L'homélie du dimanche (prochain)

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21 mars 2016

Le Jeudi saint de Pierre

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Le Jeudi saint de Pierre
Cf. également :

Jeudi Saint / De la bouchée au baiser : la méprise de Judas
Jeudi Saint : la nappe-monde eucharistique
La table du Jeudi saint
Le pain perdu du Jeudi Saint


Homélie pour le Jeudi saint / Année C
24/03/2016

 

La marche de fiducie

Connaissez-vous cet amusant exercice de cohésion, souvent pratiqué dans les séminaires de team building (ou les camps de jeunes !) ? Il s’agit, les yeux bandés, de former une file avec des collègues, chacun tenant l’autre de devant par les épaules. Seul le dernier de la file a les yeux ouverts. Il doit, sans parler, par des gestes sur les épaules de son voisin de devant, guider la file vers un but donné dans la pièce (exemple : aller mettre un ballon dans un panier). C’est bien une question de confiance (fiducie).


Nous sommes ces joueurs aveugles, obligés de compter les uns sur les autres, nous laissant guider par le Christ caché et invisible, hors de nos regards, à travers d’innombrables médiations aussi difficiles à déchiffrer qu’une légère pression sur l’épaule…

 

Dieu par surprise

C’est bien à une marche de fiducie que Jésus invite ses amis pendant cette semaine sainte, à commencer par le geste étrange du lavement des pieds ce Jeudi soir. Pierre a du mal à ce jeu-là : il nous ressemble, ou l’inverse !

Nous avons du mal à comprendre comment Dieu agit à notre égard.

Nous avons des préjugés, des conceptions préétablies de ce qu’il devrait être ou faire. Et voilà qu’il nous déçoit parfois, qu’il nous surprend souvent, en agissant à contre-courant, en nous prenant à contre-pied.

C’est ce qui arrive à Pierre le soir de ce dernier repas. Sa conception de la puissance de Dieu ne cadre pas avec l’attitude du domestique lavant les pieds des invités au repas. Comme nous, il a un geste de recul en voyant le Christ s’abaisser, aux pieds de ses disciples, proche de leur saleté, de leur transpiration, de la poussière accumulée sur les routes.

« C’est toi Seigneur qui me laves les pieds ? » La surprise et l’étonnement de Pierre doivent être les nôtres : si nous voulons discerner les signes de l’action de Dieu dans nos vies, commençons par repérer ce qui nous étonne, ce qui nous scandalise, ce qui nous surprend, ce qui ne cadre pas avec nos conceptions. Car Dieu agit souvent par effraction, comme un voleur : à nous  de chercher ailleurs que là où nous avons commencé à le trouver…

 

Plus tard tu comprendras

Afficher l'image d'origineL’avertissement de Jésus vaut également pour nous. Sur le moment, nous comprenons rarement ce qui nous arrive et où cela nous conduit. Que ce soit un événement heureux (une rencontre, une opportunité, une réussite etc.) ou difficile  (une séparation, une porte qui se ferme etc.), il nous faut du temps, comme à Pierre, pour deviner où cela peut nous conduire. Ce n’est qu’après Pâques que Pierre comprendra. Nous, c’est après bien des cheminements, après bien des discussions, bien des silences en solitude également que nous pourrons dire : « je comprends pour quoi cela m’est arrivé… »

Ne pas tout comprendre est notre condition humaine. Cela n’invalide pas notre quête du pourquoi. Mais cela nous aide à laisser ouverte à l’infini la question du pour  quoi. Et du coup à nous laisser conduire sans savoir où nous allons…

 

Pierre le radical

Quand Pierre comprend qu’il ne fera pas changer d’avis Jésus, il radicalise son geste : « pas seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête ! »

Afficher l'image d'origine

Décidément, il n’a guère le sens de la mesure… Confondant le signifié et le signifiant – pourrait-on dire – Pierre croit que c’est la matérialité du bain qui compte et non la disposition intérieure qu’il incarne. Un peu comme des nouveaux convertis croient volontiers que c’est l’accumulation des prières, des jeûnes, des grandes croix sur la poitrine qui leur garantiront l’identité chrétienne. La quantité des actes dits ‘religieux’ est beaucoup moins importante que le désir d’y conformer toute son existence. Nous en ‘rajoutons’ parfois, comme Pierre, sur les pèlerinages, les messes, les chapelets, les retraites en monastère etc. comme si le lavement des pieds devait s’étendre à tout le corps, alors que le bain d’eau du baptême nous a déjà transformé au plus intime.

Méfions-nous donc de tout les radicalismes qui prétendraient imposer des rituels à n’en plus finir sous prétexte de faire comme le Christ.

Pendant les persécutions antichrétiennes des trois premiers siècles, la question était d’importance : que faire des lapsi, ceux qui avait renié leur foi à cause de la peur, la prison, la menace contre leur famille ? Les radicaux voulaient l’exclusion totale, mais d’autres, et les papes avec eux, se sont souvenus de la miséricorde et n’ont pas voulu imposer davantage que le lavement des pieds pratiqué par le Christ, sous la forme de la confession réintégrant dans la communion ecclésiale.

Que le Jeudi saint de Pierre nous révèle notre propre résistance à laisser le Christ  nous servir en toute humilité.

 

 

Messe du soir
1ère lecture : Prescriptions concernant le repas pascal (Ex 12, 1-8.11-14)
Lecture du livre de l’Exode

