L'homélie du dimanche (prochain)

25 juin 2023

Je vis tranquille au milieu des miens

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Je vis tranquille au milieu des miens

Homélie pour le 13° Dimanche du Temps Ordinaire / Année A
02/07/2023

Cf. également :
Construisons donc une chambre haute pour notre Élisée intérieur
Dieu est le plus court chemin d’un homme à un autre
Le jeu du qui-perd-gagne
Honore ton père et ta mère
Aimer nos familles « à partir de la fin »
Prendre sa croix
Chandeleur : les relevailles de Marie
Zachée : le juste, l’incisé et la figue
Comme une épée à deux tranchants

Salutations africaines
Si vous allez au Burkina Faso, en Afrique de l’Ouest, surtout dans des villages de brousse, observez deux Mossis (l’ethnie majoritaire du centre) qui se saluent sur la route. Vous entendrez une très longue litanie de salutations très codifiées échangées de part et d’autre :
Je vis tranquille au milieu des miens dans Communauté spirituelle Image5– Kiemame ? (comment allez-vous ?)
- Laafi bala (la paix seulement)
– La zakramba, kiemame ? (et la famille, comment ça va ?)
- Laafi bala (la paix seulement)
– La villagedamba, kiemame ? (et les gens du village ?)
- Laafi bala (la paix seulement) … etc.
À chaque demande pour savoir si les proches de l’interlocuteur vont bien, l’autre répond : laafi bala, la paix seulement. Et réciproquement ! Ces salutations durent donc de longues minutes, sans regarder l’autre dans les yeux pour ne pas le gêner ni être agressif. Évidemment, les Blancs (« nassaara ») habitués à un furtif « ça va ? » dont ils n’attendent même pas la réponse pour passer à autre chose sont désemparés devant ce rituel d’apprivoisement réciproque qui demande du temps, de la présence à l’autre, de la délicatesse. Le leitmotiv « laafi bala » qui rythme cette coutume et tout le parler mossi traduit la valeur prépondérante accordée à la paix, l’harmonie, la cohésion sociale dans cette culture. L’idéal du Mossi est de vivre en paix au milieu des siens. Même s’il est malade ou si ses greniers sont vides, il commencera toujours par répondre : « laafi bala »…
Cet objectif de vie très simple est visiblement partagé par la Sunamite de notre première lecture (2 R 4,8-16). Voyons comment.

 

1. La Sunamite qui veut le rester
En la remerciant pour son hospitalité digne du meilleur AirBnb (et en plus c’est gratuit !), Élisée voudrait l’introduire auprès des hautes sphères du royaume :
sunamite-m Elisée dans Communauté spirituelle« Que peut-on faire pour toi ? Faut-il parler pour toi au roi ou au chef de l’armée ? » (2R 4,13). Ce qui reviendrait à l’extraire de son humble condition sociale pour la propulser dans la haute société princière. La réponse de la Sunamite est d’une simplicité profonde : « je vis (demeure יָשַׁבya.shav / οκω oikeō) tranquille au milieu des miens ». Le verbe employé  évoque l’atmosphère familière de la maisonnée (oikeō), et surtout le fait de demeurer (ya.shav) avec les siens. On y entend déjà en filigrane l’annonce du Prologue de Jean : « il est venu demeurer chez les siens ». D’ailleurs Élisée va demeurer chez elle à chacune de ses escales, ce qui transformera toute la maisonnée.

La Sunamite préfère rester au milieu de son village, de son peuple, plutôt que d’aller à la cour du roi. Elle ne rêve pas d’être ailleurs que là où elle est. C’est sans doute cela, la présence : habiter le présent avec ceux qui sont là, sans se projeter ailleurs, ni avant, ni après. Saint François de Sales traduira cette sagesse en une belle maxime : « Fleuris là où Dieu t’a semé ». Nous passons notre temps à vouloir être ailleurs, être quelqu’un d’autre, être à une autre époque, et du coup nous ne sommes plus vraiment là.
Comme quoi savoir demeurer quelque part est tout un art !

Elle veut vivre tranquillement au milieu des siens.
Un peu plus loin, on la voit réagir à l’insolation qui a frappé ce fils inattendu et qu’on croit mort. À son mari inquiet qui lui demande ce qui se passe, elle répond tranquillement : « tout va bien » (שָׁלוֹם shalom) 2R 4,23, alors que le danger est grand. On retrouve le mot shalom cher aux Mossis du Burkina (sous la forme laafi) : la paix. Être en paix, même en plein danger, vivre en paix, faire la paix avec soi-même et les autres, pacifier le tumulte intérieur des passions désordonnées pour se caler en son centre de gravité spirituelle, aligné sur ses valeurs, tenant résolument le cap choisi.

Il faut pouvoir le prononcer ce « tout va bien » quand tout va mal à l’intérieur, quand la déception est à son comble, quand la douleur de l’absence d’un enfant est ravivée, quand tout le rêve en un instant devient cauchemar… Mais par contraste, la voilà la belle aventure de la foi : faire confiance en l’avenir envers et contre tout, espérer contre toute espérance. En dignes enfants d’Abraham : « Espérant contre toute espérance, il a cru ; ainsi est-il devenu le père d’un grand nombre de nations, selon cette parole : Telle sera la descendance que tu auras ! » (Rm 4,18).

Être ainsi ancré dans un lieu, un peuple, dans les valeurs qui me constituent revient à être ancré en Dieu même. Comme le disait le psalmiste : « je tiens mon âme égale et silencieuse ; mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère » (Ps 131,2).
Pourtant, la Sunamite aurait eu des raisons de vouloir autre chose ! Elle et son mari ne roulent pas sur l’or. Ils doivent travailler encore malgré leur âge. Et surtout cette femme ne peut avoir d’enfant. Cela ne trouble pas sa tranquillité spirituelle. Elle a cette force intérieure qui lui permet d’accueillir ce qui est pour en tirer le meilleur. Comme dira Paul : « j’ai appris à me contenter de ce que j’ai. Je sais vivre de peu, je sais aussi être dans l’abondance. J’ai été formé à tout et pour tout : à être rassasié et à souffrir la faim, à être dans l’abondance et dans les privations. Je peux tout en celui qui me donne la force » (Ph 4,11-13)

Et vous : où souhaitez-vous demeurer parmi les vôtres ? Où en est votre tranquillité de  cœur ?

 

2. Éloge du désintéressement
Le pur amour : pour qui êtes-vous prêts à aller en enfer ?
L’hospitalité accordée à Élisée aurait pu être intéressée. Pensez donc : si c’est un prophète, peut-être fera-t-il quelque chose pour moi ? Or l’aménagement de la chambre haute pour Élisée n’est accompagné d’aucune demande, ni explicite ni implicite. À tel point qu’Élisée ne connaît même pas la souffrance de celle qui l’accueille (ne pas avoir d’enfant). Sans calcul, sans autre motif que la valeur de ce prophète et la valeur de l’hospitalité comme règle de conduite, cette femme se retire avec discrétion en laissant Élisée se reposer, sans l’importuner avec ses soucis. Elle se fait simplement une joie d’accueillir cet homme de Dieu, sans arrière-pensée, gratuitement, pour rien.

Et vous : c’était quand, la dernière fois où vous avez agi ‘pour rien’ ?

 

3. Et par-dessus le marché : la fécondité
Femmes de la bible la Sunamite Elisée
La Sunamite, par pudeur et par discrétion, mais aussi pour ne pas peser sur l’homme de Dieu, ne lui avait rien dit de sa stérilité. C’est une souffrance majeure à cette époque, plus encore qu’aujourd’hui, sur le plan social en tout cas. Une femme sans enfant était déconsidérée, voire moquée et méprisée, discriminée. Anne par exemple passait des heures à pleurer devant YHWH, écrasée par la honte de ne pouvoir être mère : « Seigneur de l’univers ! Si tu veux bien regarder l’humiliation de ta servante, te souvenir de moi, ne pas m’oublier, et me donner un fils… » (1S 1,11). Et Rachel suppliait Jacob : « Voyant qu’elle n’avait pas donné d’enfant à Jacob, Rachel devint jalouse de sa sœur. Elle dit à Jacob : ‘Donne-moi des fils, sinon je vais mourir !’ » (Gn 30,1). Lorsqu’elle met Joseph au monde, elle s’écrie : « Dieu a enlevé ma honte » (Gn 30,23). Car c’était une terrible humiliation, une honte socialement lourde à porter que de ne pas avoir d’enfant.
Malgré cette blessure intime si profonde, la Sunamite ne s’est pas laissée aigrir ni rabougrir par le drame de sa stérilité (ou de celle de son mari ?). Elle a su donner un autre sens à sa vie que les enfants.

Les innombrables célibataires – par choix par force – de nos sociétés modernes pourraient trouver en elle une belle figure d’épanouissement personnel, en passant d’un célibat subi à un célibat choisi. En se tournant vers les autres, en rendant service autant qu’elle le peut, tranquillement au milieu des siens, cette femme sans enfant est devenue une référence à Sunam. Une de ces justes ordinaires sans lesquels le monde ne tiendrait pas. Elle est populaire chez les siens, parce qu’elle trouve son plaisir à faire le bien, non pour une éventuelle récompense mais parce que cela est bien, tout simplement. Elle se désigne elle-même comme servante (2R 4,16), diaconesse avant l’heure (comme le sera la belle-mère de Pierre une fois guérie : « elle les servait » Mc 1,31). Sa joie de servir a sublimé sa douleur de ne pas avoir d’enfant. Elle ne s’attarde pas sur sa souffrance, et fait de sa disponibilité familiale un moteur pour aller vers les autres, pour les accueillir chez elle.

