L'homélie du dimanche (prochain)

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1 septembre 2024

Il n’y a pas pire sourd …

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Il n’y a pas pire sourd…

Homélie pour le 23° Dimanche du Temps ordinaire / Année B
08/09/24

Cf. également :
Bien faire le Bien
Le speed dating en mode Jésus
Le coup de gueule de saint Jacques
La revanche de Dieu et la nôtre
Effata : la Forteresse vide
L’Église est comme un hôpital de campagne !
Quand parler ? Quand se taire ?

Lisez l’Évangile de ce dimanche (Mc 7,31-37) comme si c’était la première fois.
Normalement, il y a au moins 4 bizarreries, 4 anomalies qui devraient vous sauter aux yeux et vous intriguer : Jésus parle un sourd / en araméen / il guérit un muet qui n’en est pas un / pour ne rien dire ! ! !
Examinons chacune de ces 4 absurdités apparentes.

1. Parler à un sourd
Pisser dans un violon
À moins qu’il sache lire sur les lèvres, il ne vous viendra jamais à l’idée d’adresser la parole à un sourd, sachant que précisément il ne peut pas vous entendre ni vous comprendre ! Un observateur impoli et grossier lâcherait, ironiquement : « parler à un sourd c’est comme pisser dans un violon »…
Au mieux on communique par gestes, la langue des signes étant le top pour cela. Mais ni Jésus ni le sourd de la Décapole ne connaissent la langue des signes à leur époque, et aucun ne sait lire sur les lèvres.
Alors, pourquoi parler à un sourd ?

Plusieurs indices nous invitent à considérer autrement la surdité de cet homme.
D’abord, il ne vient pas de lui-même vers Jésus : « des gens lui amènent ». Comme s’il fallait le forcer. Comme s’il résistait à cette rencontre, pressentant que cela le forcerait à quitter son équilibre actuel. Comme s’il se complaisait dans son infirmité et refusait d’en sortir. La sagesse populaire ne dit-elle pas, à raison : « il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre »
D’ailleurs, même en présence de Jésus, il ne manifeste aucune demande, ce qu’il aurait pu faire par gestes, en mimant, en suppliant à genoux en montrant ses oreilles etc.
Rien. Nada. Pas une once apparente de désir de s’en sortir.
Autre indice : Jésus est obligé de lui « mettre les doigts dans les oreilles », ce qui est un geste fort de pénétration violente, sans aucun doute contre la volonté du sourd. Au rugby, on dirait que Jésus opère un passage en force pour percer son enfermement sur lui-même.
Le sourd semble donc subir sa guérison.

On peut supposer qu’en fait, il s’était enfermé lui-même dans le silence, refusant de s’ouvrir aux autres. La Boétie parlait de servitude volontaire pour les peuples qui aiment leur tyran, leur esclavage. La Bible parle des Hébreux qui préfèrent les marmites de viande égyptiennes dans les chaînes de l’esclavage plutôt que la faim dans la liberté. Il ne faut jamais sous-estimer l’addiction d’un peuple au malheur, ni la soumission d’une personne à ce qui la détruit (drogue, argent, pouvoir…). Cet enfermement du sourd de la Décapole fait penser à bien d’autres dans les évangiles : le fils de la veuve de Naïm qu’on croyait mort et que Jésus relève (Lc 7,11-17) ; la fille de Jaïre qu’on croyait morte elle aussi mais que Jésus voit seulement endormie (Mc 5,21-43) ; le démoniaque de Gerasa qui se complaisait à vivre enchaîné au milieu des tombes en s’automutilant (Mc 5,1-20) ; peut-être même Lazare enserré de bandelettes au tombeau, que Jésus va libérer (Jn 11,38-44) etc.
Les mentalités archaïques attribuaient aux démons ces enfermements que les sciences actuelles rattachent à des maladies psychiques ou neuronales, ou à des dérèglements génétiques.
Toujours est-il que Jésus n’est pas dupe du double jeu du sourd. Pour ne pas l’humilier, il le conduit à l’écart, seul. Mais là, il lui dévoile sa complicité avec son malheur et force la barrière derrière laquelle il se confinait lui-même à l’isolement.

Beaucoup de « sourds » autour de nous sont ainsi : ils ont choisi de ne pas sortir de leur enfermement, ils se sont habitués à leur isolement, ils aiment leur esclavage, ils ne veulent plus rien entendre. Sans l’Église pour les amener au Christ, sans le Christ pour mettre ses doigts dans leurs oreilles c’est-à-dire pour faire une brèche dans leur mur de silence érigé par eux-mêmes, ils ne changent jamais.

Et qui pourrait orgueilleusement prétendre ne pas chérir lui aussi une forme de surdité ?

2. Parler à un sourd en langue étrangère
Il n’y a pas pire sourd … dans Communauté spirituelle
Effata : c’est de l’araméen ! Or en Décapole, tout le monde parle grec. Non seulement Jésus parle à un sourd, ce qui n’est déjà pas la meilleure manière de se faire entendre, mais en plus il lui parle chinois ! Aucune chance d’être compris…
Marc a soigneusement conservé cet impératif araméen : « ouvre-toi », sois ouvert, sors de ton enfermement. Peut-être pour lui conserver sa saveur étrange, comme s’il fallait de l’étrangeté, de l’altérité pour forcer les portes de la forteresse vide. « Retiens l’étranger si tu veux reconnaître ton sauveur » osait écrire Saint Augustin à propos des pèlerins d’Emmaüs. ‘Ose être étrange, étranger, différent, si tu veux guérir les surdités contemporaines’, pourrions-nous paraphraser. Sans altérité, une société étouffe dans le même. Le déni de la différence (sexuelle, nationale, ethnique, religieuse, politique etc.) rend nos sociétés sourdes et solitaires. L’indifférence religieuse en Europe par exemple ressemble à ce pire sourd qui ne veut plus entendre, se fermant à la reconnaissance de toute transcendance.

Effata : l’appel à s’ouvrir fait partie de l’initiation chrétienne. Le rituel du baptême des adultes en fait une étape importante, célébrée chaque année le samedi saint, jour du tombeau, de l’enfermement apparent. Le ministre touche les oreilles et la bouche de chacun des catéchumènes en disant : « Effata : ouvre-toi, afin que tu proclames la foi que tu as entendue pour la louange et la gloire de Dieu ».
Devenir chrétien, c’est donc s’ouvrir (à la vie, aux autres, à la communion d’amour, au pardon…).

La société ouverte et ses ennemisCette conversion s’adresse également à notre ‘vivre ensemble’. Le philosophe des sciences Karl Popper relevait que certaines sociétés choisissent politiquement de se fermer sur elles-mêmes, au nom de l’idéologie, de l’ethnie, de la race, de la religion etc. Popper transpose ainsi ce qu’il avait mis en évidence dans la logique de la découverte scientifique : le principe de réfutabilité (ou falsifiabilité). Toute assertion scientifique n’est vraie que provisoirement, en attendant qu’une autre proposition vienne la réfuter, ce qui arrive inéluctablement dans le développement de la pensée scientifique. C’est donc que la vérité scientifique n’est pas immuable, ni absolue. Il n’y a de vérité que négative : je peux démontrer que la terre n’est pas plate, mais pas qu’elle est ronde (ce n’est qu’une approximation grossière) . La science est une quête, indéfinie, inachevée par essence, car ne bouclant jamais sur un résultat définitif. Nulle théorie n’est absolument vraie, fut-ce la relativité d’Einstein ou la mécanique quantique de Planck. En transposant cela à la sociologie politique, Karl Popper définit une société ouverte comme une société où le pluralisme (démocratique) fait en sorte qu’aucun pouvoir ne soit absolu, immuable, définitif [1]. Une société ouverte est caractérisée par l’alternance pacifique des gouvernances, par le côté relatif et contestable de tout pouvoir. Une société ouverte laisse de la place à autre chose qu’elle-même, alors qu’une société fermée est totalitaire, et empêche toute altérité de contester le pouvoir en place.
On pourrait dire que l’Effata de Jésus nous oblige à maintenir ce monde ouvert, au sens topologique, comme au sens de Popper : la résultante de tous nos efforts humains n’appartient pas à ce monde-ci, mais au monde autre que le Dieu tout autre viendra inaugurer dans la venue du Christ et la résurrection finale. Le progrès humain reste contestable, « réfutable », et n’ouvre pas de lui-même sur l’avenir de l’humanité.
La connaissance étant faillible, la société doit laisser différents points de vue s’exprimer. En revendiquant une unique vérité, on débouche sur l’imposition d’une unique version de la réalité et, partant, sur une société qui dénie la liberté de pensée. À l’inverse, dans une société ouverte, chaque citoyen peut se former sa propre opinion, ce qui nécessite la liberté de pensée et d’expression ainsi que les institutions culturelles et légales qui les facilitent. Une société ouverte est également pour Popper pluraliste et multiculturelle, pour disposer du plus grand nombre de points de vue.

« Les yeux levés au ciel (ouverture à la transcendance), en soupirant (ouverture au  spirituel), adressons cette appel à nos communautés humaines : Effata, ouvre-toi, devenez des sociétés ouvertes ; arrêtez de vous recroqueviller sur des intérêts, des certitudes, des égoïsmes mortifères. N’écoutez pas les ennemis des sociétés ouvertes qui bâtissent des régimes inhumains, enclos sur eux-mêmes.

