L'homélie du dimanche (prochain)

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24 août 2013

Dieu aime les païens

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Dieu aime les païens

Homélie du 21° Dimanche du temps ordinaire / Année C
25/08/2013

Sans garantie du gouvernement

Dieu aime les païens dans Communauté spirituelle 618062-extremement-rare-telles-accusations-abusLes Frères musulmans d’Égypte ou les hassidims strictement orthodoxes de Jérusalem « grinceront des dents » à entendre les lectures de ce dimanche. Comment ? Faire partie du peuple élu ne suffit pas à être sûr d’être sauvé ? Comment ? Des étrangers venus d’on ne sait où viendraient nous « jeter dehors » pour prendre notre place auprès de Dieu ? Comment ? La pratique rituelle ne nous ouvre pas la « porte étroite » ? Alors, à quoi sert de pratiquer à la mosquée, à la synagogue ou à l’église ? Pourquoi chercher à être le premier dans le domaine de la foi si Dieu s’amuse à intervertir les derniers et les premiers ? (cf. Lc 13,22-30)

C’est ça qui est bien chez le Dieu de la Bible : il prend très souvent à contre-pied les certitudes des croyants trop sûrs d’eux, et ne garantit absolument aucun salut obtenu par la prière, le culte où la tradition. Renversant !

Isaïe annonce que le festin du royaume de Dieu est ouvert à tous les païens des quatre coins de l’horizon : rien ne sert d’être juif, cela ne donne aucune garantie ! Apparemment, dans la bouche d’Isaïe, les païens n’auront rien fait de spécial pour être ainsi associés au festin. Dieu ira les chercher gratuitement, sans autre condition que d’accepter de se laisser rassembler avec l’humanité enfin réconciliée. Par contre, ceux qui auront mangé et bu en présence du Christ se voient reprocher de faire le mal : un comble ! Comme quoi la pratique eucharistique n’est pas un calcul pour obtenir quoi que ce soit. La prière non plus. Prier ou communier relève de la gratuité et non du calcul. De la louange et non de la stratégie. Lorsque Dieu va chercher les païens – sans raison – pour les associer au festin à Jérusalem, il fait un pied de nez aux barbus, aux papillotes, aux soutanes impeccables qui virevoltent dans les lieux saints avec tant d’arrogance.

 

Dieu aime les païens.

Patrick BraudAu moins eux ne cherchent pas à l’utiliser.
Au moins eux seront étonnés d’être choisis et appelés.
Au moins eux auront conscience de ne rien mériter.
Au moins avec eux on est sûr que Dieu aime sans raison, à la limite de l’absurde.

Aimez-vous les païens qui vous entourent, à la manière de Dieu ?

C’est vrai, les chrétiens (et les pratiquants encore plus que les autres) sont minoritaires en France. Au travail, dans un quartier, en famille même ils sont quelques-uns noyés au milieu d’une masse d’indifférents ou d’opposants. La tentation est alors forte de se replier sur son identité religieuse menacée de toutes parts, et au pire de dénigrer ce qui ne vivent pas pareil, au mieux de les considérer avec un rien de mépris au fond des yeux.

Même les manifestants anti mariage-pour-tous sont exposés à ce piège. Sûrs de la droiture de leur opinion, ils risquent de juger les autres, leurs pratiques, leurs idées, avec dureté et intolérance.

 

Dieu aime les païens
En les invitant gratuitement à se rassembler avec les croyants, ils manifestent qui Il est : un amour inconditionnel.
À tous ceux qui se croient à l’abri à cause des multiples fidélités rituelles qu’ils observent soigneusement, l’appel des païens rappelle que c’est la miséricorde que Dieu désire, et non le sacrifice.

À tous ceux qui méprisent plus ou moins les autres parce qu’ils ne partagent pas leurs croyances et leurs pratiques, l’élection des païens résonne comme un signe : il y a beaucoup à apprendre de ceux qui vivent ailleurs ou autrement.

À tous ceux qui désespèrent des conflits religieux ensanglantant les peuples, de l’Égypte à l’Inde en passant par l’Irlande ou la Palestine, le choix par Dieu des païens annonce une immense espérance : Christ est mort pour rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés (Jn 11,52).

Le tout est d’aimer les païens à la manière de Dieu : tels qu’ils sont, invités au festin, associés au même étage. Les messagers (Is 66) qui sont chargés d’annoncer cette nouvelle aux nations lointaines sont chargés également de les ramener à Jérusalem, par tous les moyens possibles : chevaux, chariots, litières, mulets, dromadaires… Comme quoi tous les véhicules culturels sont bons pour ramener les nations vers Dieu ! Conception centripète de la mission d’Israël ou de l’Église, cette passion pour le rassemblement de tous dans l’unité reflète le coeur de Dieu. Jusqu’à prendre des prêtres et des lévites parmi ces païens – ose annoncer Isaïe - les fonctions les plus sacrées en Israël ! Décidément, Dieu ne respecte pas même pas son copyright, doivent penser les auditeurs du prophète…

Alors, regardez d’un autre oeil les païens avec qui vous travaillez, avec qui vous faites du sport, des repas, des sorties.
Dites-vous que ce sont vos voisins de table de demain au festin final.
Dites-vous qu’à travers eux, Dieu vous éduque à dilater votre cœur à ses dimensions à lui.
Apprenez d’eux ce qu’est la gratuité de la foi chrétienne.