Alors, nous dit le texte, la conséquence de ce détachement intérieur est paradoxalement de retrouver la fécondité perdue : « l’année prochaine, tu tiendras un fils dans tes bras » (2R 4,16). C’est tellement fou qu’elle-même n’y croit pas : ne te moque pas de moi, dit-elle à Élisée. Comme Sarah riait incrédule devant l’improbable annonce des trois visiteurs lui promettant une grossesse impossible, la Sunamite ne veut pas souffrir à nouveau en vain en espérant une grossesse qu’elle a sagement effacée de son horizon. Redisons-le : son équilibre de vie, sa tranquillité au milieu des siens, son sens du service faisait qu’elle ne demandait rien à Élisée. Son accueil est vraiment totalement désintéressé !

Aussi l’annonce finale de la naissance ne sonne pas comme une « récompense » au sens classique du terme, mais bien plutôt comme une conséquence logique de son ouverture au passage de Dieu dans sa vie. Autrement dit : la naissance ne sera pas une médaille comme en recherchent les grands de ce monde. Ce sera un cadeau, un excès de bonté divine, un plus, « par-dessus le marché » comme disait Jésus : « cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout le reste vous sera donné par-dessus le marché » (M 6,33). Dans l’Évangile de ce dimanche (Mt 10, 37-42), Matthieu emploie trois fois le terme récompense (μισθς = misthos) pour saluer les conséquences de l’accueil d’un prophète, d’un juste, d’un disciple. En bon juif converti à Jésus, Matthieu est légèrement obsédé par la problématique de la Loi juive et de son accomplissement. Il emploie 10 fois (comme les 10 commandements) le mot récompense dans son Évangile [1], justement afin de montrer l’accomplissement de la Loi dans la foi chrétienne. Il se débat avec la doctrine pharisienne de la rétribution, qui voudrait n’accorder à l’homme que ce qu’il mériterait en retour de ses actes. On traduit : récompense, mais également salaire, au sens de ce qui est dû pour le travail accompli, ce qui est normal de recevoir une fois la journée effectuée. Ce n’est donc que justice. Et c’est dans l’ordre des choses – telles que YHWH les a faites – que l’accueil désintéressé transforme celui qui accueille à l’image de celui qu’il accueille, comme l’orant est transformé à l’image de l’icône qu’il contemple.

Cette récompense n’est pas le moteur de notre empressement à accueillir. Ce n’est pas une rétribution, un mérite.
Nous ne pratiquons pas l’hospitalité pour ‘gagner le paradis’. Nous le faisons pour rien, par pur amour aurait dit Madame Guyon (cf. Le pur amour : pour qui êtes-vous prêts à aller en enfer ?).
Nous ne sommes pas ‘intéressés’ par la vie éternelle : c’est elle qui s’offre à nous, par-dessus le marché.

Et vous, quelle fécondité pouvez-vous accepter de recevoir, ‘par-dessus le marché’ ?

 

4. Déceler le besoin de l’autre
Elisée et la Sunamite
Terminons en essayant d’être moins balourd qu’Élisée ! Il n’avait rien vu de la situation de la Sunamite. C’est son serviteur Guéhazi qui lui révèle : « elle n’a pas de fils ». Élisée est tout surpris, et confus, de se rendre compte qu’il est passé à côté de la souffrance de son hôte. C’est encore le cas quand il la revoit plus tard sans deviner la maladie mortelle qui a couché son fils (« son âme est dans l’amertume. Le Seigneur me l’a caché, il ne m’a rien annoncé » 2R 4,27). C’est encore le cas quand il pense à tort que son seul bâton sera suffisant, sans lui, pour guérir l’enfant apparemment mort (2R 4,29–32).
Heureusement qu’il y a le brave Guéhazi pour lui souffler à chaque fois la solution… Tout  prophète qu’il est, Élisée ne fait pas assez attention aux petites gens qu’il croise, même ceux qui lui font du bien.
Il nous faut donc nous appuyer sur d’autres yeux que les nôtres, d’autres sensibilités, d’autres proximités sociales et spirituelles pour déceler le besoin de l’autre.

Et vous : sur qui pouvez-vous vous appuyer pour déchiffrer les réels besoins des gens qui vous entourent, au travail, en famille, en Église ?

 


[1]. Mt 5,12.46 ; 6,1.2.5.16 ; 10,41.42 ; 20,8

 

 

LECTURES DE LA MESSE

PREMIÈRE LECTURE
« Celui qui s’arrête chez nous est un saint homme de Dieu » (2 R 4, 8-11.14-16a)

Lecture du deuxième livre des Rois
Un jour, le prophète Élisée passait à Sunam ; une femme riche de ce pays insista pour qu’il vienne manger chez elle. Depuis, chaque fois qu’il passait par là, il allait manger chez elle. Elle dit à son mari : « Écoute, je sais que celui qui s’arrête toujours chez nous est un saint homme de Dieu. Faisons-lui une petite chambre sur la terrasse ; nous y mettrons un lit, une table, un siège et une lampe, et quand il viendra chez nous, il pourra s’y retirer. »
Le jour où il revint, il se retira dans cette chambre pour y coucher. Puis il dit à son serviteur : « Que peut-on faire pour cette femme ? » Le serviteur répondit : « Hélas, elle n’a pas de fils, et son mari est âgé. » Élisée lui dit : « Appelle-la. » Le serviteur l’appela et elle se présenta à la porte. Élisée lui dit : « À cette même époque, au temps fixé pour la naissance, tu tiendras un fils dans tes bras. »

PSAUME
(Ps 88 (89), 2-3, 16-17, 18-19)
R/ Ton amour, Seigneur, sans fin je le chante ! (Ps 88, 2a)

L’amour du Seigneur, sans fin je le chante ;
ta fidélité, je l’annonce d’âge en âge.
Je le dis : C’est un amour bâti pour toujours ;
ta fidélité est plus stable que les cieux.

Heureux le peuple qui connaît l’ovation !
Seigneur, il marche à la lumière de ta face ;
tout le jour, à ton nom il danse de joie,
fier de ton juste pouvoir.

Tu es sa force éclatante ;
ta grâce accroît notre vigueur.
Oui, notre roi est au Seigneur ;
notre bouclier, au Dieu saint d’Israël.

DEUXIÈME LECTURE
Unis, par le baptême, à la mort et à la résurrection du Christ (Rm 6, 3-4.8-11)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains
Frères, ne le savez-vous pas ? Nous tous qui par le baptême avons été unis au Christ Jésus, c’est à sa mort que nous avons été unis par le baptême. Si donc, par le baptême qui nous unit à sa mort, nous avons été mis au tombeau avec lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, comme le Christ qui, par la toute-puissance du Père, est ressuscité d’entre les morts. Et si nous sommes passés par la mort avec le Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec lui. Nous le savons en effet : ressuscité d’entre les morts, le Christ ne meurt plus ; la mort n’a plus de pouvoir sur lui. Car lui qui est mort, c’est au péché qu’il est mort une fois pour toutes ; lui qui est vivant, c’est pour Dieu qu’il est vivant. De même, vous aussi, pensez que vous êtes morts au péché, mais vivants pour Dieu en Jésus Christ.

ÉVANGILE
« Celui qui ne prend pas sa croix n’est pas digne de moi. Qui vous accueille m’accueille » (Mt 10, 37-42)
Alléluia. Alléluia. Descendance choisie, sacerdoce royal, nation sainte, annoncez les merveilles de Celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière. Alléluia. (cf. 1 P 2, 9)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
En ce temps-là, Jésus disait à ses Apôtres : « Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi ; celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi ; celui qui ne prend pas sa croix et ne me suit pas n’est pas digne de moi. Qui a trouvé sa vie la perdra ; qui a perdu sa vie à cause de moi la gardera. Qui vous accueille m’accueille ; et qui m’accueille accueille Celui qui m’a envoyé. Qui accueille un prophète en sa qualité de prophète recevra une récompense de prophète ; qui accueille un homme juste en sa qualité de juste recevra une récompense de juste. Et celui qui donnera à boire, même un simple verre d’eau fraîche, à l’un de ces petits en sa qualité de disciple, amen, je vous le dis : non, il ne perdra pas sa récompense. »
Patrick BRAUD

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18 juin 2023

Que faire de nos reniements ?

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Que faire de nos reniements ?

Homélie pour le 12° Dimanche du Temps Ordinaire / Année A
25/06/2023

Cf. également :
Une utopie à proclamer sur les toits
Terreur de tous côtés !