3. Guérir un muet qui n’en est pas un
« Il fait entendre les sourds et parler les muets » : le cri final d’admiration est mal traduit dans sa version liturgique. Car en grec, dans la Septante (LXX), le texte d’Is 35,4–7 (notre première lecture) ne dit pas muet mais μογιλάλον (mogilalos) = qui parle difficilement. C’est pour cela que Marc reprend exactement ce même mot pour le sourd, afin de montrer que la prophétie d’Isaïe s’accomplit on lui : « Des gens lui amènent un sourd qui avait aussi de la difficulté à parler ».

Donc notre sourd qui n’est pas vraiment sourd n’est pas vraiment muet non plus ! Il parle  difficilement. Ce qui renforce l’hypothèse de sa soumission volontaire à son handicap : s’il avait réellement voulu être guéri, il aurait été capable de bredouiller – même difficilement ‑ sa demande à Jésus. Or il ne l’a pas fait. Donc il ne semble pas vouloir sortir de son enfermement.

Et c’est vrai qu’à force de ne plus vouloir entendre les autres, on n’arrive plus à discuter avec eux facilement. La parole naît de l’écoute, dès les premiers jours de la vie humaine.
À l’inverse, ne plus écouter affaiblit la capacité de dialoguer.

Mots pour mauxCombien de gens autour de nous « parlent difficilement » ? Ils n’ont pas les mots pour exprimer leur colère, leur sentiment, leur affection. Parfois c’est une question de culture ou d’héritage familial. Les enfants de professeurs par exemple connaissent 3 à 4 fois plus de mots que les enfants d’ouvriers. Souvent c’est une question de pratique : moins je parle (de moi, de mes centres d’intérêt, de mes passions etc.), moins je sais parler. Nous savons tous que l’apprentissage d’une langue étrangère demande beaucoup de pratique conversationnelle. Échanger, dialoguer, discuter, argumenter, est une discipline où le manque de pratique est rédhibitoire. L’absence de mots suscite des maux bien connus des sociologues : la violence dans les cités, dans les stades, la domination par la force, la loi du rapport physique etc.
Pas besoin d’être anthropologue pour constater l’appauvrissement de la capacité de dialogue de tant d’adolescents aujourd’hui : enfermés derrière leurs écrans, baignant dans une culture rap et techno où les mots sont peu nombreux, meurtriers et vulgaires, ils bafouillent quelques  onomatopées en guise de conversation, et replongent aussitôt dans leur silence numérique qu’ils chérissent plus que le contact humain…

Parler difficilement devient le mal de ce siècle. Le siècle précédent parlait trop, avec trop de pseudo arguments (communisme, pacifisme, nazisme etc.). Aujourd’hui c’est l’inverse. Les arguments tonitruants ont cédé la place aux émotions silencieuses. La dictature des sentiments, le culte du ressenti, la revendication de l’opinion individuelle, le relativisme généralisé ont effacé le débat rigoureux, scientifique, basé sur l’argumentation, l’hypothèse, la réfutation logique etc.
Même la religion chrétienne subit cet avatar. Le retour à la pensée magique (si présente  dans les Églises africaines ou américaines, évangéliques notamment) fait bredouiller aux fidèles de soi-disant paroles extatiques, et organiser à la chaîne des pseudos miracles. Même Donald Trump – peu suspect de ferveur mystique – prétend avoir été sauvé de la balle assassine du 13 juillet 2024 en Pennsylvanie par la Providence divine ! Mais il faudrait alors expliquer pourquoi la même Providence n’a pas protégé J.F. Kennedy en 1963…
Le nombre de baptisés chérissant cette pensée magique ne cesse d’augmenter, transformant la parole en délire, le texte en prétexte, le ministre en charlatan.

Sans ouverture à l’altérité, nous savons de moins en moins parler les uns avec les autres. Réapprenons l’art de la disputatio [2] qui a fait la gloire de la faculté de théologie de la Sorbonne au Moyen Âge : se disputer, c’était avancer une thèse, avec des arguments, des contre arguments, des synthèses, grâce à un débat contradictoire où les élèves avaient le droit de contredire le maître s’ils avançaient des arguments rationnels, fondés, cohérents, logiques.

Réapprenons à nous disputer ainsi !

4. Guérir un muet qui n’en est pas un, pour ne rien dire !
Le but de la guérison d’un muet, c’est normalement de le faire parler. Or là, Jésus interdit formellement à tous de dire quoi que ce soit sur ce qui vient d’arriver : « Alors Jésus leur ordonna de n’en rien dire à personne » (Mc 7,36a).

Et de manière plus étonnante encore, les gens désobéissent à Jésus de plus en plus : .
« Plus il leur donnait cet ordre, plus ceux-ci le proclamaient » (Mc 7,36b).
81Ox4R-KjhL._SL1500_ effata dans Communauté spirituelleL’explication de ce paradoxe réside sans doute dans ce que les exégètes appellent le « secret messianique », cher à Marc tout particulièrement. Tant que Jésus n’est pas passé par la Passion, la croix et Pâques, sa messianité est incompréhensible. Et on risque de le réduire à un vulgaire magicien, ou à un révolutionnaire mystique. Proclamer Jésus Messie à la suite d’un miracle comme celui du sourd de la Décapole est dangereux : la foule va le confondre avec un thérapeute, un gourou, ou un illuminé. Ce n’est qu’à la lumière de la Résurrection que les disciples pourront relire les actes de Jésus. Auparavant, ils n’ont pas les clés pour déchiffrer et comprendre.

Du coup, nous qui sommes après Pâques, nous pouvons parler ! Voilà pourquoi Marc fait désobéir les témoins de la scène à l’obligation de silence imposé par Jésus sur ce secret messianique : ils nous représentent, et Marc nous demande de crier sur les toits l’œuvre de Jésus, de proclamer publiquement la libération qu’il apporte aux sourds volontaires que nous sommes !

La sagesse de ce récit semble alors être celle-ci : ne rien dire tant qu’on n’a pas les clés pour comprendre ce qui nous arrive, proclamer publiquement le salut accompli en Christ lorsque nous sommes nous-mêmes passés avec lui par la Passion–Résurrection.
Discerner quand se taire, et quand parler est toujours l’œuvre de l’Esprit en nous.
À nous d’écouter son murmure intérieur pour opérer ce discernement spirituel avec nos proches.

Parler à un sourd / en langue étrangère / guérir un muet qui n’en est pas un / pour ne rien dire : que peuvent signifier pour nous ces 4 anomalies de notre récit dominical ?
Choisissez-en au moins une pour la ruminer cette semaine…

 

___________________________________________

[1]. Karl Popper, La société ouverte et ses ennemis, 2 tomes, 1945.

[2]. »La disputatio est une forme régulière d’enseignement, d’apprentissage et de recherche, présidée par le maître, caractérisée par une méthode dialectique qui consiste à apporter et à examiner des arguments de raison et d’autorité qui s’opposent autour d’un problème théorique ou pratique et qui sont fournis par les participants, et où le maître doit parvenir à une solution doctrinale par un acte de détermination qui le confirme dans sa fonction magistrale ».
B. C. Bazan, G. Fransen, J. F. Wippel, D. JACQUART, Les questions disputées et les questions quodlibétiques dans les facultés de théologie, de droit et de médecine, « Typologie des sources du Moyen-Âge occidental 44-45″, Turnhout, 1985, p. 160.

 

LECTURES DE LA MESSE

Première lecture
« Alors s’ouvriront les oreilles des sourds et la bouche du muet criera de joie » (Is 35, 4-7a)

Lecture du livre du prophète Isaïe
Dites aux gens qui s’affolent : « Soyez forts, ne craignez pas. Voici votre Dieu : c’est la vengeance qui vient, la revanche de Dieu. Il vient lui-même et va vous sauver. » Alors se dessilleront les yeux des aveugles, et s’ouvriront les oreilles des sourds. Alors le boiteux bondira comme un cerf, et la bouche du muet criera de joie ; car l’eau jaillira dans le désert, des torrents dans le pays aride. La terre brûlante se changera en lac, la région de la soif, en eaux jaillissantes.

Psaume
(Ps 145 (146), 6c-7, 8-9a, 9bc-10)
R/ Je veux louer le Seigneur, tant que je vis. ou : Alléluia.
 (Ps 145, 2)

Le Seigneur garde à jamais sa fidélité,
il fait justice aux opprimés ;
aux affamés, il donne le pain ;

le Seigneur délie les enchaînés.
Le Seigneur ouvre les yeux des aveugles,
le Seigneur redresse les accablés,

le Seigneur aime les justes,
le Seigneur protège l’étranger.
Il soutient la veuve et l’orphelin,

il égare les pas du méchant.
D’âge en âge, le Seigneur régnera :
ton Dieu, ô Sion, pour toujours !