1ère lecture : Dieu vient rassembler toutes les nations (Is 66, 18-21)

Lecture du livre d’Isaïe

Parole du Seigneur : Je viens rassembler les hommes de toute nation et de toute langue. Ils viendront et ils verront ma gloire :
je mettrai un signe au milieu d’eux ! J’enverrai des rescapés de mon peuple vers les nations les plus éloignées, vers les îles lointaines qui n’ont pas entendu parler de moi et qui n’ont pas vu ma gloire : ces messagers de mon peuple annonceront ma gloire parmi les nations.
Et, de toutes les nations, ils ramèneront tous vos frères, en offrande au Seigneur, sur des chevaux ou dans des chariots, en litière, à dos de mulets ou de dromadaires. Ils les conduiront jusqu’à ma montagne sainte, à Jérusalem, comme les fils d’Israël apportent l’offrande, dans des vases purs, au temple du Seigneur.
Et même je prendrai des prêtres et des lévites parmi eux. Parole du Seigneur.

Psaume : Ps 116, 1, 2

R/ Allez par le monde entier proclamer la Bonne Nouvelle.

Louez le Seigneur, tous les peuples ; 
fêtez-le, tous les pays ! 

Son amour envers nous s’est montré le plus fort ; 
éternelle est la fidélité du Seigneur !

2ème lecture : Dieu corrige ceux qu’il aime (He 12, 5-7.11-13)

Lecture de la lettre aux Hébreux

Frères, n’oubliez pas cette parole de réconfort, qui vous est adressée comme à des fils : Mon fils, ne néglige pas les leçons du Seigneur, ne te décourage pas quand il te fait des reproches. Quand le Seigneur aime quelqu’un, il lui donne de bonnes leçons ; il corrige tous ceux qu’il reconnaît comme ses fils. 
Ce que vous endurez est une leçon. Dieu se comporte envers vous comme envers des fils ; et quel est le fils auquel son père ne donne pas des leçons ? Quand on vient de recevoir une leçon, on ne se sent pas joyeux, mais plutôt triste. Par contre, quand on s’est repris grâce à la leçon, plus tard, on trouve la paix et l’on devient juste.
C’est pourquoi il est écrit : Redonnez de la vigueur aux mains défaillantes et aux genoux qui fléchissent, et : Nivelez la piste pour y marcher. Ainsi, celui qui boite ne se tordra pas le pied ; bien plus, il sera guéri.

Evangile : L’appel universel au salut et la porte étroite (Lc 13, 22-30)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. De l’Orient à l’Occident, tous les peuples de la terre prendront place à la table de Dieu. Alléluia. (cf. Lc 13, 29)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Dans sa marche vers Jérusalem, Jésus passait par les villes et les villages en enseignant.
Quelqu’un lui demanda : « Seigneur, n’y aura-t-il que peu de gens à être sauvés ? » 
Jésus leur dit : « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et ne le pourront pas.
Quand le maître de la maison se sera levé et aura fermé la porte, si vous, du dehors, vous vous mettez à frapper à la porte, en disant : ‘Seigneur, ouvre-nous’, il vous répondra : ‘Je ne sais pas d’où vous êtes.’
Alors vous vous mettrez à dire : ‘Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné sur nos places.’
Il vous répondra : ‘Je ne sais pas d’où vous êtes. Éloignez-vous de moi, vous tous qui faites le mal.’ 
Il y aura des pleurs et des grincements de dents quand vous verrez Abraham, Isaac et Jacob et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous serez jetés dehors.
Alors on viendra de l’orient et de l’occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume de Dieu.
Oui, il y a des derniers qui seront premiers, et des premiers qui seront derniers. »
Patrick Braud

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17 août 2013

De l’art du renoncement

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De l’art du renoncement

Homélie du 20° Dimanche du temps ordinaire / Année C
18/08/2013

 

« Renonçant à la joie qui lui était proposée, Jésus a enduré, sans avoir de honte, l’humiliation de la croix, et, assis à la droite de Dieu, il règne avec lui. »

Chaque mot de cette phrase de la lettre aux Hébreux de ce Dimanche (He 12,1-4)  heurte notre sensibilité occidentale du XXI° siècle. Chaque mot semble prendre le contre-pied des idéologies soft actuelles sur le bien-être personnel, la recherche de l’épanouissement, le désir de ne pas souffrir, l’investissement dans la vie présente…

Prenez le verbe renoncer : qui prêche le renoncement aujourd’hui ? À part quelques écologistes radicaux prônant la décroissance, et donc la réduction de notre train de vie, qui rappelle cette vieille loi pourtant pleine de sagesse : le renoncement peut devenir un chemin de libération ?

Ce à quoi le Christ renonce, c’est à « la joie qui lui était proposée ». Voilà qui est encore plus scandaleux ! Le christianisme semble tomber ici sous les accusations de Nietzsche : religion de sous-hommes ne pouvant accéder à la joie dionysiaque, et érigeant leur impuissance en chemin de sainteté. Ce serait vrai si la phrase de He 12,3 s’arrêtait là, s’il n’y avait le but, la raison pour laquelle le Christ renonce à la joie possible.

