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28 octobre 2014

Les cimetières de la Toussaint

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Les cimetières de la Toussaint

Homélie pour la fête de Toussaint
01/11/2014

Les cimetières de la Toussaint dans Communauté spirituelle 20244386-0136-11e1-afe1-443c06db2b7bLa prochaine fois que vous avez un après-midi à perdre à Paris, allez rejoindre l’étonnante visite guidée du cimetière du Père Lachaise que l’Officiel du Spectacle vous renseignera sans coup férir. Pendant trois à quatre heures, vous naviguerez sur les différents sentiments engendrés par l’omniprésence de la mort à travers les âges. Vous verrez, c’est fascinant, plein d’humour et d’amour, de nostalgie et de douceur, d’humanité la plus commune. De la tombe d’Héloïse et Abélard, fidèles même dans la séparation, à celle de Jim Morrison, la plus fréquentée, rendez-vous des routards en pèlerinage, jusqu’au granit industriel et insipide, jusqu’aux portes des placards à cendres du columbarium en fin de visite…  le génie funéraire s’est renouvelé sans cesse, gravant l’inconscient collectif de chaque époque au sujet de la mort dans la pierre, les monuments artistiquement sculptés à la gloire de.

Lorsque vous voulez connaître un village, un peuple, visitez ses cimetières. Ils vous en diront plus long sur les vivants que les journaux locaux. Ils vous raconteront les drames, les espoirs, les valeurs de ceux qui continuent de marquer cette terre.

Si vous y allez un jour de Toussaint, vous pourrez en être éblouis. Autrefois, il y avait une seule sorte de chrysanthème, assez lugubre en fait. Sous notre soleil de début novembre éclatent désormais une multitude de nuances, chaudes, joyeuses, extrêmement variées. Les chrysanthèmes ont revêtu le marron, l’or, le jaune, le bleu même, les gerbes sont de vraies compositions florales, les plantes déposées là pour durer ne se ressemblent pas. Il règne sur ses allées bien quadrillées un air de réjouissance familiale bien loin de la corvée obligatoire de la visite aux aïeuls oubliés.

Certains tordent le nez devant cette piété populaire en accusant la foule de la Toussaint de confondre le 1° et le 2 novembre, la fête de tous les saints et le jour de prière pour les défunts. Mais cette confusion est somme toute légitime : que servirait de fêter les saints si nos cousins, nos parents, nos oncles et tantes ne pouvaient pas en faire partie ? Nos familles, nos amis déjà partis vers l’autre rive ne pourraient-ils pas faire partie de ces 144 000 [1]symboliquement évoqués par l’Apocalypse ?

 

Le rapport à la mort dans l’histoire

 

Les rituels funéraires, berceaux de l’humanité

Les recherches en anthropologie convergent vers un constat majeur pour nous aujourd’hui : l’humanité a émergé de l’animalité en même temps que les rites funéraires et sans doute grâce à eux, en même temps que l’expression artistique (cf. la grotte de Chauvet) et sans doute grâce à elle.

C’est donc qu’enterrer nos morts, codifier leurs sépultures, les entourer de gestes, de paroles, d’objets symboliques est une des conditions pour ne pas vivre de manière animale.

 

La mort redoutée

Autrefois, il y a plus de 2000 ans, la loi romaine interdisait d’enterrer les morts dans la cité, par peur du mélange entre les deux populations, afin d’éviter que les défunts reviennent hanter les vivants et troubler leur vie commune.

 

La mort apprivoisée

Les martyrs chrétiens ont changé la donne : les disciples du Christ se rassemblaient sur le lieu où les restes des martyrs avaient été recueillis, et ils y célébraient l’eucharistie clandestinement.

Puis, avec la paix de Constantin (313) on y bâtit des lieux de pèlerinage, des villes, si bien que les tombeaux des saints se sont retrouvés au milieu des vivants, au cœur de l’eucharistie villageoise. Il en reste quelques traces autour des églises romanes, lorsque vous devez presque marcher sur les pierres tombales pour vous diriger vers la porte de l’église. On vivait avec une forte conscience, une forte présence de la mort et des morts, au quotidien, sans peur. C’était une familiarité simple et pleine de sens, où la confiance dans l’au-delà permettait de regarder la mort en face, de l’apprivoiser, de vivre avec elle en amitié. On s’y préparait, on l’attendait, elle nous conduisait ailleurs.

 

La mort dramatisée

chartreuse+037 chrysantème dans Communauté spirituellePuis viennent les périodes des grandes et cruelles guerres, interminables. Les hécatombes des grandes pestes, famines et autre épidémies où un tiers de l’Occident périt dans des conditions atroces. Alors apparurent la danse macabre, la figure de la faucheuse, les requiems, les mises en scène tragiques.

 

La mort romantique

Au XVIII° siècle, le romantisme transforme l’antique sérénité en torrents de larmes, souvent hystérique. Les pleureuses lors des enterrements rivalisent de convulsions, et l’amour envers le défunt se mesure à la démesure du chagrin manifesté.

 

La mort interdite

Au XIX° siècle, l’hôpital transforme le rapport à la mort. On ne meurt plus chez soi, entouré de son village de ses proches, mais dans une chambre anonyme où des hommes en blanc combattent pour reculer cet instant fatal. La mort est depuis lors un échec, dont il vaut mieux ne pas parler pour ne pas démoraliser le malade. On ne socialise plus la mort : plus de crêpes noirs portés en signe de deuil, ni de catafalques aux  linteaux des églises et des maisons, plus de processions publiques pour marcher de l’église au cimetière. Il faut faire vite, discret, sans pleurer (pour se montrer fort) et sans prendre trop de jours de congé !

