce qu’il a et que je n’ai pas, nous jalousons, nous voulons lui ressembler à tout prix (cf. la violence mimétique analysée par René Girard). Au lieu de louer Dieu pour les talents et la personnalité de l’autre, nous cherchons à lui prendre, à le dominer, à le dévorer. Nous travestissons nos différences en inégalités, nous avons peur qu’elles soient source de domination.

 

reiser Dieu 

La Trinité au travail !

Fêter la Trinité est donc un sacré antidote à notre violence inhumaine, et un beau rappel de l’avenir qui nous est promis. Si on y réfléchit, tout notre univers est façonné par cette structure trinitaire. On a parlé de l’amitié, du couple, du sport, de la musique, de la beauté du monde. Parlons aussi de notre univers au travail.

‘Que vient faire la Trinité au travail ?’ railleront certains, en rajoutant avec cynisme : ?en entreprise, on n’est pas dans le monde des Bisounours’.

Pourtant, à moins d’être un ultralibéral partisan de la concurrence à mort, où l’un des derniers marxistes exaltant la lutte des classes, la plupart des travailleurs aspirent à des relations professionnelles faites de collaboration, de solidarité, d’estime, de reconnaissance mutuelle.

Tous les sondages réalisés auprès des salariés français ou européens redisent que l’attente des travailleurs tourne bien sûr autour de la rémunération, mais aussi de la considération, du respect, de l’ambiance et de la qualité des relations au travail.

 

Le secret de l’unité trinitaire réside dans le mouvement : se recevoir/se donner. Cette dynamique de l’échange à la manière divine peut transformer toute activité professionnelle.

Pas question alors d’imposer son autorité hiérarchique à une équipe en faisant claquer ses galons : l’autorité se reçoit, avec humilité, de bas en haut, d’une équipe qui reconnaît à quelqu’un le rôle et la mission de la conduire à sa réussite.

schema_robbes différence

 

Plus question entre collègues de rivaliser par la force ou la tromperie : la coopération fera gagner tous ensemble (ce qui ne supprime pas l’émulation, mais la met au service de la réussite commune). Se recevoir inclura également la relation client/usagers/élèves : un grand professionnel est d’abord reconnu comme tel par ses clients, un bon fonctionnaire par les usagers du service public, un professeur génial dans l’admiration de ses élèves.

Se donner marquera en retour l’activité professionnelle du sceau du service. Le grand commerçant est celui qui veut d’abord le meilleur service pour son client (qualité, prix, délai…). Il fait son métier par passion. C’est la passion de se donner qui anime également le scientifique qui cherche et expérimente, le professeur qui déploie des trésors de pédagogie etc.. Même les travaux apparemment les plus ingrats peuvent être vécus dans cet état d’esprit de service. Refaire des centaines de fois les mêmes gestes devant une machine ne peut pas se vivre sans solidarité avec les autres opérateurs, avec ceux de la maintenance des machines, avec le souci de la qualité finale pour le client etc. La manière d’accomplir sa tâche lui donne un autre sens, une dimension plus humaine parce que reliée à d’autres. Cela ne supprime pas la pénibilité physique, le côté mécanique, répétitif – voire abrutissant – de certaines tâches. Cela permet de résister à la déshumanisation qui guette toujours le monde du travail. Mais peut-être aussi d’éviter que des traders deviennent fous, des patrons arrogants, des équipes démotivées parce que divisées et sans aventure commune.

 

Une économie de communion (chère aux Foccolaris) ira puiser dans la Trinité une source d’inspiration pour transformer les relations au travail, et le travail lui-même.

Fêter la Trinité le dimanche permet donc de revenir le lundi matin à son bureau/usine/école/commerce avec le goût de la communion eucharistique (qui est trinitaire) encore dans la bouche. Tout peut devenir matière à se recevoir/se donner. Toute activité (si elle est orientée vers le bien commun) peut engendrer de l’unité entre des gens différents.

Relisons donc nos responsabilités à la lumière de cette vocation trinitaire : ne faire qu’un à plusieurs.

 

 

1ère lecture : Le Dieu tendre et miséricordieux se révèle à son peuple (Ex 34, 4b-6.8-9)

Lecture du livre de l’Exode

Moïse se leva de bon matin, et il gravit la montagne du Sinaï comme le Seigneur le lui avait ordonné.
Le Seigneur descendit dans la nuée et vint se placer auprès de Moïse. Il proclama lui-même son nom ; il passa devant Moïse et proclama :
« YAHVÉ, LE SEIGNEUR, Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de fidélité. »
Aussitôt Moïse se prosterna jusqu’à terre, et il dit :
« S’il est vrai, Seigneur, que j’ai trouvé grâce devant toi, daigne marcher au milieu de nous. Oui, c’est un peuple à la tête dure ; mais tu pardonneras nos fautes et nos péchés, et tu feras de nous un peuple qui t’appartienne. »

Psaume : Ps Dn 3, 52, 53, 54, 55, 56

R/ À toi, louange et gloire éternellement!

Béni sois-tu, Seigneur, Dieu de nos pères :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Béni soit le nom très saint de ta gloire :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Béni sois-tu dans ton saint temple de gloire :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Béni sois-tu sur le trône de ton règne :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Béni sois-tu, toi qui sondes les abîmes :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Toi qui sièges au-dessus des Kéroubim :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

Béni sois-tu au firmament, dans le ciel :
R/ À toi, louange et gloire éternellement !