La finalité de ce renoncement, c’est d’ « être assis à la droite de Dieu » et de « régner avec lui ». Avec en plus l’ouverture de cette ascension / assomption à tous ceux qui le suivraient.

Pour avoir oublié ce but ultime, certains courants du christianisme se sont transformés en rabats-joie lugubres que Nietzsche a eu raison de fustiger.

Pour avoir chassé ce but ultime de leur horizon, les courants hédonistes actuels ne comprennent pas que le renoncement est un investissement pour une joie future, éternelle. Seule la perspective eschatologique d’un autre monde en Dieu permet de comprendre le sacrifice (encore un autre mot que la modernité méconnaît) du Christ. Sinon il faut être fou pour ne pas rechercher son bonheur personnel, ici et maintenant, par tous les moyens.

 

En écartant la problématique de la joie présente comme non pertinente, Jésus introduit une contestation révolutionnaire : le salut offert aux autres est plus important que son propre épanouissement du moment. La fidélité à soi-même passe par le dessaisissement de soi pour que les humiliés de la terre puissent être élevés au plus haut.

 

Car le renoncement du Christ à ce à quoi il aurait pu prétendre (la gloire, l’admiration De l'art du renoncement dans Communauté spirituelledes foules, le pouvoir politique et religieux, la vénération populaire etc.) est la condition sine qua non pour qu’il épouse la condition des humiliés. « Il a enduré, sans avoir de honte, l’humiliation de la croix ». Notons au passage que la croix, dans cette interprétation des plus anciennes, est signe d’humiliation et non pas de souffrance physique. C’est en effet le supplice des humiliores dans le monde romain : la croix est le supplice des esclaves (cf. Spartacus et ses 6000 révoltés crucifiés avec lui le long des voies romaines), le supplice infamant qui prive tout juif le subissant des promesses faites à Israël, au point de devenir un « maudit de Dieu » (Ga 3,13; Dt 21,23) dont le corps n’est même pas digne d’être enterré.

La volonté du Christ c’est d’aller au bout de celle de son Père, « jusqu’à l’extrême » (Jn 13,1) : faire corps avec les damnés de la terre pour leur ouvrir un chemin de libération et de vie en Dieu.

En allant les rejoindre, il est assimilé à eux. Leur humiliation devient la sienne ; mais il l’assume « sans honte », alors que les puissants ont réussi en dominant les humiliés à leur faire intérioriser la honte d’être dominés. Il y a dans ce « sans honte » le début du retournement de la situation d’humiliation, comme on retourne un gant de l’intérieur. Le Père Joseph Wrésinsky l’a bien compris, qui a commencé à redonner un nom et une histoire au peuple du Quart-Monde pour qu’il retrouve la fierté d’être lui-même. Les grands libérateurs ont fait de même : Gandhi avec les colonisés indiens, Martin Luther King avec les ?nègres’ américains des années 60, Mandela avec les townships souffrant de ségrégation et de misère etc.

Endurer sans honte l’humiliation de ceux qui en sont écrasés est déjà leur ouvrir la possibilité d’une dignité pleinement rétablie.

 

Ce faisant, il ne faudra pas s’étonner de rencontrer « l’hostilité des pécheurs ». Le combat contre l’hostilité de ses adversaires, Jésus l’a vécu sans aide ni violence. Il a préféré être broyé par la violence adverse plutôt que d’employer contre elle la même logique de puissance, de domination.

Ceux qui veulent défendre les humiliés parmi leurs collègues, leurs salariés, leurs familles même, feront cette expérience au début très amère : prendre le parti des petits suscite l’hostilité, conduit à être méprisé comme eux, et apparemment cette violence semble gagner à court terme. Il faut une sacrée énergie spirituelle pour tenir bon sans « se laisser accabler par le découragement ». Il faut une vision prophétique pour garder « les yeux fixés » sur le long terme, pour surmonter les premières défaites inévitables. Il faut recevoir de Dieu le courage de « résister jusqu’au sang » s’il le faut dans notre lutte contre le mal.

 

Alors les renoncement à opérer nous apparaîtront logiques et efficaces.

Renoncer aux joies immédiates est finalement un bien par rapport à la perspective du règne de Dieu auquel le Christ nous associe. Le bonheur n’est pas un but de la vie présente. La recherche du bonheur personnel pourrait même nous éloigner de notre vrai désir. Le philosophe Alain écrivait : « le bonheur est une récompense qui vient à ceux qui ne l’ont pas cherchée ». Le bonheur est illucide, au sens où c’est en renonçant à lui qu’on peut paradoxalement y demeurer.

 

Quel est notre but ultime ?

Quelles humiliés sommes-nous appelés à défendre ?

À quel renoncement cela nous conduit-il ?