En ces jours-là, dans le pays d’Égypte, le Seigneur dit à Moïse et à son frère Aaron : « Ce mois-ci sera pour vous le premier des mois, il marquera pour vous le commencement de l’année. Parlez ainsi à toute la communauté d’Israël : le dix de ce mois, que l’on prenne un agneau par famille, un agneau par maison. Si la maisonnée est trop peu nombreuse pour un agneau, elle le prendra avec son voisin le plus proche, selon le nombre des personnes. Vous choisirez l’agneau d’après ce que chacun peut manger. Ce sera une bête sans défaut, un mâle, de l’année. Vous prendrez un agneau ou un chevreau. Vous le garderez jusqu’au quatorzième jour du mois. Dans toute l’assemblée de la communauté d’Israël, on l’immolera au coucher du soleil. On prendra du sang, que l’on mettra sur les deux montants et sur le linteau des maisons où on le mangera. On mangera sa chair cette nuit-là, on la mangera rôtie au feu, avec des pains sans levain et des herbes amères. Vous mangerez ainsi : la ceinture aux reins, les sandales aux pieds, le bâton à la main. Vous mangerez en toute hâte : c’est la Pâque du Seigneur. Je traverserai le pays d’Égypte, cette nuit-là ; je frapperai tout premier-né au pays d’Égypte, depuis les hommes jusqu’au bétail. Contre tous les dieux de l’Égypte j’exercerai mes jugements : Je suis le Seigneur. Le sang sera pour vous un signe, sur les maisons où vous serez. Je verrai le sang, et je passerai : vous ne serez pas atteints par le fléau dont je frapperai le pays d’Égypte.  Ce jour-là sera pour vous un mémorial. Vous en ferez pour le Seigneur une fête de pèlerinage. C’est un décret perpétuel : d’âge en âge vous la fêterez. »

Psaume : 115 (116b), 12-13, 15-16ac, 17-18

R/ La coupe de bénédiction est communion au sang du Christ. (cf. 1 Co 10, 16)

Comment rendrai-je au Seigneur
tout le bien qu’il m’a fait ?
J’élèverai la coupe du salut,
j’invoquerai le nom du Seigneur.

Il en coûte au Seigneur
de voir mourir les siens !
Ne suis-je pas, Seigneur, ton serviteur,
moi, dont tu brisas les chaînes ?

Je t’offrirai le sacrifice d’action de grâce,
j’invoquerai le nom du Seigneur.
Je tiendrai mes promesses au Seigneur,
oui, devant tout son peuple.

2ème lecture : « Chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur » (1 Co 11, 23-26)
Lecture de la première lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens

Frères, moi, Paul, j’ai moi-même reçu ce qui vient du Seigneur, et je vous l’ai transmis : la nuit où il était livré, le Seigneur Jésus prit du pain, puis, ayant rendu grâce, il le rompit, et dit : « Ceci est mon corps, qui est pour vous. Faites cela en mémoire de moi. » Après le repas, il fit de même avec la coupe, en disant : « Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang. Chaque fois que vous en boirez, faites cela en mémoire de moi. »
 Ainsi donc, chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne.

Evangile : « Il les aima jusqu’au bout » (Jn 13, 1-15)
Acclamation : Gloire et louange à toi, Seigneur Jésus !
Je vous donne un commandement nouveau, dit le Seigneur :
« Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. »
Gloire et louange à toi, Seigneur Jésus ! (cf. Jn 13, 34)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

Avant la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout.

 Au cours du repas, alors que le diable a déjà mis dans le cœur de Judas, fils de Simon l’Iscariote, l’intention de le livrer, Jésus, sachant que le Père a tout remis entre ses mains, qu’il est sorti de Dieu et qu’il s’en va vers Dieu, se lève de table, dépose son vêtement, et prend un linge qu’il se noue à la ceinture ; puis il verse de l’eau dans un bassin. Alors il se mit à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge qu’il avait à la ceinture. Il arrive donc à Simon-Pierre, qui lui dit : « C’est toi, Seigneur, qui me laves les pieds ? » Jésus lui répondit : « Ce que je veux faire, tu ne le sais pas maintenant ; plus tard tu comprendras. » Pierre lui dit : « Tu ne me laveras pas les pieds ; non, jamais ! » Jésus lui répondit : « Si je ne te lave pas, tu n’auras pas de part avec moi. » Simon-Pierre lui dit : « Alors, Seigneur, pas seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête ! » Jésus lui dit : « Quand on vient de prendre un bain, on n’a pas besoin de se laver, sinon les pieds : on est pur tout entier. Vous-mêmes, vous êtes purs, mais non pas tous. » Il savait bien qui allait le livrer ; et c’est pourquoi il disait : « Vous n’êtes pas tous purs. »

 Quand il leur eut lavé les pieds, il reprit son vêtement, se remit à table et leur dit : « Comprenez-vous ce que je viens de faire pour vous ? Vous m’appelez “Maître” et “Seigneur”, et vous avez raison, car vraiment je le suis. Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. »
Patrick BRAUD

 

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26 août 2015

Quel type de pratiquant êtes-vous ?

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Quel type de pratiquant êtes-vous ?

Homélie du 22° Dimanche du temps ordinaire / Année B
30/08/2015

Cf. également :  Signes extérieurs de religion

Que veut dire être pratiquant aujourd’hui en France ?


L’approche liturgique

Pratique religieuse

Les sociologues et statisticiens suivent cette question de près depuis longtemps. Dans les années 60, les célèbres enquêtes du chanoine Boulard ont fait prendre conscience de la ‘déchristianisation’ de la France, en relevant méthodiquement le nombre de ‘messalisants’ (ceux qui vont à la messe chaque dimanche), de ‘pascalisants’ (ceux qui ‘font leurs Pâques’ en se confessant et communiant) etc.

On obtient alors des courbes impressionnantes par leur déclin : la pratique religieuse se juge selon cette approche au nombre d’actes liturgiques et sacramentels posés par un pourcentage de citoyens de plus en plus restreint chez nous.

Cette définition de la pratique par la liturgie marque toujours notre inconscient. Dire : je ne suis pas très pratiquant signifie pour beaucoup : je ne vais pas souvent à la messe. À Normale Sup, on a même fini par appeler les étudiants catholiques les talas, parce qu’ils sont les rares qui vont-à-la messe…

Actuellement, selon cette approche liturgique, il n’y aurait ainsi que 5 % à 10% environ de pratiquants plus ou moins réguliers en France (cf. encadré).

 

L’approche éthique

Les lectures du jour semblent pourtant critiquer fortement cette approche finalement très réductrice où la liturgie est le seul marqueur de la pratique religieuse. Saint Jacques est le plus explicite dans notre deuxième lecture : « Devant Dieu notre Père, un comportement religieux pur et sans souillure, c’est de visiter les orphelins et les veuves dans leur détresse, et de se garder sans tache au milieu du monde… » (Jc 1, 17-27)

Pour lui, la véritable pratique religieuse est donc éthique. Rien ne sert d’aller à la messe si nos comportements quotidiens ne sont pas profondément transformés, et différents de ceux des païens.