N’arrêtez pas vos jérémiades !
L’effet saumon
Sous le signe de la promesse
La « réserve eschatologique »

Les volte-face de Mitterrand, et les nôtres
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La vie de François Mitterrand est une mine inépuisable d’articles, de sujets de thèses de doctorat, de conférences et autres documentaires pour les historiens. Comment ce jeune catholique charentais, de famille traditionnelle, a-t-il pu prendre autant de visages et incarner autant de courants politiques ? Ses années de jeunesse vichyssoise à l’extrême droite lui valurent d’être décoré de la francisque en 1943, et de figurer dans des gouvernements où il appliquait une répression féroce en Algérie française. Son retournement idéologique dans les années 70 l’a conduit opportunément à fonder le Parti Socialiste autour d’une grande idée : la rupture avec le capitalisme. Au congrès d’Épinay de 1971, sa prédication enflammée pour mettre le cap à gauche est devenue célèbre : « la révolution, c’est d’abord une rupture avec l’ordre établi. Celui-qui n’accepte pas cette rupture avec l’ordre établi, avec la société capitaliste, celui-là ne peut pas être adhérent du Parti socialiste ».
Las ! : élu Président de la République en 1981, Mitterrand s’aperçoit que la réalité économique est plus complexe que ce qu’il croyait, et il fait à nouveau volte-face, abandonnant la révolution et la rupture avec le capitalisme pour « le tournant de la rigueur » en 1983. Le socialiste révolutionnaire devenait un social-démocrate compatible avec les marchés et l’orthodoxie budgétaire. Dernier renoncement : 1984, lorsqu’il veut appliquer un point essentiel du Programme Commun de la Gauche sur lequel il s’était engagé la main sur le cœur. Il s’agissait de nationaliser l’enseignement privé pour le fusionner en un seul système public. Un million de manifestants dans la rue plus tard, il abandonne sagement la réforme emblématique de son engagement de gauche, et choisit le statut quo…

Réalisme, diront certains. Manque de courage politique, diront les autres.
Toujours est-il que « le Sphinx » – comme on le surnommait – est passé dans l’histoire comme un excellent disciple de Machiavel, prêt à renier ses convictions pour d’autres si cela lui permettait de conquérir ou garder le pouvoir.
Sur l’air de : « Paris vaut bien une messe », nos dirigeants nous ont malheureusement habitué à retourner leur veste assez souvent en fonction du vent dominant et de leurs intérêts…

 apostasie dans Communauté spirituelleSoyons honnêtes, ces volte-face sont également les nôtres. Plus ordinaires, plus mesquines peut-être que le passage de la francisque à la révolution puis aux compromissions de tous ordres. Mais nos petits reniements peuvent pareillement lézarder la belle façade de nos réussites et de nos combats.
Qui est vraiment allé au bout de ses idéaux de jeunesse ?
Qui n’a pas mis d’eau dans son vin pour vivre plus confortablement ?
Qui a accepté de payer le prix fort pour rester fidèle à une conviction dangereuse ?

La question s’est vite posée dans les premières communautés chrétiennes. L’enthousiasme du début a été douché par les menaces et persécutions romaines ou juives. L’ardeur des convertis butait sur l’ampleur des conséquences désastreuses pour eux et leurs familles s’ils persévéraient dans leur foi au Christ. À tel point que beaucoup renièrent leur baptême pour ne pas être arrêtés, suppliciés, brûlés au jetés au feu.
Quel sort fallait-il réserver à ces renégats ? Et plus troublant encore, quel sort fallait-il leur accorder s’ils voulaient revenir après avoir renié ?

 

La rigueur ou la mansuétude ?
Il y a dans le Nouveau Testament une contradiction apparente au sujet de l’apostasie. Quand Jésus parle de reniement dans notre Évangile de ce dimanche (Mt 10,26-33), on sent que les Églises locales y entendent un avertissement très net : « celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père qui est aux cieux ».

Pierre renie JésusApparemment, la ligne de conduite est claire : les renégats doivent être reniés, c’est-à-dire exclus définitivement des communautés locales, comme le Christ les reniera à la fin des temps. Oui, mais voilà… Le seul autre usage du verbe renier (ρνομαι, arneomai) dans les Évangiles est réservé… à Pierre ! Pierre le renégat, qui par 3 fois a juré : « je ne connais pas cet homme », dans la cour du grand prêtre au début du procès de Jésus. Même Judas n’est pas traité de renégat : Pierre est le seul à avoir renié Jésus dans les textes, car Judas l’a livré, pas renié (cf.Choisir Judas comme ami). Donc, logiquement, selon notre évangile, le Christ aurait dû renier Pierre devant Dieu, lui qui l’avait renié devant les hommes. Or, pas du tout ! Au contraire : selon Jean, Jésus ressuscité a demandé par 3 fois à Pierre : « m’aimes-tu ? » pour le pardonner de son triple reniement, et il lui a confié le premier rôle dans l’Église naissante : « sois le berger de mes brebis » (Jn 21,15-19).
Pierre, seul renégat du Nouveau Testament, n’est pas renié comme annoncé par Jésus mais au contraire promu au premier plan : que s’est-il passé entre Matthieu et Jean ? Comment lever cette contradiction apparente entre ces deux passages ?

Si l’on oppose seulement la lettre de nos deux évangiles, la contradiction est insoluble. Alors, mettons-les en perspective historique.
Écrits entre 30 et 60 après la mort de Jésus, ces textes ont été longuement ruminés, prêchés, travaillés, ciselés par la tradition orale dans les premières communautés chrétiennes. On l’a dit, ces communautés étaient fragiles et instables, exposées aux menaces et persécutions. Refuser d’offrir un sacrifice à l’empereur ou à une divinité païenne pouvait entraîner la prison et la mort. Jude par exemple écrit : « il s’est glissé parmi vous certains hommes, dont la condamnation est écrite depuis longtemps, des impies, qui changent la grâce de notre Dieu en dissolution, et qui renient (arneomai) notre seul maître et Seigneur Jésus-Christ » (Jude 1,4). Ce qui confirme le constat de Pierre : « Il y a eu parmi le peuple de faux prophètes, et il y aura de même parmi vous de faux docteurs, qui introduiront des sectes pernicieuses, et qui, reniant (arneomai) le maître qui les a rachetés, attireront sur eux une ruine soudaine » (2P 2,1).
L’Apocalypse quant à elle préfère par contraste encourager les Résistants en louant les Églises locales qui tiennent bon dans la foi malgré leur faiblesse et le danger : « Je sais où tu demeures, je sais que là est le trône de Satan. Tu retiens mon nom, et tu n’as pas renié (arneomai) ma foi, même aux jours d’Antipas, mon témoin fidèle, qui a été mis à mort chez vous, là où Satan a sa demeure » (Ap 2,13). « Je connais tes œuvres. Voici, parce que tu as peu de puissance, et que tu as gardé ma parole, et que tu n’as pas renié (arneomai) mon nom, j’ai mis devant toi une porte ouverte, que personne ne peut fermer » (Ap 3,8).

Ceux qui sont tombés. De lapsisReste que beaucoup préféraient renier le Christ plutôt que d’avoir des ennuis. Ces lapsi (en latin : ceux qui sont tombés, qui ont chuté) se multiplièrent. À chaque persécution nouvelle augmentait le nombre de ceux qui parmi eux reniaient le Christ. Ainsi Tertullien déplore l’« appréhension des clercs aux pieds de cerfs devant le martyre » et l’« appréhension des chrétiens devant la douleur ». Il raconte que des communautés entières ont éloigné d’elles les persécutions en corrompant les autorités, chose que l’« ordre régnant de l’Église » a approuvée. Dans ses épîtres, l’évêque Cyprien de Carthage évoque à de nombreuses reprises le fait que les évêques et hautes personnalités ecclésiastiques s’accusaient mutuellement d’avoir renié leur foi à l’occasion d’une persécution. Il mentionne également le fait que de très nombreux chrétiens se faisaient établir en sous-main, contre de l’argent, publiquement ou secrètement, une attestation (libellus) de la part des autorités, certifiant qu’ils étaient païens et sacrifiaient selon le rite païen. On en a trouvé confirmation il y a quelques années en Égypte dans ce que l’on appelle le papyrus Rainer, qui contient un registre administratif de ceux qui reniaient leur baptême et que l’on appelait libellatici. Ailleurs, Pierre d’Alexandrie dans son ouvrage sur la pénitence (Liber de poenitentia), évoque les moyens employés par les chrétiens pour échapper aux persécutions. Il y parle de chrétiens qui forçaient leurs esclaves chrétiens (!) à pratiquer pour eux des sacrifices selon le mode païen ou à mourir pour eux en martyrs s’ils refusaient ! Pas très glorieux…
Le théologien protestant Von Harnack reconnaissait que « le nombre des ceux qui reniaient leur foi dépassait largement celui des martyrs et de ceux qui, ouvertement ou secrètement, se considéraient de confession chrétienne ».

Parfois, certains lapsi voulaient revenir à l’Église après l’avoir quitté. À la fin des persécutions, ces « chrétiens de nom » affluèrent à nouveau dans l’Église, qui les accueillit avec empressement, car, comme le dit déjà le Pasteur d’Hermas, « seuls ceux qui sont butés sont rejetés pour toujours », et l’Église avait besoin de renforcer ses rangs. Tertullien prêche l’excuse du reniement arraché par la force : « si le reniement a été extorqué, la foi peut être conservée intacte dans le cœur »…

 

Que faire de ces repentis ?
Si l’on suit la ligne de notre évangile de Matthieu – la ligne rigoriste – on restera inflexible et on n’admettra pas le retour des renégats.
B072K99ZTW.01._SCLZZZZZZZ_SX500_ pénitenceSi l’on suit la ligne johannique – la ligne pénitentielle – on aménagera un retour possible moyennant une procédure de réintégration où l’apostat exprimera son repentir et son désir de choisir le Christ.
Nos deux textes apparemment contradictoires reflètent en réalité la forte tension permanente – car cela a duré plusieurs siècles – entre ces deux lignes au cœur de l’Église. Faut-il être exigeant pour sauvegarder la pureté du baptême ? ou conciliant en acceptant les fidèles tels qu’ils sont, pécheurs, mais capables de conversion ?