 

 

 

1ère lecture : Le prophète signe de contradiction (Jr 38, 4-6.8-10)

Lecture du livre de Jérémie

Pendant le siège de Jérusalem, les chefs qui tenaient Jérémie en prison dirent au roi Sédécias : « Que cet homme soit mis à mort : en parlant comme il le fait, il démoralise tout ce qui reste de combattant dans la ville, et toute la population. Ce n’est pas le bonheur du peuple qu’il cherche, mais son malheur. »
Le roi répondit : « Il est déjà entre vos mains, et le roi ne peut rien contre vous ! »
Alors ils se saisirent de Jérémie et le jetèrent dans la citerne du prince Melkias, dans la cour de la prison. On le descendit avec des cordes. Dans cette citerne il n’y avait pas d’eau, mais de la boue, et Jérémie s’enfonça dans la boue.
Un officier du palais, l’Éthiopien Ébed-Mélek, vint trouver le roi : « Mon Seigneur le roi, ce qu’ils ont fait au prophète Jérémie, c’est mal ! Ils l’ont jeté dans la citerne, il va y mourir de faim ! »
Alors le roi donna cet ordre à l’Éthiopien Ébed-Mélek : « Prends trois hommes avec toi, et retire de la citerne le prophète Jérémie avant qu’il ne meure. »

Psaume : 39, 2, 3, 4, 18

R/ Seigneur, à mon aide ! Viens à mon secours !

D’un grand espoir 
   j’espérais le Seigneur : 
il s’est penché vers moi 
   pour entendre mon cri. 

Il m’a tiré de l’horreur du gouffre, 
   de la vase et de la boue ; 
il m’a fait reprendre pied sur le roc, 
   il a raffermi mes pas. 

Dans ma bouche il a mis un chant nouveau, 
   une louange à notre Dieu. 
Beaucoup d’hommes verront, ils craindront, 
   ils auront foi dans le Seigneur. 

Je suis pauvre et malheureux, 
   mais le Seigneur pense à moi. 
Tu es mon secours, mon libérateur : 
   mon Dieu, ne tarde pas !

2ème lecture : Le combat dans la foi à l’exemple de Jésus (He 12, 1-4)

Lecture de la lettre aux Hébreux

Frères, ceux qui ont vécu dans la foi, foule immense de témoins, sont là qui nous entoure. Comme eux, débarrassons-nous de tout ce qui nous alourdit, et d’abord du péché qui nous entrave si bien ; alors nous courrons avec endurance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus, qui est à l’origine et au terme de la foi. Renonçant à la joie qui lui était proposée, il a enduré, sans avoir de honte, l’humiliation de la croix, et, assis à la droite de Dieu, il règne avec lui.
Méditez l’exemple de celui qui a enduré de la part des pécheurs une telle hostilité, et vous ne serez pas accablés par le découragement. Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang dans votre lutte contre le péché.

Evangile : Jésus, cause de division entre les hommes (Lc 12, 49-53)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Jésus, le bon Pasteur, connaît ses brebis et ses brebis le connaissent : pour elles il a donné sa vie.Alléluia. (cf. Jn 10, 14-15)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Jésus disait à ses disciples : « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé !
Je dois recevoir un baptême, et comme il m’en coûte d’attendre qu’il soit accompli !
Pensez-vous que je sois venu mettre la paix dans le monde ? Non, je vous le dis, mais plutôt la division.
Car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées : trois contre deux et deux contre trois ;
ils se diviseront : le père contre le fils et le fils contre le père, la mère contre la fille et la fille contre la mère, la belle-mère contre la belle-fille et la belle-fille contre la belle-mère. »
Patrick Braud 

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10 août 2013

Restez en tenue de service

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Restez en tenue de service

 

Homélie du 19e dimanche du temps ordinaire / Année C
11/08/13

 

« Restez en tenue de service » (Lc 12,35).

L’attitude du service est au coeur de l’évangile de ce dimanche, et de tout l’Évangile finalement. On y devine que c’est une clé essentielle de la réussite d’une vie d’homme. On y voit Jésus y découvrir le secret de son identité la plus profonde : être le Serviteur par excellence.

Restez en tenue de service dans Communauté spirituelle les-domestiques-downton-abbey On y éprouve très vite les difficultés à durer dans cet esprit de service : l’usure du temps, l’absence de perspective ultime, l’endormissement due à la fatigue ou à la lassitude, la soif de domination sur les autres etc.

Se mettre au service n’est déjà pas l’attitude la plus naturelle, que ce soit en famille ou au travail. Mais durer dans le service demande en outre une vertu peu commune.

Au début, quand on n’a pas beaucoup de pouvoir ou d’argent, on peut trouver cela facile et normal de passer les plats aux autres. Après, au fil des années, l’orgueil récupère ses droits : avec tout ce que je fais, j’ai quand même droit à me reposer, à me faire servir…

Plus que nul autre, le Christ aurait pu revendiquer ce privilège pour lui-même.
Par des prodiges, il aurait pu s’imposer pour que tous se prosternent devant lui.
Par la puissance de sa parole, il aurait pu manipuler et s’asservir des fanatiques tout dévoués à sa cause.
Par son charisme prophétique, il aurait pu galvaniser les révolutionnaires de tout poil pour bâtir son royaume à la manière d’un Che Guevara, d’un Lénine ou d’un Hitler.

Non : il a incarné totalement et jusqu’au bout l’attitude du serviteur, car c’était le coeur de son identité humaine, et le coeur de sa relation à son Père.

