L'homélie du dimanche (prochain)

29 mai 2022

La séquence de Pentecôte

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

La séquence de Pentecôte

Homélie pour la fête de Pentecôte / Année C
05/06/2022

Cf. également :

Pentecôte : un universel si particulier !
Le déconfinement de Pentecôte

Les langues de Pentecôte
Pentecôte, ou l’accomplissement de Babel
La sobre ivresse de l’Esprit
Les trois dimensions de Pentecôte
Le scat de Pentecôte
Pentecôte : conjuguer glossolalie et xénolalie
Le marché de Pentecôte : 12 fruits, 7 dons
Et si l’Esprit Saint n’existait pas ?
La paix soit avec vous
Parler la langue de l’autre
Les multiples interprétations symboliques du buisson ardent

Les impérios des Açores

Imperios - Ilha TerceiraAprès deux années de crise Covid, le tourisme redécolle ! Essayez la destination Açores, vous ne serez pas déçus. Un archipel d’îles volcaniques au charme fou, des cachalots et des baleines à quelques encablures, des hortensias magnifiques partout, des « fajãs » en bas des falaises, des « miradouros » panoramiques pour contempler le paysage, une température constante de 20°–22°C, des côtes et rivages d’une beauté à couper le souffle… Vous remarquerez inévitablement les dizaines de petites chapelles ultra colorées dans les villages. Un français se dit au premier abord que ce sont des chapelles mariales comme il y en a tant en Bretagne ou dans le Nord. Pas du tout ! Ce sont des chapelles dédiées au Saint Esprit ! Enfin un pays où le culte du Saint Esprit passe avant celui de la Vierge Marie… C’est assez rare dans le catholicisme, où les « trois blancheurs » (la Vierge, l’eucharistie, le pape) ont souvent pris le pas sur l’adoration de l’Esprit Saint ! À tel point que les théologiens pointent depuis longtemps que l’Esprit Saint est le grand oublié des catholiques, alors qu’il est ultra présent chez les protestants ou les orthodoxes.

Aux Açores, l’Esprit a donc un extraordinaire réseau de chapelles appelées impérios, toutes plus pimpantes et joyeuses les unes que les autres ! La vénération populaire à l’Esprit vient de loin aux Açores. Importée du Portugal catholique des XIV°-XV° siècles, elle est très liée à la fête de Pentecôte d’aujourd’hui, et même à toute la période pascale. Les rituels n’ont presque pas été modifiés. Un ‘Empereur’ est couronné à l’église paroissiale. Avec un sceptre et une plaque en argent, en guise de symbole d’Espírito Santo, il préside les fêtes tous les dimanches pendant sept semaines après Pâques. Le dimanche de Pentecôte, il y a une grande fête dans la ville. Le lieu des cérémonies est une petite chapelle, ou « império« , utilisée pour la distribution de la soupe d’Espírito Santo, avec de la viande et des légumes, destinée aux pauvres et aux isolés. C’est là que la couronne, la plaque et le sceptre sont exposés, sur l’autel de l’império. Bel exemple de l’esprit communautaire qui règne dans l’archipel !

Ces impérios assument donc plusieurs fonctions : enraciner le peuple dans une foi trinitaire (c’est si rare !), lier le culte à l’Esprit au soin des pauvres. La dimension sociale de la foi est indissociable de la liturgie ; les fêtes du Saint Esprit aux Açores le manifestent de façon éclatante, joyeuse et populaire !

En bons portugais, les Açoriens sont également très attachés à la Vierge Marie, mais ce n’est finalement que l’ombre portée de l’adoration de l’Esprit qui seul est Dieu, et dont Marie est tout entière emplie.

Voilà de quoi redresser nos coutumes et nos pratiques en France, afin de mieux réaffirmer la prééminence de l’Esprit sur les créatures qu’il anime. La fête de Pentecôte nous invite à cette conversion.

 

Les séquences liturgiques

Vous l’avez entendue juste avant l’Évangile (ce qui est bizarre pour une séquence, qui comme son nom l’indique devrait suivre et non précéder !) : la séquence de Pentecôte Veni sancte Spiritus, appelée parfois la séquence dorée, est un poème d’invocation à l’Esprit Saint. Nous avions déjà parlé de la séquence de Pâques Victimae paschali (avec le labyrinthe de Chartres cf. La danse pascale du labyrinthe). Il ne reste en effet que 4 séquences dans la liturgie romaine, depuis que le missel de 1570 issu du Concile de Trente a supprimé les innombrables séquences (plus de 4500 !) qui polluaient les offices auparavant, car constituées de textes non bibliques de piètre qualité, à la poésie douteuse et à la théologie approximative. Comme quoi on n’a pas attendu Vatican II pour opérer un retour à l’Écriture et simplifier en taillant à grands coups de serpe dans l’accumulation liturgique sédimentée au cours des siècles. Il n’est pas sûr cependant que l’abondante production actuelle d’éphémères chansons liturgiques soit de meilleure facture que les séquences d’autrefois…

La séquence de Pentecôte dans Communauté spirituelle Veni_Sancte_Spiritus%2C_et_emitte

Qu’on en n’ait conservé que quatre dit l’importance des fêtes auxquelles ces séquences sont dédiées : Pâques, Pentecôte, Fête-Dieu (Lauda Sion), Notre Dame des douleurs (Stabat mater, remplaçant le Dies irae après Vatican II). Elles expriment le besoin de composer sa propre prière à partir de la bonne nouvelle annoncée par la fête : avec les mots de sa culture, de son génie poétique. Elles ont pour but de résumer et d’actualiser le contenu célébré, pour le rendre accessible au plus grand nombre. Autrefois, on mémorisait facilement les séquences en les chantant, et la liturgie devenait ainsi une catéchèse simple et active. De quoi trouver des sources d’inspiration pour nos chants et nos hymnes actuels !

 

La séquence de Pentecôte

Elle est moins connue que le Veni creator avec lequel elle est souvent confondue. Le Veni creator est chanté à chaque ordination, ce qui souligne le lien entre l’Esprit Saint et les ministères dans l’Église. Le Veni sancte Spiritus est assez différent. En voici le texte, pour en dégager quelques grandes lignes :

Viens, Esprit Saint, en nos cœurs et envoie du haut du ciel un rayon de ta lumière.
Viens en nous, père des pauvres, viens, dispensateur des dons, viens, lumière de nos cœurs.
Consolateur souverain, hôte très doux de nos âmes, adoucissante fraîcheur.
Dans le labeur, le repos ; dans la fièvre, la fraîcheur ; dans les pleurs, le réconfort.
Ô lumière bienheureuse, viens remplir jusqu’à l’intime le cœur de tous tes fidèles.
Sans ta puissance divine, il n’est rien en aucun homme, rien qui ne soit perverti.
Lave ce qui est souillé, baigne ce qui est aride, guéris ce qui est blessé.
Assouplis ce qui est raide, réchauffe ce qui est froid, rends droit ce qui est faussé.
À tous ceux qui ont la foi et qui en toi se confient donne tes sept dons sacrés.
Donne mérite et vertu, donne le salut final, donne la joie éternelle. Amen

 

S’adresser à l’Esprit en personne

170px-Triandrique-Avignon-ms111-f23r Açores dans Communauté spirituelleDans cette séquence, on tutoie l’Esprit Saint ! L’Église s’adresse à lui en lui parlant comme à une personne. Or les représentations catholiques de l’Esprit souffrent d’une figuration trop animalière (la colombe) ou trop chosifiante (le feu, les langues, le souffle, les rayons de lumière etc.). Cherchez bien : sur nos vitraux, dans nos tableaux, sur nos statues, l’Esprit est rarement représenté comme une personne. Il a fallu la redécouverte de l’icône de la Trinité de Roublev en Occident, ou le Renouveau charismatique inspiré du pentecôtiste américain pour que les latins se réhabituent à prier l’Esprit en personne. Et encore, ce n’est pas gagné ! C’est évidemment le culte marial qui a absorbé pourrait-on dire l’énergie catholique normalement dirigée vers l’Esprit. Il vaudrait mieux parler de vénération mariale, car en termes techniques c’est un culte dit d’hyperdulie (supérieur au culte de dulie rendu aux saints, mais inférieur au culte rendu à Dieu qu’on appelle latrie) et non un culte divin. Or les deux ne s’opposent pas, au contraire : la vénération due à Marie se comprend comme l’hommage au travail de l’Esprit en elle, de sa conception à son Assomption en passant par son Annonciation. Rappelons-nous également que l’Esprit est féminin en hébreu (ruah) : prier l’Esprit, c’est s’adresser à la part féminine qui en Dieu prend soin de ses enfants comme une mère.

Fêter Pentecôte, c’est donc tutoyer l’Esprit pour lui parler comme à une conseillère, une mère, une compagne, « plus intime à moi-même que moi-même » (saint Augustin). Chanter la séquence de Pentecôte, c’est s’adresser à l’Esprit en personne pour lui demander son amitié, sa présence, le lien vivant de communion avec lui qui va féconder toutes nos activités. Viens Esprit Saint pourrait être la prière qui monte à nos lèvres le plus naturellement du monde lorsque nous désirons louer ou implorer, nous réjouir ou gémir, recevoir ou donner.

D’ailleurs, d’innombrables compositeurs l’ont mis en musique : Guillaume Dufay, Josquin des Prés, Adrien Willaert, Giovanni Pierluigi da Palestrina, Roland (Orlandus) de Lassus et Tomás Luis de Victoria, Arvo Pärt etc…

 

Père des pauvres

L'Abbé Pierre 1912-2007 Frère des pauvres, provocateur de PaixSurprenante appellation de la séquence ! On est plus habitué à utiliser ce nom de père pour Dieu première personne de la Trinité ! Comme quoi la paternité est une qualité bien partagée entre les Trois.