La rigueur sonne comme un avertissement de la gravité de la faute.
La pénitence prend en compte la faiblesse des croyants, pour ne pas les perdre.
Les deux courants sont présents dans le Nouveau Testament, et souvent s’affrontent sans merci.
La solution viendra plus tard, au temps de Cyprien de Carthage (III° siècle), avec l’invention de la pénitence publique comme condition pour réintégrer les lapsi désirant revenir dans l’Église. Il faut dire qu’avec l’empereur Constantin le vent aura tourné en faveur de la secte nouvelle : jadis persécutée, l’Église deviendra impériale, suscitant un afflux de demandes de baptêmes pas toujours sincères…

Paul recueille les deux traditions sans choisir : intransigeance vis-à-vis des lapsi, et miséricorde pourtant jusqu’au bout.
Pour l’intransigeance :
« Si nous persévérons, nous régnerons aussi avec lui ; si nous le renions (arneomai), lui aussi nous reniera (arneomai) » (2Tim 2,12).
« Si quelqu’un n’a pas soin des siens, et principalement de ceux de sa famille, il a renié (arneomai) la foi, et il est pire qu’un infidèle » (1Tim 5,8).
« Certains ont l’apparence de la piété, mais renient (arneomai) ce qui en fait la force. Éloigne-toi de ces hommes-là (2Tim 3,5) ».
« Ils font profession de connaître Dieu, mais ils le renient (arneomai) par leurs œuvres, étant abominables, rebelles, et incapables d’aucune bonne œuvre (Ti 1,16) ».
Pour la mansuétude :
« Si nous sommes infidèles, il demeure fidèle, car il ne peut se renier (arneomai) lui-même » (2Tim 3,13).

À l’appui du courant insistant sur la miséricorde, on trouvera bien sûr dans le Nouveau Testament la parabole du fils prodigue (Lc 15,11–32). Dans le contexte des chrétiens quittant l’Église par peur du danger, le fils cadet est devenu la figure des lapsi, ces chrétiens qui ont renié leur baptême mais font pénitence pour revenir à l’Église, tandis que le frère aîné est semblable aux rigoristes intransigeants. Cette interprétation se trouve chez Tertullien, Ambroise et Jérôme. On trouve ainsi dans les Constitutions apostoliques : « Ô évêque, tu ne te détourneras pas avec dégoût de celui qui aura chuté une première et une seconde fois, (…) Celui qui dans son repentir produit des fruits de pénitence, admettez-le à la prière, comme le fils perdu, le libertin » (Constitutions apostoliques II, 40,1-4).
La parole de Jésus : « le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu » (Lc 19,10) ne cesse de résonner comme un appel à une miséricorde plus grande que toute offense…

 

Conclusion
La ligne rigoriste de ce dimanche est utile comme garde-fou et avertisseur : attention, renier le Christ arrive plus facilement que vous ne le pensez ! Or c’est une question de vie ou de mort !
La ligne pénitentielle corrige cette dureté apparente en composant avec la faiblesse humaine : « Dieu ne veut pas la mort du pécheur, mais qu’il se convertisse » (Ez 18,23.32).
Donc si les lapsi regrettent leur reniement et font à nouveau le choix du Christ (« Pierre, m’aimes-tu ? ») ils pourront à nouveau s’asseoir à la table eucharistique avec l’assemblée-Église. La condition de ce retour – directement dérivée de l’exigence rigoriste – est de suivre un chemin pénitentiel, graduel (cf. les trois « je t’aime » de Pierre), public, et unique. Ce n’est qu’après le IX° siècle que la pénitence deviendra privée et réitérable.

tableau-définition-bienveillance renégatL’intérêt de ce débat pour nous aujourd’hui est de nous questionner en profondeur sur notre inclination personnelle :
- suis-je plutôt rigoriste par nature ? auquel cas pratiquer la miséricorde me ferait du bien…
- ou suis-je plutôt miséricordieux, acceptant facilement par réalisme la faiblesse d’autrui et la mienne ? auquel cas je devrais réétudier la radicalité de l’Évangile pour éviter que mes compromis se changent en compromissions.
- quels sont mes reniements ? comment les dépasser ?

En outre, ce débat entre rigorisme et mansuétude peut éclairer d’un jour nouveau l’accès des divorcés remariés aujourd’hui à la table eucharistique : ces « lapsi » du sacrement de mariage pourraient-ils bénéficier eux aussi une procédure pénitentielle de réintégration ?

 

Excursus rapide sur le statut des renégats dans le judaïsme et dans l’islam

Le statut des apostats dans le judaïsme
Dans la tradition juive, il n’y a pas de sanction légale ou de peine séculaire pour l’apostasie. Le judaïsme met l’accent sur le libre arbitre et la responsabilité personnelle en matière de croyance religieuse. Chaque individu est libre de choisir sa propre voie spirituelle et de quitter la pratique religieuse juive s’il le souhaite. L’apostasie n’est donc pas considérée comme un crime ou un péché punissable par les autorités religieuses ou civiles. Mais elle peut avoir des implications sociales et familiales au sein de certaines communautés juives plus traditionnelles. Dans ces contextes, un individu qui abandonne la foi juive peut être exposé à l’ostracisme, à des conséquences sociales ou à des tensions familiales en raison de la désapprobation de sa décision.

Quelques versets vont ainsi dans le sens d’une intransigeance rigoureuse :
« Si ton frère, fils de ta mère, ou ton fils, ou ta fille, ou la femme qui repose sur ton sein, ou ton ami que tu aimes comme toi-même, t’incite secrètement en disant : Allons, servons d’autres dieux ! – des dieux que ni toi ni tes pères n’avez connus, des dieux des peuples qui vous entourent, près de toi ou loin de toi, d’une extrémité de la terre à l’autre -, tu n’y consentiras pas, et tu ne l’écouteras pas ; tu ne jetteras pas sur lui un regard de pitié, tu n’auras point de miséricorde, tu ne le couvriras pas, et tu ne déroberas pas pour lui ; mais tu le feras mourir » (Dt 13,6-10).

« Mon peuple est détruit, parce qu’il lui manque la connaissance. Puisque tu as rejeté la connaissance, je te rejetterai, et tu seras dépouillé de mon sacerdoce ; puisque tu as oublié la loi de ton Dieu, j’oublierai aussi tes enfants » (Os 4,6).
Ce verset souligne les conséquences néfastes de l’abandon de la connaissance de Dieu et de la Loi, entraînant la destruction du peuple.

« Qu’il n’y ait parmi vous ni homme, ni femme, ni famille, ni tribu, dont le cœur se détourne aujourd’hui de l’Éternel, notre Dieu, pour aller servir les dieux de ces nations-là. Qu’il n’y ait point parmi vous de racine qui produise du poison et de l’absinthe. Que personne, après avoir entendu les paroles de cette malédiction, ne se croie en sécurité dans son cœur, en disant : J’aurai la paix, quoique je suive mes penchants, et que j’ajoute l’ivresse à la soif » (Dt 29,18-20).
Ce verset énonce les conséquences spirituelles négatives et les dangers associés à l’abandon de la foi et de l’alliance avec Dieu.

 

Le statut des apostats dans le Coran
Dans le Coran, il existe de nombreux versets qui abordent la question de l’apostasie ou des renégats. Voici quelques-uns d’entre eux qui sont plutôt intransigeants et rigoristes :
Sourate Al-Baqarah (2,217) : « Et ceux qui croient, puis mécroient, puis croient de nouveau, puis mécroient, et augmentent en mécréance, Allah ne leur pardonnera jamais, ni les guidera vers un chemin. »
Sourate Al-Ma’idah (5,54) : « Ô les croyants! Celui parmi vous qui apostasie de sa religion… Allah va faire venir un peuple qu’Il aime et qui L’aime, modeste envers les croyants et fier et puissant envers les mécréants, qui lutte dans le sentier d’Allah, ne craignant le blâme d’aucun blâmeur. »
Sourate An-Nisa (4,137) : « Ceux qui croient, puis mécroient, puis croient de nouveau, ensuite mécroient, et deviennent de plus en plus mécréants, Allah ne leur pardonnera jamais, ni ne les guidera vers un chemin. »
Sourate Al-Imran (3,90) : « Ceux qui ont mécru après avoir eu la foi, puis qui ont persisté dans leur mécréance, leur repentir ne sera jamais accepté, et ce sont eux les égarés. »
Sourate Al-Imran (3,85) : « Et quiconque cherche une autre religion que l’Islam, cela ne lui sera point agréé, et il sera, dans l’au-delà, parmi les perdants. »
Sourate Al-Ma’idah (5,72-73) : « Ils ont mécru ceux qui disent: ‘Allah, c’est le Messie, fils de Marie.’… Ils ont certes mécru ceux qui disent: ‘Allah est le troisième de trois.’ Mais il n’y a de divinité qu’Une Divinité Unique. Si ils ne cessent pas de tenir de tels propos, un châtiment douloureux touchera ceux d’entre eux qui auront mécru. »

Il y a cependant quelques autres versets du Coran qui relèvent plutôt de la mansuétude que du rigorisme :
Sourate Al-Baqarah (2,256) : « Nulle contrainte en religion ! Car le bon chemin s’est distingué de l’égarement. Donc, quiconque mécroit au Rebelle tandis qu’il croit en Allah saisit l’anse la plus solide, qui ne peut se briser. Et Allah est Audient et Omniscient. »
Ce verset est souvent invoqué pour souligner le principe de la liberté de religion et rejeter la contrainte dans les questions de foi. Certains soutiennent que cela implique que l’apostasie ne doit pas être punie, car la foi doit être basée sur un choix volontaire.
Sourate Al-Kafirun (109,1-6) : « Dis : Ô les infidèles ! Je n’adore pas ce que vous adorez. Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore. Je ne suis pas adorateur de ce que vous adorez. Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore. À vous votre religion, et à moi ma religion. »
Ce verset souligne le respect mutuel des croyances religieuses et l’importance de reconnaître la diversité des religions. Certains musulmans soutiennent que cela implique que les apostats doivent être libres de choisir leur propre religion sans être soumis à des sanctions.