 

La mort trop lente

L’allongement extraordinaire de la durée de la vie pose désormais la question du grand âge, quatrième et cinquième âge, la grande dépendance, de la terrible dépersonnalisation des Alzheimer comme on les appelle. Beaucoup sont déjà comme morts avant que de mourir, au sens où ils ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes. Même leurs proches ont déjà fait leur deuil avant la séparation ultime, car ce n’est plus la personne aimée et connue qu’ils visitent dans ces services spécialisés où le code d’entrée/sortie trace la frontière entre deux mondes.

 

La mort envisagée

226607315x cimetièreAvec ces longues maladies qui surviennent, et les traitements antidouleur qui heureusement s’améliorent, on a développé les soins palliatifs, et cette belle idée qu’accompagner les derniers mois, les derniers jours peut devenir une expérience intensément humaine, dense de rencontres, d’échanges, de confidences, de gestes et paroles si fortes… En envisageant = en donnant ainsi un visage de proximité et de compagnonnage à la mort qui approche (vs la mort impersonnelle en hôpital), on lui redonne un rôle structurant au lieu de la nier. On la regarde au lieu de la cacher [2].

 

La mort désirée

Les questions éthiques autour de l’euthanasie et du suicide assisté vont devenir de plus en plus fréquentes, inévitables en Occident avec les progrès de la médecine. Certains voudraient exercer un droit à mourir dans la dignité. D’autres choisiront le suicide, par lassitude, par manque d’espérance ou d’accompagnement, par peur de la déchéance…

Toutes ces strates historiques du rapport à la mort coexistent en nous et dans la société. Nous sommes un agrégat d’humanité de l’empire romain, du Moyen Âge, des Lumières, du romantisme ou de l’athéisme contemporain… Ce rapide survol historique, incomplet [3], veut surtout mettre en lumière l’importance de cette fête de la Toussaint qui réunit tant de familles aujourd’hui.

 

Notre rapport à la mort reflète nos valeurs et les façonne.
Notre façon d’honorer nos défunts dit qui nous sommes.
Notre art funéraire fait partie du génie d’un peuple.
Nos chrysanthèmes, nos bouquets, nos gerbes florales, nos ex-voto déposés dans le cimetière nous aident à devenir plus humains.

Alors, n’ayons pas honte de superposer le 1° et le 2 novembre : après tout, c’est la même espérance !

chrysanthemes05 Lachaise 

Qu’au moins cette fête de la Toussaint soit l’occasion de nous arrêter, de faire une pause, pour nous interroger : et moi, où en suis-je de mon rapport à la mort ?

 


[1]. 12×12 = la plénitude des 12 tribus d’Israël x 1000 = élargie à l’humanité entière.

[2]. Cf. Marie de Hennezel, La mort intime.  Ceux qui vont mourir nous apprennent à vivre, coll. Essai (poche), 2006.

[3]. Pour une étude plus détaillée, cf. l’ouvrage désormais classique de Philippe Ariès : Essais sur l’histoire de la mort en Occident, Du Moyen Age à nos jours, coll. Essai (poche),1977.

 

 

1ère lecture : La foule immense des rachetés (Ap 7, 2-4.9-14)

Lecture de l’Apocalypse de saint Jean

Moi, Jean, j’ai vu un ange qui montait du côté où le soleil se lève, avec le sceau qui imprime la marque du Dieu vivant ; d’une voix forte, il cria aux quatre anges qui avaient reçu le pouvoir de dévaster la terre et la mer : « Ne dévastez pas la terre, ni la mer, ni les arbres, avant que nous ayons marqué du sceau le front des serviteurs de notre Dieu. » Et j’entendis le nombre de ceux qui étaient marqués du sceau : ils étaient cent quarante-quatre mille, de toutes les tribus des fils d’Israël. 

Après cela, j’ai vu une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, races, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau, en vêtements blancs, avec des palmes à la main. Et ils proclamaient d’une voix forte : « Le salut est donné par notre Dieu, lui qui siège sur le Trône, et par l’Agneau ! »
Tous les anges qui se tenaient en cercle autour du Trône, autour des Anciens et des quatre Vivants, se prosternèrent devant le Trône, la face contre terre, pour adorer Dieu. Et ils disaient : « Amen ! Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! »
L’un des Anciens prit alors la parole et me dit : « Tous ces gens vêtus de blanc, qui sont-ils, et d’où viennent-ils ? »
Je lui répondis : « C’est toi qui le sais, mon seigneur. » Il reprit : « Ils viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs vêtements, ils les ont purifiés dans le sang de l’Agneau. »

Psaume : 23, 1-2, 3-4ab, 5-6

R/ Voici le peuple immense de ceux qui t’ont cherché.

Au Seigneur, le monde et sa richesse,
la terre et tous ses habitants !
C’est lui qui l’a fondée sur les mers
et la garde inébranlable sur les flots. 

Qui peut gravir la montagne du Seigneur
et se tenir dans le lieu saint ? 
L’homme au cœur pur, aux mains innocentes, 
qui ne livre pas son âme aux idoles.Il obtient, du Seigneur, la bénédiction, 
et de Dieu son Sauveur, la justice. 
Voici le peuple de ceux qui le cherchent,
qui recherchent la face de Dieu !

2ème lecture : Nous sommes enfants de Dieu et nous lui serons semblables (1 Jn 3, 1-3)

Lecture de la première lettre de saint Jean

Mes bien-aimés, voyez comme il est grand, l’amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu — et nous le sommes. Voilà pourquoi le monde ne peut pas nous connaître : puisqu’il n’a pas découvert Dieu.

Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. Nous le savons : lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu’il est. Et tout homme qui fonde sur lui une telle espérance se rend pur comme lui-même est pur.

Evangile : Les Béatitudes (Mt 5, 1-12a)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Venez au Seigneur, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau : il vous donnera le repos. Alléluia. (cf. Mt 11, 28)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Quand Jésus vit la foule, il gravit la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent.Alors, ouvrant la bouche, il se mit à les instruire. Il disait :

« Heureux les pauvres de cœur : le Royaume des cieux est à eux !
Heureux les doux : ils obtiendront la terre promise !
Heureux ceux qui pleurent : ils seront consolés !
Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice : ils seront rassasiés !
Heureux les miséricordieux : ils obtiendront miséricorde !
Heureux les cœurs purs : ils verront Dieu !
Heureux les artisans de paix : ils seront appelés fils de Dieu !
Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice : le Royaume des cieux est à eux !
Heureux serez-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.
Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux ! »
Patrick BRAUD
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9 octobre 2014

Tenue de soirée exigée…

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Tenue de soirée exigée…

Homélie du 28° Dimanche du temps ordinaire Année A
12/10/2014

 

Tenue de soirée exigée… dans Communauté spirituelle menu

         Reines de l’océan en Belle-Vue
         Turbot au chablis
         Veau braisé soubise
         Poulardes truffées
         Salade mimosa
         Fromages
         Bavaroise
         Fruits – Café                 

Ça vous met l’eau à la bouche !

 

J’avais retrouvé ce menu d’un repas de noces dans ma famille, d’un mariage célébré en 1945 ! À écouter un tel menu de noces, on se demande pourquoi il y en a qui refuseraient de s’asseoir à la table ! Et pourtant, la parabole de ce Dimanche nous rappelle que ce refus est toujours possible, et que Jésus s’y est exposé, jusqu’à la Croix.

« Le Royaume des Cieux est comparable à un roi qui célébrait les noces de son fils ».

Quand Jésus évoque le Royaume des cieux, il prend l’une des plus vieilles réalités humaines : les noces.

C’est lui le Fils qui célèbre ses épousailles avec l’humanité.

Et chacun de nous est demandé en mariage aujourd’hui par le Fils de Dieu lui-même !

C’est la grandeur et la dignité du mariage, et c’est pour cela que le mariage est pour nous un sacrement. En regardant vivre les gens mariés, on devrait pouvoir deviner combien le Christ désire épouser chacun. D’où la responsabilité particulière des couples mariés à l’église : témoigner des noces que Dieu célèbre pour son fils avec tout être humain, toute l’humanité. Heureux les invités à ce repas de noces où le Christ lui-même dresse la table de l’eucharistie, nouvelle Alliance !

Or certains refusent de venir.

1nouve12 César dans Communauté spirituelle

La violence meurtrière

Et nous sommes parfois de ceux-là qui ne tiennent aucun compte de cette invitation, à cause de fausses bonnes raisons : un champ à cultiver, un commerce à faire tourner – comme dans la parabole -, c’est-à-dire une vie professionnelle qui devient envahissante, une vie trop remplie de choses à faire pour entendre l’invitation. Pire encore, le Christ sait qu’il s’expose à la violence, alors même qu’il est porteur d’une invitation d’amour. L’homme est ainsi fait qu’il peut choisir de répondre par la violence à une invitation d’amour.

Il peut saccager ce qu’il a de plus cher.

Là encore, reprenez l’image-sacrement du couple : la violence peut répondre à l’amour ; c’est un constat, malheureusement.

Dieu, lui, envoie son invitation sans se lasser. Dans un couple, on se lasse vite de la violence de l’autre, et on n’accepte que difficilement d’être la bête grasse égorgée pour lui ou pour elle ! Dieu dénonce cette violence, qui se retourne d’ailleurs contre ceux qui la commettent : ils s’y détruisent, en refusant d’être aimés…

La violence peut répondre à l’amour. La Croix en est le signe.

L’indifférence suicidaire

La violence ou, pire encore, l’indifférence.
« Ils n’en tirent aucun compte et s’en allèrent, l’un à son champ, l’autre à son commerce. »
Regardez les dégâts que peut provoquer l’indifférence dans un couple : lorsque s’installe silencieusement la juxtaposition et non la communion, lorsque chacun s’investit dans son champ, son commerce – comme dit la parabole – sans tenir compte de l’autre. L’indifférence est peut-être le plus grand péché contre l’Amour. C’est elle qui nous rend imperméable aux appels de nos frères, aux appels de Dieu.

 

Le silence incompréhensible

Un dernier mot enfin sur les pleurs et les grincements de dents qui attendent l’invité qui n’a pas revêtu son vêtement de noces. Cela fait penser aux bristols très officiels à la carte d’invitation précise : « Tenue de soirée exigée ! ».

Que signifie ce vêtement de noces ?

On peut penser à la robe de baptême. Il ne suffit pas d’être invité, encore faut-il se laisser revêtir de cette robe baptismale.

Le plus dur dans l’amour, ce n’est pas aimer, c’est d’accepter d’être aimé, et d’accepter que cet amour nous change. « Dépouillez-vous du vieil homme et revêtez l’homme nouveau » disait St Paul en évoquant lui aussi ce vêtement de noces.