Les pauvres dans la Bible sont ceux qui n’ont pas d’autres ressources que Dieu pour s’en sortir : pas de fortune, pas d’amis capables de les sauver, pas de défenseur pour garantir leur droit. Est « père des pauvres » celui qui prend soin d’eux, leur fournit concrètement de quoi survivre, les rétablit dans leur droit, leur honneur, leur dignité. Job correspond à ce portrait (« Pour les pauvres, j’étais un père » Jb 29,16) ; mais c’est Dieu lui-même qui l’incarne au plus haut point : « Père des orphelins, défenseur des veuves, tel est Dieu dans sa sainte demeure » (Ps 68,6). « Tu es le Dieu des humbles, secours des opprimés, protecteur des faibles, refuge des délaissés, sauveur des désespérés » (Jdt 9,11). Attribuer ce rôle à l’Esprit revient à formuler le salut des pauvres en termes de liens de communion qui les unissent à Dieu, car c’est le propre de l’Esprit que de créer et de nourrir la relation au Dieu vivant. Dans cette relation de communion, les pauvres trouvent leur salut. Cette communion vivante les rend plus forts, leur inspire les paroles et les actes pour se défendre, le courage pour résister. Prier l’Esprit comme père des pauvres nous prépare à désirer ce lien de communion, en reconnaissant que seuls nous ne pouvons rien. Remède à l’autosuffisance, désir de vivre en communion, le Veni sancte Spiritus nous rend disponibles pour expérimenter l’action du père des pauvres en nous.

 

Les autres titres donnés à l’Esprit dans la séquence

- dispensateur des dons

7-dons-du-Saint-EspritOn pense évidemment aux dons de l’Esprit listés par Isaïe (Is 11,1-3) puis Paul (1Co 12,4-7), et qu’on a mémorisés sous la forme d’un septénaire. Les 7 dons de l’Esprit manifestent sa présence en nous. Et finalement nous apprendrons à passer des dons au Donateur, des grâces offertes à l’Esprit qui en est la source. Selon le mot de Jésus : « si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! » (Lc 11,13).

 

- consolateur souverain

C’est Isaïe encore qui est en filigrane dans ce titre : « Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu… » (Is 40,1).
N’ayons aucune honte à désirer être consolé, cajolé par l’Esprit de Dieu comme un enfant sur les genoux de sa mère (c’est l’étymologie du mot berakah, bénédiction). Souvenez-vous que l’Esprit est féminin…

 

- hôte très doux

L’Esprit est celui qui fait passer de l’extérieur à l’intérieur. De la pratique extérieure de la Loi à la pratique intérieure de la charité. De l’obligation morale à la libre inspiration : « aime et fait ce que tu veux » (Augustin). Car l’Esprit habite au plus intime de notre être, plus intime à moi-même que moi-même. Il n’est pas dans les textes, dans les règlements, dans les institutions figées, mais dans le mouvement intérieur, dans la création sans cesse renouvelée, dans la fidélité capable d’inventer et de faire du neuf.

 

Les verbes de la séquence

 Esprit- un premier verbe est lié à la Pentecôte : « viens remplir… ». Rappelez-vous que Judas se vide vers l’extérieur (« il tomba la tête la première, son ventre éclata, et toutes ses entrailles se répandirent » Ac 1,16-19), que les apôtres à l’inverse sont remplis de l’Esprit Saint qui pénètre en eux (« Tous furent remplis d’Esprit Saint…» Ac 2,4). L’Esprit de Pentecôte a horreur du vide ! Le vide de sens, le sentiment de vide qu’engendre un travail inutile, le vide d’un couple désuni, le vide d’un cœur qui s’attache trop aux choses et pas assez aux gens etc.

- les 3 verbes suivants sont plutôt liés au baptême où l’Esprit lave du péché en nous baignant dans la grâce, ce qui nous guérit de notre inclination à faire le mal.

- Les 3 verbes qui viennent alors sont liés au renouvellement du baptême dans le sacrement de réconciliation, travail dans lequel l’Esprit excelle ! Assouplir nos raideurs, réchauffer ce qui est froid et mort en nous, rendre droit ce que nous avons tordu par nos calculs et nos stratégies égoïstes compliquées, telle est l’œuvre de l’Esprit en ceux qui se laissent faire.

- Les 3 derniers verbes sont un seul en fait : donne. L’Esprit est par nature celui qui donne : le Père au Fils et réciproquement, le baptisé à son Dieu, la grâce au baptisé, la vie éternelle dans les sacrements, les 7 dons qui caractérisent la vie dans l’Esprit etc.

On a ainsi une liste de 10 verbes, ce qui n’est évidemment pas un hasard, pour cartographier la Loi nouvelle qu’instaure l’Esprit : se laisser conduire par Lui qui est communion, lien vivant d’amour entre les êtres.

En cette fête de Pentecôte, chantant avec cœur le Veni sancte Spiritus, relisons-le à tête reposée cette semaine. Qu’il monte sur nos lèvres pour implorer dans la joie comme dans la détresse.

Conjuguons-le à la première personne pour lui parler face-à-face :

Viens, Esprit Saint en mon cœur et envoie du haut du ciel un rayon de ta lumière.
Viens en moi, père des pauvres, viens, dispensateur des dons, viens, lumière de mon cœur.
Consolateur souverain, hôte très doux de mon âme, adoucissante fraîcheur.
Dans le labeur, mon repos ; dans la fièvre, ma fraîcheur ; dans les pleurs, mon réconfort.
Ô lumière bienheureuse, viens remplir mon cœur jusqu’à l’intime.
Sans ta puissance divine, il n’est rien en moi, rien qui ne soit perverti.
Lave ce qui en moi est souillé, baigne ce qui en moi est aride, guéris ce qui en moi est blessé.
Assouplis ce qui en moi est raide, réchauffe ce qui en moi est froid, rends droit ce qui en moi est faussé.
Amen !


 
   

MESSE DU JOUR

Première lecture
« Tous furent remplis d’Esprit Saint et se mirent à parler en d’autres langues » (Ac 2, 1-11)

Lecture du livre des Actes des Apôtres
Quand arriva le jour de la Pentecôte, au terme des cinquante jours après Pâques, ils se trouvaient réunis tous ensemble. Soudain un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent : la maison où ils étaient assis en fut remplie tout entière. Alors leur apparurent des langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa une sur chacun d’eux. Tous furent remplis d’Esprit Saint : ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit.
Or, il y avait, résidant à Jérusalem, des Juifs religieux, venant de toutes les nations sous le ciel. Lorsque ceux-ci entendirent la voix qui retentissait, ils se rassemblèrent en foule. Ils étaient en pleine confusion parce que chacun d’eux entendait dans son propre dialecte ceux qui parlaient. Dans la stupéfaction et l’émerveillement, ils disaient : « Ces gens qui parlent ne sont-ils pas tous Galiléens ? Comment se fait-il que chacun de nous les entende dans son propre dialecte, sa langue maternelle ? Parthes, Mèdes et Élamites, habitants de la Mésopotamie, de la Judée et de la Cappadoce, de la province du Pont et de celle d’Asie, de la Phrygie et de la Pamphylie, de l’Égypte et des contrées de Libye proches de Cyrène, Romains de passage, Juifs de naissance et convertis, Crétois et Arabes, tous nous les entendons parler dans nos langues des merveilles de Dieu. »

Psaume
(Ps 103 (104), 1ab.24ac, 29bc-30, 31.34)
R/ Ô Seigneur, envoie ton Esprit qui renouvelle la face de la terre !
ou : Alléluia !
 (cf. Ps 103, 30)

Bénis le Seigneur, ô mon âme ;
Seigneur mon Dieu, tu es si grand !
Quelle profusion dans tes œuvres, Seigneur !
la terre s’emplit de tes biens.

Tu reprends leur souffle, ils expirent
et retournent à leur poussière.
Tu envoies ton souffle : ils sont créés ;
tu renouvelles la face de la terre.

Gloire au Seigneur à tout jamais !
Que Dieu se réjouisse en ses œuvres !
Que mon poème lui soit agréable ;
moi, je me réjouis dans le Seigneur.

Deuxième lecture
« Tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu » (Rm 8, 8-17)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Romains
Frères, ceux qui sont sous l’emprise de la chair ne peuvent pas plaire à Dieu. Or, vous, vous n’êtes pas sous l’emprise de la chair, mais sous celle de l’Esprit, puisque l’Esprit de Dieu habite en vous. Celui qui n’a pas l’Esprit du Christ ne lui appartient pas. Mais si le Christ est en vous, le corps, il est vrai, reste marqué par la mort à cause du péché, mais l’Esprit vous fait vivre, puisque vous êtes devenus des justes. Et si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité Jésus, le Christ, d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous.
Ainsi donc, frères, nous avons une dette, mais elle n’est pas envers la chair pour devoir vivre selon la chair. Car si vous vivez selon la chair, vous allez mourir ; mais si, par l’Esprit, vous tuez les agissements de l’homme pécheur, vous vivrez. En effet, tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu. Vous n’avez pas reçu un esprit qui fait de vous des esclaves et vous ramène à la peur ; mais vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ; et c’est en lui que nous crions « Abba ! », c’est-à-dire : Père ! C’est donc l’Esprit Saint lui-même qui atteste à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Puisque nous sommes ses enfants, nous sommes aussi ses héritiers : héritiers de Dieu, héritiers avec le Christ, si du moins nous souffrons avec lui pour être avec lui dans la gloire.