Jésus dans l’évangile de ce dimanche (Mc 7, 1-23) souligne l’importance de la priorité de l’éthique sur les rites : lavage de coupes, de carafes et de plats sont des pratiques inventées par les hommes, des traditions purement humaines qui servent d’alibi à l’hypocrisie des scribes et des pharisiens. La vraie pureté ne vient pas de la façon de cuisiner (casher ou halal) ou de manger, mais de l’intérieur du cœur de l’homme. La longue liste des comportements contraires à la pratique religieuse selon Jésus (« inconduites, vols, meurtres, adultères, cupidités, méchancetés, fraude, débauche, envie, diffamation, orgueil et démesure »…) démontre que le prophète de Nazareth appelle à une éthique fraternelle comme premier marqueur de l’identité croyante. En cela, il est le digne héritier de tous les prophètes juifs, qui n’ont cessé de spiritualiser les obligations légales pour mettre l’amour de l’autre au cœur de la pratique de la foi.

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Liturgie / Éthique / Foi

Liturgie, éthique : un troisième terme vient également jouer dans la composition de la pratique religieuse. C’est tout simplement la foi. Saint Pierre l’affirme de manière très claire à propos du baptême : « être baptisé, ce n’est pas être purifié de souillures extérieures, mais s’engager envers Dieu avec une conscience droite » (1P 3, 18-21).

Jésus d’ailleurs avait déconcerté ses disciples en affirmant que « faire l’œuvre de Dieu, c’est croire en celui qu’il a envoyé ». Voilà donc que pratiquer a également à voir avec affirmer sa foi. Les Églises protestantes qu’on appelle confessantes ont redécouvert cette dimension de l’identité chrétienne au XVI° siècle en affirmant l’éthique comme une résultante de la foi et non l’inverse.

 

Nous voici alors devant un triangle : liturgie / éthique / foi, qui est celui du baptême lui-même. Souvenez-vous : l’onction d’huile (chrismation) qui fait du baptisé un autre Christ est accompagnée de la parole : « Dieu te marque de l’huile sainte afin que tu demeures éternellement membre de Jésus-Christ, prêtre prophète et roi ».

Prêtre renvoie à la dimension liturgique de la pratique (célébrer).

Prophète renvoie à la dimension de la foi (annoncer la Parole de Dieu).

Roi à la dimension éthique (gouverner le monde).

Être pratiquant, c’est articuler ces trois dimensions : il y a donc plusieurs manières de pratiquer, qui découlent de la hiérarchisation faite par chacun entre la Foi (F), la Liturgie (L), l’Éthique (E).

fle éthique dans Communauté spirituelle

En ne retenant que les positions les plus claires (idéal-typiques, diraient les wébériens), on obtient 6 configurations de la pratique religieuse, selon l’ordre d’importance accordée à chaque composante :

 

· FLE : la foi est première, la liturgie et l’éthique sont secondes, dans cet ordre. Cela correspond assez bien historiquement à la position des Églises évangéliques, très confessantes. L’insistance est mise sur l’annonce (le kérygme) et la relation personnelle à Jésus reconnu comme Seigneur et Sauveur. Le culte et l’assemblée sont plus importants que dans le reste du protestantisme. L’éthique vient ensuite.

· FEL : Restant sauve la priorité de la foi, l’éthique vient juste après. La liturgie est bien là, mais moins importante.

C’est grosso modo la situation de la plupart des Églises réformées : la relation personnelle au Christ est première, et l’engagement social vient largement avant la dimension ecclésiale ou cultuelle.

· EFL : la transformation de la société est plus importante que les questions de dogmes, et la liturgie est minimisée. On peut y reconnaître la position du catholicisme social façon Action Catholique du début du XXe siècle : par notre action militante, ‘nous referons chrétiens nos frères’.

· ELF : l’éthique reste première, mais la liturgie vient la nourrir et soutenir le militantisme. C’est le catholicisme social façon Semaines sociales de la deuxième moitié du XXe siècle : nourris par les sacrements, les catholiques pourront exercer leurs responsabilités sociale pour le bien commun. Ce courant est plus marqué par l’appartenance ecclésiale que le précédent (qui était plus contestataire, au moins au début).

· LFE : c’est l’ordre choisi par la Lettre aux catholiques de France (1996) : leitourgia / kerygma / martyria. La « proposition de la foi » est cette construction assez originale de la pratique religieuse où, minoritaire, le petit reste catholique français sent qu’il ne tiendra pas s’il ne se nourrit pas d’abord des sacrements vécus dans l’assemblée liturgique.

· LEF : assez proche de la proposition de la foi, cette triade en est cependant distincte par l’importance accordée à l’éthique. On peut y reconnaître l’appartenance vécue dans la plupart des communautés dites nouvelles. L’expérience charismatique est essentiellement liturgique (au cours de la prière, en assemblée), et débouche sur un changement radical de vie (il y a un avant et un après la conversion). La foi fait est un peu le parent pauvre (proclamer Jésus Seigneur suffit).

 

Idéal-typiques, ces 6 configurations de la pratique religieuse ne se rencontrent jamais à l’état pur dans les personnes et les groupes réels. Elles permettent cependant de se repérer dans la constellation des sentiments d’appartenance.

On peut les projeter dans un espace identité religieuse / engagement social, car ces deux axes sont ceux qui produisent des effets visibles dans la société.

On obtient la visualisation suivante :

Pratique religieuse

Les voisinages deux à deux de ces différentes formes de pratiques religieuses peuvent étonner, mais sont finalement très logiques. La proposition de la foi rejoint l’intuition évangélique d’une minorité active qui doit être la lumière du monde. Les communautés nouvelles reprennent en fin de compte les principes de l’Action Catholique la plus fidèle à l’enseignement ecclésial, en conciliant liturgie et éthique. Les sensibilités réformées (protestantes traditionnelles) sont assez proches de celles des militants d’Action Catholique dans leur aspect contestataire et prophétique des injustice sociales etc.

 

Entre ces 6 façons de pratiquer, il y a bien sûr une infinité de nuances et de gradations. Demandez par exemple à un groupe de personnes de noter de 0 à 3 l’importance que chacune donne à la foi, la liturgie et l’éthique dans la pratique religieuse, et vous verrez qu’il y a environ… 64 combinaisons et possibilités de se définir plus ou moins religieux !