Reprenez l’image-sacrement de l’amour humain : revêtir la robe de l’amour mutuel, c’est laisser l’être aimé me dépouiller de mon égoïsme, faire tomber mes blocages, mes défenses, mes forteresses intérieures…

En cela, le mariage est dans le droit fil du baptême, et la mariée a raison d’être en blanc ! Car se marier est un chemin pour mourir à soi-même et renaître à l’autre, comme le Christ est mort et ressuscité pour nous. Alors, celui qui est dans la salle de noces, dans l’Église, et fait semblant d’être chrétien alors que sa vie n’est pas en accord avec ce qu’il croit, celui-là abîme le témoignage de l’Église. Dieu l’interroge : « Mon ami – car il est toujours son ami à ce stade – comment es-tu entré ici sans avoir le vêtement de noce ? »

Mais le silence répond à l’amour. « L’autre garda le silence ».

 

Après l’indifférence ou la violence, voilà maintenant le silence, la non communication, le non-dit, ce que l’on cache, le refus d’entrer en dialogue.

Demandez aux couples en difficulté combien cette non-communication est la pire des épreuves ! Se taire alors qu’il y a des contradictions à lever, fuir alors que Dieu nous propose la confiance et le dialogue, c’est finalement suicidaire. Cela n’engendre que des pleurs et des grincements de dents.

Heureusement, l’invitation au repas des noces reste la plus forte : Dieu fait le nécessaire pour remplir la salle des noces avec les mauvais et les bons que nous sommes tous. À nous de nous laisser transformer de fond en comble par notre présence ici, pour revêtir « la tenue de soirée » qui va avec.

Que ce banquet de l’eucharistie nous rappelle la grandeur et l’exigence de notre baptême.
Que ce festin des noces renouvelle pour les époux la grâce de leur mariage.
Que cette invitation à nous laisser aimer par le Christ ne rencontre en nous ni indifférence, ni violence, ni silence coupable.

 

 

1ère lecture : Le festin messianique (Is 25, 6-9)

Lecture du livre d’Isaïe

Ce jour-là, le Seigneur, Dieu de l’univers, préparera pour tous les peuples, sur sa montagne, un festin de viandes grasses et de vins capiteux, un festin de viandes succulentes et de vins décantés. Il enlèvera le voile de deuil qui enveloppait tous les peuples et le linceul qui couvrait toutes les nations. Il détruira la mort pour toujours. Le Seigneur essuiera les larmes sur tous les visages, et par toute la terre il effacera l’humiliation de son peuple ; c’est lui qui l’a promis.
Et ce jour-là, on dira : « Voici notre Dieu, en lui nous espérions, et il nous a sauvés ; c’est lui le Seigneur, en lui nous espérions ; exultons, réjouissons-nous : il nous a sauvés ! »

Psaume : 22, 1-2ab, 2c-3, 4, 5, 6

 R/ Près de toi, Seigneur, sans fin nous vivrons.

Le Seigneur est mon berger :
je ne manque de rien.
Sur des prés d’herbe fraîche,
il me fait reposer.

Il me mène vers les eaux tranquilles
et me fait revivre ;
il me conduit par le juste chemin
pour l’honneur de son nom.

Si je traverse les ravins de la mort,
je ne crains aucun mal,
car tu es avec moi :
ton bâton me guide et me rassure.

Tu prépares la table pour moi
devant mes ennemis ;
tu répands le parfum sur ma tête,
ma coupe est débordante.

Grâce et bonheur m’accompagnent
tous les jours de ma vie ;
j’habiterai la maison du Seigneur
pour la durée de mes jours.

2ème lecture : La vraie richesse dans le Christ (Ph 4, 12-14.19-20)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens

Frères, je sais vivre de peu, je sais aussi avoir tout ce qu’il me faut. Être rassasié et avoir faim, avoir tout ce qu’il me faut et manquer de tout, j’ai appris cela de toutes les façons. Je peux tout supporter avec celui qui me donne la force. Cependant, vous avez bien fait de m’aider tous ensemble quand j’étais dans la gêne. Et mon Dieu subviendra magnifiquement à tous vos besoins selon sa richesse, dans le Christ Jésus.
Gloire à Dieu notre Père pour les siècles des siècles. Amen.

Evangile : Parabole des invités au festin (brève : 1-10) (Mt 22, 1-14)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Voici la Pâque du Seigneur au milieu de son peuple. Heureux les invités au festin du Royaume ! Alléluia.

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Jésus disait en paraboles : « Le Royaume des cieux est comparable à un roi qui célébrait les noces de son fils. Il envoya ses serviteurs pour appeler à la noce les invités, mais ceux-ci ne voulaient pas venir. Il envoya encore d’autres serviteurs dire aux invités : ‘Voilà : mon repas est prêt, mes bœufs et mes bêtes grasses sont égorgés ; tout est prêt : venez au repas de noce.’ Mais ils n’en tinrent aucun compte et s’en allèrent, l’un à son champ, l’autre à son commerce ; les autres empoignèrent les serviteurs, les maltraitèrent et les tuèrent. Le roi se mit en colère, il envoya ses troupes, fit périr les meurtriers et brûla leur ville. Alors il dit à ses serviteurs : ‘Le repas de noce est prêt, mais les invités n’en étaient pas dignes. Allez donc aux croisées des chemins : tous ceux que vous rencontrerez, invitez-les au repas de noce.’ Les serviteurs allèrent sur les chemins, rassemblèrent tous ceux qu’ils rencontrèrent, les mauvais comme les bons, et la salle de noce fut remplie de convives. Le roi entra pour voir les convives. Il vit un homme qui ne portait pas le vêtement de noce, et lui dit : ‘Mon ami, comment es-tu entré ici, sans avoir le vêtement de noce ?’ L’autre garda le silence. Alors le roi dit aux serviteurs : ‘Jetez-le, pieds et poings liés, dehors dans les ténèbres ; là il y aura des pleurs et des grincements de dents.’
Certes, la multitude des hommes est appelée, mais les élus sont peu nombreux. »
Patrick BRAUD

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22 août 2014

Yardén : le descendeur

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Yardén : le descendeur

 Homélie du 21° Dimanche du temps ordinaire / Année A
24/08/2014

« Jésus était venu dans la région de Césarée de Philippe »

L’endroit où Jésus pose la fameuse question : « pour vous qui suis-je ? » n’est pas choisi au hasard (Mt 16, 13-20). 