Séquence
Viens, Esprit Saint, en nos cœurs et envoie du haut du ciel un rayon de ta lumière.
Viens en nous, père des pauvres, viens, dispensateur des dons, viens, lumière de nos cœurs.
Consolateur souverain, hôte très doux de nos âmes, adoucissante fraîcheur.
Dans le labeur, le repos ; dans la fièvre, la fraîcheur ; dans les pleurs, le réconfort.
Ô lumière bienheureuse, viens remplir jusqu’à l’intime le cœur de tous tes fidèles.
Sans ta puissance divine, il n’est rien en aucun homme, rien qui ne soit perverti.
Lave ce qui est souillé, baigne ce qui est aride, guéris ce qui est blessé.
Assouplis ce qui est raide, réchauffe ce qui est froid, rends droit ce qui est faussé.
À tous ceux qui ont la foi et qui en toi se confient donne tes sept dons sacrés.
Donne mérite et vertu, donne le salut final, donne la joie éternelle. Amen

Évangile
« L’Esprit Saint vous enseignera tout » (Jn 14, 15-16.23b-26)
Alléluia. Alléluia. Viens, Esprit Saint ! Emplis le cœur de tes fidèles ! Allume en eux le feu de ton amour ! Alléluia.

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous. Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons vers lui et, chez lui, nous nous ferons une demeure. Celui qui ne m’aime pas ne garde pas mes paroles. Or, la parole que vous entendez n’est pas de moi : elle est du Père, qui m’a envoyé. Je vous parle ainsi, tant que je demeure avec vous ; mais le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit. »
Patrick BRAUD

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26 mai 2022

Étienne, protomartyr, maître es-témoignage

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Étienne, protomartyr, maître es-témoignage

Homélie pour le 7° Dimanche de Pâques / Année C
29/05/2022

Cf. également :

Sans séparation ni confusion …
Lapidation : le retour !

Poupées russes et ruban de Möbius…
Le dialogue intérieur
Sois un être de désir !
Trinité : ne faire qu’un à plusieurs

La différence entre martyr et kamikaze ou djihadiste

La médecine narrative d’Étienne

La médecine narrative - Raconte-moi la guérisonConnaissez-vous la « médecine narrative » ? Née dans les années 90 aux USA, cette pratique médicale vise à enrichir la relation médecin-patient grâce à l’écoute du récit du malade. L’université et le CHU de Bordeaux en sont des pionniers, notamment en créant en 2021 un Diplôme universitaire (DU) de médecine narrative, le premier en France.
La médecine narrative, c’est prendre le temps d’écouter le patient raconter ce qui lui arrive. Ce qui implique de former les soignants au récit afin d’améliorer leurs capacités d’écoute, de mieux prendre en compte le récit du patient, de permettre d’accéder à ses émotions et de poser des mots, les plus précis possible, pour avoir une conscience plus fine de ce qu’il ressent…
La médecine narrative est une approche des soins de santé centrée sur le patient, qui se développe dans les pays anglophones, en particulier dans le nord de l’Amérique, à partir des années 1990. Son objectif est de (re)mettre le récit du patient et son écoute attentive au cœur de l’acte médical et d’établir une relation de qualité, marquée par l’empathie, entre le soignant et le soigné. Pas inutile, quand on sait qu’un médecin interrompt son patient 17 secondes en moyenne après sa première prise de parole…
La théoricienne de ce courant, Rita Charon, formalise les principes de la médecine narrative et la décrit comme « une médecine exercée avec une compétence narrative permettant de reconnaître, d’absorber, d’interpréter les histoires de maladie, et d’être ému par elles » [1]. Son hypothèse est que « tout ce qui manque à la médecine aujourd’hui – en humilité, en responsabilité, en empathie, en individualisation – peut être apporté, en partie, par un entraînement narratif intensif ». Charon mobilise des outils d’analyse littéraire dans le contexte de la relation soignant/soigné : la prise en considération du cadre dans lequel la narration a lieu, l’intrigue, les métaphores employées, mais aussi le désir du narrateur, le sens qu’il veut donner à son récit etc. Ce sont autant d’éléments qui permettent d’accueillir un récit, qu’il s’agisse de celui d’auteur d’un roman ou de celui d’un patient.
« La médecine narrative aide à aiguiser le regard sur l’histoire du malade, complète Serge Perrot. Le parcours d’un patient, c’est un peu comme un polar. Au médecin de repérer des indices qui ont pu lui échapper » [2]. La médecine narrative ressemble effectivement à une enquête de Sherlock Holmes qui laisse les indices et les lieux parler avant que d’émettre des hypothèses : le patient est un polar à décrypter, et cela ne peut se faire sans qu’il raconte tout ce qui lui arrive, et pas seulement le symptôme en bout de chaîne.
Une plus grande empathie, une meilleure efficacité de diagnostic, des capacités relationnelles renforcées : voilà les effets positifs que recherche la médecine narrative.

Étienne, protomartyr, maître es-témoignage dans Communauté spirituelle ic%C3%B4ne.du-martyr-St-.EtiennePourquoi évoquer cette médecine narrative en ce dimanche où nous lisons le texte du martyre d’Étienne (Ac 7,55-60) ? Parce qu’en regardant le contexte de notre première lecture, nous tombons sur le très ample chapitre 7 des Actes des Apôtres où Étienne fait un long discours devant le Sanhédrin réuni pour le juger suite aux accusations de blasphème portées contre lui (Ac 6,8–15).
Une véritable plaidoirie ce chapitre 7 des Actes ! Pas besoin d’avocat : l’Esprit lui-même vient mettre sur les lèvres d’Étienne les arguments de sa défense, selon la promesse de Jésus : « l’Esprit Saint vous enseignera à cette heure-là ce qu’il faudra dire » (Lc 12,12).
Et quel argumentaire lui suscite l’Esprit ? Une longue récapitulation historique, depuis Abraham jusqu’à Jésus, où Étienne livre sa relecture des événements et révélations successives. Malheureusement, c’est le même procédé narratif – mais délirant ! – que Poutine a utilisé pour justifier son invasion de l’Ukraine, revisitant l’histoire de la Russie depuis le IX° siècle à sa façon… Si nous ne faisons pas cet exercice, les violents le feront à notre place, en mentant sans vergogne.

Étienne pratique ainsi ce qu’on pourrait appeler une médecine narrative inversée.
Dans la médecine narrative, il s’agit d’apprendre à écouter le patient pour mieux le soigner.
Dans le martyre d’Étienne, il s’agit d’apprendre à raconter aux bourreaux pour mieux témoigner.
Ici, c’est la victime qui soigne son bourreau en choisissant les mots qui lui parleront au cœur, afin qu’il soit touché et se détourne du mal. La fameuse identité narrative de Paul Ricœur trouve ici une incarnation exemplaire : c’est en racontant qu’on devient témoin, martyr. Imaginer des ukrainiens s’adressant à des soldats russes en les traitant de cousins, de frères slaves, et en racontant tous les liens qui unissent les familles et les cultures des deux côtés de la frontière ! Nombre de soldats russes seraient touchés, et changeraient d’attitude, comme ceux qui ne voulaient plus continuer cette guerre atroce qu’on leur imposait.

La médecine inversée d’Étienne nous demande de ne pas nous taire devant l’injustice, d’avoir le courage de dénoncer le mal, et de parler à nos ennemis avec la même tendresse qu’Étienne au Sanhédrin : « frères et pères… » (Ac 7,2). Pour cela, il nous faut comme lui nous exercer auparavant à cette relecture chrétienne des événements de notre vie personnelle et collective. C’est dans la force du récit que réside le témoignage. C’est par le choix des mots que l’Esprit conduit vers la vérité tout entière (Jn 16,13) les auditeurs les plus endurcis.

Soigner les violents, guérir les meurtriers, sauver les bourreaux demande d’apprendre cet art de la médecine narrative inversée qui est celle d’Étienne. Sinon, comment aimer nos ennemis et bénir ceux qui nous persécutent, selon le commandement de Jésus (Mt 5,44) ?

 

Le martyr, cet autre Christ

Devenir Un Autre Christ: Lidentification À Jésus-Christ Selon Basile Moreau de Cécile PerreaultAlter Christus était autrefois un titre réservé aux prêtres dans la théologie médiévale, qui les mettait à part, sur un piédestal. Le Nouveau Testament élargit à tous les baptisés cette dignité christique : par l’onction du baptême, nous devenons tous des oints, des Christs. Étienne n’est pas prêtre, rappelons-le. Il est l’un des Sept, c’est-à-dire un diacre permanent dans le vocabulaire d’aujourd’hui. Dans son témoignage et sa mort, Étienne est présenté par le livre des Actes comme un authentique « autre Christ ». L’accumulation des similitudes est voulue :

– Les motifs de son accusation et de condamnation sont les mêmes que ceux portés contre Jésus : blasphème contre Moïse et contre Dieu (Ac 6,11), propos hostiles contre le Temple et la Loi (6,13–14) jusqu’à annoncer sa destruction/reconstruction par Jésus.
Soulignons à nouveau que ce sont des motifs essentiellement religieux (blasphème) et rituels (les obligations de la Loi juive). Comme quoi les personnalités prestigieuses les plus religieuses sont souvent les pires persécuteurs ! Écoutez par exemple les imprécations du patriarche Kyrill de Moscou contre ceux qui doutent de la confusion État-religion dans la ‘sainte Russie orthodoxe’…

- Comme Jésus, Étienne est conduit hors la ville (7,58) pour être tué. C’est le signe de l’expulsion hors de la communauté - déshonneur ajouté à la condamnation -, de la volonté d’anéantir l’adversaire, de le déshériter des promesses d’Abraham. Étienne fait écho à la crucifixion de Jésus, conduit au Golgotha à l’écart de Jérusalem, comme le fils jeté hors de la vigne dans la parabole, pour le déshonorer à tout jamais et faire peser sur lui une malédiction infamante.
Les chrétiens font de tous temps corps avec ceux qu’on expulse, qu’on veut priver de dignité, qui sont mis à l’écart de la société.