Regardez le comportement du maître dans la parabole : n’est-il pas étonnant ? D’habitude, même s’il revient tard, un grand propriétaire terrien au mieux félicite ses serviteurs s’ils ne se sont pas endormis, au pire il les fait encore travailler pour lui dans la préparation d’un dernier verre et de son coucher. Ici au contraire, c’est le maître tardif qui passe la tenue de service, fait passer ses domestiques à sa table, et se met à les servir chacun à son tour !

C’est vraiment le monde à l’envers.

Pierre a raison d’être choqué et même scandalisé lorsque le Christ se met à laver les pieds des Douze le soir du Jeudi saint. « Toi qui es Maître et Seigneur, tu veux me laver les pieds à moi qui n’en suis pas digne ? Jamais ! »

Ne nous habituons pas à ce renversement de valeurs que Jésus incarne, le tablier du serviteur autour des reins. C’est le vrai chemin pour faire grandir l’autre, pour vaincre les difficultés, pour traverser n’importe quelle épreuve, jusqu’à la mort elle-même.

 

Certains ont bien compris la formidable efficacité de cette attitude du maître qui se fait serviteur, dans le monde des affaires notamment.

Robert Greenleaf, ex-président d’AT&T, a développé toute une conception du management basé sur la notion de servant leader. Le véritable leader est celui qui est la chance de son équipe durablement, qui est au service de la réussite de ses collaborateurs.

C’est le sens de la deuxième parabole délivrée par Jésus à l’intention des responsables, suite à la demande de Pierre qui sentait bien que ses qualités d’apôtre impliqueraient une densité accrue de service. L’intendant fidèle ne frappe pas ses  serviteurs et servantes confiées à sa responsabilité. Il ne profite pas de sa charge pour s’empiffrer, boire et s’enivrer. Il veille au contraire à la réussite de chacun, en sachant qu’il aura à rendre des comptes à un autre. « À qui l’on a beaucoup donné, on demandera beaucoup ; à qui l’on a beaucoup confié, on réclamera davantage ».

Greenleaf avait repéré 10 attitudes qui sont en entreprise caractéristiques du servant leader. Elles peuvent toutes être enracinées dans la parole et l’exemple du Christ :

- l’écoute : savoir attentivement écouter la voix des autres et sa propre voix intérieure.

- l’empathie : se laisser toucher par le bonheur et le malheur des autres, chercher à les comprendre, à les reconnaître.

- la guérison : la capacité de guérir l’autre pour lui permettre de s’intégrer de se transformer.

- la conscience de soi.

- la persuasion, plutôt que la contrainte ou la domination.

- la conceptualisation : la capacité d’imaginer, de penser au-delà du seul présent.

- la clairvoyance : comprendre les leçons du passé, les réalités du présent, prévoir les conséquences probables des décisions.

- l’esprit d’équipe.

- l’engagement dans l’évolution des personnes.

- l’engagement communautaire : savoir construire une communauté, tisser des liens, renforcer le sentiment d’appartenance.

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Chacun de nous peut devenir le servant leader de ses clients, de ses collègues, de son équipe, mais aussi de sa famille, son quartier, son association, son Église etc.

Il y a dans cette attitude une promesse de bonheur : « heureux les serviteurs… » et un constat d’efficacité : ne pas laisser percer le mur de sa maison.

 

Que l’Esprit du Christ nous garde vigilants, en tenue de service, dans tous les domaines où nous avons une responsabilité à exercer.

 

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* Cf. http://www.greenleaf.org/

 

 

 

1ère lecture : Dieu vient la nuit sauver son peuple (Sg 18, 6-9)

Lecture du livre de la Sagesse

La nuit de la délivrance pascale avait été connue d’avance par nos Pères ; assurés des promesses auxquelles ils avaient cru, ils étaient dans la joie.
Et ton peuple accueillit à la fois le salut des justes et la ruine de leurs ennemis.
En même temps que tu frappais nos adversaires, tu nous appelais pour nous donner ta gloire.
Dans le secret de leurs maisons, les fidèles descendants des justes offraient un sacrifice, et ils consacrèrent d’un commun accord cette loi divine : que les saints partageraient aussi bien le meilleur que le pire ; et déjà ils entonnaient les chants de louange des Pères.

Psaume : 32, 1.12, 18-19, 20.22

R/ Bienheureux le peuple de Dieu !

Criez de joie pour le Seigneur, hommes justes !
Hommes droits, à vous la louange  !
Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu,
heureuse la nation qu’il s’est choisie pour domaine  !

Dieu veille sur ceux qui le craignent, 
qui mettent leur espoir en son amour, 
pour les délivrer de la mort, 
les garder en vie aux jours de famine. 

Nous attendons notre vie du Seigneur : 
il est pour nous un appui, un bouclier. 
Que ton amour, Seigneur, soit sur nous 
comme notre espoir est en toi !

2ème lecture : La foi d’Abraham, modèle de la nôtre (brève : 1-2.8-12) (He 11, 1-2.8-19)

Lecture de la lettre aux Hébreux

Frères,
la foi est le moyen de posséder déjà ce qu’on espère, et de connaître des réalités qu’on ne voit pas. Et quand l’Écriture rend témoignage aux anciens, c’est à cause de leur foi. 