Ceux qui ont eu la chance d’aller en Terre Sainte savent en effet que la géographie d’Israël et de Palestine est une géographie symbolique, où chaque lieu parle de l’action de Dieu dans l’histoire humaine.

La géographie de Césarée de Philippe

Césarée de Philippe est en effet une ville qui symbolise la proximité d’avec le Père.

Le Jourdain est le fils de l’Hermon (« l’humble montagne de l’Hermon » Ps 42,7), montagne aux confins du Liban, montagne aux neiges éternelles qui culmine à 2814 mètres. Sa source accrochée aux flancs de l’Hermon est à 520 mètres d’altitude, sur l’emplacement de la ville de Césarée de Philippe, qui constituait déjà un grand centre thermal au temps de Jésus.

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Cette ville est située dans une fraîche vallée, près de l’une des principales sources du Jourdain, au pied du mont Hermon, du côté sud-ouest, à 528 mètres au-dessus du lac de Tibériade. Elle contrôle la route entre Tyr et Damas, et garde la plaine fertile du lac Huleh (le Semechonitis des Romains), irriguée par les sources du Jourdain. Le site est identifié à Baniyas (46 km à l’est de Tyr) ; le petit village qui en restait fut détruit au lendemain de l’occupation du Golan par Israël (1967). D’abord appelée Panion par les Grecs en raison du sanctuaire qu’ils y dédièrent au dieu Pan et aux Nymphe, elle fut ensuite appelée Panéas après qu’Antiochus III, vers 200 avant Jésus-Christ, y défit les Égyptiens (paneas en grec). En 20 avant Jésus-Christ, Auguste donna la région de Panéas à Hérode le Grand qui lui éleva « un temple magnifique en marbre blanc » (Flavius Josèphe), près de la grotte du dieu Pan. Après la mort d’Hérode le Grand, la région fut incluse dans la tétrarchie de Philippe qui réorganisa Panéas et qu’il nomma Césarée de Philippe, en son honneur et en celui de Tibère César. La ville devint alors un centre important de la civilisation gréco-romaine : elle contrôlait la région à laquelle elle donna son nom. Césarée de Philippe fut incluse dans le territoire d’Hérode Agrippa II (53) qui l’appela Néronias, en l’honneur de Néron. Durant la première révolte juive (66-70), elle servit de lieu de repos aux armées romaines. Césarée de Philippe eut assez tôt un évêché qui dépendant de la province de Tyr (Phénicie première). Après qu’ils eurent pris la ville (1129), les croisés y installèrent un évêque latin.

Le Jourdain, figure christique

Arrêtons-nous sur le Jourdain, pour y découvrir le sens de cet épisode sur l’identité de Jésus.

Ce n’est certes pas un fleuve comme les autres !

Depuis les hauteurs de l’Hermon, le Jourdain suit une faille qui le fait descendre de plus en plus bas, vers le lac de Tibériade (210 m au-dessous du niveau de la mer), jusqu’à la Mer Morte, le point le plus bas du globe : -392 mètres. C’est pourquoi ce fleuve s’appelle le « Jourdain », c’est à dire le « descendeur » (Yardén) en Hébreu. En faisant corps avec le Jourdain par son baptême, Jésus s’identifie à lui : il est lui aussi, par excellence, le « descendeur », celui qui jaillit des hauteurs inaccessibles du Père comme le Jourdain jaillit de l’Hermon ; celui qui va rejoindre l’humanité au plus bas, jusqu’aux enfers mêmes, dans nos Mers les plus mortes. Le Jourdain devient alors la parabole du Christ et de sa kénose d’amour : « le Christ, ayant la condition de Dieu, ne retient pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Il s’est abaissé (kénose) » (Ph 2,6‑11). Tel un plongeur, il vient plonger au plus bas de notre humanité, pour ramener vers le Père ceux que l’on croyait noyés, perdus, envasés…

C’est donc près des sources du Jourdain, à Césarée de Philippe, que Jésus annonce à ses disciples le baptême de sa Passion; c’est là encore, à l’endroit où il jaillit du Père pour descendre jusqu’à la mort, que Jésus demande à ses disciples qui il est, et donne à Pierre la primauté dans l’Église, avec le pouvoir des clés (Mt 16, 13-20).

Notre Église, notre baptême, attestent de la plongée de Dieu en notre humanité, au plus bas, pour faire triompher la vie nouvelle.

Le parallélisme entre le Jourdain et Jésus devient plus saisissant lorsqu’on voit le fleuve d’avion : il effectue de multiples méandres, plus de trois fois son trajet direct à vol d’oiseau. Voilà donc le Christ qui, comme le Jourdain descendant de l’Hermon, prend le temps de rencontrer les hommes partout sur son parcours, quitte à faire des détours, à travers les méandres de nos vies. Ce faisant, il s’y charge des déchets, des souillures, de la pollution produite par les hommes. Le Jourdain passe par le lac où les villes vident leurs poubelles ; il reprend son cours lent, sale, sinueux, à travers des méandres sans fin. « C’était nos souffrances qu’il portait » (Is 53,4).