Étienne en Jésus, Jésus en Étienne– Comme Jésus, Étienne est transfiguré de l’intérieur pour affronter sa Passion qui approche. Même ses accusateurs « virent son visage comme le visage d’un ange » (6,15) ; et à la fin de sa plaidoirie, il fixe le ciel et voit la gloire de Dieu avec Jésus debout à sa droite (7,55–56).
La transfiguration du Christ au Thabor ne lui était pas réservée : elle est largement offerte à tous les témoins qui vont comme lui plonger dans l’enfer de leur Passion.

– Comme Jésus, Étienne se donne tout entier à Dieu, jusqu’à son dernier souffle : « Seigneur Jésus, reçois mon esprit » (7,59). On y entend la prière du Christ en croix : « Père, entre tes mains je remets mon esprit » (Lc 23,46), en élevant Jésus au même rang de seigneurie que le Père.

– Comme Jésus, Étienne prie pour ceux qui le lapident pendant qu’ils lui jettent des pierres : « Seigneur, ne leurs compte pas ce péché » (Ac 7,60). Il fait ainsi écho à la prière de Jésus : « Père pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34).
À nous de pratiquer en actes et en paroles cet amour de nos ennemis, qui va jusqu’à prier pour eux, sans pour autant nous rendre complice du mal commis.

– Comme Jésus, Étienne est enseveli par « des hommes pieux qui font sur lui de grandes lamentations »(8,2). La tradition orale a conservé le souvenir du lieu de l’ensevelissement d’Étienne, si bien que des reliques (vraies et fausses !) furent ensuite dispersées dans toute l’Europe, à l’instar de celles de Jésus (couronne d’épines, suaire, bois de la Croix etc.).

– Comme pour Jésus, la mort d’Étienne sera le début d’une nouvelle aventure pour l’Église. D’abord par le biais de la persécution qui s’abat sur les hellénistes baptisés dont Étienne est le premier martyr (protomartyr). « Ce jour-là, éclata une violente persécution contre l’Église de Jérusalem. Tous se dispersèrent dans les campagnes de Judée et de Samarie, à l’exception des Apôtres » (Ac 8,1). Cette dispersion deviendra la première grande mission hors de Jérusalem. Les catastrophes qui s’abattent sur nous peuvent devenir de nouveaux départs…
Ensuite par le biais de Saul qui deviendra Paul : il avait gardé les vêtements de ceux qui lapidaient Étienne, approuvant et participant ainsi au meurtre (7,57 ; 22,20). Saul voyait dans Étienne la figure même du Juif qui a trahi la foi d’Israël. Sa radicalité le poussera à persécuter l’Église, « animé d’une rage meurtrière contre les disciples du Seigneur » (9,1). De persécuteur il deviendra pourtant apôtre après son éblouissement sur le chemin de Damas. Entre la prière du martyr et la vocation de l’apôtre, le lien est clair. La radicalité de Saul participe à la mort du disciple de Jésus, qui obtiendra la foi de son persécuteur.
Tertullien avait raison de dire : « le sang des martyrs est semence de chrétiens ». Indirectement, la lapidation d’Étienne donne à l’Église un apôtre exceptionnel en la personne de Paul ! Comment désespérer de nos pires ennemis en voyant Saul se transformer en Paul, en partie grâce à Étienne ?

On le voit : Étienne est bien un autre Christ ! Il lui ressemble tellement dans sa Passion qu’on a décidé de le fêter le 26 décembre, juste après la naissance de Jésus, pour bien montrer que tout chrétien sera comme Étienne configuré au Christ dans l’offrande qu’il fera de sa vie, jusqu’au martyre s’il le faut.

 

Allez les Verts !

220px-Golden_laurel_wreath_T_HL_04_Kerameikos_Athens Etienne dans Communauté spirituelleQui n’a pas vibré autrefois à la belle aventure du club de football de Saint-Étienne dans les années 60-80 ? On parlait des stéphanois comme de la crème du football national et européen, club mythique titulaire de 10 titres de champion de France ! Seul le PSG du Qatar l’a égalé cette année… . Ces stéphanois nous rappellent que Étienne en grec se dit στέφανος (stéphanos), qui signifie couronne. Étienne est si populaire qu’en France neuf cathédrales lui sont dédiées, et des dizaines de communes. Pensez par exemple à Saint-Étienne-du-Rouvray, où le Père Hamel est mort assassiné par un djihadiste en 2016 : commune prédestinée hélas pour recevoir la couronne du martyre…

Le premier chrétien qui reçoit la couronne du martyre s’appelle donc justement… couronne !

C’est le mot qui désigne la couronne royale de David (2Sa 12,30).
Le même mot est employé pour la couronne d’épines posée sur la tête de Jésus (Mt 27,29). Elle devient ainsi la couronne du vainqueur (1Co 9,25 ; 2Tim 4,8) promise aux athlètes de la foi comme celle convoitée par les sportifs. C’est encore la marque d’une autorité fraternelle et d’un engagement de service. Par exemple, pour l’apôtre Paul, ses frères bien-aimés sont « sa joie et sa couronne » (Ph 4,1; 1Th 2,19). Quant à l’apôtre Jacques, il utilise ce mot pour désigner celui qui aura traversé les épreuves : « Heureux l’homme qui supporte l’épreuve avec persévérance, car, sa valeur une fois vérifiée, il recevra la couronne de la vie promise à ceux qui aiment Dieu » (Jc 1,12). Enfin, Jean dans l’Apocalypse résume bien le sens du mot στέφανος, quand il écrit: « Sois fidèle jusqu’à la mort, et je te donnerai la couronne de la vie » (Ap 2,10).

Les témoins du Christ ne courent pas après les médailles, les décorations, les rubans rouges au revers des vestes. Ils recherchent d’abord cette couronne dont Étienne était le nom et le prototype. Cela devrait se voir…

 

La lapidation Étienne selon Rubens

Rubens lapidation Etienne

Terminons par un rapide flash pictural. Le génial Rubens a peint un superbe triptyque sur la lapidation du protomartyr qu’on peut admirer au musée de Valenciennes [3].

On y voit sur le volet de gauche Étienne désigner le Temple pour annoncer son remplacement par le corps du Christ et l’adoration en esprit et en vérité.

Sur le volet de droite, on assiste à l’ensevelissement d’Étienne, à la manière d’une descente de croix, soulignant le parallélisme avec Jésus.

Le panneau du milieu est superbement composé. Une diagonale sépare le monde terrestre du céleste : en bas des couleurs violentes, des contrastes criards, des hommes à la musculature noueuse exagérée pour montrer la brutalité de la violence en action. Et ces lapidateurs forment un tourbillon de mains, de bras et de visages qui entraîne le spectateur dans la spirale infernale de leur violence. Ils sont 10 d’ailleurs : peut-être une allusion au nombre minimum pour constituer une assemblée cultuelle juive (le miniane). Comme si à leur insu ils accomplissaient une liturgie. C’est bien le cas, et cette liturgie est eucharistique. Car le martyre est l’eucharistie véritable. La dalmatique que porte Étienne en est le signe. Dans ce groupe de lapidateurs, il y a des jeunes, des vieux, des barbus et des imberbes, et même un noir : devenir persécuteur n’est hélas pas une question d’âge ni de couleur de peau ! Peinture terriblement actuelle si l’on songe aux exactions des troupes armées en Ukraine, au Mali, en Syrie ou ailleurs.
Au-dessus de la diagonale, dans le monde céleste, le visage d’Étienne rayonne de la gloire qu’il reçoit d’en haut, transfiguré au milieu de sa Passion, alors que son visage apparaît tuméfié par les premières pierres. Il contemple le Christ debout auprès du Père, et il lui est semblable : même posture debout (= ressuscité), même tunique rouge-sang qui souligne son association à la Passion du Christ, même lumière douce qui tranche avec l’agressivité des tons du dessous, mêmes couleurs pastel évoquant la paix après le déchaînement de la violence.
Fidèle à la vocation de son nom, Étienne reçoit de la main des anges sa couronne qui va l’associer à la royauté du Christ. Une ligne verticale joint la pierre du bas, le bras du bourreau, le visage d’Étienne et la couronne du martyre : l’injuste violence des hommes sera changée par Dieu en témoignage éclatant de son amour. C’est là ce qu’opère le martyre, le témoignage rendu au Christ jusqu’au don de soi.

 

Si Étienne est le premier des martyrs (protomartyr), c’est pour que chacun de nous puisse à son tour participer comme lui à la Passion du Christ, avec la force que donne sa Résurrection.
Méditons donc sur notre propre témoignage en relisant le cycle d’Étienne (Ac 6,1–8,4) ou en contemplant le tableau de Rubens : quel Étienne serai-je à mon tour ?

 


[1]. Rita CHARON, Narrative Medicine. Honoring the Stories of Illness, 2006.

[2]. Cf. La Médecine narrative. Une révolution pédagogique ?, sous la direction de François Goupy et Claire Le Jeunne, Med-Line Éditions, 2016.