Deuxième lecture
« Dieu n’a-t-il pas choisi ceux qui sont pauvres pour en faire des héritiers du Royaume ? » (Jc 2, 1-5)

Lecture de la lettre de saint Jacques
Mes frères, dans votre foi en Jésus Christ, notre Seigneur de gloire, n’ayez aucune partialité envers les personnes. Imaginons que, dans votre assemblée, arrivent en même temps un homme au vêtement rutilant, portant une bague en or, et un pauvre au vêtement sale. Vous tournez vos regards vers celui qui porte le vêtement rutilant et vous lui dites : « Assieds-toi ici, en bonne place » ; et vous dites au pauvre : « Toi, reste là debout », ou bien : « Assieds-toi au bas de mon marchepied. » Cela, n’est-ce pas faire des différences entre vous, et juger selon de faux critères ? Écoutez donc, mes frères bien-aimés ! Dieu, lui, n’a-t-il pas choisi ceux qui sont pauvres aux yeux du monde pour en faire des riches dans la foi, et des héritiers du Royaume promis par lui à ceux qui l’auront aimé ?

Évangile
« Il fait entendre les sourds et parler les muets » (Mc 7, 31-37)
Alléluia. Alléluia. 
Jésus proclamait l’Évangile du Royaume et guérissait toute maladie dans le peuple. Alléluia. (cf. Mt 4, 23)

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc
En ce temps-là, Jésus quitta le territoire de Tyr ; passant par Sidon, il prit la direction de la mer de Galilée et alla en plein territoire de la Décapole. Des gens lui amènent un sourd qui avait aussi de la difficulté à parler, et supplient Jésus de poser la main sur lui. Jésus l’emmena à l’écart, loin de la foule, lui mit les doigts dans les oreilles, et, avec sa salive, lui toucha la langue. Puis, les yeux levés au ciel, il soupira et lui dit : « Effata ! », c’est-à-dire : « Ouvre-toi ! » Ses oreilles s’ouvrirent ; sa langue se délia, et il parlait correctement. Alors Jésus leur ordonna de n’en rien dire à personne ; mais plus il leur donnait cet ordre, plus ceux-ci le proclamaient. Extrêmement frappés, ils disaient : « Il a bien fait toutes choses : il fait entendre les sourds et parler les muets. »
Patrick BRAUD

 

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15 août 2024

Serions-nous cannibales et vampires ?

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Serions-nous cannibales et vampires ?

 

Homélie pour le 20° Dimanche du Temps ordinaire / Année B 

18/08/24

 

Cf. également :

Les fous, les sages, et les simples
La sobre ivresse de l’Esprit
Éternellement
Manquez, venez, quittez, servez
L’homme ne vit pas seulement de pain
Le pain perdu du Jeudi Saint
Les bonheurs de Sophie
Donne-moi la sagesse, assise près de toi
Jésus face à la violence mimétique


La « sainte horreur »

Serions-nous cannibales et vampires ? dans Communauté spirituelle 51D8gy6FELL._SL1121_1578 : Le réformateur Jean de Léry débarque au Brésil et y découvre, horrifié, les coutumes anthropophages de certains amérindiens. Coïncidence révélatrice : au même moment éclate à Rio une dispute entre catholiques et protestants au sujet de l’eucharistie. Les huguenots comparent la conception eucharistique catholique à la pratique cannibale, observée chez les Aztèques, les Indiens Guayaki ou Tupinamba, comme on en avait observé chez les Maoris de Nouvelle-Zélande où les Papous de Nouvelle-Guinée. Ils éprouvaient « une sainte horreur » de l’hostie et du calice catholiques, trop réalistes à leurs yeux. Manger la chair et boire le sang du Christ : la façon dont les catholiques prenaient au pied de la lettre ces paroles les rendaient suspects de côtoyer de trop près le cannibalisme des ‘sauvages’, et c’est donc avec « une sainte horreur » que les réformés fustigeaient cette théologie eucharistique trop païenne à leurs yeux. Malheureusement, on ne discutait pas qu’avec des mots en cette époque troublée. Les guerres de religion déchiraient l’Europe et la mettaient à feu et à sang pour des débats théologiques qui nous paraissent aujourd’hui lointains. Alors, l’amiral Villegagnon, catholique, fit arrêter les critiques, et noyer trois calvinistes dans la baie de Rio de Janeiro pour avoir taxé les catholiques de « théophages » [1].

 

Apprenant cela, Montaigne écrivit en 1580 un chapitre de ses Essais devenus célèbres : « Des cannibales » (Livre I, ch. 31). Il s’indigne du jugement occidental ethnocentré porté sur les pratiques amérindiennes, alors qu’en Europe on s’écharpe et on s’entre-tue au nom de la religion. La sauvagerie des belligérants catholiques et protestants dépasse de loin celle des Tupinamba, et les cannibales ne sont pas ceux que l’on pense… :

81Uc7GpwzUL._SL1500_ cannibalisme dans Communauté spirituelle« Je ne suis pas marri que nous remarquions l’horreur barbaresque contenue en une telle action (cannibale), mais plutôt que, jugeant bien de leurs fautes, nous soyons si aveuglés aux nôtres. 

Je pense qu’il y a plus de barbarie à manger un homme vivant qu’à le manger mort, à déchirer par tourments et par géhennes un corps encore plein de sentiment, le faire rôtir par le menu, le faire mordre et meurtrir aux chiens et aux pourceaux (comme nous l’avons non seulement lu, mais vu de fraîche mémoire, non entre des ennemis anciens, mais entre des voisins et concitoyens, et, qui pis est, sous prétexte de piété et de religion), que de le rôtir et manger après qu’il est trépassé ».

 

Qu’y a-t-il de plus horrifique en effet : mordre à pleines dents dans le mollet d’un mort ou transpercer les membres d’un vivant supplicié au tribunal de l’Inquisition ? Faire rôtir un bras mort ou plonger dans le feu un hérétique vivant ? Boire le sang du guerrier vainqueur mort au combat ou faire couler le sang de centaines d’innocents dans le massacre des guerres de religion ? Où est l’horreur véritable ? Où est la sauvagerie inhumaine ?

 

C’est vrai que la parole de Jésus dans l’Évangile de ce dimanche (Jn 6,51-58) est dure : « si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’Homme, si vous ne buvez pas son sang, vous n’aurez pas la vie en vous ». Comment interpréter ces paroles de Jésus sans retomber dans des pratique cannibales ou vampires ? Car boire le sang des proches ou des ennemis faisait également partie des coutumes largement répandues dans les mythologies des Mésopotamiens, des Grecs, des Romains et des Slaves.

 

Puisque le Christ est venu accomplir et non abolir, tentons le parallèle dérangeant, audacieux et effrayant entre la communion eucharistique et le cannibalisme et le vampirisme, stades obligés de l’évolution des cultures humaines.

 

L’eucharistie exauce la quête cannibale / vampire

image%2F0931903%2F20210605%2Fob_3fbadc_corps-et-sang-du-christ eucharistieContrairement à ce qu’ont pensé les Modernes et leur approche matérialiste, le cannibalisme n’avait pas pour but de se nourrir, ni le vampirisme d’étancher sa soif. Ce n’est pas la nécessité – famine ou pénurie de viande par exemple – qui pousse à manger la chair et boire le sang de l’autre. C’est toute une symbolique, un acte social, rigoureusement codifié par des rituels quasi religieux. Les significations symboliques en sont multiples, car il y a une multitude de cannibalismes, de pratiques [2] variées selon les tribus et les continents :  transfert de pouvoir du mort vers le consommateur ; union avec les dieux ; rites  funéraires ; entretien du cycle de la vie ; domination des vaincus ; cohésion du groupe, menace aux dissidents ; châtiment et dissuasion ; régénération spirituelle ; éloignement des revenants ; purification ; protection contre le mal etc.

 

a) Conjuguer l’altérité et identité

Les Indiens Tupinamba disaient : « Nous mangeons nos beaux-frères ». Cela traduisait l’intégration au clan grâce aux alliances matrimoniales. C’était un grand honneur fait aux « valeurs ajoutées » au clan et en même temps un  élargissement de celui-ci grâce à ces alliés.

Autrement dit : il s’agit ici de manger le même, ni trop près (enfants, conjoints…), ni trop loin (étranger). 

Il ne faut, en effet, manger ni trop près, car ce serait consommer du même, se manger soi-même (« nous ne mangeons pas ceux avec qui nous faisons l’amour » disaient ces indiens), ni trop loin, car ce serait risquer son identité, risquer la dévoration par l’ogre, cet étrange étranger. Le but est de préserver l’intégrité du clan en l’élargissant à ceux qui en sont proches. Ce repas symbolique veut conjuguer l’identité du groupe et l’altérité de ceux qui peuvent s’y adjoindre.

 

L’eucharistie exaucera ce vœu, avec la chair et le sang de Jésus si proche (un humain comme nous) et si autre (fils de Dieu, Dieu lui-même). Communier au Christ dans l’eucharistie, c’est préserver l’unité de l’Église, à travers le temps et l’espace, tout en y ajoutant ceux qui se convertissent.

 

b) Un repas d’alliance

Cannibalisme mimétiqueDans les tribus pratiquant l’endo-cannibalisme, manger ses proches c’est proclamer que le lien clanique ne s’interrompt pas avec la mort. Leur chair devient la leur, et ainsi la chaîne de solidarité continue à unir les ancêtres à leurs descendants, pour le bien des deux.