L’important n’est pas de complexifier cette classification au risque de s’y perdre, mais de repérer ‘à la louche’ dans quel endroit et proche de quelle configuration vous vous situez.

Tenir ensemble foi / liturgie / éthique demande d’être à la fois lucide et critique sur l’articulation pratiquée entre les trois (personnellement d’abord, mais également collectivement, dans la paroisse, le groupe, l’Église qui est la mienne).

Seule une circulation incessante entre ces trois dimensions nous permettra de marcher à la suite du Christ, de pratiquer en vérité.

 

 

1ère lecture : « Vous n’ajouterez rien à ce que je vous ordonne… vous garderez les commandements du Seigneur » (Dt 4, 1-2.6-8)
Lecture du livre du Deutéronome
Moïse disait au peuple : « Maintenant, Israël, écoute les décrets et les ordonnances que je vous enseigne pour que vous les mettiez en pratique. Ainsi vous vivrez, vous entrerez, pour en prendre possession, dans le pays que vous donne le Seigneur, le Dieu de vos pères. Vous n’ajouterez rien à ce que je vous ordonne, et vous n’y enlèverez rien, mais vous garderez les commandements du Seigneur votre Dieu tels que je vous les prescris. Vous les garderez, vous les mettrez en pratique ; ils seront votre sagesse et votre intelligence aux yeux de tous les peuples. Quand ceux-ci entendront parler de tous ces décrets, ils s’écrieront : ‘Il n’y a pas un peuple sage et intelligent comme cette grande nation !’ Quelle est en effet la grande nation dont les dieux soient aussi proches que le Seigneur notre Dieu est proche de nous chaque fois que nous l’invoquons ? Et quelle est la grande nation dont les décrets et les ordonnances soient aussi justes que toute cette Loi que je vous donne aujourd’hui ? »

Psaume : Ps 14 (15), 2-3a, 3bc-4ab, 4d-5
R/ Seigneur, qui séjournera sous ta tente ? (Ps 14, 1a)

Celui qui se conduit parfaitement,
qui agit avec justice
et dit la vérité selon son cœur.
Il met un frein à sa langue.

Il ne fait pas de tort à son frère
et n’outrage pas son prochain.
À ses yeux, le réprouvé est méprisable
mais il honore les fidèles du Seigneur.

Il ne reprend pas sa parole.
Il prête son argent sans intérêt,
n’accepte rien qui nuise à l’innocent.
Qui fait ainsi demeure inébranlable.

2ème lecture : « Mettez la Parole en pratique » (Jc 1, 17-18.21b-22.27)
Lecture de la lettre de saint Jacques
Mes frères bien-aimés, les présents les meilleurs, les dons parfaits, proviennent tous d’en haut, ils descendent d’auprès du Père des lumières, lui qui n’est pas, comme les astres, sujet au mouvement périodique ni aux éclipses. Il a voulu nous engendrer par sa parole de vérité, pour faire de nous comme les prémices de toutes ses créatures. Accueillez dans la douceur la Parole semée en vous ; c’est elle qui peut sauver vos âmes. Mettez la Parole en pratique, ne vous contentez pas de l’écouter : ce serait vous faire illusion. Devant Dieu notre Père, un comportement religieux pur et sans souillure, c’est de visiter les orphelins et les veuves dans leur détresse, et de se garder sans tache au milieu du monde.

Evangile : « Vous laissez de côté le commandement de Dieu, pour vous attacher à la tradition des hommes » (Mc 7, 1-8.14-15.21-23)
Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Le Père a voulu nous engendrer par sa parole de vérité, pour faire de nous comme les prémices de toutes ses créatures.
Alléluia. (Jc 1, 18)

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc

En ce temps-là, les pharisiens et quelques scribes, venus de Jérusalem, se réunissent auprès de Jésus, et voient quelques-uns de ses disciples prendre leur repas avec des mains impures, c’est-à-dire non lavées. – Les pharisiens en effet, comme tous les Juifs, se lavent toujours soigneusement les mains avant de manger, par attachement à la tradition des anciens ; et au retour du marché, ils ne mangent pas avant de s’être aspergés d’eau, et ils sont attachés encore par tradition à beaucoup d’autres pratiques : lavage de coupes, de carafes et de plats. Alors les pharisiens et les scribes demandèrent à Jésus : « Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens ? Ils prennent leurs repas avec des mains impures. » Jésus leur répondit : « Isaïe a bien prophétisé à votre sujet, hypocrites, ainsi qu’il est écrit : Ce peuple m’honore des lèvres,mais son cœur est loin de moi. C’est en vain qu’ils me rendent un culte ; les doctrines qu’ils enseignent ne sont que des préceptes humains. Vous aussi, vous laissez de côté le commandement de Dieu, pour vous attacher à la tradition des hommes. »
Appelant de nouveau la foule, il lui disait : « Écoutez-moi tous, et comprenez bien. Rien de ce qui est extérieur à l’homme et qui entre en lui ne peut le rendre impur. Mais ce qui sort de l’homme, voilà ce qui rend l’homme impur. »
Il disait encore à ses disciples, à l’écart de la foule : « C’est du dedans, du cœur de l’homme, que sortent les pensées perverses : inconduites, vols, meurtres, adultères, cupidités, méchancetés, fraude, débauche, envie, diffamation, orgueil et démesure. Tout ce mal vient du dedans, et rend l’homme impur. »
Patrick BRAUD

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29 juillet 2015

La capacité d’étonnement

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La capacité d’étonnement


Homélie du 18° dimanche du temps ordinaire / Année B

02/08/2015

Cf. également :

Éveiller à d’autres appétits


« Mann hou ? »
Qu’est-ce que c’est ?

La question des hébreux devant cette fine rosée recouvrant leur camp reflète leur étonnement. À tel point que l’interrogation est devenue le nom de la chose étonnante : la manne. Au lieu d’avoir peur, au lieu de se jeter dessus goulûment, au lieu d’ignorer le phénomène, les hébreux restent devant cette couche de givre inconnue et s’interrogent.

