L'homélie du dimanche (prochain)

  • Accueil
  • > Recherche : évangile dimanche prochain

2 novembre 2013

Zachée-culbuto

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Zachée-culbuto

Homélie du 31° dimanche du temps ordinaire / Année C
03/11/2013

 

Descend vite au fond de toi…

Vous rappelez-vous de ce jouet  de l’enfance qu’est le culbuto ?

Zachée-culbuto dans Communauté spirituelle dynamogne_-_mr_culbuto_-_copyright_henry_krul_10

Vous avez beau chercher à le faire tomber, il revient imperturbablement à sa position debout. Toutes les perturbations extérieures ne le détournent pas de sa stabilité, car il a son centre au plus bas de lui-même.

« Zachée, descend vite : aujourd’hui, il faut que j’aille demeurer chez toi. »

Et si Dieu était en bas, au fond de nous-mêmes, au lieu de l’imaginer tout en-haut seulement ?

La conversion de Zachée – et la nôtre – serait alors de revenir à notre propre centre de gravité spirituelle, qui est la demeure du Christ en nous.

Quand les enfants ferment les yeux au caté pour éprouver dans le silence la présence de Dieu, ils sentent d’instinct que le retour à Dieu coïncide avec le retour à soi-même.

Zachée nous dit la réciproque : descendre au plus profond de soi, c’est trouver Dieu. Il croyait devoir s’élever pour enter en contact avec Jésus. Il lui faudra descendre en lui-même pour le trouver.

La vie intérieure, c’est d’abord l’attention à soi.

St Augustin parlait de la pesanteur de l’amour, qui nous amène à descendre au plus profond de nous-même.

Quand la Bible parle de la gloire de Dieu, elle emploie le mot hébreu kabôd qui désigne justement la pesanteur, la masse, la gravité. Comme si rendre gloire à Dieu, c’était se laisser tomber entre ses bras, en nous laissant attirer par son poids d’amour.
Tomber au fond de soi, c’est tomber dans les bras de Dieu.

« Zachée, descend vite ! »


À la manière d’un caillou qui revient à son lieu propre, par la pesanteur, quand rien ne l’empêche de tomber.

À la manière d’un fleuve qui revient dans son lit après une inondation.
À la manière du culbuto qui fascine les tout-petits : au milieu de l’agitation de nos vies, revenir à son centre intérieur, se laisser stabiliser par son propre poids, en bas.
« Qui s’élève sera abaissé, qui s’abaisse sera élevé » nous avertissait Jésus dimanche dernier avec le pharisien et le publicain.

Mais qu’est-ce donc que descendre ? descendre de son figuier ? de son sycomore ? descendre au fond de soi ?

 

Ne pas être étranger à soi-même

mourir-%C3%A0-soi-m%C3%AAme11 arbre dans Communauté spirituelleUn homme me confiait un jour : « J’ai la quarantaine. Jusqu’ici, j’ai vécu sans me poser de questions. J’ai foncé : pour créer ma boîte, pour bâtir mon couple et ma famille. J’étais dans l’action. Maintenant, cela ne me suffit plus. J’ai besoin de dire  » je « . J’ai envie d’explorer des désirs en moi que je passais sous silence sans le savoir, faute de temps pour explorer mon identité. J’en arrive même à remettre mon couple en question. Mais je ne peux plus vivre à la surface de moi-même. »

Les témoignages abondent dans ce sens : quel dommage de se contenter de relations superficielles, alors que la profondeur d’un vrai dialogue est bouleversante ! C’est comme si on soignait un mourant en ne lui parlant que de la pluie et du beau temps…

« Zachée, descend vite » : ne te contente pas du journal télévisé et du journal local ; va puiser en toi une intensité de vivre. Tu verras, je t’attends là, en bas du culbuto. Si tu descends en toi, j’irai chez toi faire ma demeure.


Il s’agit de ne pas être étranger à soi-même.

Prenez l’exemple de la violence : violence sociale, politique, professionnelle, familiale…

Certains fuient la violence comme la peste et évitent les conflits.
D’autres répondent à l’agressivité par l’agressivité, et sont surpris d’éprouver la violence en eux.

Pour tous l’enjeu est de vivre la violence de manière évangélique : non pas superficiellement, en agissant sans réfléchir (que ce soit dans un sens ou dans un autre), mais en descendant en son fond le plus intime : que faire de cette violence ? Comment ne pas se laisser manipuler par son passé ? Comment la convertir en violence à la manière du Christ ? Celui qui descend au fond de sa violence pour laisser Dieu la transformer, celui-là engendre Dieu en lui : au sens le plus fort, le Fils de Dieu naît en lui, il engendre le Verbe, il devient la Mère de Dieu !
De même celui ou celle qui descend au fond de son angoisse, de son émerveillement, de son amour ou de sa solitude?

 

Une vie bouleversée

Etty Hillesum, jeune juive dans le ghetto d’Amsterdam, et bientôt déportée volontaire dans le camp de Westerbok, témoigne dans son journal de cette descente « au fond » de l’âme, qui produit une sérénité incroyable, même au milieu de l’horreur.

41-no-m60cL._ culbuto« La semaine prochaine, il est probable que tous les juifs hollandais subiront l’examen médical.
De minute en minute, de plus en plus de souhaits, de désirs, de liens affectifs se détachent de moi ; je suis prête à tout accepter, tout lieu de la terre où il plaira à Dieu de m’envoyer, prête aussi à témoigner à travers toutes les situations et jusqu’à la mort, de la beauté et du sens de cette vie: si elle est devenue ce qu’elle est, ce n’est pas le fait de Dieu mais, le nôtre. Nous avons reçu en partage toutes les possibilités d’épanouissement, mais n’avons pas encore appris à exploiter ces possibilités. On dirait qu’à chaque instant des fardeaux de plus en plus nombreux tombent de mes épaules, que toutes les frontières séparant aujourd’hui hommes et peuples s’effacent devant moi, on dirait parfois que la vie m’est devenue transparente, et le coeur humain aussi; je vois, je vois et je comprends sans cesse plus de choses, je sens une paix intérieure grandissante et j’ai une confiance en Dieu dont l’approfondissement rapide, au début, m’effrayait presque, mais qui fait de plus en plus partie de moi même.