 

LECTURES DE LA MESSE

PREMIÈRE LECTURE
« Il a délivré le malheureux de la main des méchants » (Jr 20, 10-13)

Lecture du livre du prophète Jérémie
Moi Jérémie, j’entends les calomnies de la foule : « Dénoncez-le ! Allons le dénoncer, celui-là, l’Épouvante-de-tous-côtés. » Tous mes amis guettent mes faux pas, ils disent : « Peut-être se laissera-t-il séduire… Nous réussirons, et nous prendrons sur lui notre revanche ! » Mais le Seigneur est avec moi, tel un guerrier redoutable : mes persécuteurs trébucheront, ils ne réussiront pas. Leur défaite les couvrira de honte, d’une confusion éternelle, inoubliable.
Seigneur de l’univers, toi qui scrutes l’homme juste, toi qui vois les reins et les cœurs, fais-moi voir la revanche que tu leur infligeras, car c’est à toi que j’ai remis ma cause.
Chantez le Seigneur, louez le Seigneur : il a délivré le malheureux de la main des méchants.

PSAUME
(Ps 68 (69), 8-10, 14.17, 33-35)
R/ Dans ton grand amour, Dieu, réponds-moi. (Ps 68, 14c)

C’est pour toi que j’endure l’insulte,
que la honte me couvre le visage :
je suis un étranger pour mes frères,
un inconnu pour les fils de ma mère.

L’amour de ta maison m’a perdu ; on t’insulte, et l’insulte retombe sur moi.
Et moi, je te prie, Seigneur : c’est l’heure de ta grâce ;
dans ton grand amour, Dieu, réponds-moi,
par ta vérité sauve-moi.

Réponds-moi, Seigneur, car il est bon, ton amour ;
dans ta grande tendresse, regarde-moi.
Les pauvres l’ont vu, ils sont en fête :
« Vie et joie, à vous qui cherchez Dieu ! »

Car le Seigneur écoute les humbles,
il n’oublie pas les siens emprisonnés.
Que le ciel et la terre le célèbrent,
les mers et tout leur peuplement !

DEUXIÈME LECTURE
« Le don gratuit de Dieu et la faute n’ont pas la même mesure » (Rm 5, 12-15)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains
Frères, nous savons que par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et que par le péché est venue la mort ; et ainsi, la mort est passée en tous les hommes, étant donné que tous ont péché. Avant la loi de Moïse, le péché était déjà dans le monde, mais le péché ne peut être imputé à personne tant qu’il n’y a pas de loi. Pourtant, depuis Adam jusqu’à Moïse, la mort a établi son règne, même sur ceux qui n’avaient pas péché par une transgression semblable à celle d’Adam. Or, Adam préfigure celui qui devait venir. Mais il n’en va pas du don gratuit comme de la faute. En effet, si la mort a frappé la multitude par la faute d’un seul, combien plus la grâce de Dieu s’est-elle répandue en abondance sur la multitude, cette grâce qui est donnée en un seul homme, Jésus Christ.

ÉVANGILE
« Ne craignez pas ceux qui tuent le corps » (Mt 10, 26-33)
Alléluia. Alléluia. L’Esprit de vérité rendra témoignage en ma faveur, dit le Seigneur. Et vous aussi, vous allez rendre témoignage. Alléluia. (cf. Jn 15, 26b-27a)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
En ce temps-là, Jésus disait à ses Apôtres : « Ne craignez pas les hommes ; rien n’est voilé qui ne sera dévoilé, rien n’est caché qui ne sera connu. Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le en pleine lumière ; ce que vous entendez au creux de l’oreille, proclamez-le sur les toits. Ne craignez pas ceux qui tuent le corps sans pouvoir tuer l’âme ; craignez plutôt celui qui peut faire périr dans la géhenne l’âme aussi bien que le corps. Deux moineaux ne sont-ils pas vendus pour un sou ? Or, pas un seul ne tombe à terre sans que votre Père le veuille. Quant à vous, même les cheveux de votre tête sont tous comptés. Soyez donc sans crainte : vous valez bien plus qu’une multitude de moineaux. Quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, moi aussi je me déclarerai pour lui devant mon Père qui est aux cieux. Mais celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père qui est aux cieux. »
Patrick BRAUD

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11 juin 2023

Choisir Judas comme ami

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Choisir Judas comme ami

Homélie pour le 11° Dimanche du Temps Ordinaire / Année A
18/06/2023

Cf. également :
Quand Dieu appelle
Le principe de gratuité
Personne ne nous a embauchés
Les ouvriers de la 11° heure
De la bouchée au baiser : la méprise de Judas
Remplacer Judas aujourd’hui

On ne choisit pas sa famille…

« On choisit pas ses parents, on choisit pas sa famille
On choisit pas non plus les trottoirs de Manille
De Paris ou d’Alger pour apprendre à marcher
Être né quelque part
Être né quelque part, pour celui qui est né
C’est toujours un hasard… »

Cette belle chanson de Maxime le Forestier nous invite à accepter d’être né quelque part, pas forcément là où on aurait rêvé. Par contraste, c’est aussi l’invitation à choisir nos amis : alors que la famille nous est imposée, nos amis relèvent de notre libre volonté de nous lier à eux.
Mais sommes-nous si sûrs de vraiment choisir nos amis librement ?
Combien avez-vous d’amis venus d’un milieu social très différent du vôtre ? Combien ont 20 ans de plus ou de moins que vous ? Combien parlent une autre langue ? Combien votent à l’opposé de vos opinions ? Etc.
Vous mesurez ainsi que choisir ses amis n’est pas si évident que cela.
D’autant qu’avec les années, certains que l’on pensait fiables s’évanouissent dès qu’ils sont loin, ou dès qu’un malheur vous frappe. Au contraire, de manière surprenante et imprévue, certains se révèlent être de vrais soutiens dans l’épreuve alors qu’on les connaissait à peine auparavant.
Bref : il se pourrait que nos amis nous soient également donnés, à travers aléas et autres événements révélateurs.

Jésus n’échappe pas à cette règle humaine. Il n’est pas allé chercher des non-juifs, ni des trop vieux ou des trop jeunes, ni même des femmes (car les coutumes de son temps excluaient ce genre de familiarité), et il a eu bien des surprises avec ses compagnons de route. Dans l’Évangile de ce dimanche (Mt 9,36-10,8), on le voit appeler 12 hommes (en référence bien sûre aux 12 tribus d’Israël), des Galiléens proches de Capharnaüm et de Nazareth, cette contrée paumée de mauvaise réputation.
http://www.sedifop.com/wp-content/uploads/2015/10/Communion-des-saints-avec-le-Christ.jpg
« Jésus appela ses douze disciples et leur donna le pouvoir d’expulser les esprits impurs et de guérir toute maladie et toute infirmité. Voici les noms des douze Apôtres : le premier, Simon, nommé Pierre ; André son frère ; Jacques, fils de Zébédée, et Jean son frère ; Philippe et Barthélemy ; Thomas et Matthieu le publicain ; Jacques, fils d’Alphée, et Thaddée ; Simon le Zélote et Judas l’Iscariote, celui-là même qui le livra. »
Comme il n’a pas fait l’ENA, Jésus ne peut pas taper dans l’association des anciens élèves pour avoir des noms prestigieux sur sa liste. Il se contente d’appeler ceux qu’il a sous la main : des pêcheurs peu instruits, des galiléens, un fonctionnaire douteux (Matthieu lui-même !), deux  militants politiques exaltés (Simon et Judas)… Sûrement pas la Dream Team que le cabinet Mac Kinsey aurait recrutée pour un futur leader mondial !
Jésus les appelle 2 par 2, comme il les enverra 2 par 2, pour éviter d’être trop possessif ou trop exclusif. Il appelle également 2 × 2 frères, car il pense que les liens familiaux peuvent devenir des liens de foi.