La communion eucharistique vient exaucer ce vœu, car elle implique la communion des saints, agrandissant le corps du Christ à travers les âges et pas seulement à travers les distances. L’alliance avec les ancêtres trouve ici sa forme la plus haute.

 

c) Absorber les forces et l’esprit de l’autre

Dans certaines tribus, on consomme le corps des ennemis vaincus pour s’approprier leur courage, leur force, leur valeur guerrière (exo-cannibalisme). Version première de   »l’homme augmenté », le cannibale augmente la panoplie de ses vertus et qualités en les empruntant aux morts, symboliquement, par l’ingestion du corps des vaincus. Le vampire suce le sang de ses victimes comme un élixir d’où il tire ses forces nouvelles.

L’eucharistie exauce ce vœu d’« empowerment » au plus haut point ! Car la communion au corps du Christ nous donne son Esprit, sa force, son courage pour mener les combats spirituels qui nous incombent.
Communier au sang du Christ fait couler dans nos veines son désir d’aimer, de servir, de témoigner, jusqu’au martyre s’il le faut.

 

c) Un repas symbolique, ritualisé, social, communautaire

Autre ressemblance : tout est codifié dans les repas cannibales. Les rôles de chacun sont spécifiques, bien répartis. Chacun les connaît, personne ne les transgresse. Les anthropologues appellent « fait social total »  de telles pratiques où le clan/le peuple se constitue et se régénère par la cérémonie où l’on consomme des proches, des amis ou des ennemis pour maintenir le clan/le monde dans son intégrité.

La chair, quoiqu’il la consomme effectivement, n’est pas une viande, mais un signe que le cannibale manipule pour construire sa vengeance et une cuisine sociale qui soude la communauté en ses articulations différenciées 

 

De même, on dénature l’eucharistie si on la réduit à un tour de magie sur du pain et du vin [3]

Au catéchisme (années 60), on m’apprenait à ne pas mordre dans l’hostie au moment de la communion, « pour ne pas faire de mal à Jésus ». Il fallait donc coller l’hostie à son palais et la laisser fondre lentement… Si bien que la prière post-communion était le plus souvent remplacée par les contorsions de la langue cherchant à se défaire du carton-pâte collé au palais. Cette chosification du corps du Christ est une trahison de la dimension sacramentelle de l’eucharistie ! 

 

Le but de la communion est essentiellement symbolique (au sens fort du terme : symbole = ce qui relie) : nous unir au Christ, à l’Église de tous les lieux et de tous les temps, faire de nous des vivants en Christ. 

Augustin par exemple emploie indifféremment le mot sacrement ou symbole : « C’est votre propre symbole qui repose sur la table du Seigneur (…) soyez ce que vous voyez, et recevez ce que vous êtes » (Serm. 272). Le sym-bole est ce qui met en relation. Le Christ est immolé « in sacramento ». On ne comprend rien à l’eucharistie si on la vide de sa substance sacramentelle, de même qu’on ne comprend rien au cannibalisme si on n’y voit qu’une pratique alimentaire !

 

Évidemment, si on s’arrêtait là, à faire la liste des ressemblances entre l’eucharistie et le cannibalisme / vampirisme, ce se serait un peu effrayant, et « la sainte horreur » de l’hostie pourrait à nouveau nous éloigner de la communion !

Allons un peu plus loin en listant quelques différences majeures où l’eucharistie est en rupture avec ces pratiques anciennes, paradoxalement pour mieux les accomplir.

 

L’eucharistie subvertit la logique cannibale/vampire

 

a) La peur des morts

Dans certaines tribus, on mange les cadavres des défunts du clan très vite, afin d’empêcher symboliquement l’âme des morts de rester en lien avec ce corps, et de venir ainsi troubler le monde des vivants. Chacun chez soi, pour la tranquillité de tous ! Les Guayaki disaient : « ne pas être cannibale, c’est se condamner à mourir », et les étrangers, qui n’ont pas eux l’habitude de manger leurs morts mourront bientôt car l’âme des défunts, condamnée à rôder, n’aura de cesse de vouloir se venger. 

Une survivance de cette croyance se retrouve dans la pratique romaine de concentrer les tombes en dehors de la cité, à l’écart, loin des vivants, afin que nul mélange ne vienne semer la confusion, le trouble et le désordre.

 

Catacombes de Saint Pancrace, RomeLes chrétiens refusèrent cette logique de peur et de séparation entre morts et vivants. D’abord en allant se réfugier dans les catacombes – ces galeries souterraines remplies de cercueils de cadavres – pendant les trois siècles de persécutions, pour s’y cacher et célébrer l’eucharistie. Puis en remettant le cimetière au cœur des villes et des villages, et non à l’extérieur. En Charente-Maritime par exemple, les belles églises romanes au centre, sur la place, sont entourées de jardins exubérants de roses trémières, qui sont en fait le cimetière local. Et il faut marcher sur les tombes pour entrer dans l’église. Quelle plus belle illustration de la communion des saints du Credo ? La mort apprivoisée remplace la mort redoutée.

En régime chrétien, les morts ne font plus peur, on prie pour eux, on demande leur intercession, ils continuent à faire partie de la famille, sans les redouter. Le cannibalisme n’a plus alors aucun intérêt.

 

b) S’incorporer un cadavre vs laisser un Vivant nous incorporer à lui

B24-300x300 sacrificeLa symbolique de l’ingestion de chair humaine tourne autour du lien d’unité à maintenir : en le mangeant, l’autre devient une part de moi-même. C’est la fonction de la nourriture : nous faire assimiler le monde extérieur pour qu’il nous fournisse l’énergie vitale une fois digéré. 

Dans l’eucharistie, c’est le processus inverse ! D’abord c’est d’un Vivant qu’il s’agit et non d’un mort. Ensuite, ce n’est pas nous qui l’absorbons : c’est lui qui nous accueille, c’est lui qui fait de nous son corps et non notre corps qui fait de lui sa chair.

« Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui » (Jn 6,56). L’Eucharistie intervertit le processus naturel de la digestion, par lequel nous nous approprions les éléments extérieurs à notre organisme. Ainsi nous devenons, « en participant au corps et au sang du Christ, un seul corps et un seul sang avec le Christ » (Catéchèse de Jérusalem).

Saint Augustin a bien compris cette subversion de l’assimilation opérée dans la communion eucharistique
« Je suis la nourriture des forts : grandis et tu me mangeras. Tu ne me changeras pas en toi, comme la nourriture de ton corps, c’est toi qui seras changé en moi ».

 

Le cannibale veut s’assimiler l’autre après sa mort. Le chrétien se laisse assimiler au Christ alors qu’Il est Vivant.

 

c) La dénonciation de la violence mimétique.

René Girard osait écrire que l’eucharistie récapitule en elle la religion du cannibalisme primitif, mais au prix de la dénonciation et du rejet de la violence qui imprégnait les meurtres rituels.

Jésus face à la violence mimétique« On peut considérer les religions archaïques comme le premier stade de la révélation progressive qui culmine dans le Christ. Ainsi, quand certains disent que l’Eucharistie est enracinée dans le cannibalisme archaïque, il ne faut pas le nier, mais l’affirmer au contraire ! La véritable histoire de l’humanité est une histoire religieuse qui remonte au cannibalisme primitif. Le cannibalisme primitif est la religion, et l’Eucharistie récapitule cette histoire, de l’alpha à l’oméga. Tout cela est primordial, et une fois qu’on l’a compris, il faut nécessairement admettre que l’histoire de l’homme inclut ce début meurtrier : Caïn et Abel » [4].

Être chrétien, c’est précisément rompre avec l’unanimité victimaire. La communion des chrétiens s’enracine dans l’ardente conviction que Jésus est innocent et que Dieu lui-même a justifié sa mort. Cette conviction n’est pas l’acceptation mais au contraire le rejet du meurtre fondateur auquel l’autre groupe adhère aveuglément » [5]


Michel Serres, l’agnostique, recevait son ami René Girard sous la Coupole de l’Académie Française avec ces mots :

« Je vois les premier chrétiens, dames patriciennes, esclaves, étrangers de Palestine ou d’Ionie, sans distinction de sexe, de classe ni de langue, ne cessant de focaliser leur regard et leur attention fervente sur l’image de la victime innocente, en partageant une hostie symbolique plutôt que les membres épars d’un lynchage. Si nous comprenions ce geste, ne changerions-nous pas de société ? » [6]

 

Contrairement au cannibale qui civilise son anthropophagie en cuisant sa viande, le catholique procède à rebours et « transforme » le cuit initial (le pain) en un cru symbolique, la chair du Christ vivant.

Le cannibalisme suppose une violence sanglante, l’eucharistie est au contraire « un sacrifice non sanglant » (Concile de Trente) accompli une fois pour toutes par Jésus, et rendu présent sacramentellement dans la célébration. Pas besoin de répéter à l’infini ce sacrifice : il est unique, accompli une fois pour toutes, et l’eucharistie nous y associe sans le réitérer. 

En ce sens, communier est un acte essentiellement non-violent.

 

d) La subversion du sang versé

De qui est le sang qui coule ? Dans le vampirisme, c’est celui de la victime. Dracula exploite les sujets de son royaume en leur suçant le sang pour revitaliser son pouvoir sur eux. 