2ème lecture : Dans l’amour trinitaire (2Co 13, 11-13)

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères, soyez dans la joie, cherchez la perfection, encouragez-vous, soyez d’accord entre vous, vivez en paix, et le Dieu d’amour et de paix sera avec vous.
Exprimez votre amitié en échangeant le baiser de paix. Tous les fidèles vous disent leur amitié.
Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu et la communion de l’Esprit Saint soient avec vous tous.

Evangile : « Dieu a tant aimé le monde…» (Jn 3, 16-18)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit : au Dieu qui est, qui était et qui vient ! Alléluia. (cf. Ap 1, 8)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle.
Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé.
Celui qui croit en lui échappe au Jugement, celui qui ne veut pas croire est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu.
Patrick BRAUD 

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31 octobre 2013

Tous un : la Toussaint, le cimetière, et l’Église…

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Tous un : la Toussaint, le cimetière, et l’Église…

Homélie pour la fête de Toussaint
01/11/2013

 

« Je crois à la communion des saints ».

Depuis la mort de mon père, cette phrase du Credo m’est devenue  extraordinairement concrète…


- Si je vais sur sa tombe, cela m’aide à penser à lui, cela me rapproche un peu ; je vois son nom sur la plaque de granit, je sais que ses restes sont là, mais ce n’est déjà plus lui ; et ce n’est pas encore être en communion.

Tous un : la Toussaint, le cimetière, et l'Église... dans Communauté spirituelle tombes_restaurees_1


- Si j’accroche sa photo, son portrait au milieu des étagères, je pense souvent à lui en passant devant, mais ce n’est pas encore être en communion.


- Si je ferme les yeux pour retrouver son air bonhomme et son sourire, çà se rapproche mais ce n’est encore que la trace qu’il a laissée dont il a marqué ma vie.
Ce n’est pas encore lui vivant.


- J’ai cherché où il pouvait me donner rendez-vous : des lettres, la mer, le bateau? jusqu’à ce qu’une évidence m’aveugle :


Puisqu’il est dans le Christ, sur le chemin de la rencontre éblouissante avec le Christ qu’on appelle Purgatoire, le plus sûr moyen d’être en communion avec lui est encore d’être en communion avec le Christ.

Dans l’hostie au creux de la main, le lien d’amour d’un père à son fils reprend, solide, en passant par le Christ.

Dieu a toujours été le plus court chemin d’un homme à un autre, mieux que la ligne droite.

À travers la mort, la relation avec nos défunts découle de notre communion au Christ.

- Et si la communion des saints que nous fêtons à la Toussaint était aussi simple que cela ?

Comme autrefois il suffisait de passer par le standard ou l’opératrice pour avoir l’international, il suffit de passer par le Christ pour être relié à ceux qui sont sur l’autre rive. Pas besoin de soi-disant médiums ou voyants qui inquiètent les vivants en leur faisant croire qu’ils sont en communication avec les morts ! Il est bien plus sûr de passer par le Christ, vrai homme et vrai Dieu, pour baisser le pont-levis entre eux et nous.

 

La communion des saints, nous l’expérimentons déjà partiellement ici-bas, lorsque de vrais liens de prière, d’affection, de solidarité nous font vibrer à l’unisson. Alors imaginez ce qu’est cette communion en Dieu même ! Imaginez la force qu’a réellement cette chaîne d’amour qui nous relie à tous ceux qui partagent la sainteté même de Dieu !

 

- Nous ne prions pas seulement pour obtenir des choses : retrouver des objets perdus avec St Antoine de Padoue, plaider pour des causes désespérées avec Ste Rita etc… Nous prions les saints pour nous-mêmes devenir saints, par la grâce de Dieu.

 

- Nous invoquons les saints, non pour nous protéger du malheur, mais pour nous exposer avec eux au bonheur des 8 Béatitudes de l’évangile de cette fête de Toussaint.

 

- Nous portons les prénoms des saints non comme une amulette, mais comme une marque de famille ; car ils sont de notre famille, ils nous redisent que la sainteté n’est pas au-dessus de nos forces ; comme mon grand-père qui était musicien me redit que l’amour de la musique fait partie de notre culture familiale.

 

- Nous égrenons les prénoms des saints comme les grains d’un chapelet litanique, car cette prière qui court d’un grain de sainteté à un autre nous relie solidement à Celui qui en est la source : le Dieu trois fois Saint.

 

Vous le voyez à chaque ordination : lorsque le futur diacre ou prêtre ou évêque est couché par terre, sur le tapis dans le choeur de la cathédrale, l’Église chante la litanie de tous les saints comme s’ils venaient eux-mêmes le chercher et l’entraîner avec eux dans la course de l’Évangile.  C’est sans doute un des moments les plus émouvants d’une ordination que cette litanie de tous les saints chantée sur l’ordinand prostré à terre, abandonné à Dieu, porté par ces compagnons invisibles de tous les siècles et de tous les horizons.

