L'homélie du dimanche (prochain)

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7 décembre 2013

Crier dans le désert

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Crier dans le désert

Homélie du 2° dimanche de l’Avent / Année C
08/12/2013

 

En français, l’expression n’est guère encourageante. Celui qui crie dans le désert a la désagréable impression que personne ne l’écoute, que son cri n’est pas entendu, et donc que son action est aussi stérile que le désert auquel finalement il s’adresse. Sans aucun doute, crier dans le désert est une expression dérivée de la Bible, et notamment de la figure de Jean-Baptiste décrite dans l’évangile de ce dimanche, mais de manière si déformée qu’elle en est arrivée à signifier à peu près l’inverse. Car Jean-Baptiste certes est dans le désert, mais son cri n’est pas stérile. Au contraire : sa prédication attire. Des foules quittent les villes pour le rejoindre au désert. Toutes les classes sociales viennent se faire baptiser – plonger – dans le Jourdain. Beaucoup écoutent la voix de ce prophète original – poils de chameau et sauterelles * - et acceptent de se convertir, de croire au pardon, d’en tirer toutes les conséquences pour eux-mêmes.

« Une voix crie dans le désert ».

Dans le livre d’Isaïe, cette voix annonce le retour d’exil, et c’est donc une sacrée nouvelle terriblement efficace (Is 40,3-5). Un problème de ponctuation a transformé le texte : « une voix crie : dans le désert préparez les chemins du Seigneur » en supprimant les « : ». Et après, on a oublié la force de cette voix, fasciné par l’autre force, celle du désert semblant tout engloutir dans la solitude.

D’ailleurs en hébreu, désert se dit midebar, que l’on peut traduire : hors de la parole, dabar signifiant parole ou chose, et mi signifiant « hors de » ou « à partir de ». Le grec erêmos (qui a donné : érémitique) a exactement le même sens, rêma signifiant parole ou chose, et e signifiant « hors de » ou « à partir de ». Jean-Baptiste affronte donc le mutisme du désert en y portant une parole forte.

Par contre, le latin desertum vient du verbe « sero » = je connecte.  Le désert évoque ainsi un lieu sans connections, sans routes. Jean-Baptiste oblige les foules qui veulent le rejoindre à tracer dans le désert une route qui mène à lui.

Or le retour de Babylone à Jérusalem en 536 av. J.C. est un événement aussi important que le retour des juifs en Palestine après la deuxième guerre mondiale en 1948 ! La voix qui annonce ce genre d’événements est tout sauf stérile ou inefficace.

La voie biblique qui crie dans le désert ne parle pas à un mur **.

Elle est puissante, efficace ; elle attire à elle l’humanité en quête de rédemption.

Elle ose être différente, singulière – poils de chameau et sauterelles ! – justement pour provoquer un choc salutaire.

Elle est en retrait, au désert pour obliger chacun à se déplacer de chez soi au Jourdain.

Elle ne cherche pas à plaire, mais à provoquer un mouvement : de même que vous êtes sortis de chez vous pour venir m’entendre au désert, sortez de votre ancienne vie pour pratiquer une vie droite. Quittez vos habitudes mauvaises et noyez-les dans l’eau du Jourdain, comme l’esclavage de vos ancêtres a été noyé dans la Mer Rouge en sortant d’Égypte.

Autrement dit : dans la Bible, crier dans le désert est une mission prophétique indispensable au redressement de la vie sociale.

Les baptisés héritent de cette mission.

À eux de crier dans le désert médiatique pour appeler au respect de la vie humaine, dès sa conception, jusqu’à sa fin.

À eux de proclamer – même minoritaires – que la différence homme-femme fait partie de la dignité fondamentale de l’humanité : l’image de Dieu en nous.

À eux de prêcher à temps et à contretemps le combat pour le respect des plus petits, dans l’univers du travail notamment.

À eux de montrer publiquement la grandeur et la beauté de toute personne humaine : avec les handicapés dans l’Arche de Jean Vanier, avec les chiffonniers du Caire dans l’oeuvre de soeur Emmanuelle, avec le peuple du Quart Monde dans le mouvement ATD fondé par le père Joseph Wrézinski etc. etc.

La liste est longue de ces voix dans le désert qui finissent par toucher bien des coeurs, bien des intelligences, et provoquent des conversions, des changements de vie radicaux. Ainsi, des jeunes traders donnent quelques années de leur vie pour les plus pauvres. Des volontaires partent en Afrique ou dans nos cités pour lutter contre l’exclusion. Des grands professionnels donnent de leur temps et de leurs compétences pour imaginer d’autres entreprises, d’autres modes d’insertion, d’autres rentabilités?

 

Un exemple récent parmi 100 000 : les Semaines Sociales de France.

Crier dans le désert dans Communauté spirituelle affiche_semaine_socialeChaque année, des centaines de chrétiens se rassemblent autour d’un thème de société. Pendant trois jours, ils planchent ensemble sur les conversions à vivre et à proposer à nos contemporains dans le domaine social et économique. Cette année, c’était sur le thème du travail : « réinventer le travail ».

Plus de 180 ateliers réalisés en partenariat avec 52 mouvements ont été animés du 22 au 24 novembre 2013, à Lyon-Villeurbanne, Paris et Strasbourg (cf. http://www.ssf-fr.org/ssf ).

Peu relayées par les médias, les Semaines Sociales de France sont pourtant une voix qui crie dans le désert, et dont la portée se mesure année après année aux initiatives originales qui fleurissent dans le monde de la finance, de l’industrie, des services. Cette poignée de croyants peut suffire à transformer bien des entreprises. Ce petit groupe ignoré des médias porte en germe une puissance de renouveau qui étonnera le monde.