[3]. Cf. https://www.prixm.org/articles/lapidation-etienne-bible-martyr-rubens

 

 

Lectures de la messe

Première lecture
« Voici que je contemple le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu » (Ac 7, 55-60)

Lecture du livre des Actes des Apôtres
En ces jours-là, Étienne était en face de ses accusateurs. Rempli de l’Esprit Saint, il fixait le ciel du regard : il vit la gloire de Dieu, et Jésus debout à la droite de Dieu. Il déclara : « Voici que je contemple les cieux ouverts et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu. » Alors ils poussèrent de grands cris et se bouchèrent les oreilles. Tous ensemble, ils se précipitèrent sur lui, l’entraînèrent hors de la ville et se mirent à le lapider. Les témoins avaient déposé leurs vêtements aux pieds d’un jeune homme appelé Saul. Étienne, pendant qu’on le lapidait, priait ainsi : « Seigneur Jésus, reçois mon esprit. » Puis, se mettant à genoux, il s’écria d’une voix forte : « Seigneur, ne leur compte pas ce péché. » Et, après cette parole, il s’endormit dans la mort.

Psaume
(Ps 96 (97), 1-2b, 6.7c, 9)

R/ Le Seigneur est roi, le Très-Haut sur toute la terre !
ou : Alléluia !
 (Ps 96, 1a.9a)

Le Seigneur est roi ! Exulte la terre !
Joie pour les îles sans nombre !
justice et droit sont l’appui de son trône.

Les cieux ont proclamé sa justice,
et tous les peuples ont vu sa gloire.

À genoux devant lui, tous les dieux !
Tu es, Seigneur, le Très-Haut sur toute la terre :

tu domines de haut tous les dieux.

Deuxième lecture
« Viens, Seigneur Jésus ! » (Ap 22, 12-14.16-17.20)

Lecture de l’Apocalypse de saint Jean
Moi, Jean, j’ai entendu une voix qui me disait : « Voici que je viens sans tarder, et j’apporte avec moi le salaire que je vais donner à chacun selon ce qu’il a fait. Moi, je suis l’alpha et l’oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin. Heureux ceux qui lavent leurs vêtements : ils auront droit d’accès à l’arbre de la vie et, par les portes, ils entreront dans la ville. Moi, Jésus, j’ai envoyé mon ange vous apporter ce témoignage au sujet des Églises. Moi, je suis le rejeton, le descendant de David, l’étoile resplendissante du matin. » L’Esprit et l’Épouse disent : « Viens ! » Celui qui entend, qu’il dise : « Viens ! » Celui qui a soif, qu’il vienne. Celui qui le désire, qu’il reçoive l’eau de la vie, gratuitement. Et celui qui donne ce témoignage déclare : « Oui, je viens sans tarder. » – Amen ! Viens, Seigneur Jésus !

Évangile

« Qu’ils deviennent parfaitement un » (Jn 17, 20-26)
Alléluia. Alléluia. 
Je ne vous laisserai pas orphelins, dit le Seigneur, je reviens vers vous, et votre cœur se réjouira. Alléluia. (cf. Jn 14, 18)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean
En ce temps-là, les yeux levés au ciel, Jésus priait ainsi : « Père saint, je ne prie pas seulement pour ceux qui sont là, mais encore pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi. Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé. Et moi, je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes UN : moi en eux, et toi en moi. Qu’ils deviennent ainsi parfaitement un, afin que le monde sache que tu m’as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé. Père, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi, et qu’ils contemplent ma gloire, celle que tu m’as donnée parce que tu m’as aimé avant la fondation du monde. Père juste, le monde ne t’a pas connu, mais moi je t’ai connu, et ceux-ci ont reconnu que tu m’as envoyé. Je leur ai fait connaître ton nom, et je le ferai connaître, pour que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux, et que moi aussi, je sois en eux. »

Patrick BRAUD

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22 mai 2022

Ascension : sur la terre comme au ciel

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Ascension : sur la terre comme au ciel

Homélie pour la fête de l’Ascension / Année C
26/05/2022

Cf. également :

Ascension : apprivoiser la disparition
Ascension : la joyeuse absence
Ascension : les pleins pouvoirs
Désormais notre chair se trouve au ciel !
Jésus : l’homme qui monte
Ascension : « Quid hoc ad aeternitatem ? »
Ascension : la joyeuse absence
Ascension : l’ascenseur christique
Une Ascension un peu taquine : le temps de l’autonomie
Les vases communicants de l’Ascension

Ton absence

La prolifération de l’irrationnel

Rapport d’activités 2018-2020 de la MIVILUDESLa crise du Covid a donné des ailes aux gourous de la santé et aux complotistes ! Dans son dernier rapport [1] (pour les années 2018–2020), la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) rapporte une hausse importante des signalements concernant des pratiques pseudo-médicales. Les pseudo-thérapeutes ont profité de la crise sanitaire pour alpaguer les foules, avec Internet comme vecteur idéal de diffusion de leurs pratiques. En toile de fond, des théories conspirationnistes acquièrent une audience de plus en plus importante. La multiplication de ces thèses exploite habilement l’inquiétude engendrée par les confinements successifs, et se nourrit de la défiance du grand public envers la science officielle, si peu pédagogue il est vrai !

Tracts (N°17) - Le Goût du vraiÉtienne Klein, philosophe des sciences (et centralien) de haute volée, a publié un ‘Tract’ : Le goût du vrai chez Gallimard pendant cette période pour alerter justement sur le déclin de la pensée rationnelle en France :
« La philosophie des Lumières défendait l’idée que la souveraineté d’un peuple libre se heurte à une limite, celle de la vérité, sur laquelle elle ne saurait avoir de prise : les « vérités scientifiques », en particulier, ne relèvent pas d’un vote. La crise sanitaire a toutefois montré avec éclat que nous n’avons guère retenu la leçon, révélant l’ambivalence de notre rapport à la science et le peu de crédit que nous accordons à la rationalité qu’il lui revient d’établir. Lorsque, d’un côté, l’inculture prend le pouvoir, que, de l’autre, l’argument d’autorité écrase tout sur son passage, lorsque la crédibilité de la recherche ploie sous la force de l’événement et de l’opinion, comment garder le goût du vrai – celui de découvrir, d’apprendre, de comprendre ? Quand prendrons-nous enfin sereinement acte de nos connaissances, ne serait-ce que pour mieux vivre dans cette nature dont rien d’absolu ne nous sépare ? » [2]

Nous préférons vanter des idées qui nous plaisent, plutôt que d’aimer celles qui sont justes. Le goût du vrai est peu à peu remplacé par la recherche de l’adhésion du plus grand nombre. Dans le domaine de la santé, cela engendre le complotisme antivax ; dans le domaine de l’information : des fake news ou de la propagande comme celle des Russes sur la guerre en Ukraine. Dans le domaine religieux, c’est l’affolement des croyances. Les gens sont prêts à croire à peu près n’importe quoi, du moment que cela leur fait du bien (croient-ils !). Les gourous se réclamant de Dieu pullulent, même au sein des congrégations religieuses respectées, comme l’ont tristement montré les affaires sur les frères Marie-Dominique et Thomas Philippe, ou sur Jean Vanier etc. Les théories les plus fumeuses se répandent, mélangeant allègrement le soi-disant surnaturel avec des médecines alternatives, des sagesses orientales détournées, ou même les ovnis et autres extraterrestres… Sur Internet, n’importe qui se prétend expert de n’importe quoi, et les gogos retwittent aussitôt sans réfléchir ni analyser, propageant ainsi les rumeurs les plus folles.

On voit par exemple de plus en plus de gens courir de sanctuaire en sanctuaire, pour chercher dans les apparitions mariales une réponse à leur inquiétude. Lourdes, Fatima, La Salette, Međugorje, Garabandal, Dozulé… : certains organisent des circuits comme des Tour operators, d’autres sont persuadés que les messages cachés, les secrets réservés aux voyants vont pouvoir sauver le monde, ou au moins leur petite existence.

C’est à tous ceux-là que les deux hommes vêtus de blanc (figure de style codée s’il en est) de l’Ascension répètent inlassablement : « pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Jésus, qui a été enlevé du milieu de vous, reviendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel » (Ac 1, 1-11). À force de regarder le nez en l’air pour essayer de voir l’invisible, votre pied va buter sur une pierre et vous faire tomber à la renverse ! Chercher le Christ dans les nuages, dans un ciel fantasmé, dans l’imaginaire de nos délires religieux est terriblement dangereux. Fixer le ciel ne sert à rien, sinon à nous distraire de l’essentiel. Mieux vaut comme les pèlerins d’Emmaüs se réjouir de l’absence du Christ, et aller rejoindre l’Église de Jérusalem dont ils s’éloignaient. Depuis l’Ascension, rester là le nez en l’air à fixer le ciel pour en attendre des miracles est une injure faite au Christ.

