L'homélie du dimanche (prochain)

29 décembre 2019

L’épiphanie du visage

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

L’épiphanie du visage

Homélie pour la fête de l’Épiphanie / Année A
05/01/2020

Cf. également :

Épiphanie : tirer les rois
Épiphanie : êtes-vous fabophile ?
Rousseur et cécité : la divine embauche !
Épiphanie : l’économie du don

Épiphanie : Pourquoi offrir des cadeaux ?
Le potlatch de Noël
Épiphanie : qu’est-ce que l’universel ?
L’Épiphanie, ou l’éloge de la double culture
L’inquiétude et la curiosité d’Hérode
Éloge de la mobilité épiphanique
La sagesse des nations

En Chine, le visage sert à tout. Reconnu par une caméra intelligente, il vous permet de payer au supermarché sans sortir votre carte bleue ni même faire la queue. Il vous donne  accès au métro, à l’entrée de votre immeuble, et à l’argent de votre compte en banque… Grâce à la reconnaissance faciale, le visage devient une signature unique, infalsifiable, qui simplifie les démarches de la vie courante.

Le revers de la médaille de cette prouesse technologique est l’avènement d’une société de contrôle, où la surveillance généralisée des visages permet de sanctionner, d’observer, de punir, de noter les citoyens. Chacun dispose ainsi d’une sorte de « permis à points » social en fonction de ses amendes, condamnations, incivilités ou au contraire des actes approuvés par le régime. Malheur à ceux dont le nombre baisse trop ! Les caméras les dénicheront où qu’ils soient et les écarteront du train, du métro, du spectacle auquel ils n’ont plus droit. On estime à près de 400 millions le nombre de caméras intelligentes dans le pays (une pour 3,5 habitants). Il passera probablement à 600 millions en 2025.

On pense bien sûr à George Orwell : son roman « 1984 » anticipait ce type de société de contrôle où la surveillance panoptique (= ayant vue sur tout) supprime l’anonymat et la vie privée. Et cela fait froid dans le dos…

Ces calculs sur les visages pour les traduire en une série de 0 ou 1 reconnaissable par l’intelligence artificielle font aussi penser à d’autres calculs étranges sur le visage humain, ceux des soi-disant docteurs nazis prétendant caractériser la race juive par son visage caricaturé à l’extrême. De grandes expositions à Paris et ailleurs consacraient cette approche anthropométrique du visage dans les années de l’occupation allemande. Sous couvert de scientificité, la mainmise sur le visage humain servait l’idéologie nazie : dénier aux juifs leur humanité et en faire des sous-hommes (Untermenschen). Cela fait froid dans le dos…

Après-guerre, bizarrement, cette manipulation des visages connut d’autres heures de gloire avec la pseudo-science de la morphopsychologie, inventée par un psychiatre français Louis Corman (1901–1995), heureusement largement inconnu. Il voulait classer scientifiquement les visages et en déduire les caractéristiques des personnalités de chacun d’après les traits de son faciès. Ce qui n’est pas sans rappeler d’ailleurs une autre pseudo-science, chinoise à nouveau, qui régnait autrefois à la cour de Pékin. Le Mian Xiang était l’art impérial de la lecture du visage, populaire en Chine depuis l’Antiquité. Cette technique d’inspiration taoïste, vieille de plusieurs millénaires, permettrait de décrypter le caractère d’une personne mais aussi de ‘prédire’ ses actes à partir d’une analyse minutieuse des traits de son visage (la distance entre ses yeux, leur courbure, la forme du nez, des oreilles et des rides…). Elle était employée dans la Chine traditionnelle pour sélectionner les candidats aux postes de fonctionnaire, mais aussi – déjà! pour repérer les personnes malveillantes dans une foule dinvités.

À l’opposé de ces pensées calculantes et techniciennes, le philosophe juif Emmanuel Levinas a réfléchi sur ce qu’il appelle l’épiphanie du visage. Lorsque nos regards se croisent, le visage de l’autre est un appel à la responsabilité éthique envers lui, pour en prendre soin et le servir. Il y a dans le visage d’autrui la manifestation d’une transcendance, de quelque chose qui nous échappe et nous commande à la fois, qui n’est pas mesurable, qui n’est pas objet de manipulation ni de calcul. L’exposition du visage à autrui – peau nue offerte à la rencontre – est bouleversante pour qui prend le temps d’y déceler l’infini qui s’y manifeste. C’est bien une épiphanie (au sens grec du terme) c’est-à-dire une manifestation (paraître au-dessus) de l’infini (la personne humaine) dans le fini (son visage). Emmanuel Lévinas appelle épiphanie l’expression du visage en tant qu’elle résiste à la prise et se refuse à la possession. Le visage s’impose par-delà les formes qui le délimitent. Il me parle et m’invite à une relation sans aucune mesure avec tout pouvoir. Cette dimension infinie, transcendante, purement éthique, est expression et discours. Sans recourir à la force, elle résiste infiniment à toute appropriation ou négation, y compris au meurtre : c’est une résistance désarmée et désarmante.

« Le visage est sens à lui seul. Toi, c’est toi. En ce sens, on peut dire que le visage n’est pas « vu ». Il est ce qui ne peut devenir un contenu, que votre pensée embrasserait ; il est l’incontenable, il vous mène au-delà.
Le  visage  se  refuse  à  la  possession,  à  mes  pouvoirs.  Dans  son épiphanie, dans l’expression, le sensible, encore saisissable se mue en  résistance  totale  à  la  prise.  (…)  L’expression  que  le  visage introduit dans le monde ne défie pas la faiblesse de mes pouvoirs, mais mon pouvoir de pouvoir.
L’infini paralyse le pouvoir par sa résistance infinie au meurtre, qui, dure et insurmontable, luit dans le visage d’autrui, dans la nudité totale de ses yeux, sans défense, dans la nudité de l’ouverture absolue du Transcendant. Il y a là une relation non pas avec une résistance très grande, mais avec quelque chose d’absolument Autre : la résistance de ce qui n’a pas de résistance – la résistance éthique.
L’épiphanie du Visage suscite cette possibilité de mesurer l’infini de la tentation du meurtre, non pas seulement comme une tentation de destruction totale, mais comme impossibilité – purement éthique – de cette tentation et tentative.
Le visage me parle et par là m’invite à une relation sans commune mesure avec un pouvoir qui s’exerce, fût-il jouissance ou connaissance.
Emmanuel Levinas, Totalité et infini, 1961.

Les Grecs pensaient autrefois qu’il fallait se masquer le visage pour jouer son rôle. Le masque de théâtre avait pour fonction de laisser porter la voix tout en cachant le visage. La personne (prosopon en grec, persona en latin) était alors en avant du masque (pro-sopon) le son qui perçait de derrière (per-sona). Avec Levinas, la personne humaine est au contraire celle que le visage révèle au lieu de la dissimuler, dans son irréductible altérité. C’est un autre qui se tient face à moi, et son altérité me renvoie au Tout-Autre dont il est une épiphanie. C’est pourquoi le visage d’autrui résonne comme une injonction éthique absolue : ‘tu ne tueras pas’.