Et c’est à 6 kilomètres de l’embouchure de la Mer Morte que Jésus est plongé pour recevoir le Baptême, c’est à dire à l’endroit où le fleuve est le plus sale. Jésus « paraît » (c’est une épiphanie) sur les bords du Jourdain (Mc 1,9) pour y être baptisé, plongé.

C’est comme si Jésus voulait faire les poubelles de l’humanité, ou venait récupérer les déchets à la déchetterie publique…
« Il a été fait péché pour nous » nous dira Saint Paul (2 Co 5,21). Il est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus. Il est venu faire corps avec tous les déchets de la société, tous les exclus d’aujourd’hui, pour les faire remonter vers le Père, lui qui jaillit du Père et y retourne.

Regardez où se jette le Jourdain : dans la Mer Morte ! Pourquoi morte ? Parce que, à cause de l’évaporation intensive à -400 m, elle s’enrichit constamment en sel (33% soit 6 fois plus que l’océan !), à tel point que nulle vie animale ou végétale ne peut s’y développer. Ni faune, ni flore, berges arides… Voilà donc le Prince de la Vie, l’Auteur de la Vie, qui se jette dans la Mer Morte ! L’Amour plonge dans une eau de mort, descendant au plus bas, jusqu’à la mort même.

Ce combat pour la vie, contre la mort, est la raison la plus profonde de la descente du Christ d’auprès du Père jusqu’à nous (Noël). La Pâque du Christ, c’est ce moment où le fleuve se jette dans la Mer Morte, et où les eaux douces viennent assainir l’eau salée, et faire gagner la vie.

Eau claire jaillissant du côté droit du Christ en croix (Jn 19,34) (souvenez-vous que pour lui, sa Passion est un baptême), notre baptême devient source des sacrements qui coulent de l’Église, corps du Ressuscité. La Vie en Christ est plus forte que la mort.

Le Jourdain dans l’histoire d’Israël

Qu’il est riche en symboles, ce Jourdain où Jésus accepte d’être aujourd’hui d’être plongé pour nous rejoindre au cœur, au plus intime, là où parfois nous avons nous-mêmes peur d’aller !… car qui n’a pas peur de fouiller dans ses propres poubelles ? …

- Josué avait déjà traversé ce Jourdain après le long exode du désert (vers 1200 avant JC), et le gué du Jourdain près de Jéricho était devenu le symbole de l’entrée dans la Terre Promise (Jos 3-4);
le baptême de Jésus, c’est vraiment le gué pour entrer dans le Royaume.

mosaique-marie1b-texte baptême dans Communauté spirituelle 

- Sur les rives du Jourdain, pour marquer l’ère nouvelle, les Israélites reçurent la circoncision et mangèrent la Pâque (Jos 5, 2-12).
Dans le baptême au Jourdain, le Christ réalise la circoncision du cœur et la Pâque nouvelle.

- Les fugitifs célèbres passeront par les gués du Jourdain pour échapper à leurs ennemis (David, Abner…) : aujourd’hui, Jésus est le passage pour échapper à la mort.

- Sur les rives du Jourdain, Élisée vit le prophète Elie s’envoler vers le ciel comme un char de feu (2R 2,1-18).
Sur les rives du Jourdain, Jean-Baptiste voit en Jésus l’Agneau de Dieu, celui qui remontera vers son Père dans la gloire de la Résurrection.

- Élisée envoya le Syrien, général d’une armée étrangère, se purifier de sa lèpre dans les eaux du Jourdain (2 R 5).
Aujourd’hui Jésus envoie tous les peuples de la terre être purifiés de leur lèpre intérieure  dans les eaux du baptême chrétien.

Oui, le Jourdain est vraiment le symbole de Jésus, le « descendeur », celui qui jaillit du Père pour nous sauver de nos Mers Mortes. À Césarée de Philippe, il prend sa source en Dieu, « l’humble montagne de l’Hermon », pour descendre au plus bas de notre humanité.

Puissions-nous, dans notre baptême, le laisser nous faire remonter – tels des saumons  - jusqu’à la source dont il jaillit sans cesse : le Père, source de tout amour ; le Père, notre avenir.

Puissions-nous également, avec lui, descendre au plus bas de notre humanité, pour aller chercher ce qui en nous était perdu, ceux qui se croient perdus des hommes, perdus de Dieu…

 



 1ère lecture : Je te confierai les clefs de la maison de David (Is 22, 19-23)

Lecture du livre d’Isaïe

Parole du Seigneur adressée à Shebna le gouverneur : « Je vais te chasser de ton poste, t’expulser de ta place.
Et, ce jour-là, j’appellerai mon serviteur, Éliakim, fils de Hilkias.
Je le revêtirai de ta tunique, je le ceindrai de ton écharpe, je lui remettrai tes pouvoirs : il sera un père pour les habitants de Jérusalem et pour la maison de Juda.
Je mettrai sur son épaule la clef de la maison de David : s’il ouvre, personne ne fermera ; s’il ferme, personne n’ouvrira.
Je le rendrai stable comme un piquet qu’on enfonce dans un sol ferme ; il sera comme un trône de gloire pour la maison de son père. »

Psaume : Ps 137, 1-2a, 2bc-3, 6a.8

R/ Toi, le Dieu fidèle, poursuis ton œuvre d’amour.