La capacité d'étonnement dans Communauté spirituelle moise31

Il y va pourtant d’un enjeu de taille : leur survie, tout simplement, dans ce désert hostile où la nourriture est rare et peu nombreuse. C’est donc que la condition première pour se nourrir de l’imprévu est d’abord de savoir s’étonner, et de se questionner.

Rainer Maria Rilke conseille cette posture à un jeune apprenti poète :

lettresaunjeunepoete émerveillement dans Communauté spirituelle« Si vous vous accrochez à la nature, à ce qu’il y a de simple en elle, de petit, à quoi presque personne ne prend garde, qui, tout à coup, devient l’infiniment grand, l’incommensurable, si vous étendez votre amour à tout ce qui est, si très humblement vous cherchez à gagner en serviteur la confiance de ce qui semble misérable, – alors tout vous deviendra plus facile, vous semblera plus harmonieux et, pour ainsi dire, plus conciliant. Votre entendement restera peut-être en arrière, étonné : mais votre conscience la plus profonde s’éveillera et saura. Vous êtes si jeune, si neuf devant les choses, que je voudrais vous prier, autant que je sais le faire, d’être patient en face de tout ce qui n’est pas résolu dans votre cœur. Efforcez-vous d’aimer vos questions elles-mêmes, chacune comme une pièce qui vous serait fermée, comme un livre écrit dans une langue étrangère. Ne cherchez pas pour le moment des réponses qui ne peuvent vous être apportées, parce que vous ne sauriez pas les mettre en pratique, les « vivre ». Et il s’agit précisément de tout vivre.

Ne vivez pour l’instant que vos questions.
Peut-être, simplement en les vivant, finirez-vous par entrer insensiblement, un jour, dans les réponses. »

Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète, Lettre n° 4 du 16/07/1903.

Savoir s’étonner est indispensable si l’on veut recueillir le don de Dieu. Chaque jour poser la question : qu’est-ce que c’est ? permet de ne pas passer à côté de ce qui a été déposé à notre porte, à notre insu, pour nous en nourrir.

L’étonnement, dit-on, « c’est l’enfance qui se cultive au quotidien ».

La capacité d’étonnement est la qualité première du philosophe : pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? s’interrogeait Leibniz [1]. Et les psaumes en écho prolongent cette interrogation jusqu’à l’homme lui-même : « qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui ? Le fils d’un homme que tu en prennes souci ? »

« S’étonner », nous dit Platon, « voilà un sentiment tout à fait philosophique. La philosophie n’a pas d’autre origine ». S’étonner est chez le philosophe « le premier symptôme de l’ignorance » ; c’est le moteur du besoin de comprendre.

Les scientifiques sont tout aussi prompts à s’étonner, et curieux eux aussi : « Celui qui ne peut plus trouver ni étonnement, ni surprise, est pour ainsi dire mort, ses yeux sont fermés », écrivait Albert Einstein [2].

Celui qui ne s’étonne pas devient vite blasé, voire cynique.
Celui qui s’habitue ne voit plus l’exceptionnel.
Celui qui ne s’arrête pas pour déceler l’inhabituel passe à côté d’un trésor sans le voir.

Prenez les foules suite à la multiplication des pains dans notre évangile : il y a ceux qui n’ont rien remarqué, satisfaits seulement d’avoir mangé à satiété. Il y a ceux qui ne voient que le produit matériel et en redemandent encore. Quelques-uns prendront du recul et se demanderont : qu’est-ce que cela ? Qui est celui qui nourrit ainsi tant de gens ? Cet étonnement les emmènera ailleurs. Habiter leur questionnement sur Jésus les conduira à le suivre pour en savoir plus sur lui.

Dans son homélie pour la fête de Pâques 2015, le Pape François murmurait :
« On ne peut vivre la Pâque sans entrer dans le mystère.
Ce n’est pas un fait intellectuel, ce n’est pas seulement connaître, lire… C’est plus, c’est beaucoup plus !
“Entrer dans le mystère”, signifie capacité d’étonnement, de contemplation; capacité d’écouter le silence et d’entendre le murmure d’un fin silence sonore dans lequel Dieu nous parle.
Entrer dans le mystère nous demande de ne pas avoir peur de la réalité: de ne pas se fermer sur soi-même, de ne pas fuir devant ce que nous ne comprenons pas, de ne pas fermer les yeux devant les problèmes, de ne pas les nier, de ne pas éliminer les points d’interrogation… »

 

Les trois enfants de l’étonnement

 

L’émerveillement

Celui qui sait s’arrêter sur l’inattendu et s’interroger : qu’est-ce que c’est ? n’est pas loin de pouvoir ensuite s’émerveiller du don de Dieu accordé à travers cette manne de chaque jour. Ne pas s’habituer aux petits miracles quotidiens donne une joie de vivre invincible, car s’alimentant sans cesse des mannes jalonnant notre route. Sainte Thérèse d’Avila disait : « Vous trouverez Dieu au fond de la casserole » !

Le fond de la casserole, c’est peut-être un matin où le ciel est irisé de couleurs improbables. C’est le sourire chaleureux d’un inconnu dans la foule du métro. C’est le coup de fil surprise de quelqu’un qui nous touche. C’est une opportunité insoupçonnée qui se présente au travail etc.

« Le Seigneur a fait pour moi des merveilles » chante Marie dans son Magnificat. C’est parce qu’elle a transformé son étonnement en émerveillement que Marie est remplie de l’allégresse de l’Esprit. Nous aussi nous pouvons enfanter le Verbe en nous si nous savons nous étonner des visites et des annonces qui nous sont faites…

 

L’action de grâces

eucharistie-125447_2 étonnementRendre grâce est dans le droit fil de l’émerveillement : une vie eucharistique est une attention de tous les instants à ce je ne sais quoi qui m’est donné à travers les autres et le monde.

Si cette musique inconnue m’a littéralement ravi hors de moi-même, si cette parole a si fort raisonné en moi, si cette main tendue a été à ce point providentielle, alors il y a de quoi rendre grâce ! Alors l’eucharistie devient la reconnaissance étonnée et émerveillée d’un amour qui me fait vivre à travers mille et une attentions  déroutantes.

 

La révolte

756107 eucharistieL’étonnement peut également conduire à la révolte.