Ce large détour par différentes conceptions du visage peut nous aider à redécouvrir le sens de la fête d’aujourd’hui.
Qu’est-ce en effet que l’Épiphanie sinon la manifestation de l’infini divin dans le fini de l’enfant de Bethléem ? En lui le Tout-Autre se révèle, l’indicible se laisse approcher, le très Grand est tout petit, l’invisible se donne à contempler. Les mages ne s’y sont pas trompés. Avec leur science astrologique, ils auraient pu se contenter de la description de leurs calculs. Ils avaient en quelque sorte inventé la reconnaissance faciale du Messie, à lire dans les astres mieux que les Chinois dans leurs caméras vidéo… Mais ils n’ont pas voulu en rester là. Cette connaissance théorique les laissait sur leur faim. Ils voulaient voir l’enfant. Ils désiraient éprouver son regard, scruter son visage, être physiquement en sa présence, se prosterner devant un être de chair et non une forme dans le ciel. Un Dieu sans visage pourrait-il vraiment entrer en relation, en communion avec l’homme ? Dès sa naissance, Jésus est l’épiphanie du Père : tout en lui nous parle de plus grand que lui ; ses actes nous montrent comment Dieu agit ; ses paroles lui sont inspirées par l’Esprit ; son visage bouleversera même ses ennemis dans le pardon offert.

Fêter l’Épiphanie, c’est donc répondre à l’injonction éthique qui me vient du visage d’autrui (pour reprendre Levinas) : ‘sois responsable de ton frère en humanité, ne te dérobe pas devant son regard. Contemple-le face-à-face et tu frémiras de pressentir une dignité infinie, ton cœur se dilatera de frôler ce qui dépasse l’entendement humain. Dans la rencontre de Bethléem, les mages font l’expérience de ce bouleversement intérieur. Les cadeaux qu’ils offrent sont les signes de leur responsabilité envers l’enfant : de l’or pour qu’il soit reconnu comme roi, de l’encens pour discerner en lui le Grand Prêtre venu de Dieu, de la myrrhe pour que son embaumement après la croix révèle au monde sa victoire sur la mort.

Totalité et infiniAllez rendre visite à un service de pédiatrie : vous ne pourrez pas échapper aux regards de ces enfants malades dont certains semblent vous avertir du danger extrême qui les menace et vous supplie en vous tendant leurs visages. Même le pire bourreau ne pourra rester insensible à cette détresse d’autrui qui est un appel à prendre soin de lui. On raconte que les commandos nazis chargés des basses besognes d’extermination en étaient réduits à se saouler continûment pour se confronter à des statistiques de travail et non à des visages humains implorant leur pitié ou flambant de colère et de haine.

À Bethléem, c’est presque l’effet symétrique. La profondeur du mystère qui émane du visage du nouveau-né oblige les mages à prendre soin d’eux-mêmes. Grâce à un songe commun, ils repartent « par un autre chemin » pour éviter la violence du fourbe Hérode qui aurait voulu les éliminer pour les faire taire. D’ailleurs Hérode fera tuer les premiers-nés à distance, sur un ordre politique, sans se salir lui-même les mains. 

Nous ne pouvons plus comme les mages aller nous prosterner au loin devant le Roi des juifs. Mais nous pouvons en-visager (c’est-à-dire donner un visage) à ceux que nous croisons sans les voir. Les voisins de palier, de quartier, de bureau. Les SDF dans la rue qui nous gênent et dont nous détournons le regard. Les gens trop gros, trop maigres, trop grands, trop petits, trop handicapés, trop différents de peau, psychologiquement trop dérangés… Et d’abord les tous proches : conjoint, enfants, famille, dont on croit connaître la personnalité et dont nous ne voulons plus nous étonner.

Dieu le Tout-Autre se révèle sur le visage d’autrui. Face-à-face, quelque chose de plus grand que tout se dévoile. Si je renonce à mettre la main sur lui (par la technique, le calcul, l’aveuglement idéologique, l’intérêt etc.), l’appel à prendre soin qui émane de son visage changera mon chemin et mes décisions.

Telle est l’épiphanie du visage humain, qui s’enracine dans l’Épiphanie du Christ à Bethléem : ne pas passer à côté de l’autre sans contempler sur son visage l’infini qui nous fait vivre tous les deux et nous convoque à devenir responsables l’un de l’autre…

 

LECTURES DE LA MESSE

PREMIÈRE LECTURE
« La gloire du Seigneur s’est levée sur toi » (Is 60, 1-6)

Lecture du livre du prophète Isaïe

Debout, Jérusalem, resplendis ! Elle est venue, ta lumière, et la gloire du Seigneur s’est levée sur toi. Voici que les ténèbres couvrent la terre, et la nuée obscure couvre les peuples. Mais sur toi se lève le Seigneur, sur toi sa gloire apparaît. Les nations marcheront vers ta lumière, et les rois, vers la clarté de ton aurore. Lève les yeux alentour, et regarde : tous, ils se rassemblent, ils viennent vers toi ; tes fils reviennent de loin, et tes filles sont portées sur la hanche. Alors tu verras, tu seras radieuse, ton cœur frémira et se dilatera. Les trésors d’au-delà des mers afflueront vers toi, vers toi viendront les richesses des nations. En grand nombre, des chameaux t’envahiront, de jeunes chameaux de Madiane et d’Épha. Tous les gens de Saba viendront, apportant l’or et l’encens ; ils annonceront les exploits du Seigneur.

PSAUME

(Ps 71 (72), 1-2, 7-8, 10-11, 12-13)
R/ Toutes les nations, Seigneur, se prosterneront devant toi. (cf. Ps 71,11)

Dieu, donne au roi tes pouvoirs,
à ce fils de roi ta justice.
Qu’il gouverne ton peuple avec justice,
qu’il fasse droit aux malheureux !

En ces jours-là, fleurira la justice,
grande paix jusqu’à la fin des lunes !
Qu’il domine de la mer à la mer,
et du Fleuve jusqu’au bout de la terre !

Les rois de Tarsis et des Îles apporteront des présents.
Les rois de Saba et de Seba feront leur offrande.
Tous les rois se prosterneront devant lui,
tous les pays le serviront.

Il délivrera le pauvre qui appelle
et le malheureux sans recours.
Il aura souci du faible et du pauvre,
du pauvre dont il sauve la vie.

DEUXIÈME LECTURE
« Il est maintenant révélé que les nations sont associées au même héritage, au partage de la même promesse » (Ep 3, 2-3a.5-6)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Éphésiens

Frères, vous avez appris, je pense, en quoi consiste la grâce que Dieu m’a donnée pour vous : par révélation, il m’a fait connaître le mystère. Ce mystère n’avait pas été porté à la connaissance des hommes des générations passées, comme il a été révélé maintenant à ses saints Apôtres et aux prophètes, dans l’Esprit. Ce mystère, c’est que toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Évangile.