Ascension : sur la terre comme au ciel dans Communauté spirituelleSaint Jean de la Croix fustigeait ses contemporains lorsqu’ils demandaient toujours plus de miracles, comme autant de marmites de viande et de puits égyptiens :
Celui qui voudrait maintenant l’interroger, ou désirerait une vision ou une révélation, non seulement ferait une folie, mais ferait injure à Dieu, en ne jetant pas les yeux uniquement sur le Christ, sans chercher autre chose ou quelque nouveauté. Dieu pourrait en effet lui répondre de la sorte : ‘Si je t’ai déjà tout dit dans ma parole, qui est mon Fils, je n’ai maintenant plus rien à te révéler ou à te répondre qui soit plus que lui. Fixe ton regard uniquement sur lui ; c’est en lui que j’ai tout déposé, paroles et révélations ; en lui tu trouveras même plus que tu ne demandes et que tu ne désires. Tu me demandes des paroles, des révélations ou des visions, en un mot des choses particulières; mais si tu fixes les yeux sur lui, tu trouveras tout cela d’une façon complète, parce qu’il est toute ma parole, toute ma réponse, toute ma vision, toute ma révélation. Or, je te l’ai déjà dit, répondu, manifesté, révélé, quand je te l’ai donné pour frère, pour maître, pour compagnon, pour rançon, pour récompense. […] Mais maintenant si quelqu’un vient m’interroger comme on le faisait alors et me demande quelque vision ou quelque révélation, c’est en quelque sorte me demander encore le Christ ou me demander plus de foi que je n’en ai donné : de la sorte, il offenserait profondément mon Fils bien-aimé, parce que non seulement il montrerait par là qu’il n’a pas foi en lui, mais encore il l’obligerait une autre fois à s’incarner, à recommencer sa vie et à mourir. Vous ne trouverez rien de quoi me demander, ni de quoi satisfaire vos désirs de révélations et de visions. Regardez-y bien. Vous trouverez que j’ai fait et donné par lui beaucoup plus que ce que vous demandez’.
Jean de la Croix, La montée du Carmel, ch. XX

La course au surnaturel a quelquefois tellement éloigné les chrétiens de leur véritable responsabilité envers leurs frères que la religion en devenait l’opium du peuple. Au lieu de rencontrer le Christ et de le servir dans les personnes les plus pauvres, on lui offrait or et encens à l’autel pour mieux le piétiner à la sortie de l’église dans l’usine ou dans les guerres. C’est ainsi qu’aujourd’hui encore Kyrill, le patriarche de Moscou, revêt des chasubles d’or pour bénir la guerre de Poutine…

 

Lourdes, ou la lutte antidrogue

Lourdes. Les hospitaliers au service des pèlerins et des maladesCet opium-là, je sais que Lourdes n’en vend pas. Le message de Bernadette Soubirous est à la fois de venir en procession et que les malades soient au cœur de cette procession. Nulle autre ville au monde ne met ainsi les personnes handicapées au premier rang : tout y est conçu pour elles et à partir d’elles. Les hôtels, les accès, les transports, les sanctuaires leur sont tout entier dédiés. Ainsi, en mettant les malades au centre, Lourdes rend un culte véritable au Christ de l’Ascension. Celui qui resterait le nez en l’air à fixer la grotte en espérant un miracle s’entendrait vite dire par un brancardier de l’Hospitalité : ‘venez nous donner un coup de main. Il y a des malades à baigner, des repas à servir, des dortoirs à nettoyer, des frères et sœurs à écouter, parce que ces jours de pèlerinage sont les rares jours de fraternité de leur année en hôpital, en EHPAD ou seul chez eux’.

Si elle restait là à fixer le ciel pour attendre que Dieu intervienne directement, la foi chrétienne ne serait qu’une drogue de plus, une tentative d’évasion désespérée, détournant l’énergie des pauvres et assurant l’alibi des puissants pour que rien ne change ici-bas.

La guerre atroce en Ukraine menée avec la bénédiction du patriarche Kirill de Moscou devrait nous avertir : à quoi sert une belle liturgie orthodoxe nous faisant entrer dans la sphère céleste par les chants superbes, les habits dorés, la fumée des encens et des cierges, la beauté des icônes… si à la sortie ceux qui ont communié vont massacrer des enfants, exécuter des vieillards et violer des femmes à Boutcha, Marioupol, Kramatorsk ou Odessa ?
Rappelez-vous saint Paul, pour qui le véritable culte eucharistique est l’offrande de soi et non l’évasion au ciel : « Je vous exhorte donc, frères, par la miséricorde de Dieu, à offrir vos personnes en hostie vivante, sainte, agréable à Dieu : c’est là le culte spirituel que vous avez à rendre » (Rm 12,1). Imaginez que vous vous approchiez du Christ pour l’embrasser au visage alors que vous lui écrasez les pieds avec de gros souliers ferrés. Eh bien – s’écriait saint Augustin – « le Christ criera plus fort pour ses pieds qu’on écrase que pour sa tête qu’on honore » !
Et le cardinal Ratzinger (futur Benoît XVI) écrivait autrefois : « seul célèbre vraiment l’Eucharistie celui qui l’achève dans le service divin de tous les jours qu’est l’amour fraternel » [3].

Ceux qui reviennent de Lourdes n’ont pas la tête dans les nuages, mais le cœur sur la main. S’il y a 70 miracles reconnus par l’Église à Lourdes, ce n’est pas pour arrêter tous les traitements médicaux et remettre sa santé à la prière ! C’est pour avoir confiance dans la puissance de la foi qui transforme l’être humain tout entier. En plus, nul théologien un peu sérieux ne prétendra que le miracle relève de l’irrationnel, mais plutôt d’une rationalité plus profonde, plus large, plus intégrale que l’ordinaire.

L’Ascension nous détourne de l’irrationnel comme les hommes en blanc détournent le regard des apôtres sidérés vers la communauté qui les attend à Jérusalem, et les païens au-delà d’Israël.

 

Sur la terre comme au ciel

Terre Avec Un Ciel Bleu. Journée Mondiale De L'environnement Photo PremiumFinalement, la seule utilité de lever le nez en l’air serait de contempler - de l’intérieur de l’amour trinitaire pourrait-on dire - le Christ assis à la droite du Père afin de reproduire ici-bas les relations de communion qui unisse les trois Personnes divines. Depuis l’Ascension, les cieux sont ouverts, non pour y monter de façon imaginaire mais au contraire pour en laisser descendre l’Esprit de Pentecôte qui renouvelle toutes choses et tout être vivant, en nous accoutumant à vivre comme Dieu vit.

Notre vraie soif de surnaturel est celle qu’exprime le Notre Père : « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel ». « Nous ajoutons : Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel, non pas pour que Dieu fasse ce qu’il veut, mais pour que nous puissions faire ce que Dieu veut » (Saint Cyprien, Commentaire sur la prière du Seigneur).

Un théologien protestant, John Ortberg, interprète cette phrase comme suit : « Beaucoup de gens pensent que notre travail est de s’occuper de ma destination après la mort, puis de marcher sur l’eau jusqu’à ce que nous soyons tous éjectés et que Dieu revienne et incendie cet endroit. Mais Jésus ne l’a jamais dit à personne – ni à ses disciples, ni à nous – pour prier : « Sortez-moi d’ici pour que je puisse y aller. » Sa prière était: « Faites venir ici ».   »Faites en sorte que les choses fonctionnent comme elles le font là-haut ». La demande « que ta volonté soit faite » est l’invitation de Dieu à se joindre à lui pour faire les choses ici-bas comme elles sont là-haut » [4].

376_big Ascension dans Communauté spirituelleContempler Dieu, c’est s’engager à construire avec lui un monde trinitaire. Que dirait-on d’un architecte qui s’extasierait sur la beauté des plans d’un monument et ne se lancerait pas dans sa construction ? Un tel savant n’aurait d’architecte que le titre…

 

L’Ascension nourrit on nous le goût du vrai, pas de l’irrationnel.
L’Ascension nous désintoxique de toute drogue d’évasion soi-disant spirituelle.
L’Ascension convertit notre soif de surnaturel en une quête du divin caché en chacun.
L’Ascension nous engage à faire la volonté de Dieu sur la terre comme elle est faite « au ciel ».
Pour cela, il nous faut l’Esprit du Christ, sans lequel le ciel est vide et la terre inhumaine.
Vivement Pentecôte en moi, en toi, en nous !

 


[2]. Etienne Klein, Le Goût du vrai, Tract n° 17, Gallimard, 2020.

[3]. Joseph Ratzinger, Le nouveau peuple de Dieu, Paris, 1971, p. 17.

[4]. John Ortberg, Dieu est plus proche que vous ne le pensez, Zondervan, 2005, p. 176.

 

 

Lectures de la messe

1ère lecture : L’Ascension du Seigneur (Ac 1, 1-11)
Commencement du livre des Actes des Apôtres
Mon cher Théophile, dans mon premier livre j’ai parlé de tout ce que Jésus a fait et enseigné depuis le commencement, jusqu’au jour où il fut enlevé au ciel après avoir, dans l’Esprit Saint, donné ses instructions aux Apôtres qu’il avait choisis. C’est à eux qu’il s’était montré vivant après sa Passion : il leur en avait donné bien des preuves, puisque, pendant quarante jours, il leur était apparu, et leur avait parlé du royaume de Dieu. Au cours d’un repas qu’il prenait avec eux, il leur donna l’ordre de ne pas quitter Jérusalem, mais d’y attendre ce que le Père avait promis. Il leur disait : « C’est la promesse que vous avez entendue de ma bouche. Jean a baptisé avec de l’eau ; mais vous, c’est dans l’Esprit Saint que vous serez baptisés d’ici quelques jours. » Réunis autour de lui, les Apôtres lui demandaient : « Seigneur, est-ce maintenant que tu vas rétablir la royauté en Israël ? » Jésus leur répondit : « Il ne vous appartient pas de connaître les délais et les dates que le Père a fixés dans sa liberté souveraine. Mais vous allez recevoir une force, celle du Saint-Esprit, qui viendra sur vous. Alors vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. » Après ces paroles, ils le virent s’élever et disparaître à leurs yeux dans une nuée. Et comme ils fixaient encore le ciel où Jésus s’en allait, voici que deux hommes en vêtements blancs se tenaient devant eux et disaient : « Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Jésus, qui a été enlevé du milieu de vous, reviendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel. »

Psaume : Ps 46, 2-3, 6-7, 8-9
R/ Dieu monte parmi l’acclamation, le Seigneur aux éclats du cor.

Tous les peuples, battez des mains,
acclamez Dieu par vos cris de joie !
Car le Seigneur est le Très-Haut, le redoutable,
le grand roi sur toute la terre.