‘Hineinhorchen’ : ‘écouter au-dedans‘ ; je voudrais disposer d’un verbe bien hollandais pour dire la même chose. De fait, ma vie n’est qu’une perpétuelle écoute ‘au dedans’ de moi même, des autres, de Dieu. Et quand je dis que j’écoute ‘au-dedans‘, en réalité c’est plutôt Dieu en moi qui est à l’écoute.
Ce qu’il y a de plus essentiel et de plus profond en moi écoute l’essence et la profondeur de l’autre : (en moi) Dieu écoute Dieu. » *

Si vous faites ainsi passer votre centre de gravité « en-bas », comme le culbuto, alors rien ne pourra vous troubler, comme le culbuto qui revient à son centre après les oscillations extérieures. Cela demande de ne pas s’attacher à ses oeuvres, de rester libre pour Dieu et pour soi-même. Mais cette plongée intérieure est un voyage en Dieu. Comme le Christ est en bas de l’arbre de Zachée, c’est dans le fond de l’âme que Dieu réside, nous enseigne, nous attend et nous unit à lui.

« On s’engouffre dans cet abîme.
Et dans cet abîme est l’habitation propre de Dieu [...].
Dieu ne quitte jamais ce fond. Il n’y a là ni passé ni futur.
Rien ne peut combler ce fond. Rien de créé ne peut le sonder »
(Tauler XIV°)


« Zachée, descend vite »
.
Quitte ce qui en toi n’est que superficiel et léger.
Explore tes désirs les plus profonds.
Prends le temps du silence, de l’adoration, de la méditation et tu découvriras Dieu attablé dans le fond de ton âme mieux que Jésus attablé dans la demeure de Zachée.
« Zachée, descend vite ».
Qui que tu sois, descends vite au plus profond de toi : « aujourd’hui, il faut que j’aille demeurer chez toi »
.

 

_____________________________________________

* Etty Hillesum, Une vie bouleversée, Journal (1941-1943).

 


 

1ère lecture : Dieu aime toutes ses créatures (Sg 11, 23-26; 12, 1-2)

Lecture du livre de la Sagesse

Seigneur, tu as pitié de tous les hommes, parce que tu peux tout. Tu fermes les yeux sur leurs péchés, pour qu’ils se convertissent.
Tu aimes en effet tout ce qui existe, tu n’as de répulsion envers aucune de tes ?uvres, car tu n’aurais pas créé un être en ayant de la haine envers lui.
Et comment aurait-il subsisté, si tu ne l’avais pas voulu ? Comment aurait-il conservé l’existence, si tu ne l’y avais pas appelé ?
Mais tu épargnes tous les êtres, parce qu’ils sont à toi, Maître qui aimes la vie, toi dont le souffle impérissable anime tous les êtres.

Ceux qui tombent, tu les reprends peu à peu, tu les avertis, tu leur rappelles en quoi ils pèchent, pour qu’ils se détournent du mal, et qu’ils puissent croire en toi, Seigneur.

Psaume : Ps 144, 1-2, 8-9, 10-11, 13cd-14

R/ La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant !

Je t’exalterai, mon Dieu, mon Roi, 
je bénirai ton nom toujours et à jamais !
Chaque jour je te bénirai, 
je louerai ton nom toujours et à jamais.

Le Seigneur est tendresse et pitié, 
lent à la colère et plein d’amour ; 
la bonté du Seigneur est pour tous, 
sa tendresse, pour toutes ses ?uvres. 

Que tes oeuvres, Seigneur, te rendent grâce 
et que tes fidèles te bénissent ! 
Ils diront la gloire de ton règne, 
ils parleront de tes exploits. 

Le Seigneur est vrai en tout ce qu’il dit, 
fidèle en tout ce qu’il fait. 
Le Seigneur soutient tous ceux qui tombent, 
il redresse tous les accablés.

2ème lecture : Préparer dans la paix la venue du Seigneur(2Th 1, 11-12; 2, 1-2)

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens

Frères, nous prions continuellement pour vous, afin que notre Dieu vous trouve dignes de l’appel qu’il vous a adressé ; par sa puissance, qu’il vous donne d’accomplir tout le bien que vous désirez, et qu’il rende active votre foi. Ainsi, notre Seigneur Jésus aura sa gloire en vous, et vous en lui ; voilà ce que nous réserve la grâce de notre Dieu et du Seigneur Jésus Christ.
Frères, nous voulons vous demander une chose, au sujet de la venue de notre Seigneur Jésus Christ et de notre rassemblement auprès de lui : si l’on nous attribue une révélation, une parole ou une lettre prétendant que le jour du Seigneur est arrivé, n’allez pas aussitôt perdre la tête, ne vous laissez pas effrayer.

Evangile : Zachée : descends vite ! (Lc 19, 1-10)

Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique. Tout homme qui croit en lui possède la vie éternelle. Alléluia. (Jn 3, 16)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Jésus traversait la ville de Jéricho.
Or, il y avait un homme du nom de Zachée ; il était le chef des collecteurs d’impôts, et c’était quelqu’un de riche. Il cherchait à voir qui était Jésus, mais il n’y arrivait pas à cause de la foule, car il était de petite taille. Il courut donc en avant et grimpa sur un sycomore pour voir Jésus qui devait passer par là.
Arrivé à cet endroit, Jésus leva les yeux et l’interpella : « Zachée, descends vite : aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison. »
Vite, il descendit, et reçut Jésus avec joie.
Voyant cela, tous récriminaient : « Il est allé loger chez un pécheur. »
Mais Zachée, s’avançant, dit au Seigneur : « Voilà, Seigneur : je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. »
Alors Jésus dit à son sujet : « Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison, car lui aussi est un fils d’Abraham. En effet, le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. »
Patrick Braud

Mots-clés : , , , ,

20 juillet 2013

Le je de l’ouie

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Le je de l’ouie

 

Homélie du 16° Dimanche du temps ordinaire
Année C   21/07/13 

Connaissez-vous le sketch de Raymond de Devos sur le verbe « ouïr » ?