ÉVANGILE
Nous sommes venus d’Orient adorer le roi (Mt 2, 1-12)
Alléluia. Alléluia.Nous avons vu son étoile à l’orient, et nous sommes venus adorer le Seigneur. Alléluia. (cf. Mt 2, 2)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Jésus était né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode le Grand. Or, voici que des mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son étoile à l’orient et nous sommes venus nous prosterner devant lui. » En apprenant cela, le roi Hérode fut bouleversé, et tout Jérusalem avec lui. Il réunit tous les grands prêtres et les scribes du peuple, pour leur demander où devait naître le Christ. Ils lui répondirent : « À Bethléem en Judée, car voici ce qui est écrit par le prophète : Et toi, Bethléem, terre de Juda,tu n’es certes pas le dernierparmi les chefs-lieux de Juda,car de toi sortira un chef,qui sera le berger de mon peuple Israël. » Alors Hérode convoqua les mages en secret pour leur faire préciser à quelle date l’étoile était apparue ; puis il les envoya à Bethléem, en leur disant : « Allez vous renseigner avec précision sur l’enfant. Et quand vous l’aurez trouvé, venez me l’annoncer pour que j’aille, moi aussi, me prosterner devant lui. » Après avoir entendu le roi, ils partirent.
Et voici que l’étoile qu’ils avaient vue à l’orient les précédait, jusqu’à ce qu’elle vienne s’arrêter au-dessus de l’endroit où se trouvait l’enfant. Quand ils virent l’étoile, ils se réjouirent d’une très grande joie. Ils entrèrent dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie sa mère ; et, tombant à ses pieds, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe.
 Mais, avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin.
Patrick Braud

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22 décembre 2019

Y aura-t-il du neuf à Noël ?

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Y aura-t-il du neuf à Noël ?

Homélie de Noël / Année A
24/12/2019

Cf. également :

Noël : évangéliser le païen en nous
Tenir conte de Noël
Noël : solstices en tous genres
Noël : Il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune…
Noël : la trêve des braves
Noël : croyance dure ou croyance molle ?
Le potlatch de Noël
La bienveillance de Noël
Noël « numérique », version réseaux sociaux…
Noël : « On vous écrira… »
Enfanter le Verbe en nous…

Y aura t-il de la neige à Noël ?

Y aura-t-il du neuf à Noël ?

Evidemment, on aurait plutôt tendance à se demander en cette période de grève : y aura-t-il des trains à Noël et après…?
Mais ce titre vous fera peut-être penser également à ce film inclassable sorti en 1996 qui a eu un joli succès – et inattendu – aussi bien auprès du public que de la critique (prix Louis Delluc, César de la meilleure première œuvre) : « Y aura-t-il de la neige à Noël ? » On y suit de près une famille éclatée dans une ferme isolée, près d’Avignon. Une mère courageuse y élève ses  sept enfants dans le dénuement et sous la menace constante de son mari, qui pourtant l’a officiellement quittée pour aller vivre avec une autre dont il a également deux enfants. Le quotidien des travaux agricoles s’égrène au fil des saisons, dur, sans fin, épuisant. Le père est là presque chaque jour, et sa violence – voire pire – est redoutée par la mère et ses enfants. La famille est un peu perdue, à l’image de la scène initiale où ils jouent au labyrinthe à travers les meules de foin. Mais la longue scène finale du réveillon ouvre sur un possible avenir différent, peut-être grâce aux flocons de neige qui tombent miraculeusement à Noël et qui symbolisent le renouveau inespéré.

Et vous, y aura-t-il de la neige dans votre Noël ? C’est-à-dire : y aura-t-il du neuf à partir de là ? Ou n’est-ce qu’une parenthèse convenue qui finalement ne changera rien à votre existence ?

Tout dépend de la façon dont vous aurez vécu ce Noël 2019.

Si c’était pour vous un Noël plus sobre que les autres, alors la sobriété de vie peut devenir une sagesse que vous aurez envie de mettre en œuvre : moins d’achats, moins d’accumulation, une concentration sur l’essentiel et pas sur l’accessoire, une auto-limitation pour ne pas être esclave de ses appétits multiples…
La fidélité à l’enfant né sur la paille peut passer par là.

Si vous avez fêté un Noël solidaire, par exemple avec un réveillon style Secours catholique ou Restos du cœur partagé avec des gens plus pauvres que vous, alors la solidarité sera peut-être un de vos fils rouges pour l’année à venir. Prendre de nouveaux engagements, se tenir à ceux qui sont déjà pris  mais en s’y investissant vraiment, ou rejoindre un collectif pour un combat qui vous tient à cœur : les pistes ne manquent pas pour donner de son temps, de son énergie, de ses compétences au service des autres.
La fidélité à celui qui a voulu prendre notre chair peut passer par là.

Si vous avez eu un Noël essentiellement familial, ce qui est le cas de la majorité, alors pourquoi ne pas choisir d’investir davantage sur votre famille dans les mois qui viennent. Visites, mails, coups de fil, réconciliations, affection partagée… : il n’y a rien de moins naturel que l’harmonie familiale ! Tant de séparations, de rancœurs, d’incompréhensions voire de violence défigurent nos familles ! Raison de plus pour entretenir soigneusement cette harmonie malgré les différences et l’éloignement des « way of life » de chacun.
La fidélité à l’humble famille de Nazareth peut passer par là.

th_ophile_gautier_en_bd__1Si vous n’avez pas fêté Noël, par conviction peut-être (athée, musulmane, anticapitaliste…), alors vous saurez être attentif à tous ceux que les fêtes suivantes mettront hors-jeu socialement : la Fête des Mères ou des Pères pour ceux qui n’ont pas d’enfants ou plus de parents, la Saint Valentin pour les célibataires, les ponts du mois de mai pour ceux qui n’ont pas de congés etc.
Le respect du message altruiste contenu dans Noël, quelles que soient ses opinions, peut passer par là.

« Personne n’est tenu à l’écart de cette allégresse, car le même motif de joie est commun à tous. Notre Seigneur, chargé de détruire le péché et la mort, n’ayant trouvé personne qui en fût affranchi, est venu en affranchir tous les hommes. Que le saint exulte, car il approche du triomphe. Que le pécheur se réjouisse, car il est invité au pardon. Que le païen prenne courage, car il est appelé à la vie. » (Sermon de Saint Léon le Grand pour Noël)

Si vous avez loupé Noël par manque de temps (le boulot, les soucis : tout passe si vite et Noël est déjà fini sans l’avoir vu arriver), vous pourrez prendre la ferme résolution de ne plus vous laisser submerger par le quotidien, en vous ménageant des espaces pour prendre de la hauteur, des moments pour faire silence, des pauses pour respirer, des temps rien qu’à vous pour faire ce que vous aimez…
La fidélité aux mages de l’Épiphanie qui ont quitté leur pays pour voir l’enfant de la crèche peut passer par là.

La vraie magie de Noël opère lorsque effectivement du neuf surgit dans nos vies, lorsqu’une naissance nous travaille, au point d’infléchir notre course et de renouveler nos objectifs. La gueule de bois du lendemain de fête vient des excès ponctuels masquant mal nos déficits chroniques de sens. La reprise de la routine quotidienne, « comme si de rien n’était », referme la parenthèse et nous replonge en apnée jusqu’à la prochaine fête.

Fêtons donc Noël comme un point de départ, un commencement : si les flocons peuvent se mettre à tomber le jour de Noël pour réveiller l’espoir d’une famille dans la rudesse, isolée et menacée, ils pourront également blanchir nos lendemains de Noël pour revêtir de neuf les mois à venir…

Celui qui croit fera tomber la neige qui renouvellera son univers en l’habillant d’espérance.