 

Le message de Jean-Baptiste au désert est fort : n’ayez pas peur vous aussi de crier alors qu’au début personne ne semble vous entendre. Ne vous découragez pas d’être ignorés des grands de ce monde, des modes médiatiques et du bling-bling des people. Tenez bon en proclamant vos convictions : elles attireront ceux que la Parole de Dieu pourra bouleverser à travers vous. Ne regardez pas le vide apparent du désert qui vous entoure, mais la source d’eau vive dans laquelle plonger avec les compagnons de route qui vous sont donnés.

Jean-Baptiste – on le sait – paiera de sa vie sa liberté de parole. Il osera reprocher haut et fort à Hérode d’avoir épousé la femme de son frère, Hérodiade. Salomé (fille de Hérodiade) se vengera en le faisant décapiter. Mais on ne fait pas taire la voix de la vérité en éliminant ses porte-parole. La force de la voix au désert est telle qu’elle démasque l’hypocrisie des puissants, qu’elle renverse les tyrans de leur trône, qu’elle redonne aux humbles le courage de ne pas se laisser dominer.

Chaque baptisé reçoit cette mission prophétique avec l’onction d’huile.

Qu’en faisons-nous ?

Quelle est notre voix, et dans quel désert est-elle appelée à retentir ?

Croyons en la puissance de cette voix, et la parole qu’elle porte pourra à travers nous convertir des foules entières à vivre une vie plus droite. Dans nos familles, nos entreprises, le quartier, des foules attendent qu’on les appelle au désert pour noyer leurs esclavages.

Ne nous dérobons pas à cette vocation prophétique, qui passe par le courage d’être différents, minoritaires, afin d’ouvrir à tous le chemin du salut.

 

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* Les poils de chameau symbolisent la solidarité de Jean-Baptiste avec les nations païennes impures, et le salut qui leur est offert. Car le chameau est un animal impur pour les juifs. Et les sauterelles renvoient sans doute aux plaies d’Égypte : un avertissement pour souligner l’urgence de la conversion avant qu’il ne soit trop tard.

** La langue familière dit aussi : pisser dans un violon !

1ère lecture : Le Messie, roi de paix (Is 11, 1-10)

Lecture du livre d’Isaïe

Parole du Seigneur Dieu :
Un rameau sortira de la souche de Jessé, père de David, un rejeton jaillira de ses racines.
Sur lui reposera l’esprit du Seigneur : esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur,
qui lui inspirera la crainte du Seigneur. Il ne jugera pas d’après les apparences, il ne tranchera pas d’après ce qu’il entend dire.
Il jugera les petits avec justice, il tranchera avec droiture en faveur des pauvres du pays. Comme un bâton, sa parole frappera le pays, le souffle de ses lèvres fera mourir le méchant.
Justice est la ceinture de ses hanches ; fidélité, le baudrier de ses reins.

Le loup habitera avec l’agneau, le léopard se couchera près du chevreau, le veau et le lionceau seront nourris ensemble, un petit garçon les conduira.
La vache et l’ourse auront même pâturage, leurs petits auront même gîte. Le lion, comme le b?uf, mangera du fourrage.
Le nourrisson s’amusera sur le nid du cobra, sur le trou de la vipère l’enfant étendra la main.
Il ne se fera plus rien de mauvais ni de corrompusur ma montagne sainte ; car la connaissance du Seigneur remplira le pays comme les eaux recouvrent le fond de la mer.

Ce jour-là, la racine de Jessé, père de David, sera dressée comme un étendard pour les peuples, les nations la chercheront, et la gloire sera sa demeure.

Psaume : Ps 71, 1-2, 7-8, 12-13, 17

R/ Voici venir un jour sans fin de justice et de paix.

Dieu, donne au roi tes pouvoirs,
à ce fils de roi ta justice.
Qu’il gouverne ton peuple avec justice,
qu’il fasse droit aux malheureux !

En ces jours-là, fleurira la justice, 
grande paix jusqu’à la fin des lunes ! 
Qu’il domine de la mer à la mer, 
et du Fleuve jusqu’au bout de la terre !

Il délivrera le pauvre qui appelle 
et le malheureux sans recours. 
Il aura souci du faible et du pauvre, 
du pauvre dont il sauve la vie.

Que son nom dure toujours ; 
sous le soleil, que subsiste son nom ! 
En lui, que soient bénies toutes les familles de la terre ; 
que tous les pays le disent bienheureux !

2ème lecture : L’espérance offerte par l’Écriture s’étend à toutes les nations (Rm 15, 4-9)
Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Frères, tout ce que les livres saints ont dit avant nous est écrit pour nous instruire, afin que nous possédions l’espérance grâce à la persévérance et au courage que donne l’Écriture. Que le Dieu de la persévérance et du courage vous donne d’être d’accord entre vous selon l’esprit du Christ Jésus. Ainsi, d’un même coeur, d’une même voix, vous rendrez gloire à Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ.
Accueillez-vous donc les uns les autres comme le Christ vous a accueillis pour la gloire de Dieu, vous qui étiez païens. Si le Christ s’est fait le serviteur des Juifs, c’est en raison de la fidélité de Dieu, pour garantir les promesses faites à nos pères ; mais, je vous le déclare, c’est en raison de la miséricorde de Dieu que les nations païennes peuvent lui rendre gloire ; comme le dit l’Écriture : Je te louerai parmi les nations, je chanterai ton nom.