Dieu s’élève parmi les ovations,
le Seigneur, aux éclats du cor.
Sonnez pour notre Dieu, sonnez,
sonnez pour notre roi, sonnez !

Car Dieu est le roi de la terre :
que vos musiques l’annoncent !
Il règne, Dieu, sur les païens,
Dieu est assis sur son trône sacré.

2ème lecture : Domination universelle du Christ assis à la droite du Père (Ep 1, 17-23)
Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Éphésiens
Frères, que le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père dans sa gloire, vous donne un esprit de sagesse pour le découvrir et le connaître vraiment.
Qu’il ouvre votre coeur à sa lumière, pour vous faire comprendre l’espérance que donne son appel, la gloire sans prix de l’héritage que vous partagez avec les fidèles, et la puissance infinie qu’il déploie pour nous, les croyants. C’est la force même, le pouvoir, la vigueur, qu’il a mis en oeuvre dans le Christ quand il l’a ressuscité d’entre les morts et qu’il l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux.
Il l’a établi au-dessus de toutes les puissances et de tous les êtres qui nous dominent, quel que soit leur nom, aussi bien dans le monde présent que dans le monde à venir.
Il lui a tout soumis et, le plaçant plus haut que tout, il a fait de lui la tête de l’Église qui est son corps, et l’Église est l’accomplissement total du Christ, lui que Dieu comble totalement de sa plénitude.

Evangile : « Allez vers toutes les nations…je suis avec vous »(Mt 28, 16-20)
Acclamation : Alléluia. Alléluia. Le Seigneur s’élève parmi l’acclamation, il s’élève au plus haut des cieux. Alléluia. (cf. Ps 46, 6.10)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
Les onze disciples s’en allèrent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre.
Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais certains eurent des doutes.
Jésus s’approcha d’eux et leur adressa ces paroles : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre.
Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ; et apprenez-leur à garder tous les commandements que je vous ai donnés. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »
Patrick BRAUD

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15 mai 2022

Se réjouir d’un départ

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Se réjouir d’un départ

Homélie du 6° Dimanche de Pâques / Année C
22/05/2022

Cf. également :

L’Esprit saint et nous-mêmes avons décidé que…
Le Paraclet, l’Église, Mohammed et nous
La gestion des conflits
L’Esprit et la mémoire
Dieu nous donne une ville
L’Esprit nous précède
Lier Pâques et paix
La Trinité en actes : le geste de paix
La paix soit avec vous
Les chrétiens sont tous des demeurés
Ton absence…
Ascension : la joyeuse absence

La politique de la chaise vide

En entendant cette expression, les plus anciens d’entre nous penseront immédiatement à la décision du Général De Gaulle de ne plus participer aux réunions du Conseil des ministres de la CEE, pour protester contre la modification du principe de l’unanimité dans la prise de décision au profit de la règle majoritaire. Cette politique française de la chaise vide bloqua de facto toute prise de décision, et le bras de fer dura du 30 juin 1965 au 30 janvier 1966. Le compromis trouvé à Luxembourg en janvier 1966 mit fin à la crise institutionnelle en affirmant la nécessité d’une prise de décision à l’unanimité pour les votes importants.
Comme quoi s’absenter est quelquefois le meilleur moyen de faire bouger les lignes, et de faire évoluer l’histoire !
La génération des années Mitterrand associera plutôt cette expression à la séquence devenue culte où l’on entend l’ex-futur président Giscard d’Estaing battu aux présidentielles de 1981 prononcer un sépulcral « au-revoir » en laissant sa chaise vide après un long silence devant la caméra à la fin de son allocution d’adieu…
Comme quoi laisser sa chaise vide, c’est reconnaître – même forcé ! – qu’il faut partir…

Icône de la PentecôtePlus fondamentalement, il y a dans l’Église orthodoxe une autre symbolique de la chaise vide. Regardez l’icône de la Pentecôte : les apôtres sont réunis autour de la table pour recevoir l’Esprit, et au milieu d’eux, en haut de la couronne qu’ils forment, il y a un vide. Vide central volontaire, qui représente le Christ parti vers son Père. C’est sa place - au sommet de l’Église - et elle doit rester vide. Pour ne jamais mettre quelqu’un à sa place – fut-ce un patriarche, un pape ou un saint – les orthodoxes laissent vide le siège principal dans une cathédrale ou une basilique. On appelle cela l’étimasie, du grec ἑτοιμασία = etoimasia, préparer, selon les termes de Jésus dans l’Évangile de Jean : « Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures ; sinon, vous aurais-je dit : ‘Je pars vous préparer une place’ ? Quand je serai parti vous préparer une place, je reviendrai et je vous emmènerai auprès de moi, afin que là où je suis, vous soyez, vous aussi » (Jn 14,2-3). La chaise vide nous rappelle que le Christ est parti nous préparer une place auprès de son Père, et que personne ne doit prendre sa place d’ici là.

Cette disposition rituelle liturgique est majeure : le Christ seul est la tête du Corps qu’est l’Église. Comme il n’est plus là devant nos yeux, sa place doit rester vide. Comme il s’est absenté de l’histoire depuis l’Ascension, son absence ne doit pas être remplacée, sinon l’idolâtrie nous guette. Souvenons-nous qu’au désert, lorsque Moïse s’est absenté 40 jours au mont Sinaï, le peuple ne supportant plus cette attente avait remplacé YHWH par un veau d’or fabriqué de leurs bijoux et richesses (Ex 32). Ne pas laisser vide la place du Christ, c’est préparer la voie à tous les veaux d’or modernes !
Et comme le Christ doit revenir à la fin des temps, qui prendrait le risque d’occuper son trône en attendant ? qui oserait usurper sa place ?

Dans l’Évangile de ce dimanche (Jn 14,23-29), le Ressuscité rappelle à ses disciples qu’il va bientôt s’en aller : « vous m’avez entendu dire : ‘je pars vers le Père’ » ; « je m’en vais… ». Notre première ascèse pascale est de regarder cette absence en face, de ne pas la masquer par des petits dieux dérisoires, comme on dissimule un trou dans le mur avec un poster recouvrant le vide. Or il est si facile de boucher les vides de notre existence ! Certains le font même avec des objets très religieux, des pratiques très spirituelles, des savoir-faire remarquables, d’autant plus dangereux qu’ils sont excellents, puisqu’ils occultent alors la béance laissée par le Christ de l’Ascension.

 

Partir c’est mourir un peu

Se réjouir d’un départ dans Communauté spirituelle ChatPeurMortS’en aller, partir : en français, c’est une façon pudique de parler de la mort. ‘Il s’en est allé…’ Mais il y a quelque chose de vrai dans ce langage : nos départ ont souvent la couleur du deuil, nos deuils ne sont en fait que de nouveaux départs. Jésus nous dit aujourd’hui qu’il part (πορεύομαι) vers le Père (Jn 14,2). C’est le même verbe que Jean emploie lorsque Jésus se rend au Mont des oliviers (Jn 8,1), ou montre le bon Pasteur sortant de l’enclos devant ses brebis (10,4), ou annonce que son départ est la condition de l’envoi de l’Esprit (16,7). C’est ce verbe encore qui montre Jésus allant réveiller Lazare, son ami mort (11,11). Les juifs hostiles à Jésus vont même jusqu’à imaginer qu’il pourrait quitter Jérusalem et partir pour la Diaspora dispersée chez les Grecs : « Les Juifs se dirent alors entre eux : où va-t-il bien partir (πορεύομαι) pour que nous ne le trouvions pas ? Va-t-il partir (πορεύομαι) chez les nôtres dispersés dans le monde grec, afin d’instruire les Grecs ? » (Jn 7,35). Sans le savoir (mais Jean lui le sait !), ils lient déjà départ et mission, absence et universalité, Ascension et catholicité de l’Église (« élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes » Jn 12,32). Avec son humour habituel, Jean dénonce ainsi leur suffisance, puisqu’ils croient pouvoir mettre la main sur Jésus à leur guise !

Tous ces départs de Jésus nous mettent la puce à l’oreille : avec lui, il doit être possible de vivre nos propres départs autrement ! Nous aussi nous allons vers le Père. Nous aussi nous ne cessons de rencontrer et de quitter, d’être intensément présent puis de devoir nous absenter, de partir devant pour que d’autres puissent nous suivre, d’aller réveiller ce qui est mort ailleurs en acceptant de quitter notre zone de confort, d’anticiper pour préparer une place à nos enfants, notre conjoint etc.
Tous ces départs ont la saveur d’une Ascension sans cesse réactualisée ! Impossible de vivre sans quitter, impossible de grandir sans se séparer, impossible d’aimer sans s’absenter. Qui n’a pas connu l’absence ne sait rien de l’amour.

Plutôt que de subir ces départs successifs et de s’en désoler, nous pouvons les transformer selon l’Esprit du Christ en autant de preuves d’amour : partir pour préparer une place à ceux qui nous sont chers, partir en laissant vide notre place, car il ne nous appartient pas de distribuer les rôles de ceux qui restent.
L’absence est à l’amour ce qu’est le vent au feu : il éteint le petit, il allume le grand.
En famille c’est tout un art de savoir s’absenter. En entreprise – surtout une entreprise familiale – c’est encore plus difficile. Entre amis, l’éloignement et les années font leur œuvre, et nous avons du mal à ritualiser ces moments où il faut nous en aller en clôturant le lien. Dans une équipe de partage entre chrétiens, assumer et célébrer la fin de l’équipe est une forme de sagesse peu courante.

Laisserons-nous le départ du Christ vers son Père inspirer nos propres départs ?

