Ne baissez pas les bras !
Ne baissez pas les bras !
Homélie du 29ème Dimanche du temps ordinaire / Année C
Dimanche 20 Octobre 2013
« Ne baissez pas les bras ! »
L’histoire de Moïse qui se tient les mains levées pour soutenir le long combat de Josué contre l’ennemi est célèbre. Peut-être est-ce de là que vient l’expression : « Ne baissez pas les bras ! ». Car si Moïse laissait retomber ses bras, l’ennemi était le plus fort ; sinon, Israël devenait le plus fort.
« Ne baissez pas les bras ! »
L’expression peut également venir de la boxe. Si un boxeur baisse sa garde en abaissant ses mains, il va vite se retrouver KO. Le fait de baisser les bras pour un boxeur est un geste d’abandon dans un combat. Par extension, « baisser les bras » en est venu à signifier que l’on abandonne un projet ou une action par manque de courage, de force ou de volonté.
Comment Moïse est-il parvenu à ne pas baisser les bras là où tant d’autres avaient capitulé ? Regardons bien le texte et transposons-le à aujourd’hui.
1) D’abord, Moïse a su déléguer et garder une certaine distance.
Il appelle Josué, l’envoie à la bataille pendant que lui va regarder les choses de haut depuis le sommet de la colline.
Vous aussi, si vous voulez tenir bon dans les combats qui sont les vôtres, apprenez à déléguer, à ne pas vous noyer dans l’action, à garder une certaine distance intérieure, à voir les choses « d’en haut ».
2) Ensuite, Moïse ne monte pas seul sur la colline. Il emmène Aaron et Hour.
Croire qu’on pourra s’en sortir tout seul est l’une des grandes tentations. Le piège, c’est de ne vouloir personne à ses côtés dans les combats de nos vies.
Tentation du repli sur soi, de l’autosuffisance, du mutisme?
Moïse sait qu’il aura besoin d’être aidé, et il l’accepte humblement. (Car Moïse est le plus humble des hommes que la terre ait portés?).
Vous aussi, acceptez d’être accompagné, aidé, sinon votre solitude se changera en lassitude.
3) Continuons le texte :
Quand ses mains deviennent trop lourdes pour rester levées, Moïse s’assoit sur une pierre. Il ne tient plus debout tout seul, il prend appui sur un autre que lui-même. Il se repose sur Dieu, son « rocher », comme disent les Psaumes.
Ce serait une illusion très prétentieuse que de vouloir se passer de Dieu pour aller jusqu’au bout de nos projets.
S’asseoir, être assis en Dieu, est paradoxalement la 1ère attitude pour mener la bataille.
4) Après s’être assis, Moïse accepte que d’autres lui tiennent les mains levées. Aaron et Hour lui soutiennent la main gauche et la main droite vers le ciel.
Impossible là encore de tenir bon sans accepter d’être porté, supporté, élevé par nos compagnons d’armes. Tantôt ce sont des amis, tantôt un père spirituel, une équipe de réflexion et de partage, un groupe de prière?
Si vous voulez ne pas baisser les bras, entourez-vous de compagnons qui soient de vrais soutiens et acceptez leur aide, humblement.
5) « Ainsi les mains de Moïse demeurèrent levées jusqu’au coucher du soleil ».
La dernière attitude de Moïse dans le récit biblique, c’est de persévérer, jusqu’au bout du jour, de durer sans se lasser. Cette persévérance dans la prière (que reprend Jésus dans l’évangile d’aujourd’hui) est une condition sine qua non de notre fidélité. Il y a des bons et des mauvais jours, il y a des réussites et des échecs, il y a des doutes et des grands élans : l’important, pour ne pas baisser les bras, est de persévérer jusqu’à la fin.
Dans le monde économique ou politique, on est quelquefois prisonnier de la dictature du court terme, du très court terme : qui raisonne au-delà de 6 mois en entreprise ? La culture de l’efficacité rapide peut obscurcir l’horizon d’une action durable.
Dans la foi chrétienne, nous préférons le présent au court-terme.
Sans renier l’efficacité, nous lui préférons la fécondité qui demande du temps, qui demande de passer par la mort et la résurrection du grain de blé.
Le long-terme s’appelle plutôt pour nous : avenir, espérance ; et « l’espérance ne déçoit pas » (Rm 8).
Voilà donc quelques points de repère pour, à la suite de Moïse, ne pas baisser les bras :
- savoir déléguer et garder une certaine distance
- accepter d’être accompagné (et bien choisir ces compagnons !)
- s’asseoir, s’appuyer sur Dieu
- accepter d’être porté
- durer, persévérer jusqu’au bout.
Un poème anonyme traduit à sa manière cette espérance en la fécondité de cette attitude spirituelle. Je vous le livre :
Ne baissez pas les bras
1. Quand parfois rien ne veut s’arranger
Quand la route pénible continue de monter
Quand les fonds sont en baisse, les dettes amoncelées
Quand vous voulez sourire et que vous soupirez
Quand tout vous presse et que vous êtes surmené
Faites une pause, mais ne baissez pas les bras.