Evangile : Jean Baptiste annonce que le Messie vient juger le monde (Mt 3, 1-12)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez la route : tout homme verra le salut de Dieu. Alléluia. (cf. Lc 3, 4.6)
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

En ces jours-là, paraît Jean le Baptiste, qui proclame dans le désert de Judée :
« Convertissez-vous, car le Royaume des cieux est tout proche. » Jean est celui que désignait la parole transmise par le prophète Isaïe : À travers le désert, une voix crie : Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route.
Jean portait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins ; il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage.

Alors Jérusalem, toute la Judée et toute la région du Jourdain venaient à lui,
et ils se faisaient baptiser par lui dans le Jourdain en reconnaissant leurs péchés. 
Voyant des pharisiens et des sadducéens venir en grand nombre à ce baptême, il leur dit : « Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? Produisez donc un fruit qui exprime votre conversion, et n’allez pas dire en vous-mêmes : ‘Nous avons Abraham pour père’ ; car, je vous le dis : avec les pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham. Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu.
Moi, je vous baptise dans l’eau, pour vous amener à la conversion. Mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et dans le feu ; il tient la pelle à vanner dans sa main, il va nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera le grain dans son grenier. Quant à la paille, il la brûlera dans un feu qui ne s’éteint pas. »
Patrick Braud

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30 novembre 2013

Gravity, la nouvelle arche de Noé ?

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Gravity, la nouvelle arche de Noé ?


Homélie du 1° Dimanche de l’Avent / Année A
01/12/2013

Pour évoquer sa venue en ce premier dimanche de l’Avent, Jésus revient au Déluge et à l’Arche qui a permis à Noé et à sa famille d’échapper à la catastrophe.

« L’avènement du Fils de l’homme ressemblera à ce qui s’est passé à l’époque de Noé.
À cette époque, avant le déluge, on mangeait, on buvait, on se mariait, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche.
Les gens ne se sont doutés de rien, jusqu’au déluge qui les a tous engloutis : tel sera aussi l’avènement du Fils de l’homme. » (Mt 24, 37-44)

Le dernier film d’Alfonso Cuarón, Gravity, peut nous aider à revisiter cette image de l’Arche de Noé, transposée dans notre monde moderne, technique, scientifique et individualiste.

Vous connaissez sans doute le scénario de ce blockbuster. Un vaisseau spatial américain Explorer est désintégré dans une pluie de débris provenant d’autres satellites. Deux astronautes seulement en réchappent, expulsés dans l’espace (Matt Kowalski = George Clooney, et la scientifique Ryan Stone = Sandra Bullock) 1. Pour survivre, ils se déplacent vers une station internationale, mais l’un des deux doit se sacrifier pour permettre à l’autre d’y arriver. La survivante – Ryan - seule et menacée, se réfugie dans une navette pour tenter de rejoindre une troisième station chinoise, où un vaisseau de secours pourra la ramener à terre.

Gravity 

On peut suivre cette aventure en la lisant au premier degré : une belle histoire de sacrifice de l’un, la volonté de survie de l’autre, des images magnifiques (surtout en 3D) de notre planète vue de l’espace.

 

La perte de repères

On peut également lire ce film au second degré.

Voilà une jeune femme qui tout d’un coup est expulsée de sa base, projetée dans un espace inconnu où très vite elle est seule, isolée. Un déluge de débris venus eux-mêmes de la destruction d’autres satellites a désintégré son univers. Triste constat : ce sont des débris insignifiants, provoqués par d’autres, qui projetés à la vitesse de rotation autour de la Terre, deviennent un déluge engloutissant tout sur son passage. Voilà déjà une interprétation novatrice du vieux thème du déluge : c’est un presque rien qui vient tout détruire ; c’est une réaction en chaîne où le mal provoqué ailleurs entraîne le déluge ici.

Soyons attentifs à ces débris qui traversent notre trajectoire : ils annoncent souvent l’effondrement qui vient.

Soyons attentifs aux réactions en chaîne qui répandent le mal comme une traînée de poudre : ces séries noires finiront un jour par nous atteindre.

Gravity, la nouvelle arche de Noé ? dans Communauté spirituelle gravity-debris 

La perte de repères se glisse jusque dans son prénom : Ryan est un prénom masculin, parce que son père voulait un fils au lieu d’une fille. Elle porte ce prénom d’un homme, alors que justement elle n’a plus d’homme dans sa vie, et qu’elle est mère d’une enfant décédée à l’âge de 4 ans?

Le déluge de Gravity est cette pluie de ‘débris’ du savoir humain qui viennent cribler la demeure transitoire des astronautes. Projetée dans l’espace, coupée de sa base, Ryan n’a plus de repères visuels, ni le repère de la gravité. Tout est littéralement sens-dessus-dessous. On se souvient d’ailleurs que le mot hébreu pour dire déluge est : maboul, tant il est vrai que l’épreuve du déluge peut rendre fou en faisant disparaître nos repères, notre gravité intérieure.

Il est des catastrophes personnelles et collectives qui produisent cet effet-là.

Les familles juives expulsées hors de chez elles et projetées dans l’horreur de la Shoah étaient dans cet état d’esprit d’apesanteur morale et spirituelle.

La pluie de débris peut prendre la figure d’un divorce : séparation nourrie de ces multitudes d’impacts relationnels où le couple est passé au crible de ce qui justement le crible de partout.

C’est également un licenciement où explose la fragile sécurité d’un toit, d’un équilibre de vie.

Ou bien le coup de tonnerre d’un cancer dépisté trop tard, où l’on anticipe la fin sûrement très proche…

Bref, les déluges d’aujourd’hui sont aussi puissants que celui qui a submergé le monde de Noé ou la station spatiale de Gravity.