Grâce à la foi, Abraham obéit à l’appel de Dieu : il partit vers un pays qui devait lui être donné comme héritage. Et il partit sans savoir où il allait. Grâce à la foi, il vint séjourner comme étranger dans la Terre promise ; c’est dans un campement qu’il vivait, ainsi qu’Isaac et Jacob, héritiers de la même promesse que lui, car il attendait la cité qui aurait de vraies fondations, celle dont Dieu lui-même est le bâtisseur et l’architecte.

Grâce à la foi, Sara, elle aussi, malgré son âge, fut rendue capable d’avoir une descendance parce qu’elle avait pensé que Dieu serait fidèle à sa promesse. C’est pourquoi, d’un seul homme, déjà marqué par la mort, ont pu naître des hommes aussi nombreux que les étoiles dans le ciel et les grains de sable au bord de la mer, que personne ne peut compter.

C’est dans la foi qu’ils sont tous morts sans avoir connu la réalisation des promesses ; mais ils l’avaient vue et saluée de loin, affirmant que, sur la terre, ils étaient des étrangers et des voyageurs. Or, parler ainsi, c’est montrer clairement qu’on est à la recherche d’une patrie. S’ils avaient pensé à celle qu’ils avaient quittée, ils auraient eu la possibilité d’y revenir. En fait, ils aspiraient à une patrie meilleure, celle des cieux. Et Dieu n’a pas refusé d’être invoqué comme leur Dieu, puisqu’il leur a préparé une cité céleste. 

Grâce à la foi, quand il fut soumis à l’épreuve, Abraham offrit Isaac en sacrifice. Et il offrait le fils unique, alors qu’il avait reçu les promesses et entendu cette parole : C’est d’Isaac que naîtra une descendance qui portera ton nom.  Il pensait en effet que Dieu peut aller jusqu’à ressusciter les morts : c’est pourquoi son fils lui fut rendu ; et c’était prophétique.

Evangile : Se tenir prêts pour le retour du Seigneur (brève : 35-40) (Lc 12, 32-48)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Soyez vigilants et demeurez prêts : vous ne connaissez pas l’heure où le Fils de l’homme viendra. Alléluia.(cf. Mt 24, 42.44)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Jésus disait à ses disciples : « Sois sans crainte, petit troupeau, car votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume. Vendez ce que vous avez et donnez-le en aumône. Faites-vous une bourse qui ne s’use pas, un trésor inépuisable dans les cieux, là où le voleur n’approche pas, où la mite ne ronge pas. Car là où est votre trésor, là aussi sera votre c?ur.
Restez en tenue de service, et gardez vos lampes allumées. Soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces, pour lui ouvrir dès qu’il arrivera et frappera à la porte. Heureux les serviteurs que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller. Amen, je vous le dis : il prendra la tenue de service, les fera passer à table et les servira chacun à son tour. S’il revient vers minuit ou plus tard encore et qu’il les trouve ainsi, heureux sont-ils ! Vous le savez bien : si le maître de maison connaissait l’heure où le voleur doit venir, il ne laisserait pas percer le mur de sa maison. Vous aussi, tenez-vous prêts : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. »
Pierre dit alors : « Seigneur, cette parabole s’adresse-t-elle à nous, ou à tout le monde ? »
Le Seigneur répond : « Quel est donc l’intendant fidèle et sensé à qui le maître confiera la charge de ses domestiques pour leur donner, en temps voulu, leur part de blé ? Heureux serviteur, que son maître, en arrivant, trouvera à son travail. Vraiment, je vous le déclare : il lui confiera la charge de tous ses biens. Mais si le même serviteur se dit : ‘Mon maître tarde à venir’, et s’il se met à frapper serviteurs et servantes, à manger, à boire et à s’enivrer, son maître viendra le jour où il ne l’attend pas et à l’heure qu’il n’a pas prévue ; il se séparera de lui et le mettra parmi les infidèles. Le serviteur qui, connaissant la volonté de son maître, n’a pourtant rien préparé, ni accompli cette volonté, recevra un grand nombre de coups. Mais celui qui ne la connaissait pas, et qui a mérité des coups pour sa conduite, n’en recevra qu’un petit nombre. À qui l’on a beaucoup donné, on demandera beaucoup ; à qui l’on a beaucoup confié, on réclamera davantage. »
Patrick Braud 

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3 août 2013

La double appartenance

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La double appartenance

Homélie du 18° Dimanche du temps ordinaire     Année C
04/08/13

« Qui m’a établi pour être juge ou pour faire vos partages ? » (Lc 12,14)

Le Christ se démarque ici fortement de Moïse ou de Mohammed ! Dans le judaïsme comme dans l’islam, l’oeuvre législative est en effet fondamentale, structurante. Ces deux religions organisent les héritages, les mariages, les différends juridiques jusque dans les moindres détails. Le Sanhédrin du temps de Jésus était l’équivalent des tribunaux islamiques actuels ou quasiment.

Rien de tel en Christ. Peut-être parce qu’il a été lui-même victime de Pilate et du Sanhédrin, Jésus refuse d’endosser le rôle de juge, de législateur qu’on veut lui faire jouer.