De tout mon cœur, Seigneur, je te rends grâce :
tu as entendu les paroles de ma bouche.
Je te chante en présence des anges,
vers ton temple sacré, je me prosterne.
Je rends grâce à ton nom pour ton amour et ta vérité, 

car tu élèves, au-dessus de tout, ton nom et ta parole.
Le jour où tu répondis à mon appel, 
tu fis grandir en mon âme la force. 
Si haut que soit le Seigneur, il voit le plus humble,
Le Seigneur fait tout pour moi. 
Seigneur, éternel est ton amour : 
n’arrête pas l’oeuvre de tes mains.

2ème lecture : Profondeur insondable du mystère du
salut
 (Rm 11, 33-36)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Quelle profondeur dans la richesse, la sagesse et la science de Dieu !
Ses décisions sont insondables, ses chemins sont impénétrables !
Qui a connu la pensée du Seigneur ? Qui a été son conseiller ?
Qui lui a donné en premier, et mériterait de recevoir en retour ?
Car tout est de lui, et par lui, et pour lui.
À lui la gloire pour l’éternité ! Amen.

Evangile : « Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux» (Mt 16, 13-20)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Sur la foi de Pierre le Seigneur a bâti son
Église, et les puissances du mal n’auront sur elle aucun pouvoir. Alléluia. (cf. Mt 16, 18)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Jésus était venu dans la région de Césarée-de-Philippe, et il demandait à ses disciples : « Le Fils de l’homme, qui est-il, d’après ce que disent les hommes ? »
Ils répondirent : « Pour les uns, il est Jean Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres encore, Jérémie ou l’un des prophètes. »
Jésus leur dit : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? »
Prenant la parole, Simon-Pierre déclara : « Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant ! »
Prenant la parole à son tour, Jésus lui déclara : « Heureux es-tu, Simon fils de Yonas : ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux.
Et moi, je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle.
Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux. »
Alors, il ordonna aux disciples de ne dire à personne qu’il était le Messie.
Patrick BRAUD

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15 août 2014

Maison de prière pour tous les peuples

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 5 h 00 min

Maison de prière pour tous les peuples

Homélie du 20° Dimanche du temps ordinaire / Année A
17/08/2011

 Quelle place donner aux étrangers dans la vie sociale, culturelle, religieuse d’un pays ?

Faut-il leur accorder le droit de vote ? À quelles élections ? Quelle place peuvent-ils prendre dans les associations, dans les Églises ? Faut-il une politique d’intégration, d’assimilation, ou bien un multiculturalisme intelligent ?

Ces questions sont de toujours à toujours, et nos politiques ne sont ni les premiers ni les derniers à instrumentaliser ou au contraire à fuir ces réels enjeux du vivre ensemble. 

Isaïe transmet une prise de position courageuse, sans doute à contre-courant de l’opinion majoritaire des coreligionnaires juifs de son époque. « Je ferai bon accueil aux étrangers qui se sont attachés au service de mon Nom. Je les rendrai heureux dans ma maison de prière » (Is 56).

Bien sûr la condition exprimée semble restrictive (« s’attacher au service du Nom » = se détacher du polythéisme et devenir un craignant-Dieu). Mais pour l’époque c’est déjà révolutionnaire d’universaliser ainsi le salut et le bonheur offerts dans le Temple de Jérusalem. La conclusion est encore plus stupéfiante : « ma maison s’appellera : maison de prière pour tous les peuples » (Is 56,7). Salomon ira encore plus loin en demandant à Dieu d’exaucer les prières des étrangers qui viendront prier ici (1R 8)…

Que quelques tribus d’ex-nomades, d’ex-esclaves aient prétendu détenir la vérité sur le seul vrai Dieu est déjà un tournant unique de l’histoire humaine. Qu’ils aient élargi leur position religieuse jusqu’à en conclure logiquement que ce dieu – puisqu’il est unique – est aussi le dieu des païens, des étrangers, de l’univers tout entier, est un autre tournant tout aussi important.

 

Maison de prière pour tous les peuples dans Communauté spirituelle 16950555 

Les prophètes ne font pas de Jérusalem une capitale ethnocentrée. Elle est « maison de prière pour tous les peuples ». Le Vatican, en demandant un statut international pour la ville de Jérusalem, serait paradoxalement plus juif que les politiques juifs, dans la ligne prophétique d’Isaïe !

Paul : le souci des locaux

conf-car-paris-2009-saint-paul prière dans Communauté spirituellePaul réfléchit lui aussi à ce mystère d’Israël au milieu des nations (Rm 11). Le scandale de la croix du Christ a opéré un chassé-croisé surprenant. Ceux qui étaient loin (les étrangers) sont désormais devenus proches, et les enfants de famille (les juifs) semblent être devenus des ennemis irréductibles, alors que Jésus est l’un d’entre eux, ainsi que Paul et tous les premiers chrétiens.

L’apôtre des païens n’oubliera jamais la vocation singulière du peuple de l’Alliance. Tout en parcourant la Méditerranée, jusqu’à faire arriver le premier l’Évangile en Europe, Paul n’aura de cesse de rappeler que les fils de famille ne doivent pas être délaissés ni méprisés sous prétexte d’ouverture aux païens.

Si nous avions gardé cette tension féconde, nous n’aurions jamais regardés les juifs comme les nouveaux étrangers du christianisme. Nous aurions empêché les pogroms, les conversions forcées, peut-être même la Shoah…

Jésus : l’étranger est surprise

Jésus est juif jusqu’au bout des ongles. Alors qu’il fait un peu de camping touristique, ou du moins alors qu’il prend du repos le long de la côte libanaise (Tyr et Sidon), il semble camper dans un complexe de supériorité si courant chez les rabbins juifs. « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues d’Israël » (Mt 15,21-28). Autrement dit : les étrangers, ce n’est pas mon problème. Isaïe a dû se retourner dans sa tombe ! Heureusement, la ténacité de cette libanaise qui lui réclame des miettes va ébranler l’autosuffisance juive qui n’a pas épargné même Jésus : « les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leur maître ». Là, Jésus stupéfait est obligé de reconnaître que cette femme a raison : les étrangers sont bien invités au festin, et pas que pour des miettes ! C’est sans doute un déclic dans la conscience de Jésus.