MESSE DE LA NUIT

PREMIÈRE LECTURE
« Un enfant nous est né » (Is 9, 1-6)

Lecture du livre du prophète Isaïe

Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; et sur les habitants du pays de l’ombre, une lumière a resplendi. Tu as prodigué la joie, tu as fait grandir l’allégresse : ils se réjouissent devant toi, comme on se réjouit de la moisson, comme on exulte au partage du butin. Car le joug qui pesait sur lui, la barre qui meurtrissait son épaule, le bâton du tyran, tu les as brisés comme au jour de Madiane. Et les bottes qui frappaient le sol, et les manteaux couverts de sang, les voilà tous brûlés : le feu les a dévorés.
Oui, un enfant nous est né, un fils nous a été donné ! Sur son épaule est le signe du pouvoir ; son nom est proclamé : « Conseiller-merveilleux, Dieu-Fort, Père-à-jamais, Prince-de-la-Paix. » Et le pouvoir s’étendra, et la paix sera sans fin pour le trône de David et pour son règne qu’il établira, qu’il affermira sur le droit et la justice dès maintenant et pour toujours. Il fera cela, l’amour jaloux du Seigneur de l’univers !

PSAUME

(Ps 95 (96), 1-2a, 2b-3, 11-12a, 12b-13a, 13bc)
R/ Aujourd’hui, un Sauveur nous est né : ’est le Christ, le Seigneur. (cf. Lc 2, 11)

Chantez au Seigneur un chant nouveau,
chantez au Seigneur, terre entière,
chantez au Seigneur et bénissez son nom !

De jour en jour, proclamez son salut,
racontez à tous les peuples sa gloire,
à toutes les nations ses merveilles !

Joie au ciel ! Exulte la terre !
Les masses de la mer mugissent,
la campagne tout entière est en fête.

Les arbres des forêts dansent de joie
devant la face du Seigneur, car il vient,
car il vient pour juger la terre.

Il jugera le monde avec justice
et les peuples selon sa vérité.

DEUXIÈME LECTURE

« La grâce de Dieu s’est manifestée pour tous les hommes » (Tt 2, 11-14)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre à Tite

Bien-aimé, la grâce de Dieu s’est manifestée pour le salut de tous les hommes. Elle nous apprend à renoncer à l’impiété et aux convoitises de ce monde, et à vivre dans le temps présent de manière raisonnable, avec justice et piété, attendant que se réalise la bienheureuse espérance : la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur, Jésus Christ. Car il s’est donné pour nous afin de nous racheter de toutes nos fautes, et de nous purifier pour faire de nous son peuple, un peuple ardent à faire le bien.

ÉVANGILE

« Aujourd’hui vous est né un Sauveur » (Lc 2, 1-14)
Alléluia. Alléluia.Je vous annonce une grande joie : Aujourd’hui vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur ! Alléluia. (cf. Lc 2, 10-11)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

 En ces jours-là, parut un édit de l’empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre – ce premier recensement eut lieu lorsque Quirinius était gouverneur de Syrie. Et tous allaient se faire recenser, chacun dans sa ville d’origine. Joseph, lui aussi, monta de Galilée, depuis la ville de Nazareth, vers la Judée, jusqu’à la ville de David appelée Bethléem. Il était en effet de la maison et de la lignée de David. Il venait se faire recenser avec Marie, qui lui avait été accordée en mariage et qui était enceinte.
Or, pendant qu’ils étaient là, le temps où elle devait enfanter fut accompli. Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune. Dans la même région, il y avait des bergers qui vivaient dehors et passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. L’ange du Seigneur se présenta devant eux, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière. Ils furent saisis d’une grande crainte. Alors l’ange leur dit : « Ne craignez pas, car voici que je vous annonce une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple : Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur. Et voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. » Et soudain, il y eut avec l’ange une troupe céleste innombrable, qui louait Dieu en disant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime. »
Patrick Braud

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29 septembre 2019

Foi de moutarde !

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Foi de moutarde !

Homélie du 27° Dimanche du Temps Ordinaire / Année C
06/10/2019 

Cf. également :

Les deux serviteurs inutiles
L’ « effet papillon » de la foi
L’injustifiable silence de Dieu
Entre dans la joie de ton maître
Restez en tenue de service
Jesus as a servant leader
Agents de service

moutarde-a-l-ancienneUne bonne moutarde à l’ancienne, avec de gros grains et une pâte onctueuse et ferme : imaginez-la sur une andouillette de Troyes, une pièce de bœuf grillé, ou dans la sauce salade faite maison. Immédiatement, un bouquet de saveurs vous reviendra en mémoire, mariant la force et le goût, la couleur et la consistance. Jésus savait bien que parler de moutarde dans une parabole susciterait ce genre d’émotion chez ses auditeurs, et il ne s’en prive pas ! C’est sa manière à lui de rendre concret ce qui demeure insaisissable : la foi.

En ce temps-là, les Apôtres dirent au Seigneur : « Augmente en nous la foi ! »
Le Seigneur répondit : « Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde (sénevé), vous auriez dit à l’arbre que voici : ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’, et il vous aurait obéi. » (Lc 17, 5-7)

Ce faisant, il innove. Car l’Ancien Testament ne parlait jamais de cette humble graine appelée également sénevé, ni le reste du Nouveau Testament d’ailleurs. Les seules occurrences de cette graine sont dans cette parabole dans Matthieu et dans Luc. Il fallait son regard d’enfant de Nazareth, d’adolescent se promenant dans les champs de Galilée pour remarquer ces tiges velues et feuillues aux propriétés bien intéressantes à cultiver dans son potager. En choisissant d’accrocher la foi à ces graines plutôt qu’à une idée ou un concept, Jésus pratique d’instinct une pensée concrète qui parle d’expérience aux paysans, aux ruraux qui sont la majorité de ses contemporains. L’avantage de ces paraboles très simples est qu’elles constituent un réservoir inépuisable d’interprétations. Les citadins que nous sommes devenus en 2000 ans continuent à voir dans cette comparaison un lien entre foi et saveurs, mais aussi entre foi et croissance, foi et guérison, jusqu’à penser l’effet papillon de la foi (au sens de la théorie du chaos).

 

Croire et croître

Description de cette image, également commentée ci-aprèsLe premier effet de la parabole est visuel, saisissant : de la bille noire minuscule qui se coince entre deux dents à la belle plante potagère haute de 1 m à 3 m, quelle croissance spectaculaire ! Qui pourrait croire qu’un tel potentiel de vitalité est concentré dans le point de départ si infime ? La loi de croissance organique qui préside au développement de cette graine peut devenir le principe de notre propre croissance spirituelle. Très peu de foi suffit pour grandir.

En français, dire, je crois peux avoir les deux significations, à un accent près : je fais confiance (fides = foi, confiance) ou : je grandis, je déploie toutes les potentialités de mon être (je croîs, du verbe croître = se développer). Me confier à Dieu a pour résultat immédiat de faire pousser en moi les qualités utiles aux autres (les oiseaux du ciel) : hauteur de vue, saveurs, protection des petits (ombre reposante) etc.