Le christianisme n’a donc pas vocation à absorber le législatif, il ne cherche pas à organiser ou à contrôler la vie sociale, du moins s’il est fidèle à l’esprit du Christ… Pourquoi ? Parce que sa perspective est eschatologique. Ou, pour le dire en termes plus simples : parce qu’il regarde la finalité ultime de toute chose, le christianisme relativise toute forme d’organisation sociale, la laissant libre de choisir ses modalités, tout en la questionnant sur son ouverture à l’ultime.

Posséder des biens, comme dans toute économie d’accumulation de richesses, pourquoi pas ? Mais « amasser pour soi-même » au lieu de « vouloir être riche en vue de Dieu » relève d’une singulière myopie.

Partager un héritage familial entre frères et soeurs, pourquoi pas ? Mais l’âpreté au gain dont certains pourraient se repaître à cette occasion est en contradiction flagrante avec l’avenir qui nous est promis en Dieu.

C’est ce qu’un théologien (Jean-Baptiste Metz) appelle la « réserve eschatologique ». Au nom de notre enracinement dans la promesse du monde de la résurrection, nous ne pourrons jamais devenir les adorateurs serviles des idoles du monde présent. Ni la richesse ni le pouvoir, ni la démocratie ni le libéralisme ne peuvent exiger de nous une adhésion totale, sans réserve. Nous avons toujours cette réserve qui nous vient de notre espérance en un monde autre, au-delà de la mort. Toute réalisation actuelle n’est que partielle. La démocratie passera et sera remplacée par d’autres systèmes, comme l’ont été le système tribal, la féodalité, la monarchie etc. Le libéralisme économique n’a pas les promesses de la vie éternelle, et ne constitue en aucun cas une quelconque « fin de l’histoire ». Dans quelques milliers d’années, nos successeurs nous traiteront peut-être de fous pour avoir été aveugles à des enjeux qui leur paraîtront évidents. Nous sommes si fiers de nos lois, de nos organisations du travail, de nos droits de l’homme etc. que nous sommes aveugles sur ce que les générations suivantes dénonceront comme des scandales insupportables. Nous nous indignons devant l’esclavage qui a été accepté pendant des siècles, devant les castes ou les rivalités ethniques vieilles de quelques milliers d’années, et nous fermons les yeux sur les atteintes à la vie humaine qui nous ferons comparaître au tribunal de l’histoire…

Dès que l’on met en perspective l’évolution humaine, on s’aperçoit que toute vérité n’est que relative, locale et transitoire. Ce qui ne disqualifie pas l’effort humain pour ordonner sa vie, mais ce qui empêche d’absolutiser ce qui ne sera qu’une réalisation partielle et provisoire.

Seul le but ultime, seule la fin = la finalité du monde permet d’être libre par rapport à ses réalisations partielles.

 

« Tu es fou : cette nuit même on te redemandera ta vie ».

Réfléchir sur sa propre mort peut éviter cette folie aveugle. « Que philosopher, c’est La double appartenance dans Communauté spirituelle 32857apprendre à mourir » : cette maxime de Montaigne s’inscrit tout à fait dans la perspective de la réserve eschatologique. Quelles valeurs ont les objectifs que je poursuis par rapport à la réalité de ma propre mort ? de mon avenir au-delà de cette mort ? Le pari de Pascal reste d’une actualité extraordinairement féconde *.

Autrement dit : mieux vaut choisir ce sur quoi investir que de me laisser manipuler par les habitudes mondaines. Devenir riche n’est pas un objectif en soi, c’est devenir riche en vue de Dieu qu’il l’est. De même en ce qui concerne les enfants, la réussite dans son métier, l’amour des autres etc.

Même l’amour familial ne peut s’ériger en absolu. On connaît celui de la Mafia pour ses proches, et l’on sait que c’est au service du mal. Et ailleurs on voit le critère familial devenir un instrument horrible dans les massacres inter-ethniques etc.

 

Les disciples du Christ sont libérés de toute vénération absolue. Nul veau d’or ne peut les asservir à une fidélité exclusive. Parce qu’ils ont une double identité, ils ne pourront jamais se dévouer à une cause de manière totalitaire ou totalisante. Parce qu’ils ont « comme une ancre jetée dans les cieux » (He 6,17 cieuxnaît celui de la mconde.anesdes champs dont el eportait le nom.. simples comme à travers le spires inustices…), ils ne dériveront pas au gré des modes de l’époque. Celui qui épouse l’air de son temps se retrouve très vite veuf…

Un auteur anonyme du II° siècle atteste de cette double appartenance des chrétiens : à la société de leur temps, et à leur « république spirituelle » :

 Diognète dans Communauté spirituelleCar les Chrétiens ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni par le  langage, ni par les vêtements. Ils n’habitent pas de villes qui leur soient propres, ils  ne se servent pas de quelque dialecte extraordinaire, leur genre de vie n’a rien de  singulier. Ce n’est pas à l’imagination ou aux rêveries d’esprits agités que leur doctrine doit sa découverte ; ils ne se font pas, comme tant d’autres, les champions d’une doctrine humaine. Ils se répartissent dans les cités grecques et barbares  suivant le lot échu à chacun ; ils se conforment aux usages locaux pour les  vêtements, la nourriture et la manière de vivre, tout en manifestant les lois  extraordinaires et vraiment paradoxales de leur république spirituelle. Ils résident chacun dans sa propre patrie, mais comme des étrangers domiciliés. Ils s’acquittent de tous leurs devoirs de citoyens et supportent toutes les charges comme des étrangers. Toute terre étrangère leur est une patrie et toute patrie une terre étrangère.
(Lettre à Diognète) 

À cause de cette fameuse réserve eschatologique dont fait preuve Jésus dans cette parabole des greniers remplis à ras bords, les chrétiens auront toujours un oeil ailleurs, un oeil en avant, les préservant d’être de parfaits petits soldats de quelque cause que ce soit.