 

Face au déluge, où est l’arche ?

Pour Noé c’est ce vaisseau de bois qui va lui permettre de sauver sa famille, 8 personnes au total, car 8 et le chiffre de la résurrection (cf. 1P 3,20 ; 2P 2,5).

Pour Gravity, c’est le module de la station internationale, puis la capsule de retour sur Terre de la station chinoise. Mais là, individualisme moderne oblige, Ryan est la seule rescapée. Et elle n’inaugure pas un monde nouveau (ce que fait Noé) mais le retour à la bonne vieille Terre, au bon vieux plancher des vaches qu’elle étreint de ses mains en réalisant enfin qu’elle est sauvée.

L’Avent est pour les chrétiens l’interdiction de revenir à l’ancien monde, « l’ardente obligation » 2 de quitter ce monde-ci pour accueillir un monde nouveau. La venue du Christ à la fin des temps ne sera pas la restauration de notre univers enfin corrigé de ses imperfections, mais la création d’une autre réalité où « Dieu sera tout en tous » (1Co 15,28).

arche-noe-mont-ararat Arche dans Communauté spirituelle 

Qu’est-ce qui permet de survivre quand le déluge s’abat sur vous ?

Dans la Genèse, c’est la foi qui donne à Noé de construire l’arche malgré les railleries de ses contemporains. C’est la foi qui lui donne le courage d’être minoritaire. C’est la foi qui lui donne la patience d’attendre 40 jours et 40 nuits, les plus longues de son existence, pour constater enfin la décrue des eaux du déluge.

Dans Gravity, c’est d’abord le déplacement qui sauve Ryan. Elle accepte de se laisser traîner par Matt vers un autre coin de l’espace, où la station internationale sera un relais. Quand on a perdu tous ses repères, quand on est  coupé de sa base, quand son univers familier s’est désintégré sous ses yeux, alors on est prêt à aller ailleurs, prêts à tout quitter puisqu’il ne reste plus rien qui tienne encore debout. Ce déplacement, ce dépaysement est salutaire. C’est ce qui permet de trouver une autre source d’oxygène, un autre véhicule pour atterrir enfin. Le russe, le chinois : autant de langues inconnues que Ryan devra traverser pour quand même arriver à maîtriser son vaisseau.

De manière touchante, dans Gravity interviennent également d’autres facteurs de salut pour tenir bon après le déluge :

- l’aide d’un compagnon de route – ou plutôt d’espace ici – qui peut aller jusqu’à se sacrifier pour m’offrir de survivre.

- le souvenir de sa petite-fille de quatre ans – Sarah – morte à la suite d’un bête accident domestique, un de ces débris qui causent des catastrophes sur Terre. C’est dans la fidélité à sa fille que sa mère veut survivre malgré tout. On se bat toujours pour ceux qu’on aime, même s’ils ne sont plus là.

Noé se battait pour sa famille, nouvelle génération du monde d’après. Ryan se bat pour elle-même, pour que son compagnon d’espace ne soit pas mort en vain. Elle s’appuie en même temps sur la mémoire de son enfant morte pour ne pas se laisser engloutir par le désespoir.

Un moment donné, elle est dans sa capsule : plus de carburant, l’oxygène baisse dangereusement. Recroquevillée sur elle-même, seule au monde, elle est tentée par  cette pente dépressive qui guette tous ceux qui n’en peuvent plus tellement le déluge dure : elle commence à se laisser mourir, asphyxiée, abandonnée… C’est alors un rêve étrange, où Matt vient lui expliquer la manoeuvre à suivre, qui va la tirer de sa torpeur suicidaire. Une version sécularisée en somme de la colombe de Noé où le rameau d’olivier se change en rétropropulseurs d’atterrissage… L’intérêt est le message commun : porter attention aux signes de renouveau (le rameau d’olivier), aux possibilités de redémarrage (les propulseurs) est l’antidote à la dépression qu’engendre l’après-déluge.

san-marco_-noe-envoie-la-co Avent 

- Ryan n’a pas appris à prier. Elle aimerait pouvoir compter sur cette force-là à ce moment de sa vie, mais n’a ni les mots ni les gestes. La tradition spirituelle dit pourtant que le désir de la prière vaut mieux que la prière elle-même. Le regard de Ryan se porte sur l’icône de saint Christophe posée sur le tableau de bord russe, puis sur le Bouddha qui trône au-dessus du panneau chinois. Nul doute que cet appel à la prière sous la forme d’un autel pour Noé, d’un rêve pour Jacob, d’une icône pour Ryan est un fil rouge pour tenir bon jusqu’à la fin de l’épreuve.

 

Gravity n’est évidemment pas une oeuvre théologique.

Lorsque le Christ déchiffre sa venue comme un nouveau déluge, il va infiniment plus loin qu’un bon film de science-fiction. Et Gravity comporte bien des défauts (très américains d’ailleurs : par exemple les clichés sur la vodka, les raquettes de ping-pong etc.). On regrette qu’il n’ait pas la force de 2001 : L’odyssée de l’espace de Stanley Kubrick. Mais il y a dans ce film assez d’interrogations sur nos déluges d’aujourd’hui pour nous aider à entrer en Avent avec sagesse.

Lorsque viendra la pluie de ‘débris’ qui va ruiner votre équilibre actuel, souvenez-vous de Noé et de son arche, de Ryan et de sa volonté de survivre.

La fin de l’épreuve sera le début d’un monde nouveau.

 

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1. Tiens ! : Kowalski sonne polonais, comme un hommage au melting pot américain qui rend possible ces grandes aventures, et Stone évoque la chute d’une pierre sous l’influence de la gravité (to fall like a stone).