Comment, cette silhouette emmitouflée dans un duvet qui m’a intrigué sur le trottoir est un être humain ? Alors il ne faut pas s’habituer, et sonner  l’insurrection de la bonté comme le criait l’Abbé Pierre, pour que les SDF ne soient pas des milliers, toujours plus nombreux.

Comment, la dette de la France est de 2 000 milliards, l’équivalent de la richesse produite chaque année ? Et personne ne s’en alarme outre mesure ? Mais pourquoi plus personne ne s’en étonne ? Pourquoi ne pas se révolter contre ces nuages noirs  s’amoncelant sur la tête de nos enfants ?

Comment, une grossesse sur cinq n’arrive plus à terme, et cela n’étonne personne ?

Ne pas s’habituer peut conduire à une réaction salutaire. Le mouvement des indignés de Stéphane Hessel est né de ce regard étonné sur une réalité injuste.

En posant la question : « Mann hou ? », qu’est-ce que c’est ? le peuple hébreu au désert s’est ouvert la voie d’une attitude spirituelle toujours actuelle. Sortir de son camp pour aller voir de plus près ce qui intrigue, prendre le temps d’habiter la question surgie de l’étonnement, puis recueillir humblement chaque jour ce qui nous est donné pour avancer sur la route…

 

La manne est une figure de l’eucharistie en ce sens qu’elle nous apprend à recevoir sans nous habituer, à rendre grâce sans cesser de marcher…


[1]. Principes de la nature et de la grâce, 1714.

[2]. dans : Comment je vois ce monde, publié en 1934.

 

 

 

 

1ère lecture : « Du ciel, je vais faire pleuvoir du pain pour vous » (Ex 16, 2-4.12-15)
Lecture du livre de l’Exode

En ces jours-là,      dans le désert, toute la communauté des fils d’Israël  récriminait contre Moïse et son frère Aaron.      Les fils d’Israël leur dirent : « Ah ! Il aurait mieux valu mourir  de la main du Seigneur, au pays d’Égypte,  quand nous étions assis près des marmites de viande,  quand nous mangions du pain à satiété !  Vous nous avez fait sortir dans ce désert  pour faire mourir de faim tout ce peuple assemblé ! »     Le Seigneur dit à Moïse : « Voici que, du ciel, je vais faire pleuvoir du pain pour vous.  Le peuple sortira pour recueillir chaque jour sa ration quotidienne,  et ainsi je vais le mettre à l’épreuve : je verrai s’il marchera, ou non, selon ma loi.     J’ai entendu les récriminations des fils d’Israël.  Tu leur diras : ‘Au coucher du soleil, vous mangerez de la viande  et, le lendemain matin, vous aurez du pain à satiété.  Alors vous saurez que moi, le Seigneur, je suis votre Dieu.’ »

    Le soir même, surgit un vol de cailles qui recouvrirent le camp ;  et, le lendemain matin,  il y avait une couche de rosée autour du camp.      Lorsque la couche de rosée s’évapora,  il y avait, à la surface du désert, une fine croûte,  quelque chose de fin comme du givre, sur le sol.      Quand ils virent cela,  les fils d’Israël se dirent l’un à l’autre : « Mann hou ? » (ce qui veut dire : Qu’est-ce que c’est ?),  car ils ne savaient pas ce que c’était.  Moïse leur dit : « C’est le pain que le Seigneur vous donne à manger. »

Psaume : Ps 77 (78), 3.4ac, 23-24, 25.52a.54a

R/ Le Seigneur donne le pain du ciel !  (cf. 77, 24b)

Nous avons entendu et nous savons
ce que nos pères nous ont raconté :
et nous le redirons à l’âge qui vient,
les titres de gloire du Seigneur.

Il commande aux nuées là-haut,
il ouvre les écluses du ciel :
pour les nourrir il fait pleuvoir la manne,
il leur donne le froment du ciel.

Chacun se nourrit du pain des Forts,
il les pourvoit de vivres à satiété.
Tel un berger, il conduit son peuple.
Il le fait entrer dans son domaine sacré.

2ème lecture : « Revêtez-vous de l’homme nouveau, créé selon Dieu » (Ep 4, 17.20-24)
Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Éphésiens

Frères,     je vous le dis, j’en témoigne dans le Seigneur : vous ne devez plus vous conduire comme les païens  qui se laissent guider par le néant de leur pensée.     Mais vous, ce n’est pas ainsi  que l’on vous a appris à connaître le Christ,      si du moins l’annonce et l’enseignement que vous avez reçus à son sujet  s’accordent à la vérité qui est en Jésus.      Il s’agit de vous défaire de votre conduite d’autrefois,  c’est-à-dire de l’homme ancien corrompu par les convoitises  qui l’entraînent dans l’erreur.      Laissez-vous renouveler  par la transformation spirituelle de votre pensée.      Revêtez-vous de l’homme nouveau,  créé, selon Dieu, dans la justice et la sainteté conformes à la vérité.

Évangile : « Celui qui vient à moi n’aura jamais faim, celui qui croit en moi n’aura jamais soif » (Jn 6, 24-35)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. 
L’homme ne vit pas seulement de pain,
mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.
Alléluia.  (Mt 4, 4b)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

En ce temps-là,     quand la foule vit que Jésus n’était pas là,  ni ses disciples,  les gens montèrent dans les barques  et se dirigèrent vers Capharnaüm  à la recherche de Jésus.      L’ayant trouvé sur l’autre rive, ils lui dirent : « Rabbi, quand es-tu arrivé ici ? »      Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : vous me cherchez,  non parce que vous avez vu des signes,  mais parce que vous avez mangé de ces pains  et que vous avez été rassasiés.      Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd,  mais pour la nourriture qui demeure  jusque dans la vie éternelle,  celle que vous donnera le Fils de l’homme,  lui que Dieu, le Père, a marqué de son sceau. »      Ils lui dirent alors : « Que devons-nous faire pour travailler aux œuvres de Dieu ? »      Jésus leur répondit : « L’œuvre de Dieu,  c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. »      Ils lui dirent alors : « Quel signe vas-tu accomplir  pour que nous puissions le voir, et te croire ?  Quelle œuvre vas-tu faire ?      Au désert, nos pères ont mangé la manne ;  comme dit l’Écriture : Il leur a donné à manger le pain venu du ciel. »  Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : ce n’est pas Moïse  qui vous a donné le pain venu du ciel ;  c’est mon Père  qui vous donne le vrai pain venu du ciel.      Car le pain de Dieu,  c’est celui qui descend du ciel  et qui donne la vie au monde. »     Ils lui dirent alors : « Seigneur, donne-nous toujours de ce pain-là. »     Jésus leur répondit : « Moi, je suis le pain de la vie.  Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ;  celui qui croit en moi n’aura jamais soif. »
Patrick BRAUD

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20 mai 2015

Le scat de Pentecôte

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Le scat de Pentecôte 

cf. également

Pentecôte : conjuguer glossolalie et xénolalie
Le marché de Pentecôte : 12 fruits, 7 dons
Et si l’Esprit Saint n’existait pas ?
La paix soit avec vous
Parler la langue de l’autre

Homélie pour la fête de Pentecôte 2015
24/05/2015

Connaissez-vous le scat ?