Dans l’eucharistie, c’est l’inverse ! C’est le maître qui laisse couler son sang ; c’est le prince qui se fait serviteur ; c’est le supérieur qui se sacrifie pour ses subordonnés. Les vampires modernes (profits financiers [7], dévastation de la planète, tyrannies politiques etc.) consomment et ne redonnent rien ; ils se gardent en vie en volant celle des autres ; ils dominent sans servir.

Le sang eucharistique est celui du don total à l’autre, fût-il mon ennemi. Communier, c’est pratiquer le don du sang sous toutes ses formes, du service jusqu’au martyre en passant par la profession ou la politique. À l’inverse, les cannibales et vampires modernes détruisent en consommant, font mourir pour survivre, saignent les pauvres pour rester riches.

 

Conclusion : une réalité en sacrement

On doit prendre au sérieux cet accomplissement/subversion des cannibalismes/vampirismes par l’eucharistie !

Nous avons réellement la chair et le sang de Jésus sur l’autel, mais c’est une réalité en sacrement, donc non sanglante, non physiologique. Et cette réalité accomplit le meilleur de la religion cannibale, tout en subvertissant ses dérives violentes et inhumaines.

ichtus vampireL’Occident a un mal fou à concevoir une réalité autre que celle des molécules et des atomes. Notre matérialisme nous aveugle. Or il y a d’autres réalités que matérielle : esthétique, artistique, amoureuse, symbolique, voire virtuelle, augmentée, probabiliste…. Le réalisme eucharistique n’est pas physique au sens moderne du terme, mais au sens de la substance (sub-stance = ce qui se tient en-dessous des choses) des philosophes romains ou de la nature (physis) des Grecs

Le mot transsubstantiation est une tentative d’explication de cette réalité, et c’est une transformation sacramentelle, non sanglante, non carnée. Nous ne reproduisons pas l’unique sacrifice mais nous le rendons présent, symboliquement [8] – c’est-à-dire sacramentellement – en chaque eucharistie.

Le Concile de Trente reconnaît lui-même que les mots seront toujours trop pauvres pour décrire cette réalité de la chair et du sens eucharistique : le Christ est présent « en sa substance, dans un mode d’existence que nos mots peuvent sans doute à peine exprimer, mais que notre intelligence, éclairée par la foi, peut cependant reconnaître et que nous devons croire fermement comme une chose possible à Dieu ».

Rappelez-vous Saint Augustin : « Si tu comprends, ce n’est pas Dieu »

Ce qui n’empêche pas la recherche théologique et spirituelle, au contraire, car le but est dans la quête elle-même, infinie…

 

N’allons pas communier comme avant. 

Même si les images cannibales et vampires vous effrayent, qu’elles vous obligent au moins à regarder la réalité eucharistique de la chair et du sang du Christ sous un autre jour !

_____________________________________________

[1]. Cf. Frank Lestringant, Une sainte horreur ou le voyage en Eucharistie, XVI°-XVIII° siècle, préface de Pierre Chaunu, Paris, PUF « Histoires », 1996.

[2]. Par exemple : endo ou exo cannibalisme, rituels de dépeçage et de consommation, de cuisine (cuir, rôtir, bouillir, réduire en cendres etc.), repas réservé à quelques-uns ou offert à tous etc…

[3]. Le langage populaire disait même: « faire Hocus Pocus » (déformation de « hoc est corpus (meum) » = « ceci est mon corps ») pour signifier : faire un tour de passe-passe.

[4]. René Girard, Les origines de la culture, Desclée de Brouwer, 2004, p. 129.

[5]. Ibid., pp. 193-194.

[7]. Cf. la critique de Marx : « Le capital est du travail mort, qui, semblable au vampire, ne s’anime qu’en suçant le travail vivant, et sa vie est d’autant plus allègre qu’il en pompe davantage. Le temps pendant lequel l’ouvrier travaille est le temps pendant lequel le capitaliste consomme la force de travail qu’il lui a achetée ». « La prolongation de la journée de travail au-delà des bornes du jour naturel, c’est à dire jusque dans la nuit, n’agit que comme palliatif, n’apaise qu’approximativement la soif de vampire du capital pour le sang vivant du travail » (Karl Marx, Le Capital Livre I).

[8]. Les premiers Chrétiens qualifiaient couramment le corps et le sang du Seigneur de nourriture et de boisson « spirituelles » : « Mais nous, tu nous as gratifiés d’une nourriture et d’un breuvage spirituels, et de la vie éternelle, par Jésus ton Serviteur » (Didachè, 10.3). « Fortifie ton cœur en prenant ce pain comme une nourriture spirituelle, et rend joyeux le visage de ton âme » (Catéchèses mystagogiques de l’Église de Jérusalem).

 LECTURES DE LA MESSE

Première lecture
« Venez, mangez de mon pain, buvez le vin que j’ai préparé » (Pr 9, 1-6)

Lecture du livre des Proverbes
La Sagesse a bâti sa maison, elle a taillé sept colonnes. Elle a tué ses bêtes, et préparé son vin, puis a dressé la table. Elle a envoyé ses servantes, elle appelle sur les hauteurs de la cité : « Vous, étourdis, passez par ici ! » À qui manque de bon sens, elle dit : « Venez, mangez de mon pain, buvez le vin que j’ai préparé. Quittez l’étourderie et vous vivrez, prenez le chemin de l’intelligence. »

Psaume
(Ps 33 (34), 2-3, 10-11, 12-13, 14-15)
R/ Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur !
 (cf. Ps 33, 9)

Je bénirai le Seigneur en tout temps,
sa louange sans cesse à mes lèvres.
Je me glorifierai dans le Seigneur :
que les pauvres m’entendent et soient en fête !

Saints du Seigneur, adorez-le :
rien ne manque à ceux qui le craignent.
Des riches ont tout perdu, ils ont faim ;
qui cherche le Seigneur ne manquera d’aucun bien.

Venez, mes fils, écoutez-moi,
que je vous enseigne la crainte du Seigneur.
Qui donc aime la vie
et désire les jours où il verra le bonheur ?

Garde ta langue du mal
et tes lèvres des paroles perfides.
Évite le mal, fais ce qui est bien,
poursuis la paix, recherche-la.

Deuxième lecture
« Comprenez bien quelle est la volonté du Seigneur » (Ep 5, 15-20)

Lecture de la lettre de saint Paul aux Éphésiens
Frères, prenez bien garde à votre conduite : ne vivez pas comme des fous, mais comme des sages. Tirez parti du temps présent, car nous traversons des jours mauvais. Ne soyez donc pas insensés, mais comprenez bien quelle est la volonté du Seigneur. Ne vous enivrez pas de vin, car il porte à l’inconduite ; soyez plutôt remplis de l’Esprit Saint. Dites entre vous des psaumes, des hymnes et des chants inspirés, chantez le Seigneur et célébrez-le de tout votre cœur. À tout moment et pour toutes choses, au nom de notre Seigneur Jésus Christ, rendez grâce à Dieu le Père.

Évangile
« Ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson » (Jn 6, 51-58) Alléluia. Alléluia.
Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi en lui, dit le Seigneur. Alléluia. (Jn 6, 56)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean
En ce temps-là, Jésus disait à la foule : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. » Les Juifs se querellaient entre eux : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? » Jésus leur dit alors : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi. Tel est le pain qui est descendu du ciel : il n’est pas comme celui que les pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. »
Patrick BRAUD

 

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14 juillet 2024

Droit dans le mur !

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Droit dans le mur !

 

Homélie pour le 16° Dimanche du Temps ordinaire / Année B 

21/07/24

 

Cf. également :

Les écarts de Jésus et les nôtres
Il a détruit le mur de la haine
Medium is message
Du bon usage des leaders et du leadership
Des brebis, un berger, un loup
Le berger et la porte
La différence entre martyr et kamikaze ou djihadiste
Un manager nommé Jésus
Le Passe-murailles de Pâques


La faillite du mur de Gaza

Sur un tracé de 708 km, environ 500 km de murs ont été réalisés Il s’agit à 95 % d’une haute clôture, mais dans les endroits urbains, comme ici à Bethléem, le mur est en béton et atteint 9 m de haut.C’est un peu la ligne Maginot des Israéliens : le « mur de fer » séparant la bande de Gaza d’Israël était censé protégé les colons juifs des commandos du Hamas. Mais le 7 octobre 2023 au matin, des milliers de roquettes enfoncèrent le poste-frontière d’Eretz, y ouvrant une brèche énorme, des dizaines d’ULM de combattants volèrent par-dessus des 8 m de métal, un bulldozer ouvrit un passage à travers l’immense grillage fortifié prolongeant le mur de Gaza…

Stupéfaits, les Israéliens découvraient que ce mur si coûteux (plus d’un milliard de dollars), si technologique (bardé de capteurs, radars, surveillance vidéo etc.), fièrement construit depuis 2002 (à cause de l’intifada) pour garantir leur sécurité était en réalité un leurre…

La faillite de ce système sécuritaire est totale. Le mur n’a pas empêché les 1200 victimes et 252 otages juifs du Hamas. Que deviendra-t-il après la guerre actuelle en riposte à ce pogrom ? Peut-être Israël devait-il méditer sur la 2e lecture de ce dimanche :

« Mais maintenant, dans le Christ Jésus, vous qui autrefois étiez loin, vous êtes devenus proches par le sang du Christ. C’est lui, le Christ, qui est notre paix : des deux, le Juif et le païen, il a fait une seule réalité ; par sa chair crucifiée, il a détruit ce qui les séparait, le mur de la haine ; il a supprimé les prescriptions juridiques de la loi de Moïse. Ainsi, à partir des deux, le Juif et le païen, il a voulu créer en lui un seul Homme nouveau en faisant la paix, et réconcilier avec Dieu les uns et les autres en un seul corps par le moyen de la croix ; en sa personne, il a tué la haine. Il est venu annoncer la bonne nouvelle de la paix, la paix pour vous qui étiez loin, la paix pour ceux qui étaient proches. Par lui, en effet, les uns et les autres, nous avons, dans un seul Esprit, accès auprès du Père » (Ep 2,13-18).