Je relisais récemment la vie d’Armand Marquiset, fondateur de l’association des Petits Frères des Pauvres et de Frères des Hommes. Il aura suffi d’un éblouissement intérieur à Notre Dame de Paris en juin 1936 pour que cet homme, seul au début, déploie après la guerre un immense réseau de solidarité et de chaleur humaine auprès des « vieillards » isolés comme on disait à l’époque. Aujourd’hui, les Petits Frères des Pauvres représentent un réseau de plus de 12 000 bénévoles qui visitent chaque semaine 36 000 personnes âgées isolées. Plus de 600 salariés organisent des séjours de vacances, des réveillons de Noël, des sorties culturelles, du relogement etc. Voilà une histoire de graine de moutarde qui a soulevé des montagnes pour faire reculer la solitude et l’isolement, obtenir des fonds, être déclarée grande cause nationale en 1996 etc.

Oui, s’en remettre à Dieu avec confiance c’est grandir, et réussir ses projets selon son cœur au-delà de toute espérance !

 

Croire et guérir

ImageUn autre usage de la plante moutarde était médicinal à l’époque de Jésus. Ses feuilles sont riches en vitamine C, et constituent un bon tonic printanier et un bon dépuratif. On l’a employée pour soigner la bronchite et autres affections respiratoires ; et surtout, ses graines ont des propriétés répulsives qui font merveille en cataplasme de choc.

Comparer la foi à une graine plante de moutarde, c’est donc lier de manière naturelle croire et guérir. Comme un cataplasme appliqué sur les zones douloureuses, la foi réchauffe et assouplit nos raideurs  personnelles, nos congestions spirituelles.

On oublie que le mot salut vient de la même racine que le mot santé. L’impératif latin Salve (deuxième personne de l’impératif) signifie : « Porte-toi bien » ; il a donné le mot salut, qui souhaite la bonne santé à quelqu’un.

Le salut au temps de Jésus désigne indissociablement la santé de l’âme et du corps. L’histoire de la petite graine de moutarde nous met sur la piste d’une foi qui guérit, ce que toutes les thérapies naturelles du bien-être et du développement personnel expérimentent à leur manière aujourd’hui. Nous avons un trésor dans notre tradition chrétienne : le corps humain est tout entier impliqué et concerné dans l’accueil du salut par la foi ! Peut-être cela nous aidera-t-il à avoir une pratique moins matérialiste de la médecine, sans pour autant tomber dans les dérives magiques de soi-disant guérisseurs en tout genre ?

 

Croire et goûter

Photo de Andouillette de Troyes "Moutarde & Champignons" Pommes Sautées Maison. Plat du restaurant Le FerrareLe goût si fort de la moutarde à l’ancienne se superpose immédiatement au nom de la plante moutarde : la foi est affaire de saveur ! Elle rehausse les joies simples de la vie. Elle donne un poids d’éternité à l’amitié partagée, à la communion amoureuse, au repas si délicat qu’il enchante les pupilles, au velouté du vin d’exception… Il y a un épicurisme chrétien qui, loin de mépriser la joie de la chair, lui donne une forme de plénitude, d’accomplissement étonnant. La vie a un autre goût lorsque l’on croit ! La moindre rencontre, la joie la plus humble, le plaisir le plus simple acquièrent une stature, une hauteur et une profondeur dont la disproportion graine de moutarde / plante adulte nous donne une faible idée. Tout peut être savouré avec une intensité élevée au carré lorsqu’on y entend les harmoniques du salut à venir…

 

L’effet papillon de la foi

L'effet papillon de la foiOn a déjà évoqué cette propriété stupéfiante des équations météorologiques de Konrad Lorentz (cf. L’effet papillon de la foi). Le battement d’ailes d’un papillon sur la côte est des États-Unis peut provoquer, par enchaînement successifs, une tornade sur la côte ouest ! Et c’est vrai que les plus petits leviers peuvent soulever des montagnes énormes, les plus petites graines engendrer des arbres immenses.

La Bible regorge d’exemples illustrant l’importance des petites choses [1]. Une petite pierre a fait tomber un géant; une petite coupe de cheveux a failli causer la perte du royaume ; un petit repas a coûté la vie à un prophète ; une petite mangeoire a changé la destinée de toute l’humanité ; un petit arrangement a provoqué la mort du Sauveur, pour qu’une toute petite graine de moutarde puisse déplacer des montagnes !

Ézéchiel prend l’image du petit rameau qui va devenir une demeure pour les oiseaux du ciel :

Ainsi parle le Seigneur, Yahvé : J’enlèverai, moi, la cime d’un grand cèdre, et je la placerai; j’arracherai du sommet de ses branches un tendre rameau, et je le planterai sur une montagne haute et élevée. Je le planterai sur une haute montagne d’Israël; il produira des branches et portera du fruit, il deviendra un cèdre magnifique. Les oiseaux de toute espèce reposeront sous lui, tout ce qui a des ailes reposera sous l’ombre de ses rameaux. (Ez 17, 22-23)

La Bible nous dit de « ne pas mépriser le jour des petits commencements », même un seul talent ; même cinq pains et deux petits poisons ; une mauvaise décision dans le Jardin d’Eden ; un petit bateau dans un déluge planétaire ; une petite tour de Babel, qui provoqua une confusion mondiale jusqu’à nos jours et d’innombrables guerres entre les nations de la terre ; une petite promesse faite à Abraham, qui fit tomber des bénédictions sur le monde entier ; un petit homme sur une montagne, qui transmit le Décalogue à toute la terre ; un petit garçon dans une bergerie, qui devint roi et contribua à changer le cours de l’histoire ; une petite mesure de farine et quelques gouttes d’huile, mélangées à de l’obéissance, qui permirent au prophète de Dieu, à son hôtesse et à son fils de survivre durant trois années de famine.
« Car ceux qui méprisaient le jour des faibles commencements se réjouiront […] » (Za 4,10)

Plus que jamais, nous pouvons croire à l’importance des commencements. Il nous faut pour cela « des veilleurs sur les remparts de Jérusalem », pour distinguer au loin ce qui vient, pour repérer comme Élie au Mont Carmel le nuage dans le ciel à peine plus gros que le point mais annonciateur de la pluie salvatrice. Il nous faut des planteurs de graines aussi minuscules que celle de la moutarde, qui feront confiance à leur pouvoir démultiplicateur.

Foi de moutarde ! dans Communauté spirituelle Small-Is-BeautifulNe nous laissons donc pas fasciner par les colosses aux pieds d’argile (too big to fall pensait-on avant la crise financière de 2008). Small is beautiful pourrait être comme dans les années 80 un beau slogan à remettre à l’ordre du jour…

Terminons en citant deux autres usages de cette image de la graine de moutarde. L’un dans le Coran, qui reprend sa petitesse pour évoquer que rien n’échappe à Allah omniscient :

«À la résurrection, sur les balances justes, personne ne sera trompé du poids d’un grain de moutarde… Devant son tribunal, ce qui ne pèserait qu’un grain de moutarde, fût-il caché… au ciel ou sur la terre, sera produit par Dieu… »(Sourates 21.47 ; 31.16).