 

Se réjouir pour ceux qui partent

9782330124328 absence dans Communauté spirituelleJésus est très clair : « Vous avez entendu ce que je vous ai dit : Je m’en vais, et je reviens vers vous. Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie (ἐχάρητε, du verbe χαίρω = chairó, se réjouir) puisque je pars vers le Père, car le Père est plus grand que moi » (Jn 14,28). C’est le même verbe que Luc emploie pour inviter Marie à se réjouir de la présence de Dieu en elle : « Réjouis-toi (chairō) Marie… » (Lc 1,28). Comme quoi se réjouir de la présence et de l’absence ne sont pas incompatibles, au contraire !
Si les disciples aiment le Christ, ils savent que son être est de ne faire qu’un avec celui qu’il appelle son Père. Toute forme d’éloignement – même l’Incarnation ! – est pour lui une souffrance, une déchirure intime. Aller vers le Père est synonyme pour Jésus d’aller vers soi (souvenez-vous de l’appel lancé à Abraham : « leikh lekha » = « va vers toi ! »). Qui ne se réjouirait de voir son ami réaliser sa vocation en plénitude ?
Bien évidemment, nous ne parlons pas ici des départs inhumains imposés par la guerre aux réfugiés, par la famine aux affamés, par la détresse à ceux qui ont tout perdu etc.
Dans l’Évangile de Jean, le verbe χαίρω (chairó, se réjouir) désigne la joie de l’ami de l’époux qui entend sa voix et conduit l’époux à l’épouse pour qu’ils soient ensemble (Jn 3,29). Tel Jean-Baptiste présentant l’époux Jésus à son peuple (féminin en hébreu) au Jourdain, les disciples éprouvent une grande joie en entendant le Ressuscité annoncer qu’il les quitte pour la communion d’amour trinitaire. Se réjouir du bonheur de l’autre, sans aucun regret, sans chercher à le posséder ni le retenir, est au cœur de la dépossession de l’amitié véritable.
De manière ordinaire, que dirait-on de parents qui maintiendraient leurs enfants trop longtemps sur leur coupe ? De managers qui ne feraient pas évoluer leur équipe, jusqu’à ce qu’ils volent de leurs propres ailes ? d’associations ou d’Églises dont on ne pourrait pas partir tellement la culpabilisation y serait forte ?
C’est la trace de la convoitise que de ne pas se réjouir du départ de l’autre vers son accomplissement. C’est vouloir le posséder, mettre la main sur lui, au sens le plus malsain du terme : ne pas être heureux qu’il soit heureux, loin de moi s’il le faut.

Le Christ de l’Ascension nous aide à nous réjouir pour ceux qui partent.

 

Se réjouir pour ceux qui restent

41VZeDij85L._SY291_BO1,204,203,200_QL40_ML2_ AscensionDans notre chapitre 14 de ce dimanche, Jean associe également le départ du Ressuscité à deux conséquences positives pour ceux qui restent :
– une place leur est préparée auprès du Père
– l’Esprit va leur être envoyé pour se souvenir, être conduits vers la vérité tout entière, et tenir bon jusqu’à la fin.
Double effet Kiss Cool de l’absence Christ en quelque sorte !

Il y a donc des absences qui bénéficient à ceux qui restent : « il est bon pour vous que je m’en aille » (Jn 16,7). De façon prosaïque, bien des dirigeants d’entreprises devraient dire cela ! Ou même des parents, car vivre dans l’ombre des générations précédentes ne doit durer qu’un temps. Des hommes politiques devraient aussi avoir cette humilité plutôt que de téter quelques décennies de trop les hochets du pouvoir…

Lorsque quelqu’un part, on peut donc se réjouir pour ceux qui restent. Pas toujours, car certains nous laissent vraiment orphelins. Mais lorsqu’ils ont su préparer leur départ, leur absence ouvre une nouvelle période pleine de nouvelles opportunités.

En Afrique, lorsqu’un vieux meurt, on fait la fête, on danse et on festoie pendant plusieurs jours, on porte son cercueil en dansant jusqu’au cimetière, on rassemble ceux qui restent pour qu’ils mesurent ce qu’ils ont reçu du défunt et continuent son aventure familiale et villageoise. En France, j’ai été maintes fois témoin du travail de mémoire que font les familles préparant des obsèques, avec des rires, des anecdotes, des confidences, une étonnante liberté de critiquer et remercier le défunt, et finalement une forme de paix qui s’installe à travers tout cela. La célébration vient alors comme un point d’orgue : mesurer combien un être cher nous manque, et éprouver le désir de vivre ensemble en faisant fructifier le don reçu de lui.

« Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez parce que je pars vers le Père vous préparer une place ».
Réjouissons-nous de l’absence du Ressuscité qui n’est plus devant nos yeux !
Réjouissons-nous de la place qui nous est préparée auprès du Père.
Réjouissons-nous de l’Esprit de Dieu envoyé par le Christ pour nous inspirer jour après jour.
Réjouissons-nous pour ceux qui partent, et réjouissons-nous pour ceux qui restent…

Et laissons vide la place du Christ au cœur de notre existence.

 

 

Lectures de la messe

Première lecture
« L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas faire peser sur vous d’autres obligations que celles-ci qui s’imposent » (Ac 15, 1-2.22-29)

Lecture du livre des Actes des Apôtres
En ces jours-là, des gens, venus de Judée à Antioche, enseignaient les frères en disant : « Si vous n’acceptez pas la circoncision selon la coutume qui vient de Moïse, vous ne pouvez pas être sauvés. » Cela provoqua un affrontement ainsi qu’une vive discussion engagée par Paul et Barnabé contre ces gens-là. Alors on décida que Paul et Barnabé, avec quelques autres frères, monteraient à Jérusalem auprès des Apôtres et des Anciens pour discuter de cette question. Les Apôtres et les Anciens décidèrent avec toute l’Église de choisir parmi eux des hommes qu’ils enverraient à Antioche avec Paul et Barnabé. C’étaient des hommes qui avaient de l’autorité parmi les frères : Jude, appelé aussi Barsabbas, et Silas. Voici ce qu’ils écrivirent de leur main : « Les Apôtres et les Anciens, vos frères, aux frères issus des nations, qui résident à Antioche, en Syrie et en Cilicie, salut ! Attendu que certains des nôtres, comme nous l’avons appris, sont allés, sans aucun mandat de notre part, tenir des propos qui ont jeté chez vous le trouble et le désarroi, nous avons pris la décision, à l’unanimité, de choisir des hommes que nous envoyons chez vous, avec nos frères bien-aimés Barnabé et Paul, eux qui ont fait don de leur vie pour le nom de notre Seigneur Jésus Christ. Nous vous envoyons donc Jude et Silas, qui vous confirmeront de vive voix ce qui suit : L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas faire peser sur vous d’autres obligations que celles-ci, qui s’imposent : vous abstenir des viandes offertes en sacrifice aux idoles, du sang, des viandes non saignées et des unions illégitimes. Vous agirez bien, si vous vous gardez de tout cela. Bon courage ! »

Psaume
(Ps 66 (67), 2-3, 5, 7-8)
R/ Que les peuples, Dieu, te rendent grâce ; qu’ils te rendent grâce tous ensemble !
ou : Alléluia.
 (Ps 66, 4)

Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse,
que son visage s’illumine pour nous ;
et ton chemin sera connu sur la terre,
ton salut, parmi toutes les nations.

Que les nations chantent leur joie,
car tu gouvernes le monde avec justice ;
tu gouvernes les peuples avec droiture,
sur la terre, tu conduis les nations.

La terre a donné son fruit ;
Dieu, notre Dieu, nous bénit.
Que Dieu nous bénisse,
et que la terre tout entière l’adore !

Deuxième lecture
« Il me montra la Ville sainte qui descendait du ciel » (Ap 21, 10-14.22-23)

Lecture de l’Apocalypse de saint Jean
Moi, Jean, j’ai vu un ange. En esprit, il m’emporta sur une grande et haute montagne ; il me montra la Ville sainte, Jérusalem, qui descendait du ciel, d’auprès de Dieu : elle avait en elle la gloire de Dieu ; son éclat était celui d’une pierre très précieuse, comme le jaspe cristallin. Elle avait une grande et haute muraille, avec douze portes et, sur ces portes, douze anges ; des noms y étaient inscrits : ceux des douze tribus des fils d’Israël. Il y avait trois portes à l’orient, trois au nord, trois au midi, et trois à l’occident. La muraille de la ville reposait sur douze fondations portant les douze noms des douze Apôtres de l’Agneau. Dans la ville, je n’ai pas vu de sanctuaire, car son sanctuaire, c’est le Seigneur Dieu, Souverain de l’univers, et l’Agneau. La ville n’a pas besoin du soleil ni de la lune pour l’éclairer, car la gloire de Dieu l’illumine : son luminaire, c’est l’Agneau.

Évangile
« L’Esprit Saint vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit » (Jn 14, 23-29)
Alléluia. Alléluia. Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, dit le Seigneur ; mon Père l’aimera, et nous viendrons vers lui. Alléluia. (Jn 14, 23)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons vers lui et, chez lui, nous nous ferons une demeure. Celui qui ne m’aime pas ne garde pas mes paroles. Or, la parole que vous entendez n’est pas de moi : elle est du Père, qui m’a envoyé. Je vous parle ainsi, tant que je demeure avec vous ; mais le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit.
Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne. Que votre cœur ne soit pas bouleversé ni effrayé. Vous avez entendu ce que je vous ai dit : Je m’en vais, et je reviens vers vous. Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie puisque je pars vers le Père, car le Père est plus grand que moi. Je vous ai dit ces choses maintenant, avant qu’elles n’arrivent ; ainsi, lorsqu’elles arriveront, vous croirez. »
 Patrick BRAUD

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