Paul sait bien qu’il y a un mur invisible séparant les juifs des non-juifs : les habits, la cuisine, les prescriptions juridiques, les rites, la circoncision, le shabbat, les papillotes, les  tsitsits etc. : tout sépare les uns des autres, tout nourrit la haine réciproque. On mesure mal aujourd’hui la révolution apportée par le christianisme, qui abolit ces différences en n’imposant plus ni la circoncision ni l’incirconcision, ni la cashrout, ni la kippa, ni tout le reste ! Mais il suffit d’appliquer le texte de Paul aux relations actuelles entre juifs et palestiniens pour réaliser le renversement inouï opéré en Christ : « en sa personne, il a tué la haine » (Ep 2,16) qui séparait les deux. Il a détruit le mur qui divisait la Terre sainte. Car « le Seigneur ne fait pas de différence entre les hommes » (Ac 10,34 ; 15,9), là où pourtant eux sacralisent ces différences au point de les ériger en murs infranchissables.

 

Depuis la chute du mur de Berlin en 1989, on croyait que cette époque d’enfermement des peuples était révolue. C’était oublier que l’humanité ne cesse d’ériger des murs tout au long de son histoire.

- Muraille de Chine

Le plus vieux est sans doute la Grande Muraille de Chine : plus de 6000 km de protection contre les invasions mongoles et autres, construit depuis le III° siècle et sans cesse reconstruit.

N’oublions pas les autres murailles hélas célèbres :

– Mur de Corée

238 km de murs dans la zone démilitarisée entre Corée du Nord et Corée du Sud (le film « Meurs un autre jour » s’ouvre sur une séquence spectaculaire où James Bond traverse cette zone en hovercraft !).

– Mur des sables

2700 km, 3 m de hauteur : ce mur construit par le Maroc dans les années 50 traverse le Sahara occidental pour protéger le pays des incursions du Front Polisario.

– Mur Inde–Bangladesh

3200 km de fil de fer barbelé : l’Inde a construit cette séparation entre les deux pays jusqu’en 2013, pour stopper les immigrations clandestines bangladaises.

- « Bouclier Est »
La Pologne va construire une ligne de fortification militarisée de 700 km de long en frontière de la Biélorussie et de Kaliningrad.

- Sans oublier les « Peace Walls » qui en Irlande séparent encore certains quartiers catholiques et protestants depuis 1970. Ni la « Ligne verte » (mur surveillé par la Force des Nations Unies) qui coupe l’île de Chypre en deux entre Turcs et Grecs.

- Ni le fameux mur USA–Mexique dont Donald Trump avait fait le symbole de sa détermination anti immigrationniste.

On le voit, l’humanité ne cesse d’ériger des murs depuis 1989 (plus de 70 autour du globe, sur 41 000 km, soit le tour de la Terre !). Sous couvert de préoccupations légitimes : terrorisme, immigration massive, trafics illégaux, insécurité, ils s’exposent au tard à la faillite de celui de Gaza. Et ils tombent sous la condamnation de Paul : Christ est venu détruire les murs de séparation entre les peuples, il est venu pour la communion et non la partition.

Comment puis-je contribuer à démasquer l’idéologie des murs de haine ?


Le mur du séparatisme

L'Archipel français: Naissance dune nation multiple et diviséeNous pourrions en France nous croire loin de ces dangers. Pourtant, le mur de Calais sépare la jungle des migrants de l’agglomération de Calais. Et la séparation dont parlait Paul est parfois dans les têtes plus que dans les parpaings, dans les cœurs plus que dans les barbelés. L’archipélisation de la France décrite par Jérôme Fouquet nous dessine en effet un paysage morcelé. Des groupes ethniques se rassemblent pour vivre entre eux dans certains quartiers ; des modes de vie s’imposent ici, incompatibles avec ceux qui sont pratiqués là. Moins de mariages mixtes, peu de liberté de changer de religion, police des mœurs, repli sur une langue étrangère… : des îlots se forment, afghans, marocains, algériens, turcs, comme autrefois polonais, italiens, portugais, mais plus radicaux, et portés  par des schémas culturels incompatibles. La perspective n’est plus le fameux « vivre ensemble », mais plutôt vivre séparés : chacun selon ses coutumes, ses langues, ses habits, sa cuisine, son quartier, son droit coutumier etc.


Bref : le séparatisme progresse à pas de géant. Le modèle anglo-saxon en faisait autrefois un éloge très idéologique, accusant la laïcité française de ne rien comprendre au mélange des peuples. Il semblerait que les Britanniques en reviennent, comme les Suédois, les Danois, les Norvégiens, tous pays où la montée des partis nationalistes inquiète mais révèle en creux la faillite du multiculturalisme.


Dans tous ces pays, pourquoi les chrétiens ne font-ils pas valoir davantage leur vision paulinienne de la société ? Pour Paul, prêcher le Christ c’est refuser tout séparatisme, qu’il soit juif ou païen. Abolir la circoncision, manger des viandes consacrées aux idoles, s’affranchir du shabbat, s’asseoir à la même table que les païens, laisser libre et ne rien imposer sinon le respect de l’autre : les premiers chrétiens ont appris à cohabiter – non sans tensions – entre hébreux, grecs, romains, esclaves et hommes libres, hommes et femmes…

Retrouvons cette capacité d’innovation sociale pour aujourd’hui ! Inventons des manières d’être où chacun peut exprimer le génie propre de sa culture d’origine tout en se mélangeant réellement aux autres.

Refusons le séparatisme qui fait mentir la croix du Christ, lui qui est « mort afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés » (Jn 11,52). Nous voulons la communion et non la séparation, la communion et non la créolisation (qui n’est jamais que la domination du nombre), la communion et non le mode de vie unique.

Comment puis-je contribuer à faire reculer le séparatisme autour de moi ?

 

Notre mur intérieur

clivage du moiDétruire le mur qui sépare juifs et nations, chrétiens et musulmans, israéliens et palestiniens, hindous et bangladais etc. : la division à l’extérieur ne doit pas nous faire perdre de vue la division à l’intérieur. Car le mur de la division passe au-dedans de nous. Ce que les psychologues appellent le clivage du moi est un défi commun à tous.
Qui ne s’affronte pas en effet à ce clivage intime où, comme le dit Paul encore, « je fais le mal que je ne voudrais pas et je ne fais pas le bien que je voudrais » (Rm 7,19) ? Au-dedans de notre esprit, de notre conscience, intelligence et volonté, s’affrontent des pulsions antagonistes, des projets contradictoires. Il y a en chacun des forces opposées le déchirant intérieurement. Surmonter ce clivage intime pour devenir davantage Un est la voie spirituelle ouverte par le Christ et en lui. Lui-même s’est battu à Gethsémani pour ne faire qu’un avec la volonté de son Père. Lui-même a dû accepter de surmonter sa répulsion juive envers la femme cananéenne, les lépreux embarrassants, la femme hémorroïsse, les impurs et les exclus de l’Israël d’alors. Et le possédé de Gérasa avoue lui-même être clivé au point d’utiliser le pluriel en parlant de lui, symptôme diabolique d’une personnalité profondément désunie : « que nous veux-tu Jésus de Nazareth ? Je sais fort bien qui tu es… » (Lc 4,34).

N’oublions pas que diabolos (diable) signifie diviseur en grec, exactement à l’opposé du synbolon (symbole) = rassembler, réunir, mettre ensemble.

Le clivage est diabolique ; l’unification est intérieure et divine.


Unifier sa conscience intérieure, unifier sa personne et ses actes, unifier son intelligence, sa volonté et ses sentiments : la vocation chrétienne est d’abord de vivre la communion trinitaire offerte en Christ, en devenant toujours plus cohérent avec soi-même, à la manière de Dieu.

Les incohérents finissent dans la folie. Incohérente, la lumière se dissipe, se disperse ; cohérente, elle a la puissance du faisceau laser capable de toucher les étoiles et sa précision pour toucher l’infiniment petit.

Dans quel domaine puis-je travailler à éliminer mes clivages intérieurs ?