L’autre usage est dans le Catéchisme de l’Église catholique. Avec poésie, le court texte du Credo de Nicée-Constantinople est comparé à une graine de moutarde contenant tous les développements ultérieurs de la théologie et de la spiritualité :

CEC n° 186
Comme la semence de sénevé contient dans une toute petite graine un grand nombre de branches, de même ce résumé de la foi renferme-t-il en quelques paroles toute la connaissance de la vraie piété contenue dans l’Ancien et le Nouveau Testament (S. Cyrille de Jérusalem, catech. ill. 5,12).

Relisez donc la parabole de Jésus : vous ne verrez plus jamais votre pot de moutarde à l’ancienne comme avant ! 

 


 

 

LECTURES DE LA MESSE

PREMIÈRE LECTURE
« Le juste vivra par sa fidélité » (Ha 1, 2-3 ; 2, 2-4)

Lecture du livre du prophète Habacuc

Combien de temps, Seigneur, vais-je appeler, sans que tu entendes ? crier vers toi : « Violence ! », sans que tu sauves ? Pourquoi me fais-tu voir le mal et regarder la misère ? Devant moi, pillage et violence ; dispute et discorde se déchaînent.
Alors le Seigneur me répondit : Tu vas mettre par écrit une vision, clairement, sur des tablettes, pour qu’on puisse la lire couramment. Car c’est encore une vision pour le temps fixé ; elle tendra vers son accomplissement, et ne décevra pas. Si elle paraît tarder, attends-la : elle viendra certainement, sans retard.
Celui qui est insolent n’a pas l’âme droite, mais le juste vivra par sa fidélité.

PSAUME
(Ps 94 (95), 1-2, 6-7ab, 7d-8a.9)
R/ Aujourd’hui, ne fermez pas votre cœur, mais écoutez la voix du Seigneur ! (cf. Ps 94, 8a.7d)

Venez, crions de joie pour le Seigneur,
acclamons notre Rocher, notre salut !
Allons jusqu’à lui en rendant grâce,
par nos hymnes de fête acclamons-le !

Entrez, inclinez-vous, prosternez-vous,
adorons le Seigneur qui nous a faits.
Oui, il est notre Dieu ;
nous sommes le peuple qu’il conduit.

Aujourd’hui écouterez-vous sa parole ?
« Ne fermez pas votre cœur comme au désert,
où vos pères m’ont tenté et provoqué,
et pourtant ils avaient vu mon exploit. »

DEUXIÈME LECTURE
« N’aie pas honte de rendre témoignage à notre Seigneur » (2 Tm 1, 6-8.13-14)

Lecture de la deuxième lettre de saint Paul apôtre à Timothée

Bien-aimé, je te le rappelle, ravive le don gratuit de Dieu ce don qui est en toi depuis que je t’ai imposé les mains. Car ce n’est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d’amour et de pondération. N’aie donc pas honte de rendre témoignage à notre Seigneur, et n’aie pas honte de moi, qui suis son prisonnier ; mais, avec la force de Dieu, prends ta part des souffrances liées à l’annonce de l’Évangile. Tiens-toi au modèle donné par les paroles solides que tu m’as entendu prononcer dans la foi et dans l’amour qui est dans le Christ Jésus. Garde le dépôt de la foi dans toute sa beauté, avec l’aide de l’Esprit Saint qui habite en nous.

ÉVANGILE
« Si vous aviez de la foi ! » (Lc 17, 5-10) Alléluia. Alléluia.
La parole du Seigneur demeure pour toujours ; c’est la bonne nouvelle qui vous a été annoncée. Alléluia. (cf. 1 P 1, 25)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

En ce temps-là, les Apôtres dirent au Seigneur : « Augmente en nous la foi ! » Le Seigneur répondit : « Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’, et il vous aurait obéi.
Lequel d’entre vous, quand son serviteur aura labouré ou gardé les bêtes, lui dira à son retour des champs : ‘Viens vite prendre place à table’ ? Ne lui dira-t-il pas plutôt : ‘Prépare-moi à dîner, mets-toi en tenue pour me servir, le temps que je mange et boive. Ensuite tu mangeras et boiras à ton tour’ ? Va-t-il être reconnaissant envers ce serviteur d’avoir exécuté ses ordres ? De même vous aussi, quand vous aurez exécuté tout ce qui vous a été ordonné, dites : ‘Nous sommes de simples serviteurs : nous n’avons fait que notre devoir’ »
Patrick BRAUD

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15 août 2019

La foi : combien de divisions ?

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

La foi : combien de divisions ?

Homélie pour le 20° Dimanche du temps ordinaire / Année C
18/08/2019

Cf. également :

N’arrêtez pas vos jérémiades !
De l’art du renoncement
Les trois vertus trinitaires
Les djihadistes n’ont pas lu St Paul !

Vous aurez reconnu la transposition de la célèbre réplique de Staline en 1935 répondant à Pierre Laval qui lui demandait de respecter les libertés religieuses en URSS : « le Vatican, combien de divisions ? ». On sait combien l’avenir lui donnera tort.

« La foi : combien de divisions ? » : l’Évangile de ce dimanche (Lc 12, 49-53) permet cet autre jeu de mots associant foi et divisions non pas militaires mais sociales, car le Christ semble bien lier les deux de manière assez perturbante :

« Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais bien plutôt la division. Car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées : trois contre deux et deux contre trois ; ils se diviseront : le père contre le fils et le fils contre le père, la mère contre la fille et la fille contre la mère, la belle-mère contre la belle-fille et la belle-fille contre la belle-mère. »

Voilà des versets dangereux dans la bouche d’un autre que Jésus. En leur nom, les Témoins de Jéhovah par exemple justifient la coupure familiale qu’ils imposent aux nouveaux convertis. Isoler des disciples de leurs proches pour mieux les retourner est une technique sectaire de manipulation mentale vieille comme le monde. Sous prétexte d’aller au bout de ses convictions politiques, religieuses ou autres, combien ont coupé les ponts d’avec leurs amis d’avant, leurs frères et sœurs, leurs proches ? Autrefois, les idéalistes rêvant de révolution plaquaient tout pour partir à Cuba (comme Régis Debray), Katmandou, Woodstock ou le Larzac. Maintenant, ils partent faire la guerre en Syrie pour Daesh, refusent de manger à la même table que les carnivores et militent à L214, vont rejoindre des groupes écologistes extrémistes avec des choix de vie les coupant radicalement des autres.

Bref, de tout temps, la foi divise.
La foi, ou les convictions fortes, si l’on préfère cette équivalence sécularisée. Ce qui peut nous rendre méfiants envers les gens ayant des idées très arrêtées…

Image intitulée Clean Rainbow Sandals Step 2À première lecture, on pourrait utiliser Jésus pour prêcher une telle radicalité. Les versets d’aujourd’hui annoncent la division familiale comme conséquence de la foi au Christ. Mais ailleurs, Jésus n’est pas plus tendre : « qui n’est pas avec moi est contre moi ». « Qui me préfère à son père, sa mère, ses frères et sœurs n’est pas digne de moi ». « Ne va pas enterrer ton père : laisse les morts enterrer leurs morts ». « Qui sont ma mère, mes frères et mes sœurs ? Ceux qui écoutent la parole de Dieu et la mettent en pratique » (sous-entendu : les autres ne font pas partie de ma vraie famille). « Si on ne vous accueille pas dans un village, secouez la poussière de vos pieds et partez ailleurs ». Etc.