 

90-_ordination2juin2013 Toussaint dans Communauté spirituelle

 

D’une certaine manière, cette communion de Toussaint illustre parfaitement ce qu’est l’Église, notre Église. 25 ans après le Concile Vatican II (en 1985) les évêques réunis à Rome en Synode relisaient dans Vatican II son apport principal, essentiel :

« L’ecclésiologie de communion est l’idée centrale et fondamentale des documents du Concile. (…)
Au lendemain du Concile, Paul VI s’adressait aux fidèles en ces termes: ?L’Église est une communion. Que signifie ici ce mot communion ? Je vous renvoie au passage du catéchisme qui parle de la communion des Saints. Église veut dire communion des Saints. Et communion des Saints signifie une double participation vitale: l’incorporation des chrétiens à la vie du Christ, et la circulation de la même charité dans toute la communauté des fidèles, en ce monde et en l’autre. Union au Christ et dans le Christ; et union entre les chrétiens dans l’Église’ (08/06/1966). »
Christifideles laïci ; Jean Paul II, 1988

Nous étions partis de la quête d’un fils cherchant le fil d’Ariane qui l’unirait à son père au-delà de la mort. Nous arrivons à la plus belle définition de l’Église qui soit, celle de Vatican II : l’Église est le sacrement de la communion trinitaire.

 

C’est donc que cette belle fête de Toussaint, pleine d’espérance, est indispensable à la vie de l’Église comme à celle de nos familles.

 

Nous sommes faits pour la communion, la communion de tous les saints en Dieu.

 

Saints et saintes de Dieu,

dont la vie et la mort ont crié Jésus-Christ sur les routes du monde,

Saints et saintes de Dieu, priez pour nous,

afin que nos liens ici-bas se laissent transformer à l’image des liens d’amour qui vous unissent en Dieu Trinité.

 

 

 

 

1ère lecture : La foule immense des rachetés (Jn 7, 2-4.9-17)

Lecture de l’Apocalypse de saint Jean

Moi, Jean, j’ai vu un ange qui montait du côté où le soleil se lève, avec le sceau qui imprime la marque du Dieu vivant ; d’une voix forte, il cria aux quatre anges qui avaient reçu le pouvoir de dévaster la terre et la mer : « Ne dévastez pas la terre, ni la mer, ni les arbres, avant que nous ayons marqué du sceau le front des serviteurs de notre Dieu. » Et j’entendis le nombre de ceux qui étaient marqués du sceau : ils étaient cent quarante-quatre mille, de toutes les tribus des fils d’Israël. 

Après cela, j’ai vu une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, races, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau, en vêtements blancs, avec des palmes à la main. Et ils proclamaient d’une voix forte : « Le salut est donné par notre Dieu, lui qui siège sur le Trône, et par l’Agneau ! » Tous les anges qui se tenaient en cercle autour du Trône, autour des Anciens et des quatre Vivants, se prosternèrent devant le Trône, la face contre terre, pour adorer Dieu.

Et ils disaient : « Amen ! Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! »

L’un des Anciens prit alors la parole et me dit : « Tous ces gens vêtus de blanc, qui sont-ils, et d’où viennent-ils ? »

Je lui répondis : « C’est toi qui le sais, mon seigneur. » Il reprit : « Ils viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs vêtements, ils les ont purifiés dans le sang de l’Agneau ! » 

Psaume : 23, 1-2, 3-4ab, 5-6

R/ Voici le peuple immense de ceux qui t’ont cherché.

Au Seigneur, le monde et sa richesse, 
la terre et tous ses habitants ! 
C’est lui qui l’a fondée sur les mers 
et la garde inébranlable sur les flots. 

Qui peut gravir la montagne du Seigneur 
et se tenir dans le lieu saint ? 
L’homme au c?ur pur, aux mains innocentes, 
qui ne livre pas son âme aux idoles. 

Il obtient, du Seigneur, la bénédiction, 
et de Dieu son Sauveur, la justice.
Voici le peuple de ceux qui le cherchent ! 
Voici Jacob qui recherche ta face !

2ème lecture : Nous sommes enfants de Dieu et nous lui serons semblables (1 Jn 3, 1-3)

Lecture de la première lettre de saint Jean

Mes bien-aimés, voyez comme il est grand, l’amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu ? et nous le sommes. Voilà pourquoi le monde ne peut pas nous connaître : puisqu’il n’a pas découvert Dieu.

Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. Nous le savons : lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu’il est. Et tout homme qui fonde sur lui une telle espérance se rend pur comme lui-même est pur.

Evangile : Les Béatitudes (Mt 5, 1-12a)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Venez au Seigneur, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau : il vous donnera le repos. Alléluia. (cf. Mt 11, 28)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Quand Jésus vit la foule qui le suivait, il gravit la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent. Alors, ouvrant la bouche, il se mit à les instruire. Il disait :

« Heureux les pauvres de coeur :
   le Royaume des cieux est à eux !

Heureux les doux : 
   ils obtiendront la terre promise !

Heureux ceux qui pleurent :
   ils seront consolés !

Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice :
   ils seront rassasiés !

Heureux les miséricordieux :
   ils obtiendront miséricorde !

Heureux les c?urs purs :
   ils verront Dieu !

Heureux les artisans de paix :
   ils seront appelés fils de Dieu !

Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice :
   le Royaume des cieux est à eux !

Heureux serez-vous si l’on vous insulte, 
   si l’on vous persécute 
   et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.

Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux ! »
Patrick Braud

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14 août 2013

L’Assomption de Marie, étoile de la mer

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

L’Assomption de Marie, étoile de la mer

Homélie pour la fête de l’Assomption / Année C
15 Août 2013

L'Assomption de Marie, étoile de la mer dans Communauté spirituelle voilier

 

« Le vent se lève. Hâte-toi. La voile bat au long du mât. L’honneur est dans les toiles ; et l’impatience sur les eaux comme fièvre du sang. La brise mène au bleu du large ses couleuvres d’eau verte. Et le pilote lit sa route entre les grandes taches de nuit mauve, couleur de cerne et d’ecchymose. » 1

Fermez les yeux…

Vous naviguez de nuit, à la fraîche.

Vous avez hissé la voile aussitôt sortis du port de la Trinité sur Mer, et vous voilà à chercher l’accès vers Belle-Île à travers le passage du Béniguet. Le vent est établi : 3 à 4 Beaufort, de quoi entendre le chuintement régulier de l’étrave dans la vague, belle et franche respiration du bateau taillant sa route vers Houat et Hoedic. La nuit, le plancton phosphorescent donne à l’océan un air illuminé où toutes les rencontres deviennent possibles. Bien sûr vous avez le compas à l’oeil, l’enchaînement des bouées est bien visible sur la table à cartes ; et le GPS – espion fidèle – surveille votre route.

Imaginez un moment que tous ces repères n’existent plus, que l’électronique tombe en panne, qu’il n’y ait plus de bouées, plus de cartes marines, plus de satellites : comment ne pas aller se fracasser sur la multitude de cailloux et de rochers qui parsèment ces étroits passages entre les îles bretonnes ?

Vous retrouvez alors les vieux réflexes des navigateurs d’antan : lever les yeux, regarder le ciel étoilé, repérer les astres remarquables, calculer son cap d’après les alignements, ressortir l’antique sextant qui autrefois guidait les navigateurs au-delà de leurs mondes connus…

En ce 15 août, Marie est « montée » au ciel, telle une étoile non pas filante mais au contraire stable et rassurante. Le peuple chrétien la chante depuis des siècles sous le titre d’étoile de la mer.

ave-maris-stella Assomption dans Communauté spirituelleAve, maris stella,

Dei mater alma,

Atque semper virgo,

Felix caeli porta.

Sumens illud « Ave »

Gabrielis ore,

Funda nos in pace,

Mutans Evae nomen.

 

Solve vincla reis,

Profer lumen caecis,

Malanostra pelle,

Bona concta posce.

Monstra te esse matrem,

Sumat per te preces

Qui pronobli natus

Tulit esse tuus

 

Virgo singularis,

Inter mones mitis,

Nos culpis solutos

Mites fac et castos.

Vitam praesta puram,

Iter para tutum,

Ut videntes Jesu

Semper collaetémur

 

Sit laus Deo Patri,

Summo Christus decus,

Spirituti Sancto

Tribus, honor unus.

Amen

Traduction

Salut, étoile de la mer,

Sainte Mère de Dieu

Et vierge à jamais consacrée,

Bienheureuse porte du ciel.

 

Recevant cet Ave

Par la bouche de Gabriel

Fixe-nous dans la paix,

Retournement du nom d’Eva (Ève).

 

Des pécheurs brise les liens

Aux aveugles accorde la lumière,

Délivre-nous de nos misères,

Obtiens pour nous les vrais biens !

 

Montre toujours que tu es Mère,

Qu’il reçoive de toi nos prières

Celui qui est né pour nous,

En acceptant d’être ton fils.

 

O Vierge sans pareille

Vierge douce entre toutes,

Obtiens le pardon de nos fautes

Rends nos c?urs humbles et purs.

 

Rends sainte notre vie

Rends sûre notre route,

Afin que, contemplant Jésus,

Nous partagions sans fin ta joie.

 

Louange à Dieu le Père,

Gloire au Christ souverain

Ainsi qu’au Saint-Esprit ;

Aux Trois un seul honneur sans fin.

Ave Maris Stella est un vieil hymne toujours chanté à l’office, saluant la Vierge sous les traits d’un astre de nuit guidant les marins au milieu des dangers de l’océan. Le texte de l’hymne joue avec les mots. Ave est l’inverse de Eva : le salut (ave) signifie que la nouvelle Ève, accomplissant en sens inverse le chemin de la création déchue, réalise la vocation ultime de l’humanité : partager l’intimité de Dieu. L’assonance Maris / Maria suggère la même immensité en Marie quand l’océan.

Patrick Braud 

« De millénaires ouverte, la Mer totale m’environne.
L’abîme infâme m’est délice, et l’immersion, divine.
Et l’étoile apatride chemine dans les hauteurs du Siècle vert.
Et ma prérogative sur les mers est de rêver pour vous ce rêve du réel…
Ils m’ont appelé l’Obscur et j’habitais l’éclat.

(…)

Étroits sont les vaisseaux, étroite notre couche. Et par toi, coeur aimant, toute l’étroitesse d’aimer, et par toi, coeur inquiet, tout l’au-delà d’aimer. Entends siffler plus haut que mer la horde d’ailes migratrices. Et toi force nouvelle, passion plus haute que d’aimer, quelle autre mer nous ouvres-tu où les vaisseaux n’ont point d’usage ? (Ainsi j’ai vu un jour, entre les îles, l’ardente migration d’abeilles, et qui croisait la route du navire, attacher un instant à la haute mature l’essaim farouche d’une âme très nombreuse, en quête de son lieu…)

(?)