Cette liberté s’enracine dans la promesse d’un monde après la mort. Seule cette perspective nous permet de contester les prétentions idolâtriques qui foisonnent  autour de nous.

« Recherchez donc les réalités d’en haut » (Col 3,12) nous disait la deuxième lecture. Vous pourrez alors vous investir dans toutes vos actions entre les évaluant à l’aune de cet objectif ultime, ce qui pourra vous amener à prendre des décisions surprenantes?

 

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« Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu’il est, sans hésiter. » (Pensées, fragment 233)

 

1ère lecture : Vanité des richesses (Qo 1, 2; 2, 21-23)
Lecture du livre de l’Ecclésiaste
Vanité des vanités, disait l’Ecclésiaste. Vanité des vanités, tout est vanité !

Un homme s’est donné de la peine ; il était avisé, il s’y connaissait, il a réussi. Et voilà qu’il doit laisser son bien à quelqu’un qui ne s’est donné aucune peine. Cela aussi est vanité, c’est un scandale.
En effet, que reste-t-il à l’homme de toute la peine et de tous les calculs pour lesquels il se fatigue sous le soleil ?
Tous les jours sont autant de souffrances, ses occupations sont autant de tourments : même la nuit, son c?ur n’a pas de repos. Cela encore est vanité.

Psaume : Ps 89, 3-4, 5-6, 12-13, 14.17abc

R/ D’âge en âge, Seigneur, tu as été notre refuge.

Tu fais retourner l’homme à la poussière ; 
tu as dit : « Retournez, fils d’Adam ! »
À tes yeux, mille ans sont comme hier, 
c’est un jour qui s’en va, une heure dans la nuit.

Tu les as balayés : ce n’est qu’un songe ; 
dès le matin, c’est une herbe changeante : 
elle fleurit le matin, elle change ; 
le soir, elle est fanée, desséchée.

Apprends-nous la vraie mesure de nos jours : 
que nos coeurs pénètrent la sagesse. 
Reviens, Seigneur, pourquoi tarder ? 
Ravise-toi par égard pour tes serviteurs. 

Rassasie-nous de ton amour au matin, 
que nous passions nos jours dans la joie et les chants.
Que vienne sur nous la douceur du Seigneur notre Dieu.
Consolide pour nous l’ouvrage de nos mains.

2ème lecture : Avec le Christ, de l’homme ancien à l’homme nouveau (Col 3, 1-5.9-11)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens

Frères, vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu. Tendez vers les réalités d’en haut, et non pas vers celles de la terre.

En effet, vous êtes morts avec le Christ, et votre vie reste cachée avec lui en Dieu. Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire. Faites donc mourir en vous ce qui appartient encore à la terre : débauche, impureté, passions, désirs mauvais, et cet appétit de jouissance qui est un culte rendu aux idoles.
Plus de mensonge entre vous ; débarrassez-vous des agissements de l’homme ancien qui est en vous, et revêtez l’homme nouveau, celui que le Créateur refait toujours neuf à son image pour le conduire à la vraie connaissance.
Alors, il n’y a plus de Grec et de Juif, d’Israélite et de païen, il n’y a pas de barbare, de sauvage, d’esclave, d’homme libre, il n’y a que le Christ : en tous, il est tout.

Evangile : Parabole de l’homme qui amasse pour lui-même (Lc 12, 13-21)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Heureux les pauvres de c?ur : le Royaume des cieux est à eux ! Alléluia. (Mt 5, 3)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Du milieu de la foule, un homme demanda à Jésus : « Maître, dis à mon frère de partager avec moi notre héritage. »
Jésus lui répondit : « Qui m’a établi pour être votre juge ou pour faire vos partages ? »
Puis, s’adressant à la foule : « Gardez-vous bien de toute âpreté au gain ; car la vie d’un homme, fût-il dans l’abondance, ne dépend pas de ses richesses. »
Et il leur dit cette parabole : « Il y avait un homme riche, dont les terres avaient beaucoup rapporté.
Il se demandait : ‘Que vais-je faire ? Je ne sais pas où mettre ma récolte.’
Puis il se dit : ‘Voici ce que je vais faire : je vais démolir mes greniers, j’en construirai de plus grands et j’y entasserai tout mon blé et tout ce que je possède.
Alors je me dirai à moi-même : Te voilà avec des réserves en abondance pour de nombreuses années. Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence.’
Mais Dieu lui dit : ‘Tu es fou : cette nuit même, on te redemande ta vie. Et ce que tu auras mis de côté, qui l’aura ?’
Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu. »
Patrick Braud

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