 

LECTURES DE LA MESSE

PREMIÈRE LECTURE
« Je ramènerai le reste de mes brebis, je susciterai pour elles des pasteurs » (Jr 23, 1-6)

Lecture du livre du prophète Jérémie
Quel malheur pour vous, pasteurs ! Vous laissez périr et vous dispersez les brebis de mon pâturage – oracle du Seigneur ! C’est pourquoi, ainsi parle le Seigneur, le Dieu d’Israël, contre les pasteurs qui conduisent mon peuple : Vous avez dispersé mes brebis, vous les avez chassées, et vous ne vous êtes pas occupés d’elles. Eh bien ! Je vais m’occuper de vous, à cause de la malice de vos actes – oracle du Seigneur. Puis, je rassemblerai moi-même le reste de mes brebis de tous les pays où je les ai chassées. Je les ramènerai dans leur enclos, elles seront fécondes et se multiplieront. Je susciterai pour elles des pasteurs qui les conduiront ; elles ne seront plus apeurées ni effrayées, et aucune ne sera perdue – oracle du Seigneur.
Voici venir des jours – oracle du Seigneur, où je susciterai pour David un Germe juste : il régnera en vrai roi, il agira avec intelligence, il exercera dans le pays le droit et la justice. En ces jours-là, Juda sera sauvé, et Israël habitera en sécurité. Voici le nom qu’on lui donnera : « Le-Seigneur-est-notre-justice. »
 
PSAUME
(Ps 22 (23), 1-2ab, 2c-3, 4, 5, 6)
R/ Le Seigneur est mon berger : rien ne saurait me manquer. (cf. Ps 22, 1)

Le Seigneur est mon berger :
je ne manque de rien.
Sur des prés d’herbe fraîche,
il me fait reposer.


Il me mène vers les eaux tranquilles
et me fait revivre ;
il me conduit par le juste chemin
pour l’honneur de son nom.


Si je traverse les ravins de la mort,
je ne crains aucun mal,
car tu es avec moi :
ton bâton me guide et me rassure.


Tu prépares la table pour moi
devant mes ennemis ;
tu répands le parfum sur ma tête,
ma coupe est débordante.


Grâce et bonheur m’accompagnent
tous les jours de ma vie ;
j’habiterai la maison du Seigneur
pour la durée de mes jours.

 
DEUXIÈME LECTURE
« Le Christ est notre paix : des deux, le Juif et le païen, il a fait une seule réalité » (Ep 2, 13-18)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Éphésiens
Frères, maintenant, dans le Christ Jésus, vous qui autrefois étiez loin, vous êtes devenus proches par le sang du Christ. C’est lui, le Christ, qui est notre paix : des deux, le Juif et le païen, il a fait une seule réalité ; par sa chair crucifiée, il a détruit ce qui les séparait, le mur de la haine ; il a supprimé les prescriptions juridiques de la loi de Moïse. Ainsi, à partir des deux, le Juif et le païen, il a voulu créer en lui un seul Homme nouveau en faisant la paix, et réconcilier avec Dieu les uns et les autres en un seul corps par le moyen de la croix ; en sa personne, il a tué la haine. Il est venu annoncer la bonne nouvelle de la paix, la paix pour vous qui étiez loin, la paix pour ceux qui étaient proches. Par lui, en effet, les uns et les autres, nous avons, dans un seul Esprit, accès auprès du Père.
 
ÉVANGILE
« Ils étaient comme des brebis sans berger » (Mc 6, 30-34)
Alléluia. Alléluia. Mes brebis écoutent ma voix, dit le Seigneur ; moi, je les connais, et elles me suivent. Alléluia. (Jn 10, 27)

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc
En ce temps-là, après leur première mission, les Apôtres se réunirent auprès de Jésus, et lui annoncèrent tout ce qu’ils avaient fait et enseigné. Il leur dit : « Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu. » De fait, ceux qui arrivaient et ceux qui partaient étaient nombreux, et l’on n’avait même pas le temps de manger. Alors, ils partirent en barque pour un endroit désert, à l’écart. Les gens les virent s’éloigner, et beaucoup comprirent leur intention. Alors, à pied, de toutes les villes, ils coururent là-bas et arrivèrent avant eux. En débarquant, Jésus vit une grande foule. Il fut saisi de compassion envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les enseigner longuement.
.Patrick Braud

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30 juin 2024

À côté de leurs pompes !

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

À côté de leurs pompes !

 

Homélie pour le 14° Dimanche du Temps ordinaire / Année B 

07/07/24

 

Cf. également :

Je t’envoie vers les nations rebelles
Nul n’est prophète en son pays
Quelle est votre écharde dans la chair ?
Le Capharnaüm de la mémoire : droit à l’oubli, devoir d’oubli
La grâce étonne ; c’est détonant !
Un nuage d’inconnaissance
La parresia, ou l’audace de la foi
Secouez la poussière de vos pieds
Avez-vous la nuque raide ?


De l’art de contraposer

« Nul n’est prophète en son pays » : la célèbre maxime citée par Jésus ce dimanche (Mc 6,1-6) nous est familière. Peut-être trop. Alors, pour la voir sous un nouveau jour, attachons-nous à la proposition équivalente obtenue par contraposition.

En logique, on montre en effet que si « A implique B », alors « non B implique non A ». Cette seconde  proposition s’appelle la contraposée de la première. Par exemple, la contraposée de : « tout homme est mortel » est : « si quelqu’un est immortel, alors ce n’est pas un homme ».

Le formalisme mathématique de la contraposition s’écrit :

Contraposée

Notre proverbe évangélique peut ainsi subir cette transformation : la contraposée de Mc 6,1 doit être vraie ! « Nul n’est prophète en son pays » implique que « si quelqu’un est prophète, c’est un étranger ».

Prophète pas Patrie

Nul n'est prophète en son paysVue sous cet angle, la contraposée appliquée à Jésus nous donne :

« Jésus est prophète, donc il passe pour étranger aux yeux de ses compatriotes de Nazareth ».

Comme s’il fallait que le Christ reste un étranger pour que notre foi se réveille !

À Nazareth, son village natal, Jésus n’est pas reconnu comme prophète. Mais à Capharnaüm, la ville cosmopolite d’à côté, où il élira domicile à cause peut-être de ce rejet par Nazareth, là il sera reconnu et on aura foi en lui ! Être un familier de Jésus (de sa famille, son village, sa terre, son Église) est donc un handicap, car le manque d’étrangeté de sa parole et de sa personne nous empêchera de le reconnaître tel qu’il est…

On devine que l’avertissement est sévère pour les frères et sœurs de Jésus (et même sa mère), pour ses voisins d’enfance, comme il est sévère pour les vieux chrétiens baptisés depuis longtemps qui ont l’impression de connaître Jésus par cœur !

À nous de l’entendre…


Vous avez dit bizarre… comme c’est bizarre !

À côté de leurs pompes ! dans Communauté spirituelleSi rien ne nous choque en Jésus, nous passons à côté.

Si rien ne nous dérange chez lui, nous l’assimilerons à ce que nous en avons déjà découvert, c’est-à-dire bien peu.

Si rien ne nous heurte dans sa parole, c’est que nous avons transformé l’Évangile en un petit  système bien-pensant enclos sur nos propres convictions.

La plupart du temps, ce manque d’étonnement vient du fait que nous sélectionnons les seuls passages qui nous plaisent dans sa vie, dans les textes, si bien que nous pratiquons déjà ce que les réseaux sociaux ont érigé en machine de guerre pour capter notre attention : l’enfermement algorithmique. Sur une page Facebook par exemple, on vous suggérera d’autres pages qui vont dans le même sens, et un peu plus loin même. Si vous êtes complotistes, on vous suggérera des pages antivax. Si vous êtes sur un tweet dénonçant le massacre à Gaza, on vous proposera d’autres tweets vantant la « résistance » du Hamas ou dénonçant le « génocide sioniste » etc.

Eh bien, certains lisent la Bible de la même manière, en s’enfermant mutuellement dans des passages et des interprétations qui vont toujours dans leur sens, en sélectionnant certains versets et en fermant les yeux sur d’autres. Ce type de lecture s’enferme dans des opinions préétablies. Le texte devient un pré-texte.

En réalité, exercez-vous non pas à chercher dans la Bible les passages qui vous plaisent, mais au contraire ceux qui vous choquent. N’allez pas y sélectionner ce que vous aimez déjà, ce que vous aimez bien : affrontez-vous à ce qui vous y pose question, ce que vous ne comprenez pas. De même que l’argumentation rationnelle demande de penser contre soi-même, en s’obligeant à examiner sérieusement les objections à notre opinion première (comme Saint Thomas d’Aquin dans sa Somme théologique : sed, a contra…), la Bible demande de la lire contre elle-même.

S’il n’y a rien de bizarre pour moi dans l’Évangile, comment Jésus pourrait-il se manifester à moi comme prophète ?

Si je ne me laisse pas surprendre par sa parole et ses actes, je suis de Nazareth et pas de Capharnaüm.

Si je ne me bats pas avec les passages obscurs, avec les versets qui me déplaisent, comment la Bible pourrait-elle devenir parole de Dieu pour moi ? Elle ne sera qu’un écho de mon système de pensée. Un peu comme le miroir magique de la méchante reine de Blanche Neige : « Miroir, mon gentil miroir, qui est la plus belle du royaume ? »…

Saint Augustin osait affirmer : « Si tu comprends, ce n’est pas Dieu » (Sermon 117).