Une même vague par le monde, une même vague parmi nous, haussant, roulant l’hydre amoureuse de sa force… Et du talon divin, cette pulsation très forte, et qui tout gagne… Amour et mer de même lit, amour et mer au même lit… »  2

Pourquoi appeler Étoile de la mer Marie en son Assomption ?

tumblr_m3il06VWOm1r0kx5qo1_500 étoileDepuis l’Ascension du Christ, il n’est plus là physiquement devant nos yeux. Lui, la lumière des nations (Lumen Gentium, cf. Vatican II), le soleil de grâce, nous a été enlevé, et nous avançons comme à tâtons, environnés de nuit. Pourtant, cette obscurité n’est plus comme celle d’avant, puisqu’elle nous mène au soleil levant de la résurrection. Et déjà, les astres brillent au firmament de ce long convoyage vers l’aube nouvelle. La communion des saints ressemble à ces écheveaux de constellations imbriquées les unes dans les autres, de toutes tailles, scintillantes de mille manières. Parmi elles, une étoile demeure, fixe dans son alignement terre-soleil, fournissant ainsi un repère précieux pour les marins sans carte ni boussole dans leur exploration de profondeurs océanes inconnues.

Marie est pour nous ce repère accroché tout en haut de la carte pour élever le regard et projeter sur notre route une clarté indirecte, reçue du Christ, suffisamment atténuée pour ne pas être aveuglé, suffisamment brillante pour discerner les dangers de la navigation.

I-Miniature-638-sauves-dans-l-esperance-spe-salvi.net Marie« Par une hymne du VIIe-IXe siècle, donc depuis plus de mille ans, l’Église salue Marie, Mère de Dieu, comme « étoile de la mer »: Ave maris stella. La vie humaine est un chemin. Vers quelle fin ? Comment en trouvons-nous la route ? La vie est comme un voyage sur la mer de l’histoire, souvent obscur et dans l’orage, un voyage dans lequel nous scrutons les astres qui nous indiquent la route.

Les vraies étoiles de notre vie sont les personnes qui ont su vivre dans la droiture. Elles sont des lumières d’espérance.

Certes, Jésus Christ est la lumière par antonomase, le soleil qui se lève sur toutes les ténèbres de l’histoire. Mais pour arriver jusqu’à Lui nous avons besoin aussi de lumières proches – de personnes qui donnent une lumière en la tirant de sa lumière et qui offrent ainsi une orientation pour notre traversée.

Et quelle personne pourrait plus que Marie être pour nous l’étoile de l’espérance? « 

Benoît XVI, encyclique Spe Salvi, § 49

 

En ce 15 août, prions Marie, Étoile de la mer : qu’elle soit pour nous un repère plus sûr que le GPS l’est aux navigateurs…

 

Marie, étoile de la mer (St Bernard ? 1153)

L’image de l’astre

« Et le nom de la vierge était Marie » (Lc 1,27).

Disons quelque chose aussi sur ce nom, qui est interprété : « étoile » de la mer et qui convient à merveille à la mère restée vierge.

Oui, on la compare à un astre, et rien de plus juste : comme l’astre, sans être altéré, émet son rayon, ainsi, sans lésion intime, la Vierge met au monde son Fils. Le rayon n’amoindrit pas la clarté de l’astre, pas plus que le fils ne diminue l’intégrité de la vierge.

Oui, elle est cette noble étoile issue de Jacob dont les rayons illuminent l’univers entier, dont la splendeur étincelle sur la cime et pénètre jusqu’aux ombres profondes, dont la chaleur répandue sur la terre réchauffe les âmes plus que les corps, mûrit les vertus et consume les vices.

Elle est cette brillante et merveilleuse étoile qui se lève, glorieuse et nécessaire au-dessus de cet océan immense, dans la splendeur de ses mérites et de ses  exemples.

Dans la tempête, regarde l’étoile, invoque Marie !

O toi, qui que tu sois, qui dans cette marée du monde, te sens emporté à la dérive parmi orages et tempêtes, plutôt que sur la terre ferme, ne quitte pas les feux de cet astre, si tu ne veux pas sombrer dans la bourrasque.

Quand se déchaînent les rafales des tentations, quand tu vas droit sur les récifs de l’adversité, regarde l’étoile, appelle Marie !

Si  l’orgueil, l’ambition, la jalousie te roulent dans leurs vagues, regarde l’étoile, crie vers Marie !

Si la colère ou l’avarice, si les sortilèges de la chair secouent la barque de ton âme, regarde vers Marie !

Quand, tourmenté par l’énormité de tes fautes, honteux des souillures de ta conscience, terrorisé par la menace du jugement, tu te laisses happer par le gouffre de la tristesse, par l’abîme du désespoir, pense à Marie.

Dans les dangers, dans les angoisses, dans les situations critiques, pense à Marie, crie vers Marie !

Que son nom ne quitte pas tes lèvres, qu’il ne quitte pas ton c?ur, et pour obtenir la faveur de ses prières, ne cesse d’imiter sa vie.

Fais ta propre expérience de Marie !

Si tu la suis, point ne t’égares.

Si tu la pries, point ne désespère.

Si tu la gardes en pensée, point de faux pas.

Qu’elle te tienne, plus de chute.

Qu’elle te protège, plus de crainte.

Sous sa conduite, plus de fatigue.

Grâce à sa faveur, tu touches au port.

Et voilà comment ta propre expérience te montre combien se justifie la parole : Le nom de la Vierge était Marie (Lc 1, 27).

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1. Saint-John Perse, Amers, 1957.