Il y a des verbes qui se conjuguent très irrégulièrement.
Par exemple, le verbe OUÏR.
Le verbe ouïr, au présent, ça fait J’ois… j’ois…
Si au lieu de dire « j’entends », je dis « j’ois », les gens vont penser que ce que j’entends est joyeux alors que ce que j’entends peut être particulièrement triste. Il faudrait préciser : ?Dieu, que ce que j’ois est triste !’
Si au lieu de dire « l’oreille », on dit « l’ouïe », et qu’on pense à une oie, alors on peut dire que l’ouïe de l’oie a ouï.
Pour peu que l’oie appartienne à Louis, cela donne :
- L’ouïe de l’oie de Louis a ouï.
- Ah oui ? Et qu’a ouï l’ouïe de l’oie de Louis ?
- Elle a ouï ce que toute oie oit…
Au passé, ça fait : J’ouïs… J’ouïs !
Il n’y a vraiment pas de quoi !

 


Au-delà de ces superbes jeux de mots, c’est presque un sketch « à la Devos » que Jésus nous interprète ici devant Marthe et Marie 
:

 

« Toute ouïe »

- Marie écoute; elle est « toute ouïe », l’oreille et le coeur tendus vers la parole de Jésus.
À sa soeur qui fait un tas de choses, Marie dit: « J’ouïs », c’est-à-dire : j’écoute, pour jouir de cette relation, pour savourer cette communion de parole.

- C’est comme un reproche implicite, où Jésus interpelle Marthe : arrête de te noyer dans les choses à faire, viens, et jouis de la Parole.

Or Marthe ne veut pas ouïr ;
elle ne veut pas jouir de la Parole du Christ, et voudrait même interdire ce plaisir à sa soeur?

Qui a dit que le christianisme était fâché avec la jouissance ?

Joue, oui

- Jésus insiste alors : « Joue, oui ! » c’est-à-dire : mets du jeu dans ta vie, réintroduis des degrés et des moments de liberté, au lieu de te laisser absorber complètement (par le travail, la famille, les soucis de tous ordres). Par cette ouverture à l’autre qu’est l’écoute, retrouve le goût du jeu avec ce qui n’est pas prévu, ni rentable.

La dimension ludique et artistique est essentielle à la foi chrétienne.

 

« Toute oui »

- « Joue ta vie sur le oui », en réponse à cette Parole d’un Autre.

Marie est « toute ouïe », toute écoute, et du coup, elle devient « toute oui », un oui intense à la Parole du Christ. Joue ta vie sur cette Parole, au lieu de préférer les choses à la relation, la cuisine à l’invité, le devoir au plaisir?


- Si bien que le jeu de l’écoute permet à Marie de dire « je », de découvrir son désir le plus vrai.

Le « je » de Marie lui est donné dans l »ouïe » de la Parole qu’est Jésus lui-même.
C’est la « part unique » qu’elle a choisie :
préférer la relation vivante à l’enfermement dans les choses; recevoir son identité la plus profonde de l’écoute de la parole d’un autre, du Tout-Autre.

Comme Jésus d’ailleurs, qui est le premier à écouter Celui dont il se reçoit, et qu’il appelle à cause de cela son Père. Il ne parle pas de lui-même, mais il parle de ce qu’il a d’abord écouté auprès de son Père (Jn 8,28 ; 12,49)

Le je de l'ouie dans Communauté spirituelle jesus-chez-marthe-et-marie 

Jouis

Vous voyez: l’écoute est première.
Ouïr est un vrai plaisir, un vrai « oui » à la vie.
Les Juifs nous le rappellent en priant 3 fois par jour (comme Jésus l’a fait toute sa vie) :
« Écoute Israël : le Seigneur est notre Dieu, le Seigneur est Un ».

C’est donc qu’il y a un lien entre l’écoute et l’unicité de l’être.

Écouter permet de progresser dans l’unité.

L’appel que le Christ nous lance dans cet évangile est donc à l’inverse du puritanisme, et de tous ceux qui voudraient faire de la religion un rabat-joie !

Le Christ semble nous dire :

« remet du plaisir dans ta relation aux autres, dans ta relation à Dieu.
Goûte particulièrement le plaisir d’écouter la parole, la parole de l’autre, la Parole de Dieu.
Pour cela, ne te laisse pas absorber par les choses ni par le seul devoir.
Remet du jeu dans ta vie. »

Accorde-toi quelque degré de liberté et de gratuité, pour jouir de la beauté de l’écoute, à l’image de Marie de Béthanie assise aux pieds de Jésus.


L’été est une période favorable pour cela.
Écouter la Parole que Dieu nous adresse à travers la nature splendide : mer, montagne, campagne…
Jouir de sa parole à travers une halte dans un monastère, une lecture tranquille des textes du Dimanche, ou un silencieux rendez-vous avec sa présence en nous…

Si nous réduisons la foi chrétienne à une accumulation de choses à faire, nous serons les plus malheureux de tous les croyants. Car on n’en fait jamais assez, ni assez bien ! Et puis, cela risque de nous priver de la rencontre avec Celui pour qui nous voulons faire ces choses.

l+ouie+louis amour dans Communauté spirituelle

Les mères de famille – ou les célibataires – connaissent bien cette agitation où il faut tout préparer pour qu’un dîner avec des invités se passe bien. Elles connaissent également la frustration de Marthe qui est dans la cuisine, et qui enrage de ne pouvoir prendre part à la conversation qui a lieu à côté.