Denys l’Aréopagite enfonçait le clou : « Et si, en voyant Dieu, on comprend ce que l’on voit, ce n’est pas Dieu qu’on a contemplé, mais bien quelqu’une des choses qui sont de lui, et que nous pouvons connaître. Pour lui, supérieur à tout entendement, à toute existence, il subsiste suréminemment, et il est connu d’une manière transcendante, par cela même qu’il ne subsiste pas, et qu’on ne le connaît pas. Et cette absolue et heureuse ignorance constitue précisément la science de celui qui surpasse tous les objets de la science humaine » (Lettre première. À Caïus, thérapeute).

Les voisins de Jésus de Nazareth croyaient le connaître, c’est pourquoi ils n’ont pas cru en lui. Prenons garde de ne pas tomber dans ce piège de la familiarité trompeuse…


La paroisse d’à côté

À fréquenter cet étrange prophète, nous en deviendrons nous-même étranger pour les autres. À nous laisser conduire ailleurs à cause de la parole surprenante du prophète de Capharnaüm, nous en viendrons nous-même à habiter ailleurs, à quitter Nazareth pour Capharnaüm. Autrement dit, nous serons toujours en léger décalage avec la moyenne sociale. C’est pour cela que la paroisse s’appelle ainsi ! Le mot paroisse vient de l’étymologie : la maison d’à côté, la résidence en pays étranger (παροικια = παρα, à côté +  οικια, maison). La maison (oikia) d’un paroissien (paroikos) ne sera jamais que « voisine »  sans jamais être complètement intégrée dans la cité. Celui qui séjourne dans un peuple (dèmos)  sans en faire partie restera un parepidèmos = à côté du peuple : son séjour, fût-il long, ne lui permettra jamais de se fondre dans la communauté de ses habitants. Il  sera toujours à côté (par-oikios et par-epi-dèmos).

Capharnaüm à côté de Nazareth Les paroissiens ne sont pas donc des citoyens comme les autres. Ils sont à côté, ils ne se fondent pas dans la masse, mais gardent une différence, une altérité qui les rend étrangers, voire étranges, aux yeux des gens normaux. Pierre encourageait sa communauté à tenir bon dans cette différence : « Bien-aimés, puisque vous êtes comme des étrangers (paroikos) résidents ou de passage (parepidēmos), je vous exhorte à vous abstenir des convoitises nées de la chair, qui combattent contre l’âme. » (1P 2,11). Nous appartenons à notre milieu social et professionnel, et en même temps nous sommes à côté. Notre patrie de cœur est ailleurs (« Mon royaume n’est pas de ce monde… »). Nous sommes comme en séjour en pays étranger. Et la paroisse est l’assemblée de tous ces disciples qui sont à côté, non pas de leurs pompes, mais des pompes de ce siècle ! Ils ne suivent pas les modes et les idoles, les « pompes » mondaines. Si bien que les autres ont vraiment l’impression que les paroissiens sont à côté de leurs pompes à eux…

C’est ce que Dieu avait annoncé à Abraham : « Va vers toi… Mais sache que tes descendants seront étrangers dans un pays qui ne sera pas le leur » (Gn 15,13). Même lorsqu’Israël se sera installé sur une terre, YHWH n’aura de cesse de lui rappeler qu’il est un étranger de passage : « La terre ne sera pas vendue sans retour, car la terre est à moi et vous n’êtes pour moi que des immigrés, des hôtes » (Lv 25,23).

« Nous ne sommes devant toi que des immigrés, des hôtes comme tous nos pères » (1Ch 29,15).

« Je suis un étranger sur la terre ; ne me cache pas tes volontés » (Ps 118,19).

« Entends ma prière, Seigneur, écoute mon cri ; ne reste pas sourd à mes pleurs. Je ne suis qu’un hôte chez toi, un passant, comme tous mes pères » (Ps 38,13).

Et Paul rappelle aux Hébreux que leur foi les rend citoyens d’une autre patrie que leur terre natale : « C’est dans la foi, sans avoir connu la réalisation des promesses, qu’ils sont tous morts ; mais ils l’avaient vue et saluée de loin, affirmant que, sur la terre, ils étaient des étrangers et des voyageurs. Or, parler ainsi, c’est montrer clairement qu’on est à la recherche d’une patrie » (He 11,13–14).

Maintenir vivante la flamme de l’étrangeté du Christ afin de le reconnaître comme prophète : c’est là un trait fondamental de la paroisse, cette maison d’à côté qui joue le rôle de Capharnaüm pour Nazareth.

Les paroissiens ne se choisissent pas s’ils viennent à l’église de la paroisse géographique, en répondant à l’appel qui les fait sortir de chez eux (en grec, Église se dit ekklesia [ek/kaleo] = l’assemblée des appelés au-dehors). Le critère géographique fait que normalement on ne choisit pas son voisin de banc à l’église paroissiale, qui du coup est le relativement étrange m’empêchant de faire de l’Église un club, un parti, un syndicat ou un lobby, ou de faire du Christ le prétexte pour me conforter dans ce que je crois déjà.

Car l’entre-soi rend sourd aux paroles prophétiques. Une paroisse qui brasse tous les âges, toutes les catégories socioprofessionnelles, les handicaps, les votes et les cultures aura plus de chance d’écouter Jésus comme le prophète de Capharnaüm que celle où tout le monde pense pareil, s’habille dans les mêmes boutiques, et dont les enfants vont dans les mêmes écoles…


Nul n’est prophète en son pays

– Quelle est la part d’étrange que je cultive dans ma foi, afin qu’elle reconnaisse la nouveauté prophétique du Christ aujourd’hui ?

– Quelle est ma part d’étranger en ce monde, me faisant demeurer à côté et non comme tous les autres ?

Car pour être prophète, il nous faut accepter d’être un peu étranger, et donc de passer sans cesse de Nazareth à Capharnaüm…



LECTURES DE LA MESSE

PREMIÈRE LECTURE
« C’est une engeance de rebelles ! Qu’ils sachent qu’il y a un prophète au milieu d’eux ! » (Ez 2, 2-5)

Lecture du livre du prophète Ézékiel
En ces jours-là, l’esprit vint en moi et me fit tenir debout. J’écoutai celui qui me parlait. Il me dit : « Fils d’homme, je t’envoie vers les fils d’Israël, vers une nation rebelle qui s’est révoltée contre moi. Jusqu’à ce jour, eux et leurs pères se sont soulevés contre moi. Les fils ont le visage dur, et le cœur obstiné ; c’est à eux que je t’envoie. Tu leur diras : ‘Ainsi parle le Seigneur Dieu…’ Alors, qu’ils écoutent ou qu’ils n’écoutent pas – c’est une engeance de rebelles ! – ils sauront qu’il y a un prophète au milieu d’eux. »

PSAUME
(Ps 122 (123), 1-2ab, 2cdef, 3-4)
R/ Nos yeux, levés vers le Seigneur, attendent sa pitié. (cf. Ps 122, 2)

Vers toi j’ai les yeux levés,
vers toi qui es au ciel,
comme les yeux de l’esclave
vers la main de son maître.


Comme les yeux de la servante
vers la main de sa maîtresse,
nos yeux, levés vers le Seigneur notre Dieu,
attendent sa pitié.


Pitié pour nous, Seigneur, pitié pour nous :
notre âme est rassasiée de mépris.
C’en est trop, nous sommes rassasiés
du rire des satisfaits, du mépris des orgueilleux !

DEUXIÈME LECTURE
« Je mettrai ma fierté dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ fasse en moi sa demeure » (2 Co 12,7-10)

Lecture de la deuxième lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens
Frères, les révélations que j’ai reçues sont tellement extraordinaires que, pour m’empêcher de me surestimer, j’ai reçu dans ma chair une écharde, un envoyé de Satan qui est là pour me gifler, pour empêcher que je me surestime. Par trois fois, j’ai prié le Seigneur de l’écarter de moi. Mais il m’a déclaré : « Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse. » C’est donc très volontiers que je mettrai plutôt ma fierté dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ fasse en moi sa demeure. C’est pourquoi j’accepte de grand cœur pour le Christ les faiblesses, les insultes, les contraintes, les persécutions et les situations angoissantes. Car, lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort.

ÉVANGILE
« Un prophète n’est méprisé que dans son pays » (Mc 6, 1-6)
Alléluia. Alléluia. L’Esprit du Seigneur est sur moi, il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres. Alléluia. (Lc 4,18ac)

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc
En ce temps-là, Jésus se rendit dans son lieu d’origine, et ses disciples le suivirent. Le jour du sabbat, il se mit à enseigner dans la synagogue. De nombreux auditeurs, frappés d’étonnement, disaient : « D’où cela lui vient-il ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée, et ces grands miracles qui se réalisent par ses mains ? N’est-il pas le charpentier, le fils de Marie, et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ? » Et ils étaient profondément choqués à son sujet. Jésus leur disait : « Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté et sa maison. » Et là il ne pouvait accomplir aucun miracle ; il guérit seulement quelques malades en leur imposant les mains. Et il s’étonna de leur manque de foi. Alors, Jésus parcourait les villages d’alentour en enseignant.
Patrick Braud

 

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