2. La vie est surprenante avec ses volte-face
Chacun de nous un jour a pu le constater.
Maints échecs en succès ont été transformés.
Celui qui est en tête est parfois dépassé.
Ne baissez pas les bras bien que l’allure soit lente
Un petit vent nouveau peut vous faire triompher.
3. Le but est bien souvent à portée de la main
De l’homme fatigué, affaibli, chancelant.
Il arrive au vainqueur parfois de renoncer
Alors que la victoire est au bout du chemin.
C’est après qu’il comprend, mais hélas trop tard,
Combien il était près de la couronne d’or.
4. Le succès, c’est l’échec qui change soudain de cap
Et contourne très loin les nuages du doute
Et nul ne peut dire si le but se rapproche.
Il peut être tout près alors qu’il semble loin.
Plongez dans la bagarre lorsque vous êtes en tête
Et lorsque tout va mal, ne baissez pas les bras,
Ne baissez pas les bras.
1ère lecture : La prière persévérante de Moïse obtient la victoire (Ex 17, 8-13)
Lecture du livre de l’Exode
Le peuple d’Israël marchait à travers le désert.
Les Amalécites survinrent et attaquèrent Israël à Rephidim. Moïse dit alors à Josué : « Choisis des hommes, et va combattre les Amalécites. Moi, demain, je me tiendrai sur le sommet de la colline, le bâton de Dieu à la main. »
Josué fit ce que Moïse avait dit : il livra bataille aux Amalécites. Moïse, Aaron et Hour étaient montés au sommet de la colline. Quand Moïse tenait la main levée, Israël était le plus fort. Quand il la laissait retomber, Amalec était le plus fort. Mais les mains de Moïse s’alourdissaient ; on prit une pierre, on la plaça derrière lui, et il s’assit dessus. Aaron et Hour lui soutenaient les mains, l’un d’un côté, l’autre de l’autre. Ainsi les mains de Moïse demeurèrent levées jusqu’au coucher du soleil. Et Josué triompha des Amalécites au tranchant de l’épée.
Psaume : Ps 120, 1-2, 3-4, 5-6, 7-8
R/ Notre secours, c’est Dieu, le Maître du monde !
Je lève les yeux vers les montagnes :
d’où le secours me viendra-t-il ?
Le secours me viendra du Seigneur
qui a fait le ciel et la terre.
Qu’il empêche ton pied de glisser,
qu’il ne dorme pas, ton gardien.
Non, il ne dort pas, ne sommeille pas,
le gardien d’Israël.
Le Seigneur, ton gardien, le Seigneur, ton ombrage,
se tient près de toi.
Le soleil, pendant le jour, ne pourra te frapper,
ni la lune, durant la nuit.
Le Seigneur te gardera de tout mal,
il gardera ta vie.
Le Seigneur te gardera, au départ et au retour,
maintenant, à jamais.
2ème lecture : Méditer l’Écriture pour proclamer la Parole(2Tm 3, 14-17; 4, 1-2)
Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre à Timothée
Fils bien-aimé,
tu dois en rester à ce qu’on t’a enseigné : tu l’as reconnu comme vrai, sachant bien quels sont les maîtres qui te l’ont enseigné. Depuis ton plus jeune âge, tu connais les textes sacrés : ils ont le pouvoir de te communiquer la sagesse, celle qui conduit au salut par la foi que nous avons en Jésus Christ. Tous les textes de l’Écriture sont inspirés par Dieu ; celle-ci est utile pour enseigner, dénoncer le mal, redresser, éduquer dans la justice ; grâce à elle, l’homme de Dieu sera bien armé, il sera pourvu de tout ce qu’il faut pour faire un bon travail.
Devant Dieu, et devant le Christ Jésus qui doit juger les vivants et les morts, je te le demande solennellement, au nom de sa manifestation et de son Règne : proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps, dénonce le mal, fais des reproches, encourage, mais avec une grande patience et avec le souci d’instruire.
Evangile : Parabole de la veuve qui demandait justice (Lc 18, 1-8)
Acclamation : Alléluia. Alléluia. Le Seigneur est juste en toutes ses voies, il est proche de ceux qui l’invoquent, il écoute leur cri : il les sauve. Alléluia. (Ps 144, 17-19)
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
Jésus dit une parabole pour montrer à ses disciples qu’il faut toujours prier sans se décourager :
« Il y avait dans une ville un juge qui ne respectait pas Dieu et se moquait des hommes.
Dans cette même ville, il y avait une veuve qui venait lui demander : ‘Rends-moi justice contre mon adversaire.’ Longtemps il refusa ; puis il se dit : ‘Je ne respecte pas Dieu, et je me moque des hommes, mais cette femme commence à m’ennuyer : je vais lui rendre justice pour qu’elle ne vienne plus sans cesse me casser la tête.’ »
Le Seigneur ajouta : « Écoutez bien ce que dit ce juge sans justice ! Dieu ne fera-t-il pas justice à ses élus, qui crient vers lui jour et nuit ? Est-ce qu’il les fait attendre ? Je vous le déclare : sans tarder, il leur fera justice. Mais le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ? »
Patrick Braud