Alors, plutôt que de se réjouir du bonheur de sa soeur qui écoute, plutôt que de se réjouir de lui permettre ce bonheur, elle veut l’en priver.

Comme si le bonheur de l’autre, tout proche, était insupportable, parce que justement ce n’est pas le mien.

C’est une vieille tentation de vouloir piétiner le bonheur que je ne peux ou ne veux pas atteindre. Marthe nie la différence entre elle et sa soeur, ne supporte pas qu’elle soit heureuse, et d’une autre manière qu’elle.

Être jaloux de la joie de ses proches au point de vouloir les en priver : cela arrive souvent dans nos familles, dans les communautés religieuses même !

C’est la réaction de l’enfant qui, voyant un beau jouet dans les bras de son frère, lui arrache, le casse et le piétine pour qu’aucun des deux ne soit heureux. Comme si l’égalité dans le malheur était un soulagement !

Cette violence, nous l’éprouvons tous lorsque, jaloux et nous comparant sans cesse, nous voulons ramener l’autre à notre état d’insatisfaction, au lieu de renoncer au comparatif et de nous réjouir de son bonheur.

C’est préférer casser un CD plutôt que voir un autre l’écouter.

C’est la folie de tous les crimes passionnels, où l’amour ne peut plus supporter le bonheur de l’autre, et préfère le détruire plutôt que de le voir s’éloigner…

 

Ouïr la Parole de Dieu…

Jouir de cette Parole.

Et ainsi devenir soi-même dans ce « Jeu / Je de l’ouïe »…

Que Marthe et Marie de Béthanie nous inspirent cet été de vrais moments où savourer la goûteuse présence de Dieu en nous…

1ère lecture : Abraham donne l’hospitalité à Dieu, qui lui promet un fils (Gn 18, 1-10a)
Lecture du livre de la Genèse

Aux chênes de Mambré, le Seigneur apparut à Abraham, qui était assis à l’entrée de la tente. C’était l’heure la plus chaude du jour.
Abraham leva les yeux, et il vit trois hommes qui se tenaient debout près de lui. Aussitôt, il courut à leur rencontre, se prosterna jusqu’à terre et dit: « Seigneur, si j’ai pu trouver grâce à tes yeux, ne passe pas sans t’arrêter près de ton serviteur. On va vous apporter un peu d’eau, vous vous laverez les pieds, et vous vous étendrez sous cet arbre. Je vais chercher du pain, et vous reprendrez des forces avant d’aller plus loin, puisque vous êtes passés près de votre serviteur ! »
Ils répondirent : « C’est bien. Fais ce que tu as dit. »
Abraham se hâta d’aller trouver Sara dans sa tente, et il lui dit : « Prends vite trois grandes mesures de farine, pétris la pâte et fais des galettes. »
Puis Abraham courut au troupeau, il prit un veau gras et tendre, et le donna à un serviteur, qui se hâta de le préparer. Il prit du fromage blanc, du lait, le veau qu’on avait apprêté, et les déposa devant eux ; il se tenait debout près d’eux, sous l’arbre, pendant qu’ils mangeaient.
Ils lui demandèrent : « Où est Sara, ta femme ? » Il répondit : « Elle est à l’intérieur de la tente. »
Le voyageur reprit : « Je reviendrai chez toi dans un an, et à ce moment-là, Sara, ta femme, aura un fils. »

Psaume : Ps 14, 1a.2, 3bc-4ab, 5

R/ Tu es proche, Seigneur : fais-nous vivre avec toi.

Seigneur, qui séjournera sous ta tente ?
Celui qui se conduit parfaitement,
qui agit avec justice
et dit la vérité selon son coeur.

Il ne fait pas de tort à son frère
et n’outrage pas son prochain.
À ses yeux, le réprouvé est méprisable
mais il honore les fidèles du Seigneur.

Il prête son argent sans intérêt,
n’accepte rien qui nuise à l’innocent.
L’homme qui fait ainsi
demeure inébranlable.

2ème lecture : Le mystère du Christ s’accomplit dans la vie de l’Apôtre (Col 1, 24-28)
Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens

Frère,
je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous, car ce qu’il reste à souffrir des épreuves du Christ, je l’accomplis dans ma propre chair, pour son corps qui est l’Église.
De cette Église, je suis devenu ministre, et la charge que Dieu m’a confiée, c’est d’accomplir pour vous sa parole, le mystère qui était caché depuis toujours à toutes les générations, mais qui maintenant a été manifesté aux membres de son peuple saint.
Car Dieu a bien voulu leur faire connaître en quoi consiste, au milieu des nations païennes, la gloire sans prix de ce mystère : le Christ est au milieu de vous, lui, l’espérance de la gloire !
Ce Christ, nous l’annonçons : nous avertissons tout homme, nous instruisons tout homme avec sagesse, afin d’amener tout homme à sa perfection dans le Christ.

Evangile : Marthe et Marie accueillent Jésus chez elles (Lc 10, 38-42)
Acclamation : Alléluia. Alléluia. Heureux qui entend la voix du Seigneur et lui ouvre sa porte : il a trouvé son bonheur et sa joie. Alléluia. (cf. Ap 3, 20)
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Alors qu’il était en route avec ses disciples, Jésus entra dans un village. Une femme appelée Marthe le reçut dans sa maison.
Elle avait une soeur nommée Marie qui, se tenant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.
Marthe était accaparée par les multiples occupations du service. Elle intervint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien ? Ma s?ur me laisse seule à faire le service. Dis-lui donc de m’aider. »
Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part : elle ne lui sera pas enlevée. »
Patrick Braud

Mots-clés : , , , , , , , ,

13 juillet 2013

Aime ton Samaritain !

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Aime ton Samaritain !