Donc Jésus à la fois choisit les 12, et il les reçoit, tels qu’ils sont. Car ils sont rebelles, râleurs, un peu ‘bouchés’, lâches, et aucun ne va réagir comme Jésus aurait pu l’espérer. Ça ne fait rien : tels qu’ils sont, Jésus prend le risque. D’abord de les appeler, puis de les envoyer, et tout au long de les aimer. Ainsi ils seront disciples au début (ceux qui suivent un rabbin), puis apôtres (envoyés), et tout au long amis.
Il recevra d’autres amis imprévus que la vie lui enverra : Marie de Magdala, un groupe de femmes qui le suivaient, Joseph D’Arimathie après sa mort etc.

Comment vivre sans amis, même peu reluisants ?
Jésus le sait bien. Et il a l’audace de tenter ce qu’on appellerait aujourd’hui une vraie mixité sociale au sein de son groupe. Car c’est un chaudron explosif que de mélanger des pêcheurs rugueux et un fonctionnaire véreux, des impurs comme Mathieu collaborant avec les Romains pour lever les impôts et les purs et durs comme Simon et Judas, des fils de leaders (Alphée = conduire le troupeau) avec des fils de followers (Thaddée = celui qui est nourri), des révolutionnaires politiques professionnels comme Simon le zélote et Judas l’Iscariote avec des ‘doux’ comme Jean ou André etc.
Ces Douze forment une solution chimique hautement instable, que seule l’autorité charismatique de leur leader semble maintenir en émulsion permanente. Quelque chose entre le RPR de Jacques Chirac et la NUPES de Mélenchon…

Notre liste de contacts-amis est-elle aussi bigarrée et diverse que celle des Douze ?…

Intéressons-nous maintenant aux deux derniers de la liste, les deux violents qui forment une paire de choc : Simon le zélote et Judas l’Iscariote.

 

Simon et Judas
Ils ont dû s’indigner ces deux-là de la présence d’un publicain dans la bande à Jésus. « Social traître », comme aimaient à dire les staliniens des années 60, Mathieu (Lévy) est le prototype du fonctionnaire corrompu qui profite de l’Occupation pour se faire de l’argent facile sur le dos des contribuables, tout en étant protégé par le nouveau régime étranger. C’est comme si Jésus demandait à Jean Moulin et Lucie Aubrac de faire équipe avec Klaus Barbie. Car les zélotes étaient la Résistance armée, et le sicaire auquel fait allusion le qualificatif « l’Iscariote » n’est rien d’autre que le poignard pour égorger le plus de Romains  possible [1].
Premier pari risqué donc de la part de Jésus : apprendre aux extrêmes à travailler ensemble.
Deuxième pari : désamorcer la violence des deux terroristes de la bande, pour leur faire peu à peu découvrir que le Royaume appartient aux doux et aux artisans de paix.Choisir Judas comme ami dans Communauté spirituelle

Il semble que Jésus ait gagné son pari avec Simon le Zélote. On le voit avec les autres à la Pentecôte. Puis le Nouveau Testament perd sa trace. Mais la Tradition rapporte que, après avoir évangélisé l’Égypte et les Berbères, il aurait rejoint l’apôtre Jude de l’autre côté de l’Euphrate pour prêcher en Perse, ce qui à l’époque correspond à l’Empire parthe. De très nombreuses sources chrétiennes convergent pour parler de cette prédication dans l’espace parthe et au sud de l’Arménie. D’autres sources le situent dans la région de la mer Noire comme l’apôtre André principalement en Abkhazie actuelle où il aurait séjourné dans une grotte à Soukhoumi (à l’époque Sebastopolis). Selon les sources, il serait mort martyr, découpé à la scie ou crucifié.

Évidemment, Judas le symétrique ne suit pas le même chemin, et diverge très vite de l’itinéraire de Simon, alors qu’ils auraient pu évoluer ensemble. La version officielle (celle de Jean, puis de l’Église romaine) présente Judas comme le traître, le cupide qui pour 30 deniers a fait tomber son ami aux mains de l’occupant. Du coup, Jean le noircit à outrance : il serait possédé par Satan, et son péché est plus grand que tous, impardonnable.
Est-ce si sûr ?

 

Celui qui livra Jésus
Le verbe livrer qu’emploie Matthieu (« Judas, celui qui livra Jésus ») signifie certes la plupart du temps trahir, faire arrêter, condamner (environ 85 usages en ce sens dans le Nouveau Testament). Mais il y a une quinzaine d’autres usages qui pourraient faire penser à autre chose [2].
Livrer (παραδίδωμι, paradidomi) signifie d’abord : remettre entre les mains de quelqu’un, avec confiance. Ce qu’on remet ainsi peut être une chose : un commandement, des talents à faire crucifier, la foi, la Parole, le Royaume de Dieu lui-même etc. Ce peut être également quelqu’un. Livrer Jésus serait alors pour Judas un acte de confiance envers le pouvoir juif  pour trouver un accord avec Jésus afin d’unir leurs forces en vue de chasser les Romains hors d’Israël [3]. Ce qui serait cohérent avec la flamme nationaliste qui animait Judas : il voyait en Jésus le Messie libérateur capable de soulever les foules contre l’occupant étranger, comme Mattathias autrefois (en -167) avait réussi à obtenir l’indépendance grâce un soulèvement populaire, pour quelques décennies.

Giotto, le Baiser de JudasLe malentendu serait alors celui-ci : Judas est persuadé d’accomplir le désir de son maître en l’aidant à établir le Royaume de Dieu par la force. D’où son enthousiasme lors de la Cène, lorsqu’il demande : « est-ce moi Seigneur qui te livre ? » Lorsque Jésus lui répond : « ce que tu as à faire, fais-le vite », Juda se sont confirmé dans sa mission d’intermédiaire et de négociateur pour trouver une alliance entre les prêtres juifs et Jésus. Il y croit. Quand il embrasse Jésus à Gethsémani, ce n’est pas par dérision : c’est l’authentique geste d’amitié de celui qui va donner à son maître l’occasion enfin d’en finir avec les Romains.

Si l’on suit cette interprétation du rôle de Judas, nulle trahison, nulle traîtrise en l’apôtre, mais seulement un énorme malentendu du côté de Judas qui se méprend sur la nature de la révolution prêchée par Jésus. Du coup, lorsque tout cela échoue lamentablement au Golgotha, Judas considère que sa mission est un désastre, et – à la vie à la mort – reste solidaire de son maître et ami qu’il croyait mener au triomphe. Il se suicide pour partager le même sort que son héros. Par pendaison ou par éventration ? On a les deux versions dans le Nouveau Testament, signe d’une relecture tardive, visiblement à charge, de cet événement. En tout cas, il ne peut ni ne veut survivre à la mort de son ami qui est en même temps la mort de son rêve politique.

Jésus savait-il tout cela ?
Jean lui prête la faculté de connaître tout à l’avance. Mais quand on choisit ses amis, on prend un risque. On ne peut savoir à l’avance – à moins de n’être que Dieu sans être homme – ce que la liberté de l’autre va l’amener à faire envers nous. Connaissant le tempérament violent et les idées politiques extrêmes de Judas (et de Simon), Jésus pourtant a fait confiance, et a pris le risque de se livrer entre les mains de gens peu recommandables. Simon a compris que le Royaume serait tout intérieur, et a progressivement abandonné la lutte armée. Judas lui a fantasmé sur Jésus des rêves de renversement et d’indépendance. Il l’a fait sincèrement, s’aveuglant lui-même. Jésus a souvent observé ce malentendu grandissant qui allait creuser un fossé entre lui et Judas. Il a essayé de l’avertir. Il a continué à faire confiance malgré tout, croyant que son Père saurait se débrouiller avec ce violent. « Tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu » (Rm 8,28), même le choix d’un terroriste parmi les Douze, pensait Jésus. Car « le Seigneur a tout fait selon son dessein, même le méchant pour les jours de malheur » (Pr 16,4).
Ne sachant plus comment se dépêtrer de l’attachement encombrant de ce guérillero, Jésus finit par tout remettre entre les mains de son Père en laissant le champ libre à Judas.

Judas, un coupable idéal ?Choisir Judas pour ami est encore aujourd’hui une redoutable mission qui nous incombe.
Nombre de divorces ressemblent à ce malentendu grandissant qui se glisse entre Jésus et Judas jusqu’à provoquer la rupture. Et chacun accuse alors l’autre de le trahir.
Nombre de brouilles entre amis partent de l’idéalisation de l’autre lui prêtant des qualités ou des désirs qu’il n’a pas.
Nombre de conflits au travail reposent sur ce manque d’explicitation d’un projet commun.
Nombre de schismes en Église se sont d’abord nourris de ce processus d’estrangement comme on dit en franglais – où chacun devient étranger à l’autre en ne comprenant plus ce qu’il cherche.

Car, sans Judas, les Douze ne seraient pas les Douze. À tel point qu’il a fallu le remplacer fissa après la mort de Jésus, pour continuer l’aventure.
N’ayons donc pas peur de prendre Judas pour ami encore aujourd’hui. Même s’il nous trahit, même s’il nous livre à d’autres projets que le nôtre,
Dieu sera bien s’en débrouiller, lui qui « écrit droit avec des lignes courbes »…
Ce risque est grand, mais le jeu en vaut la chandelle. Car que serait l’amitié si elle se limitait à ceux qui nous ressemblent ?