Ceux qui veulent sélectionner dans le Nouveau Testament des paroles justifiant leur coupure d’avec les autres pourront en trouver une liste assez solide pour impressionner les nouveaux convertis.

Alors, la foi est-elle un facteur de division ?
On peut tenter d’apporter une réponse en plusieurs temps.

- Il est essentiel de lire le Nouveau Testament dans sa globalité, sans isoler les versets dangereux de leur contexte et du reste.
Car, hors la liste évoquée ci-dessus, l’ensemble du Nouveau Testament plaide courageusement pour ce qu’on appellerait aujourd’hui un vivre ensemble apaisé. L’amour des ennemis, la volonté tenace de Jésus de se mélanger aux impurs, aux catégories socialement méprisées, aux romains idolâtres lui a attiré les foudres des « purs », des pharisiens notamment dont le nom signifie justement « séparés » parce qu’ils habitent, mangent, s’habillent et prient à l’écart des autres. Il s’est battu pour réintégrer les lépreux, les aveugles, les handicapés de toutes sortes alors que la superstition religieuse voulait les garder hors du contact des autres. Ses paroles dures sont souvent contrebalancées par des paroles différentes : « Qui n’est pas contre moi est avec moi ». « Ne faites pas tomber le feu du ciel sur ceux qui ne vous accueillent pas ». « Honore ton père et ta mère ». « Laissez pousser ensemble le bon grain et l’ivraie » etc. Et plus tard, les apôtres exhorteront les chrétiens à vivre en paix avec tous, en respectant les autorités légitimes, sans causer d’autres troubles que l’annonce de la résurrection.

Les sectaires pratiquent toujours une lecture fondamentaliste et sélective de la Bible. C’est ainsi par exemple que des Églises réformées ont pu justifier bibliquement l’apartheid en Afrique du Sud pendant des décennies ! Fondamentalistes, ils prennent un verset au pied de la lettre, sans le situer dans son contexte. Sélectifs, ils rabâchent quelques versets  seulement, qu’ils isolent du reste pour justifier leur idéologie.

Il nous revient de ne pas sélectionner dans les Écritures ce qui va dans notre sens seulement, ce qui nous conforte dans nos convictions préétablies.

Il nous revient également de toujours situer un verset dans un ensemble, son contexte historique, social, les particularités de sa langue d’écriture, sous peine d’incohérence.

Un professeur d’exégèse aimait répéter : le plus important dans la Bible, c’est la reliure…

La foi : combien de divisions ? dans Communauté spirituelle 006_CAinsi nos versets ‘dangereux’ sont nettement plus compréhensibles quand on se souvient qu’ils ont été écrits dans les années 70 après Jésus-Christ : à ce moment-là, les persécutions juives et romaines battaient déjà leur plein, et menaçaient les fragiles communautés naissantes. Sous la pression de l’occupant romain, cherchant à éradiquer ce nouveau groupe juif un peu trop gênant, des pères dénonçaient des fils, des frères livraient des sœurs aux autorités, des amis se divisaient sur la résurrection de Jésus, avec des conséquences terribles car la prison et les fauves n’étaient jamais bien loin.

Dire que la foi chrétienne divise n’était pas alors un projet social ou politique, mais un constat historique douloureux. Jésus ne dit pas à ses disciples d’être des facteurs de division ; il les avertit qu’ils seront soumis à la division à cause de lui. C’est fort différent !

Et ce constat est toujours le nôtre : des minorités chrétiennes sont persécutées et ghettoïsées en 2019 à cause de leur foi un peu partout dans le monde, particulièrement  dans les pays fortement religieux, où la religion majoritaire ne tolère pas d’autres convictions que les siennes (ce que les Églises chrétiennes ont été capables de faire par le passé, hélas).

En France, malgré un certain bashing antichrétien (surtout parmi les gens des médias et de l’intelligentsia) la situation est plus paisible. Reste que la messe de minuit à Noël est devenue un facteur de discorde car elle divise la table familiale (quand autrefois tout le monde y allait en bloc, croyant ou non). Reste que des jeunes se voient mettre quasiment à la porte de chez eux lorsqu’ils disent demander le baptême, ou entrer au séminaire, ou vouloir devenir religieuse… La solitude des croyants au cœur de leur famille est réelle. Je connais un père de famille qui tous les dimanches matins depuis 40 ans va seul à l’église du quartier, parce que sa femme et ses enfants n’épousent pas ses convictions chrétiennes…

La foi divise donc : c’est un constat. Amer et douloureux.
Mais il faut tout de suite préciser : du côté des chrétiens au moins, la foi divise quand elle reste seule. Si l’on reste sur le seul registre des convictions, et si ces convictions sont assez fortes pour accepter de mourir pour elles, alors la vie commune avec ceux qui ne les partagent pas devient très difficile.

L'essence du ChristianismeFeuerbach avait déjà dénoncé au XIX° siècle le pouvoir clivant de la foi seule. Dans L’essence du christianisme (1841), il explicite les fondements de l’humanisme moderne, qui dénonce la foi en Dieu comme source d’intolérance. Son raisonnement est rigoureux, et hante encore aujourd’hui l’inconscient collectif européen : la foi seule est meurtrière. Car elle sépare les hommes en croyants et mécréants : divisions et conflits sont inéluctablement engendrés par les religions. L’athéisme pratique des européens puise ses racines dans cette méfiance envers la violence inhérente à la foi :

« La foi porte nécessairement à la haine, la haine à la persécution, dès que la puissance de la foi ne trouve pas de résistance, ne se brise pas contre une puissance étrangère, celle de l’amour, de l’humanité, du sentiment du droit. La foi, par elle-même, s’élève au-dessus des lois de la morale naturelle ; sa doctrine est la doctrine des devoirs envers Dieu, et le premier devoir est la foi. Autant Dieu est au-dessus de l’homme, autant les devoirs envers Dieu sont au-dessus des devoirs envers l’homme, et ces devoirs entrent nécessairement en collision les uns avec les autres. »

- C’est là qu’intervient pour les chrétiens le triptyque : foi/amour/espérance.
Car la foi sans amour n’est qu’idéologie. Avec l’amour, la foi permet de prier pour ceux qui nous font du mal, de ne pas rendre le mal pour le mal, de bénir ceux qui nous maudissent, et de considérer l’autre comme supérieur à soi. L’amour ne demande pas de se couper des autres, mais de les accepter tels qu’ils sont, comme je m’accepte tel que je suis. « Aime ton prochain comme toi-même » en quelque sorte !