En jazz, c’est un phénomène bien connu : une chanteuse comme Ella Fitzgerald était capable de jubiler sur des onomatopées pendant des minutes entières avant de reprendre le fil de sa chanson. Le scat, vous en faites sans le savoir lorsque vous chantonnez, tout joyeux, en oubliant les paroles, devant un beau paysage ou sous la douche…

Eh bien, on a très fortement l’impression, en suivant le texte du livre des Actes, qu’à la Pentecôte les pèlerins de Jérusalem ont assisté étonnés au premier « scat liturgique » de l’Église envahie d’Esprit Saint. Pierre est même obligé de préciser :« ces gens ne sont pas ivres comme vous le supposez, car il n’est que 9h du matin ! » (Ac 2, 15). Certains en effet, en entendant l’Église chanter sa joie au-delà des paroles « se moquaient et disaient : ils sont pleins de vin doux » (Ac 2, 13).

Voilà un fruit majeur de la Pentecôte, un effet capital de l’Esprit Saint en nous : la joie déborde tellement que nous n’avons plus de mots pour la décrire !

Rappelez-vous : quand avez-vous été subjugués par la beauté, d’une musique, d’un paysage, d’un tableau ? quand avez-vous été bouleversés par l’intensité enivrante d’un regard, d’un silence ? Dans ces moments-là, les mots nous manquent, mais le souffle qui est en nous nous fait jubiler au-delà des paroles. Et nous improvisons comme Ella Fitzgerald un scat débordant de joie ! Ella, elle avait ce don de communiquer la joie en se laissant envahir par elle : son chant était une petite Pentecôte ! Vraiment inspirée par un Esprit magnifique…

Ce don de l’Esprit n’a jamais manqué à l’Église.

Pensez aux longues vocalises des moines et moniales bénédictins tenant des portées entières sur un « o » de Dominus ou un « a » de alléluia, jusqu’à être comblés et épuisés de bonheur à moduler cette voyelle dans le chant grégorien, le temps suspendu….

Pensez aux groupes charismatiques (les pentecôtistes, bien nommés !) qui ont redécouvert ce qu’ils appellent le chant en langues (la glossolalie) : il arrive dans la prière qu’un groupe chante sans partition ni paroles, comme s’il y avait un chef d’orchestre invisible, et cela donne une mélopée puissante harmonieuse et belle…

Relisez saint Augustin qui était déjà témoin au 4ème siècle de ce « scat spirituel » sous l’effet de l’Esprit de Pentecôte. Il est lui aussi partisan de cet excès, de cette densité de joie si forte qu’elle appelle le chant :

« Chantez-lui le cantique nouveau, chantez bien (nous dit le psaume). Chacun se demande comment chanter pour Dieu. Chante pour lui, mais évite de chanter mal. […] Eh bien, il te donne cette méthode de chant : ne cherche pas des paroles, comme si tu pouvais expliquer ce qui plaît à Dieu. Chante par des cris de jubilation. Bien chanter pour Dieu, c’est chanter par des cris de jubilation. En quoi cela consiste-t-il ? C’est comprendre qu’on ne peut pas expliquer par des paroles ce que l’on chante dans son cœur. En effet ceux qui chantent, soit en faisant la moisson, soit en faisant les vendanges, ou n’importe quel travail enthousiasmant, lorsqu’ils se mettent à exulter de joie par les paroles de leurs chants, sont comme gonflés par une telle joie qu’ils ne peuvent la détailler par des paroles, ils renoncent à articuler des mots, et ils éclatent en cris de jubilation. […]

Que ton cœur se réjouisse sans prononcer de paroles et que l’infinité de tes joies ne soit pas limitée par des syllabes. Chantez bien avec des cris de joie. » (Homélie sur le psaume 32)

Cette joie-là ne vient pas de nous, de nos seules forces : elle nous est donnée, elle vient de Dieu, elle est Dieu-en-nous : l’Esprit qui nous rend présent à nous-même, présent au monde…

Bref, être habité par l’Esprit Saint, c’est se laisser remplir par une joie que rien ne pourra nous ravir. Non pas une joie naïve, bêtasse, qui serait ignorante du combat spirituel à mener. « Mon cœur s’est ouvert depuis ce jour alors que je le croyais mort » témoignait une adulte lors de sa confirmation. C’est donc que l’Esprit vient apporter la joie en traversant les forces de mort auxquelles nous sommes confrontés : pas en niant le mal, mais en gagnant sur lui grâce au pardon, grâce à la Résurrection du Christ travaillant en nous…

Au cœur des difficultés économiques actuelles, le monde attend des témoins de cet Esprit-là : des acteurs compétents, responsables, qui surtout relèvent les défis sans amertume ni violence, sans résignation ni fatalisme. Des acteurs sociaux habités, imprégnés, transpirant d’une joie profonde qui vient de l’espérance en la Résurrection.

Dans les débats de société sur l’Europe et les élections à venir, on espère des témoins comme à la Pentecôte remplis d’un Esprit d’enthousiasme communicatif. Souvenez-vous : l’hymne à la joie de Beethoven est quand même notre hymne européen officiel !

C’est l’enjeu de notre confirmation : être « confirmés », c’est être rendus fermes dans la confiance en Dieu, source intarissable de notre joie.