2. Ibid.

Messe du jour

1ère lecture : La Femme de l’Apocalypse, image de l’Église comme Marie (Ap 11, 19a ; 12, 1-6a.10ab)

Lecture de l’Apocalypse de saint Jean

Le Temple qui est dans le ciel s’ouvrit, et l’arche de l’Alliance du Seigneur apparut dans son Temple. 

Un signe grandiose apparut dans le ciel : une Femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles.
Elle était enceinte et elle criait, torturée par les douleurs de l’enfantement.
Un autre signe apparut dans le ciel : un énorme dragon, rouge feu, avec sept têtes et dix cornes,et sur chaque tête un diadème.
Sa queue balayait le tiers des étoiles du ciel, et les précipita sur la terre. Le Dragon se tenait devant la femme qui allait enfanter, afin de dévorer l’enfant dès sa naissance.
Or, la Femme mit au monde un fils, un enfant mâle, celui qui sera le berger de toutes les nations, les menant avec un sceptre de fer. L’enfant fut enlevé auprès de Dieu et de son Trône, et la Femme s’enfuit au désert, où Dieu lui a préparé une place. 

Alors j’entendis dans le ciel une voix puissante, qui proclamait : « Voici maintenant le salut, la puissance et la royauté de notre Dieu, et le pouvoir de son Christ ! »

Psaume : 44, 11-12a, 12b-13, 14-15a, 15b-16

R/ Heureuse es-tu, Vierge Marie, dans la gloire de ton Fils.

Écoute, ma fille, regarde et tends l’oreille ;
oublie ton peuple et la maison de ton père :
le roi sera séduit par ta beauté. 

Il est ton Seigneur : prosterne-toi devant lui. 
Alors, les plus riches du peuple, 
chargés de présents, quêteront ton sourire. 

Fille de roi, elle est là, dans sa gloire, 
vêtue d’étoffes d’or ; 
on la conduit, toute parée, vers le roi. 

Des jeunes filles, ses compagnes, lui font cortège ; 
on les conduit parmi les chants de fête : 
elles entrent au palais du roi.

2ème lecture : Le Christ nous entraîne tous dans la vie éternelle ( 1 Co 15, 20-27a)

Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens

Frères, le Christ est ressuscité d’entre les morts, pour être parmi les morts le premier ressuscité. Car, la mort étant venue par un homme, c’est par un homme aussi que vient la résurrection. En effet, c’est en Adam que meurent tous les hommes ; c’est dans le Christ que tous revivront, mais chacun à son rang : en premier, le Christ ; et ensuite, ceux qui seront au Christ lorsqu’il reviendra. Alors, tout sera achevé, quand le Christ remettra son pouvoir royal à Dieu le Père, après avoir détruit toutes les puissances du mal. C’est lui en effet qui doit régner jusqu’au jour où il aura mis sous ses pieds tous ses ennemis. Et le dernier ennemi qu’il détruira, c’est la mort, car il a tout mis sous ses pieds.

Evangile : « Heureuse celle qui a cru ! » (Lc 1, 39-56)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Aujourd’hui s’est ouverte la porte du paradis : Marie est entrée dans la gloire de Dieu ; exultez dans le ciel, tous les anges ! Alléluia.

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

En ces jours-là, Marie se mit en route rapidement vers une ville de la montagne de Judée.
Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth. Or, quand Élisabeth entendit la salutation de Marie, l’enfant tressaillit en elle. Alors, Élisabeth fut remplie de l’Esprit Saint,
et s’écria d’une voix forte :
« Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni.
Comment ai-je ce bonheur que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ?
Car, lorsque j’ai entendu tes paroles de salutation, l’enfant a tressailli d’allégresse au-dedans de moi.
Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. »
Marie dit alors :
« Mon âme exalte le Seigneur,
mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur.
Il s’est penché sur son humble servante ; désormais tous les âges me diront bienheureuse.
Le Puissant fit pour moi des merveilles ; Saint est son nom !
Son amour s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent.
Déployant la force de son bras, il disperse les superbes.
Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles.
Il comble de bien les affamés, renvoie les riches les mains vides.
Il relève Israël son serviteur, il se souvient de son amour,
de la promesse faite à nos pères, en faveur d’Abraham et de sa race à jamais. »
Marie demeura avec Élisabeth environ trois mois, puis elle s’en retourna chez elle.
Patrick Braud

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24 mai 2013

Les bonheurs de Sophie

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Les bonheurs de Sophie

 

Homélie pour la fête de la Trinité / Année C
26/05/13

 

La sagesse personnifiée

Dans la foulée de la fête de Pentecôte de dimanche dernier, la première lecture de ce dimanche de la Trinité nous propose une figure énigmatique : la Sagesse.

Les bonheurs de Sophie dans Communauté spirituelle 9782204051538FSLe chapitre huit du livre des Proverbes a suscité d’innombrables interprétations, et fascine toujours. Qui est la Sagesse, identifiée à une personne vivante en Proverbes 8 ? Comme pour la ramener à quelque chose de connu – et ainsi se rassurer à bon compte – la tradition juive y a souvent vu la Torah, présidant à la création du monde aux côtés de Dieu. Les chrétiens l’ont majoritairement identifiée au Verbe, le fameux Logos du prologue de Jean, préexistant « au commencement », ou bien – plus justement – à l’Esprit Saint, « trouvant ses délices avec les fils des hommes » en les inspirant dès le début de l’humanité. Les musulmans ont hérité de ces débats l’identification de la Sagesse avec leur Coran incréé. Bref, cette figure mystérieuse enfantée avant la création du monde et co-architecte divin n’a pas cessé d’intriguer et de susciter des interprétations infinies. Peut-être renvoie-t-elle également à la sagesse égyptienne, proclamant ainsi que la raison et la technique sont des principes structurants l’émergence de toute vie ?