À partir de la rencontre de cette étrangère, il défendra jusqu’au bout l’universalité de sa mission. Il annoncera de salut pour tous. L’écriteau INRI, rédigé en latin, grec et araméen témoignera de son désir de « rassembler dans l’unité des enfants de Dieu dispersés » (Jn 11,52), étrangers et juifs enfin réunis.

Peut-on conclure quelque chose de ce bref parcours sur la place des étrangers dans la vie d’Israël et de l’Église ?

Pas un programme politique détaillé.
Pas un catalogue de mesures répressives ou libérales.

Plutôt un état d’esprit, qui aura des conséquences énormes à la longue.

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Avec Isaïe nous continuons de proclamer que tous les étrangers ont leur place dans la maison de prière qu’est l’Église, pour tous les peuples.

Avec Paul, nous rappelons en même temps il ne faut pas oublier les fils de la maison, ceux qui accueillent, et qui ont besoin de ne pas devenir symétriquement les étrangers des autres.

Avec Jésus, nous voulons nous laisser surprendre dans la rencontre de l’étranger, qui a tant de choses à nous apprendre sur Dieu.

Ce n’est qu’un socle sur lequel bâtir une vraie politique d’accueil des étrangers. Il faudrait d’ailleurs relire tous les textes bibliques accordant aux étrangers un statut d’égalité avec les juifs dans le Royaume d’Israël (ex: « la loi sera la même pour le citoyen et pour l’étranger en résidence parmi vous » Ex 12,49 etc.)

Mais ce socle pourrait déjà changer bien des choses dans nos têtes, dans nos coeurs, dans notre porte-monnaie.

 

 

 

1ère lecture : Dieu accueille les étrangers qui viennent le prier (Is 56, 1.6-7)

Lecture du livre d’Isaïe

Parole du Seigneur :
Observez le droit, pratiquez la justice. Car mon salut est approche, il vient, et ma justice va se révéler.

Les étrangers qui se sont attachés au service du Seigneur pour l’amour de son nom et sont devenus ses serviteurs, tous ceux qui observent le sabbat sans le profaner et s’attachent fermement à mon Alliance, je les conduirai à ma montagne sainte. Je les rendrai heureux dans ma maison de prière, je ferai bon accueil, sur mon autel, à leurs holocaustes et à leurs sacrifices, car ma maison s’appellera « Maison de prière pour tous les peuples ».

 

Psaume : Ps 66, 2b-3, 5abd, 7b-8

R/ Dieu, que les peuples t’acclament !
Qu’ils t’acclament, tous ensemble !

Que ton visage s’illumine pour nous ;
et ton chemin sera connu sur la terre,
ton salut, parmi toutes les nations.

Que les nations chantent leur joie,
car tu gouvernes le monde avec justice ;
sur la terre, tu conduis les nations.

Dieu, notre Dieu, nous bénit.
Que Dieu nous bénisse,
et que la terre tout entière l’adore !

 

2ème lecture : Le rôle des Juifs dans la nouvelle Alliance (Rm 11, 13-15.29-32)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Frères,
je vous le dis à vous, qui étiez païens : dans la mesure même où je suis apôtre des païens, ce serait la gloire de mon ministère de rendre un jour jaloux mes frères de race, et d’en sauver quelques-uns.
Si en effet le monde a été réconcilié avec Dieu quand ils ont été mis à l’écart, qu’arrivera-t-il quand ils seront réintégrés ? Ce sera la vie pour ceux qui étaient morts !

Les dons de Dieu et son appel sont irrévocables.
Jadis, en effet, vous avez désobéi à Dieu, et maintenant, à cause de la désobéissance des fils d’Israël, vous avez obtenu miséricorde ; de même eux aussi, maintenant ils ont désobéi à cause de la miséricorde que vous avez obtenue, mais c’est pour que maintenant, eux aussi, ils obtiennent miséricorde.
Dieu, en effet, a enfermé tous les hommes dans la désobéissance pour faire miséricorde à tous les hommes.

 

Evangile : Jésus exauce la prière d’une étrangère (Mt 15, 21-28)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Le Seigneur redresse les accablés, le Seigneur protège l’étranger. Heureux qui met en lui son espoir !Alléluia. (Ps 145, 5.8-9)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

 

Jésus s’était retiré vers la région de Tyr et de Sidon.
Voici qu’une Cananéenne, venue de ces territoires, criait : « Aie pitié de moi, Seigneur, fils de David ! Ma fille est tourmentée par un démon. »
Mais il ne lui répondit rien. Les disciples s’approchèrent pour lui demander : « Donne-lui satisfaction, car elle nous poursuit de ses cris ! »
Jésus répondit : « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues d’Israël. »
Mais elle vint se prosterner devant lui : « Seigneur, viens à mon secours ! »
Il répondit : « Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants pour le donner aux petits chiens. ? C’est vrai, Seigneur, reprit-elle ; mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres. »
Jésus répondit : « Femme, ta foi est grande, que tout se fasse pour toi comme tu le veux ! » Et, à l’heure même, sa fille fut guérie.
Patrick BRAUD

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