 


[1]. Son nom pourrait être la forme sémitisée de l’épithète latine sicarius, en considérant que le « i » a été placé devant le surnom pour lui donner une forme sémitique.
En latin, le mot sicarius signifie le « porteur de dague ». Dans la Peshitta, version araméenne des évangiles, il est appelé Judas sikariot, « sicaire » étant probablement un nom péjoratif pour désigner les Juifs révoltés contre le pouvoir romain comme les zélotes, les Galiléens et autres « brigands » ou « bandits ». Robert Eisenman fait remarquer que la plupart des consonnes et des voyelles correspondent, entre le sicarioi/sicariōn de Flavius Josèphe et le Iscariot du Nouveau Testament. Le suffixe « -ote » dénote l’appartenance à une communauté – dans ce cas, celle des sicaires.

[2]. Mt 11,27; 25,14.20.22 Lc 1,2; 4,6 Jn 19,30 Ac 6,14; 15,40; 16,4 Rm 6,17 1Co 11,2; 15,3.24 2P 2,21 Jud 1,3

[3]. C’est la thèse développée notamment par Armand Abécassis dans : En vérité je vous le dis, une lecture juive des Évangiles, Editions N° 1, 1999 et Judas et Jésus. Une liaison dangereuse, Éditions N° 1, 2001.

 

 

LECTURES DE LA MESSE

PREMIÈRE LECTURE
« Vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte » (Ex 19, 2-6a)

Lecture du livre de l’Exode
En ces jours-là, les fils d’Israël arrivèrent dans le désert du Sinaï, et ils y établirent leur camp juste en face de la montagne. Moïse monta vers Dieu. Le Seigneur l’appela du haut de la montagne : « Tu diras à la maison de Jacob, et tu annonceras aux fils d’Israël : Vous avez vu ce que j’ai fait à l’Égypte, comment je vous ai portés comme sur les ailes d’un aigle et vous ai amenés jusqu’à moi. Maintenant donc, si vous écoutez ma voix et gardez mon alliance, vous serez mon domaine particulier parmi tous les peuples, car toute la terre m’appartient ; mais vous, vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte. »

PSAUME
(Ps 99 (100), 1-2, 3, 5)
R/ Il nous a faits, et nous sommes à lui, nous, son peuple, son troupeau. (Ps 99, 3bc)

Acclamez le Seigneur, terre entière,
servez le Seigneur dans l’allégresse,
venez à lui avec des chants de joie !

Reconnaissez que le Seigneur est Dieu :
il nous a faits, et nous sommes à lui,
nous, son peuple, son troupeau.

Oui, le Seigneur est bon,
éternel est son amour,
sa fidélité demeure d’âge en âge.

DEUXIÈME LECTURE
« Si nous avons été réconciliés par la mort du Fils, à plus forte raison serons-nous sauvés en recevant sa vie » (Rm 5, 6-11)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains
Frères, alors que nous n’étions encore capables de rien, le Christ, au temps fixé par Dieu, est mort pour les impies que nous étions. Accepter de mourir pour un homme juste, c’est déjà difficile ; peut-être quelqu’un s’exposerait-il à mourir pour un homme de bien. Or, la preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ est mort pour nous, alors que nous étions encore pécheurs. À plus forte raison, maintenant que le sang du Christ nous a fait devenir des justes, serons-nous sauvés par lui de la colère de Dieu. En effet, si nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils alors que nous étions ses ennemis, à plus forte raison, maintenant que nous sommes réconciliés, serons-nous sauvés en ayant part à sa vie. Bien plus, nous mettons notre fierté en Dieu, par notre Seigneur Jésus Christ, par qui, maintenant, nous avons reçu la réconciliation.

ÉVANGILE
« Jésus appela ses douze disciples et les envoya en mission » (Mt 9,36-10,8)
Alléluia. Alléluia. Le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à l’Évangile. Alléluia. (Mc 1,15)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
En ce temps-là, voyant les foules, Jésus fut saisi de compassion envers elles parce qu’elles étaient désemparées et abattues comme des brebis sans berger. Il dit alors à ses disciples : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. »
Alors Jésus appela ses douze disciples et leur donna le pouvoir d’expulser les esprits impurs et de guérir toute maladie et toute infirmité. Voici les noms des douze Apôtres : le premier, Simon, nommé Pierre ; André son frère ; Jacques, fils de Zébédée, et Jean son frère ; Philippe et Barthélemy ; Thomas et Matthieu le publicain ; Jacques, fils d’Alphée, et Thaddée ; Simon le Zélote et Judas l’Iscariote, celui-là même qui le livra.
Ces douze, Jésus les envoya en mission avec les instructions suivantes : « Ne prenez pas le chemin qui mène vers les nations païennes et n’entrez dans aucune ville des Samaritains. Allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d’Israël. Sur votre route, proclamez que le royaume des Cieux est tout proche. Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, expulsez les démons. Vous avez reçu gratuitement : donnez gratuitement. »
Patrick BRAUD

 

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4 juin 2023

Fêtons le Saint Sacrement avec Chrysostome

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Fêtons le Saint Sacrement avec Chrysostome

Homélie pour le Dimanche de la fête du Corps et du Sang du Christ / Année A
11/06/2023

Cf. également :
Le réel voilé sous le pain et le vin
L’Alliance dans le sang
Les 4 présences eucharistiques
Bénir en tout temps en tout lieu
Les deux épiclèses eucharistiques
Les trois blancheurs
Comme une ancre jetée dans les cieux
Boire d’abord, vivre après, comprendre ensuite
De quoi l’eucharistie est-elle la madeleine ?
Donnez-leur vous-mêmes à manger
Impossibilités et raretés eucharistiques
Je suis ce que je mange
L’eucharistie selon Melchisédech
2, 5, 7, 12 : les nombres au service de l’eucharistie

Fêtons le Saint Sacrement avec Chrysostome dans Communauté spirituelle Le-Saint-Sacrement-Livre-1970896240_MLSaint Jean Chrysostome (344-407) est l’un des Pères de l’Église les plus percutants sur le plan social. Cela lui a valu des années d’exil de la part du pouvoir impérial qui n’aimait pas trop ce trublion, non aligné sur les puissants de l’époque.

Il fait sans cesse le lien entre l’eucharistie et les pauvres, et souligne avec force que le sacramentel doit se traduire dans le social, sinon ce n’est que de la superstition. Pourtant on lui doit l’anaphore (prière eucharistique) la plus célébrée des Divines Liturgies dans les Églises orthodoxes : son amour de l’eucharistie est donc au-dessus de tout soupçon !

À l’heure où prolifèrent les élucubrations les plus irrationnelles sur l’eucharistie, célébrons la fête du Corps et du Sang du Christ en laissant l’évêque de Constantinople remettre à l’endroit notre dévotion au Saint Sacrement.

 

À la vue d’un pauvre fidèle, dites-vous que c’est un autel que vos yeux contemplent
Le Christ nous a invités à sa table, il nous a vêtus, quand nous étions nus, et nous ne l’accueillons pas quand il passe.
Il nous a fait boire à sa coupe, et nous lui refusons un verre d’eau fraîche.

infographie-carte-europe-sdf-01 autel dans Communauté spirituelleEh bien ! Vous honorez cet autel parce qu’il supporte le corps du Christ, et pour l’autel qui est le corps du Christ, vous l’outragez, et quand il tombe en ruines, vous passez sans regarder. Cet autel, vous pourrez le voir partout, dans les ruelles, et dans les places, et il n’est pas de jour où vous ne puissiez y offrir un sacrifice à toute heure, car sur cet autel le sacrifice s’offre aussi.

Et de même que le prêtre, debout à l’autel, fait venir le Saint-Esprit, de même, vous aussi, vous le faites venir ce Saint-Esprit, non par des paroles, mais par des actions. Car il n’est rien qui alimente, qui embrase le feu du Saint-Esprit, comme cette huile de l’aumône largement répandue. Tenez-vous à savoir encore ce que deviennent les largesses épanchées par vous, approchez, je vous montrerai tout. Quelle est la fumée ? Quelle est la bonne odeur que cet autel exhale ? C’est la gloire, avec les bénédictions. Et jusqu’où monte-t-elle cette fumée ? Jusqu’au ciel ? Non, elle ne s’y arrête nullement ; elle s’élève bien au-dessus du ciel, elle va plus haut encore ; jusqu’au trône même du Roi des Rois. « Car - dit l’Écriture - vos prières et vos aumônes sont montées jusqu’à la présence de Dieu » (Ac 10,4). La bonne odeur qui flatte les sens ne traverse pas une grande partie de l’air,  alors que le parfum de l’aumône pénètre à travers les plus hautes voûtes des cieux. Vous gardez le silence, mais votre œuvre fait entendre un grand cri. C’est un sacrifice de louange ; il n’y a pas de génisse égorgée, de peau dévorée par la flamme, c’est une âme spirituelle qui apporte tous ses dons : sacrifice incomparable, surpassant tout ce que peut faire l’amour pour les hommes.

Donc à la vue d’un pauvre fidèle, dites-vous que c’est un autel que vos yeux contemplent.