C’est l’enjeu de la communion au Corps du Christ : être « enivrés » de l’Esprit du Christ jusqu’à avoir au cœur un sentiment de plénitude et de suffocation qu’aucune épreuve ne pourra nous enlever. La sobre ivresse de l’Esprit est le fruit de cette communion eucharistique.

 

Il y a bien d’autres effets de l’Esprit de la Pentecôte : parler la langue de l’autre, proclamer les merveilles de Dieu (Ac 2, 11), devenir chacun et chacune prophète (Ac 2, 17-18) mais je voulais aujourd’hui insister sur la joie, fruit de l’Esprit de Pentecôte, car de cette joie-là notre société a faim et soif plus que jamais.

Alors, laissez l’Esprit de votre baptême improviser en vous un scat jubilatoire qui vous maintiendra en communion avec Dieu, pour l’étonnement et le plaisir de ceux qui vous entourent…

 

Messe du jour de Pentecôte

1ère lecture : « Tous furent remplis d’Esprit Saint et se mirent à parler » (Ac 2, 1-11)

Lecture du livre des Actes des Apôtres

Quand arriva le jour de la Pentecôte, au terme des cinquante jours après Pâques, ils se trouvaient réunis tous ensemble. Soudain un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent : la maison où ils étaient assis en fut remplie tout entière. Alors leur apparurent des langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa une sur chacun d’eux. Tous furent remplis d’Esprit Saint : ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit.

 Or, il y avait, résidant à Jérusalem, des Juifs religieux, venant de toutes les nations sous le ciel. Lorsque ceux-ci entendirent la voix qui retentissait, ils se rassemblèrent en foule. Ils étaient en pleine confusion parce que chacun d’eux entendait dans son propre dialecte ceux qui parlaient. Dans la stupéfaction et l’émerveillement, ils disaient : « Ces gens qui parlent ne sont-ils pas tous galiléens ? Comment se fait-il que chacun de nous les entende dans son propre dialecte, sa langue maternelle ? Parthes, Mèdes et Élamites, habitants de la Mésopotamie, de la Judée et de la Cappadoce, de la province du Pont et de celle d’Asie, de la Phrygie et de la Pamphylie, de l’Égypte et des contrées de Libye proches de Cyrène, Romains de passage, Juifs de naissance et convertis, Crétois et Arabes, tous nous les entendons parler dans nos langues des merveilles de Dieu. »

Psaume : 103 (104), 1ab.24ac, 29bc-30, 31.34

R/ Ô Seigneur, envoie ton Esprit
qui renouvelle la face de la terre !
ou : Alléluia ! 
(cf. 103, 30)

Bénis le Seigneur, ô mon âme ;
Seigneur mon Dieu, tu es si grand !
Quelle profusion dans tes oeuvres, Seigneur !
La terre s’emplit de tes biens.

Tu reprends leur souffle, ils expirent
et retournent à leur poussière.
Tu envoies ton souffle : ils sont créés ;
tu renouvelles la face de la terre.

Gloire au Seigneur à tout jamais !
Que Dieu se réjouisse en ses œuvres !
Que mon poème lui soit agréable ;
moi, je me réjouis dans le Seigneur.

2ème lecture : « Le fruit de l’Esprit » (Ga 5,16-25)
Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Galates

Frères, je vous le dis : marchez sous la conduite de l’Esprit Saint, et vous ne risquerez pas de satisfaire les convoitises de la chair. Car les tendances de la chair s’opposent à l’Esprit, et les tendances de l’Esprit s’opposent à la chair. En effet, il y a là un affrontement qui vous empêche de faire tout ce que vous voudriez. Mais si vous vous laissez conduire par l’Esprit, vous n’êtes pas soumis à la Loi. On sait bien à quelles actions mène la chair : inconduite, impureté, débauche, idolâtrie, sorcellerie, haines, rivalité, jalousie, emportements, intrigues, divisions, sectarisme, envie, beuveries, orgies et autres choses du même genre. Je vous préviens, comme je l’ai déjà fait : ceux qui commettent de telles actions ne recevront pas en héritage le royaume de Dieu. Mais voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi. En ces domaines, la Loi n’intervient pas. Ceux qui sont au Christ Jésus ont crucifié en eux la chair, avec ses passions et ses convoitises. Puisque l’Esprit nous fait vivre, marchons sous la conduite de l’Esprit.

Séquence de Pentecôte

Viens, Esprit Saint, en nos cœurs
et envoie du haut du ciel
un rayon de ta lumière.

Viens en nous, père des pauvres,
viens, dispensateur des dons,
viens, lumière de nos cœurs.

Consolateur souverain,
hôte très doux de nos âmes,
adoucissante fraîcheur.

Dans le labeur, le repos ;
dans la fièvre, la fraîcheur ;
dans les pleurs, le réconfort.

Ô lumière bienheureuse,
viens remplir jusqu’à l’intime
le cœur de tous les fidèles.

Sans ta puissance divine,
il n’est rien en aucun homme,
rien qui ne soit perverti.

Lave ce qui est souillé,
baigne ce qui est aride,
guéris ce qui est blessé.

Assouplis ce qui est raide,
réchauffe ce qui est froid,
rends droit ce qui est faussé.

À tous ceux qui ont la foi
et qui en toi se confient
donne tes sept dons sacrés.

Donne mérite et vertu,
donne le salut final,
donne la joie éternelle. Amen.

Evangile : « L’Esprit de vérité vous conduira dans la vérité tout entière » (Jn 15, 26-27 ; 16, 12-15)

Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Viens, Esprit Saint !
Emplis le cœur de tes fidèles !
Allume en eux le feu de ton amour !
Alléluia.

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Quand viendra le Défenseur, que je vous enverrai d’auprès du Père, lui, l’Esprit de vérité qui procède du Père, il rendra témoignage en ma faveur. Et vous aussi, vous allez rendre témoignage, car vous êtes avec moi depuis le commencement.  J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous ne pouvez pas les porter. Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière. En effet, ce qu’il dira ne viendra pas de lui-même : mais ce qu’il aura entendu, il le dira ; et ce qui va venir, il vous le fera connaître. Lui me glorifiera, car il recevra ce qui vient de moi pour vous le faire connaître. Tout ce que possède le Père est à moi ; voilà pourquoi je vous ai dit : L’Esprit reçoit ce qui vient de moi pour vous le faire connaître. »
Patrick BRAUD

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