Conjuguer foi et amour tempère l’ardeur des convictions pour l’ouvrir à l’accueil de l’autre, et structure le sentiment d’amitié/amour pour lui donner un contenu solide.

foi-espoir-amour-vinyle-autocollant-autocollant amour dans Communauté spirituelle

- Cela ne suffit cependant pas encore… Car les choses pourraient sembler figées : le croyant / le mécréant d’un côté, le fanatique / le raisonnable de l’autre. C’est là que l’espérance entre en jeu : elle fait bouger les lignes, elle introduit des degrés de liberté, elle dévoile de l’inachevé. Car l’espérance nous dit que rien n’est jamais figé, que la fin de l’histoire n’est pas écrite, que l’avenir – et notamment l’avenir en Dieu – nous réserve bien des surprises. Comment avoir un jugement définitif sur l’autre si j’espère qu’un jour « Dieu sera tout en tous » ? Comment camper sur mes positions si j’attends de « connaître comme je suis connu », confessant par là-même un non-savoir radical ? Comment exclure au nom de mes opinions si un verre d’eau fraîche donnée par le pire d’entre nous peut le sauver au Jugement dernier mieux que mes idées droites ? Comment rêver de vivre entre « purs » alors que Jésus sur la croix est assimilé aux bandits qui l’entourent, et promet à l’un d’entre eux le paradis ?

Avec l’espérance, la foi et l’amour ne voient pas le monde à partir des catégories humaines qui divisent et séparent, mais à partir de Dieu qui appelle l’humanité à la communion trinitaire, en formant une seule famille unie dans la diversité. Au regard de Dieu, nulle opposition ne peut se prétendre définitive ou radicale, nulle division n’est insurmontable, nulle partition n’a les promesses de l’éternité…

Pères de l'EgliseEpitre à DiognèteDans les premiers siècles, les chrétiens ont pratiqué joyeusement l’amour des ennemis alors qu’on les pourchassait. Ils ne se sont pas regroupés entre eux, ils n’ont pas exclu leur famille même si leur famille les excluait. Écoutons pour terminer ce que la célèbre Lettre à Diognète (II° siècle) disait de la fraternité qui unissait les premiers chrétiens aux autres citoyens, sans rien renier pourtant de leur conviction, jusqu’au martyre s’il le fallait :

Les chrétiens ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni par le langage, ni par les coutumes. Car ils n’habitent pas de villes qui leur soient propres, ils n’emploient pas quelque dialecte extraordinaire, leur genre de vie n’a rien de singulier. Leur doctrine n’a pas été découverte par l’imagination ou par les rêveries d’esprits inquiets; ils ne se font pas, comme tant d’autres, les champions d’une doctrine d’origine humaine.
Ils habitent les cités grecques et les cités barbares suivant le destin de chacun ; ils se conforment aux usages locaux pour les vêtements, la nourriture et le reste de l’existence, tout en manifestant les lois extraordinaires et vraiment paradoxales de leur république spirituelle. Ils résident chacun dans sa propre patrie, mais comme des étrangers domiciliés. Ils s’acquittent de tous leurs devoirs de citoyens, et supportent toutes les charges comme des étrangers. Toute terre étrangère leur est une patrie, et toute patrie leur est une terre étrangère. Ils se marient comme tout le monde, ils ont des enfants, mais ils n’abandonnent pas leurs nouveau-nés. Ils prennent place à une table commune, mais qui n’est pas une table ordinaire.
Ils sont dans la chair, mais ils ne vivent pas selon la chair. Ils passent leur vie sur la terre, mais ils sont citoyens du ciel. Ils obéissent aux lois établies, et leur manière de vivre est plus parfaite que les lois. Ils aiment tout le monde, et tout le monde les persécute. On ne les connaît pas, mais on les condamne ; on les tue et c’est ainsi qu’ils trouvent la vie. Ils sont pauvres et font beaucoup de riches. Ils manquent de tout et ils tout en abondance. On les méprise et, dans ce mépris, ils trouvent leur gloire. On les calomnie, et ils y trouvent leur justification. On les insulte, et ils bénissent. On les outrage, et ils honorent. Alors qu’ils font le bien, on les punit comme des malfaiteurs. Tandis qu’on les châtie, ils se réjouissent comme s’ils naissaient à la vie.

Que dépend-il de nous pour que la foi ne soit pas une source de division autour de nous ?

 

Lectures de la messe

Première lecture
« Ma mère, tu m’as enfanté homme de querelle pour tout le pays » (cf. Jr 15, 10) (Jr 38, 4-6.8-10)

Lecture du livre du prophète Jérémie
En ces jours-là, pendant le siège de Jérusalem, les princes qui tenaient Jérémie en prison dirent au roi Sédécias : « Que cet homme soit mis à mort : en parlant comme il le fait, il démoralise tout ce qui reste de combattant dans la ville, et toute la population. Ce n’est pas le bonheur du peuple qu’il cherche, mais son malheur. » Le roi Sédécias répondit : « Il est entre vos mains, et le roi ne peut rien contre vous ! » Alors ils se saisirent de Jérémie et le jetèrent dans la citerne de Melkias, fils du roi, dans la cour de garde. On le descendit avec des cordes. Dans cette citerne il n’y avait pas d’eau, mais de la boue, et Jérémie enfonça dans la boue. Ébed-Mélek sortit de la maison du roi et vint lui dire : « Monseigneur le roi, ce que ces gens-là ont fait au prophète Jérémie, c’est mal ! Ils l’ont jeté dans la citerne, il va y mourir de faim car on n’a plus de pain dans la ville ! » Alors le roi donna cet ordre à Ébed-Mélek l’Éthiopien : « Prends trente hommes avec toi, et fais remonter de la citerne le prophète Jérémie avant qu’il ne meure. »

Psaume
(Ps 39 (40), 2, 3, 4, 18)
R/ Seigneur, viens vite à mon secours !
(Ps 39, 14b)

D’un grand espoir,
j’espérais le Seigneur :
il s’est penché vers moi
pour entendre mon cri.

Il m’a tiré de l’horreur du gouffre,
de la vase et de la boue ;
il m’a fait reprendre pied sur le roc,
il a raffermi mes pas.

Dans ma bouche il a mis un chant nouveau,
une louange à notre Dieu.
Beaucoup d’hommes verront, ils craindront,
ils auront foi dans le Seigneur.

Je suis pauvre et malheureux,
mais le Seigneur pense à moi.
Tu es mon secours, mon libérateur :
mon Dieu, ne tarde pas !

Deuxième lecture
« Courons avec endurance l’épreuve qui nous est proposée » (He 12, 1-4)

Lecture de la lettre aux Hébreux

Frères, nous qui sommes entourés d’une immense nuée de témoins, et débarrassés de tout ce qui nous alourdit – en particulier du péché qui nous entrave si bien –, courons avec endurance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus, qui est à l’origine et au terme de la foi. Renonçant à la joie qui lui était proposée, il a enduré la croix en méprisant la honte de ce supplice, et il siège à la droite du trône de Dieu. Méditez l’exemple de celui qui a enduré de la part des pécheurs une telle hostilité, et vous ne serez pas accablés par le découragement. Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang dans votre lutte contre le péché.

Évangile
« Je ne suis pas venu mettre la paix sur terre, mais bien plutôt la division » (Lc 12, 49-53)Alléluia. Alléluia. Mes brebis écoutent ma voix, dit le Seigneur ; moi, je les connais, et elles me suivent. Alléluia. (Jn 10, 27)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! Je dois recevoir un baptême, et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli ! Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais bien plutôt la division. Car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées : trois contre deux et deux contre trois ; ils se diviseront : le père contre le fils et le fils contre le père, la mère contre la fille et la fille contre la mère, la belle-mère contre la belle-fille et la belle-fille contre la belle-mère. »
Patrick BRAUD

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