Quoi qu’il en soit, il est une des caractéristiques de la sagesse qui mérite de s’y arrêter : le jeu. On s’attendrait à un personnage grave et sérieux, à l’image des philosophes barbus et pensants de l’Antiquité et censés incarner cette sagesse. Or voici que le texte biblique ne nous dépeint pas un homme mais un sujet féminin (femme ou petite-fille on ne sait pas), plus occupée à « jouer » et « s’ébattre » qu’à raisonner et mesurer, savourant les « délices » de la compagnie humaine plus que les rigueurs des ouvrages savants.

 

Il faut qu’il y ait du jeu dans la création

Voilà donc une première piste qui nous rejoint tous et chacun dans notre capacité créatrice, que ce soit à travers la culture, le métier, ou la vie sociale. Le jeu et la raison vont bien ensemble : « tracer un cercle à la surface de l’abîme » et « s’ébattre sur la surface de la terre ». Notre sagesse est un maître d’oeuvre, une architecte pleine de gaieté et de mouvement !

Créer à la manière biblique implique donc de marier la rigueur et le jeu.

Regardez les ponts modernes : leur construction prévoit des espaces et des joints de dilatation, pour que justement les variations de température puissent « jouer » au sein de l’oeuvre sans la disloquer. Une certaine souplesse intérieure est nécessaire à la solidité de l’ensemble.

Celui qui ne sait pas « s’ébattre » et jouir avec « délices » de la présence d’autrui ne pourra pas construire quelque chose de solide !

Que ce soit pour bâtir son couple, sa carrière professionnelle ou ses engagements dans la cité, le sens du jeu et des délices est indispensable pour créer comme Dieu crée, pour co-construire avec lui.

Regardez les bébés jouer avec un objet, avec l’absence et la présence de cet objet tantôt caché/perdu, tantôt là/retrouvé : le jeu permet de faire grandir le je de l’enfant, qui ne peut devenir adulte sans passer par cette activité ludique.

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La Sagesse de Proverbes 8 montre que le jeu n’est pas réservé à l’enfant, et qu’il fait partie de la puissance créatrice que Dieu met en oeuvre à travers elle.

Il s’agit d’allier le jeu (les ébats) et la raison (« moi, la sagesse, j’habite avec le savoir-faire, je possède la science et la réflexion » Pr 8,12).

Allier et le jeu et la raison : au minimum, c’est ne pas se prendre trop au sérieux lorsque l’on crée, sachant que tout vient d’un Autre et y ramène. C’est savoir faire preuve de souplesse, d’adaptation pour laisser un jeu possible entre tous les éléments mis en place. C’est plus encore savoir prendre du recul pour savourer ce qui avance, pour jouir de ce qui est fait et de ceux qui l’ont fait. C’est – sans doute grâce à l’humour – être capable par ses « ébats » de secouer ce bel ordonnancement et de le faire trembler devant une certaine espièglerie sans craindre de le déstabiliser.

C’est donc maintenir une distance critique entre soi et son oeuvre, ne figeant rien, tel un chat jouant avec la pelote de laine qu’il est en train de rembobiner ou de dévider…

Créer sans tension, être rigoureux sans tuer la joie, réussir avec un éclat de rire intérieur : la Sagesse de Proverbes 8 met le jeu au coeur de l’activité créatrice. Et ce n’est pas une parabole pour l’enfance : c’est véritablement une des clés de notre capacité à être co-créateurs du monde !

 

Le chantier des délices

Beaucoup de maîtres flamands ont peint le « jardin des délices » promis par l’espérance chrétienne. On y voit un univers de plaisirs : fruits, fleurs, musique, costumes éblouissants, hommes et femmes transfigurés, censés annoncer le monde de la résurrection. Le Coran s’imagine pareillement la vie future dans un monde de délices très sensuels.

Notre sagesse de Proverbes 8 nous dit que ces délices font partie de la création du monde : c’est avec délice que la Sagesse s’ébat en présence de Dieu comme en compagnie des êtres humains. Avec le jeu, voilà donc une deuxième composante de l’activité authentiquement créatrice : les délices d’être aux côtés de l’autre.

Patrick Braud

Il y a comme un principe de plaisir qui structure l’acte de co-créer. Pas au sens freudien du terme (« tout, tout de suite ») : ce principe de plaisir philosophique lie la présence à l’autre et la joie de créer avec lui, le compagnonnage et la maîtrise d’oeuvre.

C’est donc un chantier des délices plus qu’un jardin !

Le travail créateur, s’il n’est que pénible ou douloureux, ne participe pas à la création divine. Il lui faut pour cela cette étincelle de plaisir, ce bonheur partagé qui transcende la seule réalisation technique.

Allier la création et le plaisir, au minimum savoir se réjouir, savoir fêter la victoire avec ses collaborateurs, valoriser le travail de chacun, savoir raconter l’aventure d’une équipe qui vient de réussir etc. C’est plus encore trouver ses délices en l’autre plus que en soi ou dans des choses, alimenter « jour après jour » sa capacité d’émerveillement et pas seulement dans les grandes occasions, apprendre à « être là », simplement, quand l’autre crée, à être « à ses côtés comme un maître d’oeuvre ».