À la vue d’un mendiant, qu’il ne vous suffise pas de ne pas l’outrager, soyez encore saisi de respect. Que si vous voyez qu’on l’outrage, empêchez, repoussez cette injure. C’est ainsi que vous pourrez vous rendre Dieu propice, et obtenir les biens qui nous sont annoncés. Puissions-nous tous entrer dans ce partage, par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

Jean Chrysostome, Homélie XX sur 2Co 9, 10-15

 

Ce temple-là a plus de valeur que l’autre
« Tu veux honorer le Corps du Christ ? Ne le méprise pas lorsqu’il est nu. Ne l’honore pas ici dans l’église, par des tissus de soie, tandis que tu le laisses dehors souffrir du froid et du manque de vêtements. Car celui qui a dit : “Ceci est mon Corps” (1 Co 11,24), et qui l’a réalisé en le disant, c’est lui qui a dit : “Vous m’avez vu avoir faim, et vous ne m’avez pas donné à manger” (Mt 25,42), et aussi : “Chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces petits, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait“ (Mt 25,45). Ici le Corps du Christ n’a pas besoin de vêtements, mais d’âmes pures ; là-bas, il a besoin de beaucoup de sollicitude. »

Apprenons donc à vivre selon la sagesse et à honorer le Christ comme il le veut lui-même. Car l’hommage qui lui est le plus agréable est celui qu’il demande, non celui que nous-mêmes choisissons. Lorsque Pierre croyait l’honorer en l’empêchant de lui laver les pieds, ce n’était pas de l’honneur, mais tout le contraire. Toi aussi, honore-le de la manière prescrite par lui en donnant ta richesse aux pauvres. Car Dieu n’a pas besoin de vases d’or mais d’âmes qui soient en or.

Je ne vous dis pas cela pour vous empêcher de faire des donations religieuses, mais je soutiens qu’en même temps, et même auparavant, on doit faire l’aumône. Car Dieu accueille celles-là, mais bien davantage celle-ci. Car, par les donations, celui qui donne est le seul bénéficiaire mais, par l’aumône, le bénéficiaire est aussi celui qui reçoit. La donation est une occasion de vanité ; mais l’aumône n’est autre chose qu’un acte de bonté.

trois calice d'or

Quel avantage y a-t-il à ce que la table du Christ soit chargée de vases d’or, tandis que lui-même meurt de misère ? Commence par rassasier l’affamé et, avec ce qui te restera, tu orneras son autel. Tu fais une coupe en or, et tu ne donnes pas un verre d’eau fraîche ? Et à quoi bon revêtir la table du Christ de voiles d’or, si tu ne lui donnes pas la couverture qui lui est nécessaire ? Qu’y gagnes-tu ? Dis-moi donc : Si tu vois le Christ manquer de la nourriture indispensable, et que tu l’abandonnes pour recouvrir l’autel d’un revêtement précieux, est-ce qu’il va t’en savoir gré ? Est-ce qu’il ne va pas plutôt s’en indigner ? Ou encore, tu vois le Christ couvert de haillons, gelant de froid, tu négliges de lui donner un manteau, mais tu lui élèves des colonnes d’or dans l’église en disant que tu fais cela pour l’honorer. Ne va-t-il pas dire que tu te moques de lui, estimer que tu lui fais injure, et la pire des injures ?

Pense qu’il s’agit aussi du Christ, lorsqu’il s’en va, errant, étranger, sans abri ; et toi, qui as omis de l’accueillir, tu embellis le pavé, les murs et les chapiteaux des colonnes, tu attaches les lampes par des chaînes d’argent ; mais lui, tu ne veux même pas voir qu’il est enchaîné dans une prison. Je ne dis pas cela pour t’empêcher de faire de telles générosités, mais je t’exhorte à les accompagner ou plutôt à les faire précéder par les autres actes de bienfaisance. Car personne n’a jamais été accusé pour avoir omis les premières, tandis que, pour avoir négligé les autres, on est menacé de la géhenne, du feu qui ne s’éteint pas, du supplice partagé avec les démons.
Par conséquent, lorsque tu ornes l’église, n’oublie pas ton frère en détresse, car ce temple-là a plus de valeur que l’autre.

Jean Chrysostome, Homélie sur l’Évangile de Matthieu

 

LECTURES DE LA MESSE

PREMIÈRE LECTURE
« Dieu t’a donné cette nourriture que ni toi ni tes pères n’aviez connue » (Dt 8, 2-3.14b-16a)

Lecture du livre du Deutéronome
Moïse disait au peuple d’Israël : « Souviens-toi de la longue marche que tu as faite pendant quarante années dans le désert ; le Seigneur ton Dieu te l’a imposée pour te faire passer par la pauvreté ; il voulait t’éprouver et savoir ce que tu as dans le cœur : allais-tu garder ses commandements, oui ou non ? Il t’a fait passer par la pauvreté, il t’a fait sentir la faim, et il t’a donné à manger la manne – cette nourriture que ni toi ni tes pères n’aviez connue – pour que tu saches que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui vient de la bouche du Seigneur. N’oublie pas le Seigneur ton Dieu qui t’a fait sortir du pays d’Égypte, de la maison d’esclavage. C’est lui qui t’a fait traverser ce désert, vaste et terrifiant, pays des serpents brûlants et des scorpions, pays de la sécheresse et de la soif. C’est lui qui, pour toi, a fait jaillir l’eau de la roche la plus dure. C’est lui qui, dans le désert, t’a donné la manne – cette nourriture inconnue de tes pères. »

PSAUME
(Ps 147 (147 B), 12-13, 14-15, 19-20)
R/ Glorifie le Seigneur, Jérusalem ! (Ps 147, 12a)

Glorifie le Seigneur, Jérusalem ! Célèbre ton Dieu, ô Sion !
Il a consolidé les barres de tes portes,
dans tes murs il a béni tes enfants.

Il fait régner la paix à tes frontières,
et d’un pain de froment te rassasie.
Il envoie sa parole sur la terre :
rapide, son verbe la parcourt.

Il révèle sa parole à Jacob,
ses volontés et ses lois à Israël.
Pas un peuple qu’il ait ainsi traité ;
nul autre n’a connu ses volontés.

DEUXIÈME LECTURE
« Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps » (1 Co 10, 16-17)

Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens
Frères, la coupe de bénédiction que nous bénissons, n’est-elle pas communion au sang du Christ ? Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ ? Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain.

SÉQUENCE

Cette séquence (ad libitum) peut être dite intégralement ou sous une forme abrégée à partir de : « Le voici, le pain des anges »

Sion, célèbre ton Sauveur, chante ton chef et ton pasteur par des hymnes et des chants.
Tant que tu peux, tu dois oser, car il dépasse tes louanges, tu ne peux trop le louer.
Le Pain vivant, le Pain de vie, il est aujourd’hui proposé comme objet de tes louanges.
Au repas sacré de la Cène, il est bien vrai qu’il fut donné au groupe des douze frères.
Louons-le à voix pleine et forte, que soit joyeuse et rayonnante l’allégresse de nos cœurs !
C’est en effet la journée solennelle où nous fêtons de ce banquet divin la première institution.
À ce banquet du nouveau Roi, la Pâque de la Loi nouvelle met fin à la Pâque ancienne.
L’ordre ancien le cède au nouveau, la réalité chasse l’ombre, et la lumière, la nuit.
Ce que fit le Christ à la Cène, il ordonna qu’en sa mémoire nous le fassions après lui.
Instruits par son précepte saint, nous consacrons le pain, le vin, en victime de salut.
C’est un dogme pour les chrétiens que le pain se change en son corps, que le vin devient son sang.
Ce qu’on ne peut comprendre et voir, notre foi ose l’affirmer, hors des lois de la nature.
L’une et l’autre de ces espèces, qui ne sont que de purs signes, voilent un réel divin.
Sa chair nourrit, son sang abreuve, mais le Christ tout entier demeure sous chacune des espèces.
On le reçoit sans le briser, le rompre ni le diviser ; il est reçu tout entier.
Qu’un seul ou mille communient, il se donne à l’un comme aux autres, il nourrit sans disparaître.
Bons et mauvais le consomment, mais pour un sort bien différent, pour la vie ou pour la mort.
Mort des pécheurs, vie pour les justes ; vois : ils prennent pareillement ; quel résultat différent !
Si l’on divise les espèces, n’hésite pas, mais souviens-toi qu’il est présent dans un fragment aussi bien que dans le tout.
Le signe seul est partagé, le Christ n’est en rien divisé, ni sa taille ni son état n’ont en rien diminué.

* Le voici, le pain des anges, il devient  le pain de l’homme en route, le vrai pain des enfants de Dieu, qu’on ne peut jeter aux chiens.
D’avance il fut annoncé par Isaac en sacrifice, par l’agneau pascal immolé, par la manne de nos pères.
Ô bon Pasteur, notre vrai pain, ô Jésus, aie pitié de nous, nourris-nous et protège-nous, fais-nous voir les biens éternels dans la terre des vivants.
Toi qui sais tout et qui peux tout, toi qui sur terre nous nourris, conduis-nous au banquet du ciel et donne-nous ton héritage, en compagnie de tes saints. Amen.

ÉVANGILE
« Ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson » (Jn 6, 51-58)
Alléluia. Alléluia. Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel, dit le Seigneur ; si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Alléluia. (Jn 6, 51.58)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean
 En ce temps-là, Jésus disait aux foules des Juifs : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. » Les Juifs se querellaient entre eux : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? » Jésus leur dit alors : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi. Tel est le pain qui est descendu du ciel : il n’est pas comme celui que les pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. »
Patrick BRAUD

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