2. Expression chère à De Gaulle pour désigner le Plan quinquennal de son gouvernement.

1ère lecture : Rassemblement des peuples et paix pour toujours (Is 2, 1-5)

Lecture du livre d’Isaïe

Le prophète Isaïe a reçu cette révélation au sujet de Juda et de Jérusalem :
Il arrivera dans l’avenir que la montagne du temple du Seigneur sera placée à la tête des montagnes et dominera les collines. Toutes les nations afflueront vers elle,
des peuples nombreux se mettront en marche, et ils diront : « Venez, montons à la montagne du Seigneur, au temple du Dieu de Jacob. Il nous enseignera ses chemins et nous suivrons ses sentiers. Car c’est de Sion que vient la Loi, de Jérusalem la parole du Seigneur. »
Il sera le juge des nations, l’arbitre de la multitude des peuples. De leurs épées ils forgeront des socs de charrue, et de leurs lances, des faucilles. On ne lèvera plus l’épée nation contre nation, on ne s’entraînera plus pour la guerre.
Venez, famille de Jacob, marchons à la lumière du Seigneur.

Psaume : Ps 121, 1-2, 3-4ab, 4cd-5, 6-7, 8-9

R/ Allons dans la joie à la rencontre du Seigneur.

Quelle joie quand on m’a dit :
« Nous irons à la maison du Seigneur ! »
Maintenant notre marche prend fin
devant tes portes, Jérusalem ! 

Jérusalem, te voici dans tes murs : 
ville où tout ensemble ne fait qu’un! 
C’est là que montent les tribus, 
les tribus du Seigneur.

C’est là qu’Israël doit rendre grâce 
au nom du Seigneur. 
C’est là le siège du droit, 
le siège de la maison de David. 

Appelez le bonheur sur Jérusalem : 
« Paix à ceux qui t’aiment ! 
Que la paix règne dans tes murs, 
le bonheur dans tes palais ! » 

À cause de mes frères et de mes proches, 
je dirai : « Paix sur toi ! » 
À cause de la maison du Seigneur notre Dieu, 
je désire ton bien.

2ème lecture : « Le jour est tout proche » (Rm 13, 11-14a)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Frère, vous le savez : c’est le moment, l’heure est venue de sortir de votre sommeil. Car le salut est plus près de nous maintenant qu’à l’époque où nous sommes devenus croyants.
La nuit est bientôt finie, le jour est tout proche. Rejetons les activités des ténèbres, revêtons-nous pour le combat de la lumière.
Conduisons-nous honnêtement, comme on le fait en plein jour, sans ripailles ni beuveries, sans orgies ni débauches, sans dispute ni jalousie, mais revêtez le Seigneur Jésus Christ.

Evangile : « Vous ne connaissez pas le jour où votre Seigneur viendra » (Mt 24, 37-44)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Montre-nous, Seigneur, ta miséricorde : fais-nous voir le jour de ton salut. Alléluia.  (cf. Ps 84, 8)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « L’avènement du Fils de l’homme ressemblera à ce qui s’est passé à l’époque de Noé.
À cette époque, avant le déluge, on mangeait, on buvait, on se mariait, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche.
Les gens ne se sont doutés de rien, jusqu’au déluge qui les a tous engloutis : tel sera aussi l’avènement du Fils de l’homme.
Deux hommes seront aux champs : l’un est pris, l’autre laissé.
Deux femmes seront au moulin : l’une est prise, l’autre laissée.
Veillez donc, car vous ne connaissez pas le jour où votre Seigneur viendra.
Vous le savez bien : si le maître de maison avait su à quelle heure de la nuit le voleur viendrait, il aurait veillé et n’aurait pas laissé percer le mur de sa maison.
Tenez-vous donc prêts, vous aussi : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. »
Patrick Braud

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23 novembre 2013

Le Christ Roi fait de nous des huiles

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Le Christ Roi fait de nous des huiles

Homélie du Dimanche 24 Novembre 2013 / Année C
Fête du Christ Roi

Qu’est-ce qui fait roi un homme ?

Le Christ Roi fait de nous des huiles dans Communauté spirituelle david1

Chez nous, ce qui fait un président c’est le soir du résultat des élections, et la cérémonie d’investiture qui suit (rappelez-vous Mitterrand au Panthéon une rose à la main?).

En Israël, ce qui faisait un roi, c’était l’onction, et l’onction d’huile.

 

La 1ère lecture décrivait ce rite d’intronisation : « ils donnèrent l’onction à David pour le faire roi sur Israël ». Être oint, recevoir l’onction, en grec, cela s’appelle la chrismation : devenir un Christ ! Appeler Jésus « le Christ », c’est reconnaître en lui un successeur de David, quelqu’un qui a reçu l’onction l’intronisant roi.

 

D’ailleurs par le baptême, par l’onction d’huile du baptême, nous devenons tous des oints, des christs !

À tel point que Cyrille de Jérusalem (4° siècle) avertissait le pouvoir romain qui persécutait les nouveaux baptisés : « ne touchez pas à mes christs ! »c’est-à-dire « ne touchez pas à ceux qui par l’onction d’huile sont devenus comme des christs. »

 

L’onction royale de notre baptême est donc à la fête en ce dimanche du Christ Roi, point d’orgue de l’année liturgique.