Homélie du Dimanche 14 Juillet 2013 /
15° Dimanche Année C

Tout le monde connaît la figure du  » bon Samaritain « . La pointe du christianisme serait de lui ressembler, dit-on couramment.
Est-ce si sûr ? Et si l’amour du prochain était l’amour pour les Samaritains de nos vies, avant d’aimer les blessés sur notre route ?…

La lecture que je vous propose de cette page d’évangile est inspirée par Françoise Dolto *. Elle tourne autour d’une question centrale en psychologie, qui est la question de la dette et de la reconnaissance.

En regardant le texte de près, on est tout d’abord obligé de rejeter l’interprétation courante qui en est fait très moralisante, du genre : « Faites du bien aux autres quand ils sont dans le besoin. » Car d’une part c’est d’une banalité à pleurer (pas besoin d’être chrétien pour cela), et ensuite le texte ne dit pas du tout cela, au contraire !

La perspective est inverse !

Quelle est en effet la question ? C’est : « Qui est mon prochain ? »
Et à la fin de la parabole, la réponse tombe : lequel a été le prochain ? C’est le Samaritain.
« Aime ton prochain » => « aime le Samaritain ».
Aimer mon prochain, c’est donc aimer ceux qui pour moi ont joué ce rôle de tendresse et de salut qu’a joué le Samaritain.
Autrement dit Jésus nous invite à nous identifier au blessé et non au Samaritain.

Le Christ nous demande d’aimer les personnes qui nous ont sauvé à un moment donné dans notre vie où nous étions blessés à mort.
Il s’agit finalement de reconnaître notre dette vis à vis des autres, vis-à-vis des Samaritains de notre vie, ceux qui nous ont épaulés à un moment où ? seuls - nous n’aurions pas pu continuer notre chemin. Que nous le connaissions ou pas, nous sommes en dette vis-à-vis de celui ou celle qui nous secourt dans la détresse.

Mais ce qui est très fort dans l’Évangile, c’est que cette dette n’est pas remboursable auprès de l’intéressé ! Car le Samaritain de l’évangile se retire, disparaît. Il laisse l’autre libre. Il s’évanouit de notre chemin et continue le sien sans attendre ni permettre un retour, une reconnaissance.

Aime ton Samaritain ! dans Communauté spirituelle Samaritain

Ce qui veut dire que cette dette d’amour, nous ne pouvons la régler qu’en devenant à notre tour sauveur d’un autre. C’est un courant d’amour qui ne boucle jamais.

Dans certaines ethnies d’Afrique, on ne doit jamais remercier quand on reçoit un cadeau ; sinon c’est que je ne veux rien devoir et que je réduis la relation humaine à une relation marchande.

Aimer notre prochain ici, c’est découvrir ce que je dois à ceux qui m’ont secouru, sans pouvoir les remercier, sans même parfois qu’ils en aient conscience, et ne pas oublier ces sauveurs. Mais plus encore, c’est ne pas m’attacher à ces sauveurs, pour qu’ils puissent continuer leur chemin et moi le mien, en donnant à mon tour gratuitement ce que j’ai reçu gratuitement, sans m’attacher moi-même au bien que je pourrai faire, consciemment ou non.

La pointe de la parabole, dans cette ligne d’interprétation, c’est d’aimer celui ou celle qui a été proche de nous quand nous étions à terre.

Si quelqu’un, un jour, nous a sorti d’un chagrin, d’une dépression, d’une blessure, d’une souffrance, d’une détresse matérielle ou morale, souvenons-nous en toute notre vie.
Mais avec les commandements de la parabole :

- Ne te laisse pas retenir par l’affection de celui qui t’a sauvé.
L’amour rend libre : et pour cela, des routes qui se sont croisées doivent savoir s’éloigner.

Ne sois pas toi-même lié intérieurement par la reconnaissance à manifester à celui qui t’a secouru.
Mais fais comme il a fait : c’est la vraie manière de reconnaître ta dette et de faire circuler l’amour sans jamais recevoir de retour.

- Inversement, si tu as été le Samaritain de quelqu’un, ne te laisse pas arrêter par le souvenir de celui que tu as pu secourir. Souviens-toi que ton propre salut, tu le dois à un autre. Aime cet autre, parti et absent, en ton c?ur, et quand l’occasion s’en présentera, accepte toi aussi de devenir le blessé dépendant d’un autre.

Reconnaître ma dette envers ceux qui se sont fait proches de moi sans m’attacher à eux me permet à mon tour de me faire proche de ceux que je croise en chemin, sans que cela m’empêche de poursuivre ma route, libre de toute possession affective, avec comme seul moteur le souvenir, la trace des tendresses qui m’ont relevé avant de disparaître, plus loin? dans cette absence que seul le retour du Christ en gloire pourra révéler?

« Aime ton prochain », commande la Loi juive. Et Jésus précise : ?aime les Samaritains qui se sont faits proches de toi. Accepte d’être aimé avant que d’aimer’.
Reconnais de quelle tendresse tu es entouré, par Dieu le premier qui s’est approché de toi en Jésus-Christ.
Si tu prends ainsi conscience de l’amour qui te précède, alors, alors seulement, tu pourras devenir le Samaritain d’un autre…

 

* Françoise Dolto, Les évangiles et la foi au risque de la psychanalyse, éd. Gallimard.

 

 

1ère lecture : La loi de Dieu dans le coeur de l’homme (Dt 30, 10-14)

Lecture du livre du Deutéronome

Moïse disait au peuple d »Israël : « Écoute la voix du Seigneur ton Dieu, en observant ses ordres et ses commandements inscrits dans ce livre de la Loi ; reviens au Seigneur ton Dieu de tout ton c?ur et de toute ton âme.
Car cette loi que je te prescris aujourd’hui n’est pas au-dessus de tes forces ni hors de ton atteinte.
Elle n’est pas dans les cieux, pour que tu dises : ’Qui montera aux cieux nous la chercher et nous la faire entendre, afin que nous la mettions en pratique ?’
Elle n’est pas au-delà des mers, pour que tu dises : ’Qui se rendra au-delà des mers nous la chercher et nous la faire entendre, afin que nous la mettions en pratique ?’
Elle est tout près de toi, cette Parole, elle est dans ta bouche et dans ton c?ur afin que tu la mettes en pratique. »

Psaume : Ps 18, 8, 9, 10, 11

R/ Ta parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance !

La loi du Seigneur est parfaite, 
qui redonne vie ; 
la charte du Seigneur est sûre, 
qui rend sages les simples. 

Les préceptes du Seigneur sont droits, 
ils réjouissent le coeur ; 
le commandement du Seigneur est limpide, 
il clarifie le regard. 

La crainte qu’il inspire est pure, 
elle est là pour toujours ; 
les décisions du Seigneur sont justes 
et vraiment équitables : 

plus désirables que l’or, 
qu’une masse d’or fin, 
plus savoureuses que le miel 
qui coule des rayons.

2ème lecture : Primauté du Christ dans la création et dans l’Église (Col 1, 15-20)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens

Le Christ est l’image du Dieu invisible, le premier-né par rapport à toute créature, 
car c’est en lui que tout a été créé dans les cieux et sur la terre, les êtres visibles et les puissances invisibles : tout est créé par lui et pour lui. Il est avant tous les êtres, et tout subsiste en lui. 
Il est aussi la tête du corps, c’est-à-dire de l’Église. Il est le commencement, le premier-né d’entre les morts, puisqu’il devait avoir en tout la primauté. Car Dieu a voulu que dans le Christ toute chose ait son accomplissement total. Il a voulu tout réconcilier par lui et pour lui,sur la terre et dans les cieux,en faisant la paix par le sang de sa croix.

Evangile : La loi d’amour : le bon Samaritain (Lc 10, 25-37)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Voici le commandement nouveau : Celui qui aime Dieu, qu’il aime aussi son frère. Alléluia. (cf. Jn 5, 21)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Pour mettre Jésus à l’épreuve, un docteur de la Loi lui posa cette question : « Maître, que dois-je faire pour avoir part à la vie éternelle ? »
Jésus lui demanda : « Dans la Loi, qu’y a-t-il d’écrit ? Que lis-tu ? »
L’autre répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton c?ur, de toute ton âme, de toute ta force et de tout ton esprit, et ton prochain comme toi-même. »
Jésus lui dit : « Tu as bien répondu. Fais ainsi et tu auras la vie. »
Mais lui, voulant montrer qu’il était un homme juste, dit à Jésus : « Et qui donc est mon prochain ? »
Jésus reprit : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba sur des bandits ; ceux-ci, après l’avoir dépouillé, roué de coups, s’en allèrent en le laissant à moitié mort.
Par hasard, un prêtre descendait par ce chemin ; il le vit et passa de l’autre côté.
De même un lévite arriva à cet endroit ; il le vit et passa de l’autre côté.
Mais un Samaritain, qui était en voyage, arriva près de lui ; il le vit et fut saisi de pitié.
Il s’approcha, pansa ses plaies en y versant de l’huile et du vin ; puis il le chargea sur sa propre monture, le conduisit dans une auberge et prit soin de lui.
Le lendemain, il sortit deux pièces d’argent, et les donna à l’aubergiste, en lui disant : ‘Prends soin de lui ; tout ce que tu auras dépensé en plus, je te le rendrai quand je repasserai.’
Lequel des trois, à ton avis, a été le prochain de l’homme qui était tombé entre les mains des bandits ? »
Le docteur de la Loi répond : « Celui qui a fait preuve de bonté envers lui. » Jésus lui dit : « Va, et toi aussi fais de même. »
Patrick Braud

Mots-clés : , , ,

29 juin 2013

Exigeante et efficace : la non-violence

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Exigeante et efficace : la non-violence

 

Homélie du 13e dimanche du temps ordinaire/ Année C
30/06/013

Les affrontements politiques à l’occasion de la loi sur le « mariage pour tous » ont mis en lumière deux façons de combattre pour ses idées.

L’une, faite de convictions, de drapeaux, de pancartes et de familles en cortège paisible, et l’autre, en marge de cette foule, faite de vitrines brisées, de provocations à la bagarre, se terminant en jets de cocktails Molotov et charges musclées des CRS. Hélas, cette deuxième forme de militance peut aller jusqu’à tuer. La mort de Clément Méric début juin rappelle que la violence des extrêmes devient vite meurtrière.

Pourtant, dans l’entreprise comme en politique, beaucoup vous diront qu’il faut rendre coup pour coup. Qu’on n’est pas dans le monde des Bisounours. Que tendre l’autre joue fait encore plus mal et n’arrête pas l’injustice.

Bref : que les cathos sont de doux rêveurs à parler de non-violence et d’amour des ennemis.

Regardons-y de plus près.

 

Éliminer ses ennemis ?

« Veux-tu que nous fassions tomber sur eux le feu du ciel ? » demandent Jacques et Jean en désignant leurs adversaires. C’est donc que l’évangélisation suscite toujours hostilité et opposition farouche. Faut-il répondre aux violents avec leurs propres armes ? La tentation séduit les disciples. Après tout, persuadés qu’ils sont d’être dans la vérité, pourquoi ne pas l’imposer par la force ?

C’est le piège dans lequel est tombé Mohamed lors de sa reconquête de la Mecque et de l’Arabie tout entière. C’est l’erreur fatale de l’Inquisition, du stalinisme ou de tout autre idéologie sûre d’elle-même.

Le Christ réfute vigoureusement ce remède pire que le mal : répondre à la violence par la violence n’engendre qu’un cycle infernal de vengeance et de représailles, dans chaque camp alternativement.

La seule exception tolérée ensuite à ce principe non-violent est celle de la légitime défense : devant Hitler envahissant la Pologne ou déportant les juifs, il est légitime de recourir à la violence pour arrêter la barbarie. À condition toutefois de n’avoir pas la haine au coeur, fut-ce contre Eichmann ou Goebbels, mais la volonté de sauver les plus faibles. Car la haine nous fait ressembler aux bourreaux que nous détestons. Car la vengeance nous ravale au rang des criminels dont nous dénonçons les actes, pas la personne.