On voit toutes les conséquences que l’on peut tirer de cette attitude ?délicieuse’ : pour un parent auprès de ses enfants, pour un leader auprès de son équipe, pour un bénévole au sein de son association etc.

 

Les bonheurs de Sophie

Autrefois, le livre de la comtesse de Ségur : les malheurs de Sophie, était un incontournable de la littérature enfantine, au même titre qu’Harry Potter ou le Seigneur des Anneaux aujourd’hui. Puisque la sagesse de Proverbes 8 est personnifiée, on peut l’appeler de son prénom grec (Sophia) et prédire que ce ne sont plus les malheurs mais les bonheurs de Sophie (ses ébats, ses délices) qui devront réapprendre à l’Occident l’art de créer de manière divine…

Puisque Sophie est un nom féminin, comme est féminin le nom hébreu donné à l’Esprit Saint (la ruah YHWH), notre Sagesse de Proverbes 8 nous invite à rapatrier une certaine part de féminité dans l’activité créatrice comme en Dieu même. L’Occident a trop masculinisé Dieu (au point que en latin, même l’Esprit est masculin, Spiritus, ainsi que le Père, Pater, et le Fils, Filius). Il est temps, à travers l’Esprit de Pentecôte, comme à travers la Sagesse créatrice, de retrouver la féminité de Dieu qui s’exprime si bien dans notre première lecture par les ébats et les délices de son compagnonnage avec Dieu et avec les hommes. Mais ceci est une autre histoire…

Puissions nous retrouver notre vocation humaine à être co-créateurs de notre monde, dans un Esprit de sagesse où le jeu et le plaisir sauront se marier avec la raison et la technique !

 

 

1ère lecture : La Sagesse est avec Dieu dès le commencement (Pr 8, 22-31)

Lecture du livre des Proverbes
Écoutez ce que déclare la Sagesse : « Le Seigneur m’a faite pour lui au commencement de son action, avant ses ?uvres les plus anciennes.
Avant les siècles j’ai été fondée, dès le commencement, avant l’apparition de la terre.
Quand les abîmes n’existaient pas encore, qu’il n’y avait pas encore les sources jaillissantes, je fus enfantée.
Avant que les montagnes ne soient fixées, avant les collines, je fus enfantée.
Alors que Dieu n’avait fait ni la terre, ni les champs, ni l’argile primitive du monde,
lorsqu’il affermissait les cieux, j’étais là. Lorsqu’il traçait l’horizon à la surface de l’abîme,
chargeait de puissance les nuages dans les hauteurs et maîtrisait les sources de l’abîme,
lorsqu’il imposait à la mer ses limites, pour que les eaux n’en franchissent pas les rivages, lorsqu’il établissait les fondements de la terre, j’étais à ses côtés comme un maître d’?uvre. J’y trouvais mes délices jour après jour, jouant devant lui à tout instant, jouant sur toute la terre, et trouvant mes délices avec les fils des hommes. »

Psaume : Ps 8, 4-5, 6-7, 8-9

R/ O Seigneur, notre Dieu, qu’il est grand, ton nom, par tout l’univers !

À voir ton ciel, ouvrage de tes doigts,
la lune et les étoiles que tu fixas,
qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui,
le fils d’un homme, que tu en prennes souci ? 

Tu l’as voulu un peu moindre qu’un dieu, 
le couronnant de gloire et d’honneur ; 
tu l’établis sur les ?uvres de tes mains, 
tu mets toute chose à ses pieds.

Les troupeaux de b?ufs et de brebis, 
et même les bêtes sauvages, 
les oiseaux du ciel et les poissons de la mer, 
tout ce qui va son chemin dans les eaux.

2ème lecture : Dans l’Esprit nous sommes en paix avec Dieu par le Christ (Rm 5, 1-5)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Frères, Dieu a fait de nous des justes par la foi ; nous sommes ainsi en paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ, qui nous a donné, par la foi, l’accès au monde de la grâce dans lequel nous sommes établis ; et notre orgueil à nous, c’est d’espérer avoir part à la gloire de Dieu.
Mais ce n’est pas tout : la détresse elle-même fait notre orgueil, puisque la détresse, nous le savons, produit la persévérance ; la persévérance produit la valeur éprouvée ; la valeur éprouvée produit l’espérance ; et l’espérance ne trompe pas, puisque l’amour de Dieu a été répandu dans nos c?urs par l’Esprit Saint qui nous a été donné.

Evangile : L’Esprit nous conduira vers le mystère de Dieu (Jn 16, 12-15)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit : au Dieu qui est, qui était et qui vient! Alléluia. (cf. Ap 1, 8)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « J’aurais encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous n’avez pas la force de les porter.
Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous guidera vers la vérité tout entière. En effet, ce qu’il dira ne viendra pas de lui-même : il redira tout ce qu’il aura entendu ; et ce qui va venir, il vous le fera connaître.
Il me glorifiera, car il reprendra ce qui vient de moi pour vous le faire connaître.
Tout ce qui appartient au Père est à moi ; voilà pourquoi je vous ai dit : Il reprend ce qui vient de moi pour vous le faire connaître. »
Patrick Braud

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