Dieu-roi-supr%C3%AAme-d%E2%80%99Isra%C3%ABl-L%E2%80%99onction-d%E2%80%99huile-qui-fait-les-messies baptême dans Communauté spirituelle« Toi qui fais maintenant partie de son peuple, Dieu te marque de l’huile sainte, afin que tu demeures éternellement membre de Jésus-Christ, prêtre, prophète, et roi » : ces paroles au moment où le prêtre/diacre verse l’huile sur le front d’un catéchumène en le signant avec cette huile, ces paroles redisent la grandeur royale de tout homme, de tout être humain. « L’homme, la seule créature que Dieu ait voulue pour elle-même » rappelle le Concile Vatican II (Gaudium et spes)…

Que nous dit cette onction d’huile de notre baptême, par laquelle nous participons à la royauté de David, bien plus encore : à la royauté du Christ ?

Comme un massage, où l’huile pénètre au plus profond de votre peau, la chrismation ouvre la voie à l’Esprit Saint au plus intime de votre coeur.


Comme un
parfum qui se dégage ensuite du corps, la chrismation vous invite à laisser émaner de vous une bonne odeur d’évangile, de sainteté, grâce à l’Esprit Saint qui travaille en vous.


Comme une
marque brillante qui luit sur le front du baptisé, la chrismation vous distingue entre tous, portant la trace de l’appartenance au Christ, comme un diadème royal.


Comme une
pommade qu’on applique sur des plaies pour les désinfecter et les soigner, l’huile vient apaiser vos brûlures intérieures, guérir vos blessures les plus secrètes? (cf. le Samaritain versant de l’huile sur les plaies du blessé?).


Comme une
énergie pour brûler et faire briller la clarté au bout d’une mèche de lampe, l’huile du baptême fait de vous des êtres de lumière pour illuminer le monde.

 

Voilà où s’enracine la dignité royale de tout baptisé : participer à la royauté du Christ sur l’univers.

En le transformant, par la science et les techniques.

En l’aimant, en bon gestionnaire qui sait bien ne pas être propriétaire de la Création, mais son ami, son partenaire.

Dans le travail professionnel tout particulièrement, cette dimension royale est à l’oeuvre. 

Parce que le travail est l’exercice ordinaire de la royauté de l’homme sur le monde, il ne faut pas espérer vivre l’évangile en dehors de cette réalité royale.

Se sanctifier par le travail, sanctifier le travail lui-même, et sanctifier le monde à travers le travail : l’onction d’huile du baptême nous donne une spiritualité très concrète, très ordinaire, très simple.

Mais faire son travail en ayant conscience de participer à la royauté du Christ sur l’univers, cela change tout ?

Car il y a bien un lien entre ces deux royautés que nous fêtons aujourd’hui : celle du Christ et la nôtre. Dans notre évangile de ce Dimanche, comment Jésus manifeste-t-il qu’il est Roi ? Paradoxalement ! En se recevant d’un Autre.  En refusant de se sauver soi-même.

Vous l’avez entendu, cette dernière tentation sur la Croix, qui revient par 3 fois dans le texte : « si tu es le Roi des Juifs, le Messie, l’oint de Dieu sauve-toi toi-même ! » Jésus résiste à cette tentation de l’auto-rédemption ; il a confiance en son Père ; il se reçoit de lui jusqu’au bout.

En cela il est Roi, parce que le rôle du Roi est de renvoyer sans cesse à un Autre que lui-même. Et il associe le « bon larron » à cette formidable aventure : puisque ce criminel accepte de recevoir, d’être sauvé par un Autre, il lui sera beaucoup donné, dès aujourd’hui, en Paradis.

Faudrait-il être un peu larron pour devenir Roi ? Peut-être?, car « celui à qui on pardonne peu montre peu d’amour »? comme l’affirmait Jésus en contemplant l’amour de la pécheresse qui justement lui versait un parfum précieux sur les pieds.

 

Que cette fête du Christ Roi nous aide à reprendre conscience de ce que l’onction d’huile sur notre front ne cesse d’opérer en nous depuis notre baptême : tu es le roi du monde, pour l’aimer, le chérir, à la manière du Christ, en Christ.

 

1ère lecture : David reçoit l’onction royale (2 S 5, 1-3)

Lecture du second livre de Samuel

Toutes les tribus d’Israël vinrent trouver David à Hébron et lui dirent : « Nous sommes du même sang que toi ! Dans le passé déjà, quand Saül était notre roi, tu dirigeais les mouvements de l’armée d’Israël, et le Seigneur t’a dit : ‘Tu seras le pasteur d’Israël mon peuple, tu seras le chef d’Israël.’ »
C’est ainsi que tous les anciens d’Israël vinrent trouver le roi à Hébron. Le roi David fit alliance avec eux, à Hébron, devant le Seigneur. Ils donnèrent l’onction à David pour le faire roi sur Israël.

Psaume : Ps 121, 1-2, 3-4, 5-6a.7a

R/ Ton règne, Seigneur, est un règne de paix.

Quelle joie quand on m’a dit :
« Nous irons à la maison du Seigneur ! »
Maintenant notre marche prend fin
devant tes portes, Jérusalem !

Jérusalem, te voici dans tes murs : 
ville où tout ensemble ne fait qu’un !
C’est là que montent les tribus, les tribus du Seigneur, 
là qu’Israël doit rendre grâce au nom du Seigneur.

C’est là le siège du droit, 
le siège de la maison de David.
Appelez le bonheur sur Jérusalem : 
« Que la paix règne dans tes murs ! »

2ème lecture : Dieu nous a fait entrer dans le royaume de son Fils (Col 1, 12-20)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens

Frères,
rendrez grâce à Dieu le Père, qui vous a rendus capables d’avoir part, dans la lumière, à l’héritage du peuple saint.
Il nous a arrachés au pouvoir des ténèbres, il nous a fait entrer dans le royaume de son Fils bien-aimé, par qui nous sommes rachetés et par qui nos péchés sont pardonnés.
Lui, le Fils, Il est l’image du Dieu invisible, le premier-né par rapport à toute créature, car c’est en lui que tout a été créé dans les cieux et sur la terre, les êtres visibles et les puissances invisibles : tout est créé par lui et pour lui.
Il est avant tous les êtres, et tout subsiste en lui. 