Ne pas confondre une personne avec ses actes ? quels qu’ils soient – reste en effet le socle de l’éthique chrétienne. Jésus a cru en l’autre quoi qu’il fasse. C’est pourquoi il pardonne à ceux qui le condamnent et le crucifient. C’est pourquoi nous sommes contre la peine de mort. C’est pourquoi nous croyons que la rédemption d’un être est toujours possible.

 

Le Christ ne veut pas utiliser la puissance pour s’imposer.

Lors de son arrestation, il dit à Pierre qui veut s’y opposer par la force : « Rengaine ton glaive; car tous ceux qui prennent le glaive périront par le glaive. Penses-tu donc que je ne puisse faire appel à mon Père, qui me fournirait sur-le-champ plus de douze légions d’anges ? » (Mt 26,52-53). Dans l’évangile aujourd’hui, il refuse de faire tomber le feu du ciel, le « feu de Dieu », sur ses ennemis. Il sait qu’il s’expose ainsi à être lui-même broyé par la violence qu’il refuse d’utiliser. Mais c’est en allant jusqu’au bout de sa non-violence que le Christ pourra nous libérer de l’emprise que la violence exerce sur nous dès l’origine (cf. le premier homicide d’Abel par Caïn).

 

Une non-violence terriblement exigeante.

Exigeante et efficace : la non-violence dans Communauté spirituelle Rajneesh-Osho-Viens-Suis-Moi-Livre-864529556_MLReste que le Christ n’est pas tendre avec ceux qui veulent le suivre. Il place la barre très haut. Il est presque plus exigeant avec ses amis que ses ennemis ! C’est que combattre la violence à l’extérieur de soi commence par la débusquer d’abord en soi. Elle provient d’attachements trop exclusifs, d’identités trop marquées, de racines culturelles ou familiales trop exclusives et donc jalouses.

Trop ou mal à posséder empêchent d’être non-violent : « le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer sa tête ».

Trop ou mal honorer sa famille empêche d’être libre, détaché : « laisse les morts enterrer leurs morts ».

Trop ou mal s’attacher à son passé empêche d’être disponible à l’avenir de l’autre : « celui qui regarde en arrière n’est pas fait pour le royaume de Dieu ».

Ces paroles sont dures, et il ne faut surtout pas en émousser l’exigence.

La non-violence du Christ est d’abord un combat intérieur, pour éliminer non pas ses ennemis du dehors, mais ces adhérences du dedans qui nous maintiennent complices de la violence passée ou possible.

 

Une non-violence terriblement efficace.

Ce combat intérieur vaut la peine. Car au bout de ce pèlerinage intime il y a la terrible efficacité de la non-violence.

La pression que Gandhi et Martin Luther King ont su mettre sur leurs adversaires a changé le cours de l’histoire : en émancipant une société coloniale, en réformant des lois raciales injustes.

La lutte non violente du syndicat Solidarnosc en Pologne (1981 – 1989) est exemplaire. Qui pouvait imaginer dans ces années 80 que le communisme – si meurtrier, si inhumain – pourrait tomber autrement que sous les obus et les missiles de l’Ouest ? Pourtant, comme l’écrivait Jean Paul II, acteur essentiel de ce bouleversement :

« Parmi les nombreux facteurs de la chute des régimes oppressifs, certains méritent d’être rappelés d’une façon particulière. Le facteur décisif qui a mis en route les changements est assurément la violation des droits du travail. On ne saurait oublier que la crise fondamentale des systèmes qui se prétendent l’expression du gouvernement et même de la dictature des ouvriers commence par les grands mouvements survenus en Pologne au nom de la solidarité. Les foules ouvrières elles-mêmes ôtent sa légitimité à l’idéologie qui prétend parler en leur nom, et elles retrouvent, elles redécouvrent presque, à partir de l’expérience vécue et difficile du travail et de l’oppression, des expressions et des principes de la doctrine sociale de l’Église.

Un autre fait mérite d’être souligné : à peu près partout, on est arrivé à faire tomber un tel « bloc », un tel empire, par une lutte pacifique, qui a utilisé les seules armes de la vérité et de la justice. Alors que, selon le marxisme, ce n’est qu’en poussant à l’extrême les contradictions sociales que l’on pouvait les résoudre dans un affrontement violent, les luttes qui ont amené l’écroulement du marxisme persistent avec ténacité à essayer toutes les voies de la négociation, du dialogue, du témoignage de la vérité, faisant appel à la conscience de l’adversaire et cherchant à réveiller en lui le sens commun de la dignité humaine.

Apparemment, l’ordre européen issu de la deuxième guerre mondiale et consacré par les Accords de Yalta ne pouvait être ébranlé que par une autre guerre. Et pourtant, il s’est trouvé dépassé par l’action non violente d’hommes qui, alors qu’ils avaient toujours refusé de céder au pouvoir de la force, ont su trouver dans chaque cas la manière efficace de rendre témoignage à la vérité. Cela a désarmé l’adversaire, car la violence a toujours besoin de se légitimer par le mensonge, de se donner l’air, même si c’est faux, de défendre un droit ou de répondre à une menace d’autrui. Encore une fois, nous rendons grâce à Dieu qui a soutenu le coeur des hommes au temps de la difficile épreuve, et nous prions pour qu’un tel exemple serve en d’autres lieux et en d’autres circonstances. Puissent les hommes apprendre à lutter sans violence pour la justice, en renonçant à la lutte des classes dans les controverses internes et à la guerre dans les controverses internationales ! » (Centesimus Annus n° 23)

La liste est longue de ces campagnes de non-violence qui ont abouti à rétablir l’être humain dans sa dignité :

- les ‘folles de la place de mai’ en Argentine dans les années 70

- le ‘people power’ aux Philippines contre le règne du dictateur Marcos en 1986

- la longue traversée du désert de Nelson Mandela (27 ans de prison !) aboutissant au pardon et à une réconciliation au-delà de l’apartheid.

- la ‘révolution de velours’ avec Waclav Havel en Tchécoslovaquie et RDA en 1989

- le mouvement du prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi en Birmanie

- les printemps arabes récents (dont le combat n’est pas terminé hélas)

- etc.

 

Ne laissons plus dire que la non-violence est faite pour les doux rêveurs dans un monde de Bisounours !

C’est au contraire l’arme la mieux adaptée à l’éradication du mal et non de ceux qui le commettent.

C’est la seule stratégie qui combat la cause et non pas les symptômes.

C’est l’attitude qui peut changer le coeur du bourreau et l’aider à se détourner de la violence commise.

 

Appliquez-la au couple ou à l’entreprise, et vous verrez que, alliée au pardon - cas de légitime défense mise à part - elle est largement plus efficace que la revanche ou la stricte justice.

 

« Veux-tu que nous fassions tomber sur eux le feu du ciel ? »

Laissons le Christ nous interpeller vivement lorsque cette tentation sauvage de détruire l’autre résonnera à nos oreilles…

 

 

 

 

1ère lecture : Élisée abandonne tout pour suivre Élie (1R 19, 16b.19-21)
Lecture du premier livre des Rois

Le Seigneur avait dit au prophète Élie : « Tu consacreras Élisée, fils de Shafate, comme prophète pour te succéder. » 
Élie s’en alla. Il trouva Élisée, fils de Shafate, en train de labourer. Il avait à labourer douze arpents, et il en était au douzième. Élie passa près de lui et jeta vers lui son manteau.
Alors Élisée quitta ses boeufs, courut derrière Élie, et lui dit : « Laisse-moi embrasser mon père et ma mère, puis je te suivrai. » Élie répondit : « Va-t’en, retourne là-bas ! Je n’ai rien fait. »
Alors Élisée s’en retourna ; mais il prit la paire de boeufs pour les immoler, les fit cuire avec le bois de l’attelage, et les donna à manger aux gens. Puis il se leva, partit à la suite d’Élie et se mit à son service.

Psaume : Ps 15, 1.2a.5, 7-8, 9-10, 2b-11

R/ Dieu, mon bonheur et ma joie !

Garde-moi, mon Dieu : j’ai fait de toi mon refuge.
J’ai dit au Seigneur : « Tu es mon Dieu !
Seigneur, mon partage et ma coupe :
de toi dépend mon sort. »

Je bénis le Seigneur qui me conseille :
même la nuit mon c?ur m’avertit.
Je garde le Seigneur devant moi sans relâche ;
il est à ma droite : je suis inébranlable.

Mon c?ur exulte, mon âme est en fête,
ma chair elle-même repose en confiance :
tu ne peux m’abandonner à la mort
ni laisser ton ami voir la corruption.

Je n’ai pas d’autre bonheur que toi.
Tu m’apprends le chemin de la vie :
devant ta face, débordement de joie !
À ta droite, éternité de délices !

2ème lecture : L’Esprit s’oppose à la chair et nous rend libres(Ga 5, 1.13-18)
Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Galates

Frères, 
si le Christ nous a libérés, c’est pour que nous soyons vraiment libres. Alors tenez bon, et ne reprenez pas les chaînes de votre ancien esclavage.
Vous avez été appelés à la liberté. Mais que cette liberté ne soit pas un prétexte pour satisfaire votre égoïsme ; au contraire, mettez-vous, par amour, au service les uns des autres.
Car toute la Loi atteint sa perfection dans un seul commandement, et le voici : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. 
Si vous vous mordez et vous dévorez les uns les autres, prenez garde : vous allez vous détruire les uns les autres.
Je vous le dis : vivez sous la conduite de l’Esprit de Dieu ; alors vous n’obéirez pas aux tendances égoïstes de la chair.
Car les tendances de la chair s’opposent à l’esprit, et les tendances de l’esprit s’opposent à la chair. En effet, il y a là un affrontement qui vous empêche de faire ce que vous voudriez.
Mais en vous laissant conduire par l’Esprit, vous n’êtes plus sujets de la Loi.

Evangile : Suivre Jésus sans condition sur la route de la Croix(Lc 9, 51-62)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Aujourd’hui le Seigneur nous appelle. Suivons-le sur les chemins de l’Évangile. Alléluia. (cf. 1 S 3, 9 ; Lc 9, 59)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Comme le temps approchait où Jésus allait être enlevé de ce monde, il prit avec courage la route de Jérusalem.
Il envoya des messagers devant lui ; ceux-ci se mirent en route et entrèrent dans un village de Samaritains pour préparer sa venue.
Mais on refusa de le recevoir, parce qu’il se dirigeait vers Jérusalem.
Devant ce refus, les disciples Jacques et Jean intervinrent : « Seigneur, veux-tu que nous ordonnions que le feu tombe du ciel pour les détruire ? »
Mais Jésus se retourna et les interpella vivement.
Et ils partirent pour un autre village.
En cours de route, un homme dit à Jésus : « Je te suivrai partout où tu iras. »
Jésus lui déclara : « Les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel ont des nids ; mais le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer la tête. »
Il dit à un autre : « Suis-moi. » L’homme répondit : « Permets-moi d’aller d’abord enterrer mon père. »
Mais Jésus répliqua : « Laisse les morts enterrer leurs morts. Toi, va annoncer le règne de Dieu. »
Un autre encore lui dit : « Je te suivrai, Seigneur ; mais laisse-moi d’abord faire mes adieux aux gens de ma maison. »
Jésus lui répondit : « Celui qui met la main à la charrue et regarde en arrière n’est pas fait pour le royaume de Dieu. » Patrick Braud

1...2324252627...29