Il est aussi la tête du corps, c’est-à-dire de l’Église. Il est le commencement, le premier-né d’entre les morts, puisqu’il devait avoir en tout la primauté.
Car Dieu a voulu que dans le Christ toute chose ait son accomplissement total.
Il a voulu tout réconcilier par lui et pour lui, sur la terre et dans les cieux, en faisant la paix par le sang de sa croix.

Evangile : Le Roi crucifié (Lc 23, 35-43)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Béni soit le règne de David notre Père, le Royaume des temps nouveaux ! Béni soit au nom du Seigneur Celui qui vient ! Alléluia. (cf. Mc 11, 10)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

On venait de crucifier Jésus, et le peuple restait là à regarder. Les chefs ricanaient en disant : « Il en a sauvé d’autres : qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu ! »
Les soldats aussi se moquaient de lui. S’approchant pour lui donner de la boisson vinaigrée, ils lui disaient : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même ! »
Une inscription était placée au-dessus de sa tête : « Celui-ci est le roi des Juifs. »
L’un des malfaiteurs suspendus à la croix l’injuriait : « N’es-tu pas le Messie ? Sauve-toi toi-même, et nous avec ! »
Mais l’autre lui fit de vifs reproches : « Tu n’as donc aucune crainte de Dieu ! Tu es pourtant un condamné, toi aussi ! Et puis, pour nous, c’est juste : après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons. Mais lui, il n’a rien fait de mal. »
Et il disait : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton Règne. »
Jésus lui répondit : « Amen, je te le déclare : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. »
Patrick Braud

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16 novembre 2013

« Même pas peur »…

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

« Même pas peur »…

Homélie du 33° Dimanche / Année C
Dimanche 17 Novembre 2013
Journée nationale du Secours Catholique

  

La peur de la fin du monde est comme une constante de l’histoire de l’humanité.

À croire que cette peur est utile à certains qui l’exploitent.

Du temps de Jésus, la peur de la fin du monde, c’était la peur de l’anéantissement d’Israël par les Romains, la peur de la destruction du temple de Jérusalem évoquée par Jésus, ou l’arrivée triomphale du Messie Juif. Mais ce n’était jamais que la fin d’un monde (et non la fin du monde).

Plus près de nous, les deux dernières guerres mondiales ont ravivé cette peur.

Puis il y a eu la guerre froide et la peur de l’auto-destruction nucléaire.

Le marxisme chantait d’ailleurs à l’époque l’écroulement inéluctable de l’économie de marché, et manipulait cette peur pour hâter la venue d’une société nouvelle d’après le cataclysme.

Certains courants écologiques ont pris le relais, prophétisant la fin de la planète…

Ou certains courants politiques ont utilisé la peur du 11 septembre comme la menace de la fin de notre monde.

 « Même pas peur »... dans Communauté spirituelle 561186-meme-pas-peur-du-haka

Vous voyez, chaque période crée sa peur, comme un miroir. 

Or, Jésus refuse de se laisser entraîner dans cette excitation apocalyptique.

Il nous avertit : « Quand vous entendrez parler de ces catastrophes, ne vous effrayez pas. Ce ne sera pas tout de suite la fin ».

Ne vous laissez donc pas prendre à la fascination des grandes catastrophes.

Ne vous laissez pas entraîner par ce pessimisme ambiant qui laisse la peur dominer sur la raison.

Ne soyez pas effrayés par ceux qui vous annoncent la fin du monde, ou même la fin d’un monde.

D’ailleurs, pour nous chrétiens, la fin du monde a déjà eu lieu !

Aussi étonnant que cela puisse paraître, dans l’évangile, la fin du monde est déjà arrivée, le Règne de Dieu est déjà au milieu de nous !

Ce n’est pas au terme de l’histoire que sera révélée la vérité de l’homme, c’est au milieu de l’histoire que cela a été accompli, dans la Passion-Résurrection du Christ.

Voilà pourquoi nous sommes libres de ne pas courir après les dernières peurs à la mode.

Quand le Christ prononce : « Tout est accompli » sur la croix, c’est réellement la fin, la plénitude, le terme qui est déjà à l’oeuvre, présent dans nos vies.

Regardez les façade de nos cathédrales romanes : le Christ dans la mandorle de gloire attire à lui tous les hommes, toute l’histoire, tout l’univers.

C’est le Christ de l’Ascension qui a déjà tout accompli lorsqu’il est élevé auprès du Père.

C’est en même temps le Christ de la fin des temps qui reviendra manifester la vérité du monde.

Mais depuis l’Ascension, notre monde a déjà basculé en Christ du côté de la Résurrection, de la divinisation de l’homme.

 

Quelles sont les conséquences pratiques de cette conception chrétienne de la fin du monde au milieu de l’histoire ?

- D’abord ne plus avoir peur.

Les prophètes de malheur ne pourront jamais nous détourner de ce qui est pleinement accompli en Christ.

- Ensuite, nous sommes libres :

* Libres de témoigner de cet avenir déjà présent, jusque dans la persécution s’il le faut.

* Libres de ne pas être fascinés par les chiffres, par le quantitatif, car si le Royaume est déjà là sous forme de graine, cela suffit pour tout transformer.

* Libres de combattre tout catastrophisme, toute « terreur sacrée » où l’on voudrait nous embrigader dans des pensées inhumaines, comme le marxisme autrefois, sous prétexte de fin du monde. 

* Libres enfin de travailler – comme les martyrs des 1er siècles alors que l’empire romain s’écroulait – à l’émergence d’un monde nouveau que Dieu façonne sans cesse.

Ne nous résignons pas à la résignation ambiante.

Nous avons oublié l’eschatologie (c’est-à-dire l’espérance en l’accomplissement final) et sa réalité profonde : l’Éternel est présent dans le temps et les signes du Royaume de Dieu sont semés dans la lourde pâte de notre monde. À nous de discerner cette pédagogie divine à base de confiance.

Demandez aux 65 000 bénévoles du Secours catholique s’ils se résignent ! Demandez aux 1000 salariés du Secours s’ils s’affolent ! La pauvreté augmente en France, c’est vrai. Mais en cette journée Nationale du Secours Catholique, nous ne cédons pas au catastrophisme.

Partout, notre don agit. Le Secours catholique est un service de l’Église de France pour faire rayonner la charité, pour que partout votre don agisse, par la prière, le don matériel, le soutien scolaire, en créant des groupes de parole, des lieux de fraternité, en interpellant la société au sujet des plus faibles. Le rapport annuel du Secours Catholique sur la pauvreté en France insistait notamment sur la détresse grandissante de ce que l’on appelle pudiquement : ‘les familles monoparentales’, c’est-à-dire les femme seules avec enfants. Mais ce n’est pas nous faire peur que le Secours nous informe, c’est pour agir !…

Si on vous parle de catastrophes et de fin du monde, ne vous effrayez donc pas, nous redit Jésus aujourd’hui. « N’y allez pas ! N’y courez pas ! » (Lc 17,23).

Gardez en vous cette distance intérieure, cette « réserve eschatologique » (Jean-Baptiste Metz) qui vient de votre appartenance à l’autre monde, celui que le Christ a déjà inauguré par sa Résurrection et son Ascension au plus haut.

Ne vous laissez pas égarer par les dernières peurs à la mode…

 

 

1ère lecture : De l’esclavage du péché au service de Dieu (Rm 6, 12-18)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Frères, il ne faut pas que le péché règne dans votre corps mortel et vous fasse obéir à ses désirs. Ne mettez pas les membres de votre corps au service du péché pour mener le combat du mal : mettez-vous au contraire au service de Dieu comme des vivants revenus de la mort, et offrez à Dieu vos membres pour le combat de sa justice. Car le péché n’aura plus sur vous aucun pouvoir : en effet, vous n’êtes plus sujets de la Loi, vous êtes sujets de la grâce de Dieu.
Alors ? Puisque nous ne sommes pas sujets de la Loi, mais de la grâce, allons-nous recommencer à pécher ? Absolument pas. Vous le savez bien : en vous mettant au service de quelqu’un pour lui obéir comme esclaves, vous voilà esclaves de celui à qui vous obéissez : soit du péché, qui est un chemin de mort ; soit de l’obéissance à Dieu, qui est un chemin de justice. Mais rendons grâce à Dieu : vous qui étiez esclaves du péché, vous avez maintenant obéi de tout votre c?ur à l’enseignement de base auquel Dieu vous a soumis. Vous avez été libérés du péché, vous êtes devenus les esclaves de la justice.

Psaume : 123, 2-3, 4-5, 7
R/ Notre secours est dans le nom du Seigneur.

Sans le Seigneur qui était pour nous
quand des hommes nous assaillirent,
alors ils nous avalaient tout vivants,
dans le feu de leur colère.

Alors le flot passait sur nous, 
   le torrent nous submergeait ; 
alors nous étions submergés 
   par les flots en furie.

Comme un oiseau, nous avons échappé 
   au filet du chasseur ; 
le filet s’est rompu : 
   nous avons échappé.

Evangile : Attendre le retour du Seigneur : parabole de l’intendant fidèle (Lc 12, 39-48)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Heureux celui qui veille dans la prière : il sera jugé digne de paraître debout devant le Fils de l’homme. Alléluia.(cf. Lc 21, 36)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Jésus disait à ses disciples : « Vous le savez bien : si le maître de maison connaissait l’heure où le voleur doit venir, il ne laisserait pas percer le mur de sa maison. Vous aussi, tenez-vous prêts : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. »
Pierre dit alors : « Seigneur, cette parabole s’adresse-t-elle à nous, ou à tout le monde ? »
Le Seigneur répond : « Quel est donc l’intendant fidèle et sensé à qui le maître confiera la charge de ses domestiques pour leur donner, en temps voulu, leur part de blé ?
Heureux serviteur, que son maître, en arrivant, trouvera à son travail. Vraiment, je vous le déclare : il lui confiera la charge de tous ses biens.
Mais si le même serviteur se dit : ‘Mon maître tarde à venir’, et s’il se met à frapper serviteurs et servantes, à manger, à boire et à s’enivrer, son maître viendra le jour où il ne l’attend pas et à l’heure qu’il n’a pas prévue ; il se séparera de lui et le mettra parmi les infidèles.
Le serviteur qui, connaissant la volonté de son maître, n’a pourtant rien préparé, ni accompli cette volonté, recevra un grand nombre de coups.
Mais celui qui ne la connaissait pas, et qui a mérité des coups pour sa conduite, n’en recevra qu’un petit nombre. À qui l’on a beaucoup donné, on demandera beaucoup ; à qui l’on a beaucoup confié, on réclamera davantage. »
Patrick Braud

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