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17 mai 2020

Ascension : les pleins pouvoirs

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 30 min

Ascension : les pleins pouvoirs

Homélie de l’Ascension / Année A
Jeudi 21/05/2020

Cf. également :

Désormais notre chair se trouve au ciel !
Jésus : l’homme qui monte
Ascension : « Quid hoc ad aeternitatem ? »
Ascension : la joyeuse absence
Ascension : l’ascenseur christique
Une Ascension un peu taquine : le temps de l’autonomie
Les vases communicants de l’Ascension

Faut-il avoir peur du pouvoir ?

Affiche Les Pleins PouvoirsQuelquefois on a l’impression que les chrétiens sont mal à l’aise avec ce mot et ce qu’il représente. Pour rester gentil avec tout le monde, il vaudrait mieux – dit-on – renoncer au pouvoir, ne se consacrer qu’au service, et se méfier de toutes les sphères du pouvoir actuel. D’ailleurs, Dieu ne renverse-t-il pas les puissants de leur trône, comme le chante Marie dans son Magnificat ?

Alors, plutôt que d’avoir les mains sales, les chrétiens seraient invités à se replier sur l’humanitaire ou le social, laissant la politique, le médiatique et l’économique aux Machiavels de leur époque.

Pourtant, quand on relit les Évangiles, on s’aperçoit que ni Jésus ni ses disciples n’ont peur de ce mot : le pouvoir (en grec exousia). Notre fête de l’Ascension lui accorde une grande importance : « Tout pouvoir m’a été donné, au ciel et sur la terre ». (Mt 28, 19). On dirait bien qu’un des buts de l’Ascension, c’est que le Christ reçoive enfin les « pleins pouvoirs », au ciel et sur la terre !

La 2ème lecture insiste : Dieu a fait asseoir le Christ à sa droite pour qu’il soit au-dessus de ceux qui nous dominent, pour que tout lui soit soumis. « C’est la force même, le pouvoir, la vigueur, qu’il a mis en œuvre dans le Christ quand il l’a ressuscité d’entre les morts et qu’il l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux. Il l’a établi au-dessus de toutes les puissances et de tous les êtres qui nous dominent, quel que soit leur nom, aussi bien dans le monde présent que dans le monde à venir. Il lui a tout soumis et, le plaçant plus haut que tout… »  (Ep 1, 17-23).

On pense aux mosaïques des coupoles byzantines, qui étalent le visage du Christ ‘Pantocrator’ = ‘Tout-Puissant’ au-dessus de la tête de la foule rassemblée dans l’église.

Pourquoi faudrait-il alors avoir peur du pouvoir ? Surtout si c’est celui du Christ ressuscité, assis à la droite de Dieu. Car c’est essentiellement un pouvoir sur le mal, sur la mort, un pouvoir pour la vie. C’est ce pouvoir et cette autorité (c’est le même mot en grec) que Jésus a manifesté tout au long de sa mission historique.

Christ Pantocrator mosaïque à l'intérieur de la cathédrale de Monreale près de Palerme, Sicile, Italie Banque d'images - 87618564

C’est le pouvoir de pardonner les péchés (cf. le paralytique Mt 9,6), le pouvoir de discerner et de juger (Jn 5, 27), le pouvoir de guérir (cf. les miracles), le pouvoir de donner sa vie par amour (et c’est sans doute là le pouvoir le plus évangélique cf. Jn 10,18)…

Ce pouvoir s’oppose à celui qui veut détruire l’homme : la puissance de Satan, qui peut jeter dans la géhenne (Lc 12,5), faire régner les ténèbres (Lc 22,53) et finalement ôter la vie… Satan offre son pouvoir à Jésus lors des tentations au désert, mais déjà Jésus se montre victorieux du mal en refusant cette puissance-là, et en choisissant l’autre, celle de son Père, la puissance de la Parole de Dieu.

La victoire du Christ est aujourd’hui totale dans son Ascension auprès du Père : il est « Seigneur », « Pantocrator », « élevé au-dessus de tout » (Ph 2, 6-11), Seigneur de ma vie (Rm 10, 9-10), Seigneur de l’Église et finalement de l’univers entier.

Élevé au plus haut des cieux, le Christ ressuscité donne à son Église de participer à « ses » pleins pouvoirs. Il nous confie son pouvoir de pardonner, de libérer, de chasser les démons, de guérir, de donner la vie, jusqu’au pouvoir de lier et de lier (confié à l’Église collectivement Mt 18,18 et à Pierre personnellement Mt 16,19).

Si l’Église était impuissante à lutter contre le mal, à quoi servirait-elle ? Être sans pouvoir est le malheur des esclaves, être impuissant est le drame des stériles. Or notre Église est libre et elle est féconde, grâce au pouvoir reçu du Christ.

Voilà donc de quoi ne plus avoir peur du pouvoir humain. Voilà de quoi évangéliser l’exercice du pouvoir qui est le nôtre. Comment ?

Voici quelques pistes pour réfléchir à l’évangélisation du pouvoir en nous et autour de nous.

 

1/ D’abord reconnaître humblement la part de pouvoir qui est la mienne.

Personne n’est si pauvre qu’il n’ait aucun pouvoir. Contempler le Christ assis à la droite du Père peut nous aider à ne pas avoir peur du pouvoir que l’on exerce. Il s’agit de prendre conscience des pouvoirs qui sont les miens : famille, quartier, immeuble, travail, vie associative, Église… et d’y faire jouer des degrés de liberté, des marges de manœuvre, des alternatives possibles. L’Évangile demande de ne pas enfouir nos talents, mais au contraire de les exploiter au service des autres.

Quelle est ma part de pouvoir à exercer ?

 

2/ Ensuite, il s’agit de ne pas idolâtrer le pouvoir.

Achille Talon - Tome 6 - Achille Talon au pouvoir par [Greg]Le pouvoir est bon s’il n’est pas une fin en soi, un petit dieu à la place du seul vrai Dieu. Résister à la tentation de l’idolâtrie du pouvoir, comme Jésus au désert (Lc 4, 5-9) est la condition de notre liberté. Cela ne veut pas dire renoncer au pouvoir, mais l’orienter vers autre chose.

Quand le pouvoir risque-t-il de devenir une idole pour moi ?

 

3/ D’où la 3ème piste : orienter le pouvoir vers le service le plus désintéressé possible de nos frères et particulièrement des plus petits.

L’exercice païen du pouvoir conduit à dominer en maître ; l’exercice évangélique de ce même pouvoir conduit servir la croissance de nos frères, à l’image du Christ lavant les pieds de ses amis (Mt 20, 27-28).

Quelle sont mes occasions d’exercer du pouvoir au service des autres ?

 

4/ Du coup, on s’apercevra très vite qu’il y a un prix à payer pour convertir l’exercice du pouvoir dans l’Esprit du Christ. Le prix à payer, c’est d’abord (paradoxalement !) la gratuité, le désintéressement et donc une carrière personnelle souvent inattendue. Plus encore, le prix du pouvoir évangélique, c’est la mort à soi-même.

À la mère des fils de Zébédée qui demande des postes de ministres pour ses enfants, Jésus répond qu’un tel poste a un prix : la coupe de la Passion, le baptême de la mort – résurrection (Mt 20, 20-29). Au prix de ce détachement intérieur, qui va jusqu’à livrer sa vie, le pouvoir évangélique cherche donc à allier la compétence la plus grande possible au service le plus désintéressé.

Quels risques devrais-je assumer pour que mes décisions soient plus courageuses ?

 

Prendre conscience du pouvoir qui est nôtre, ne pas l’idolâtrer, l’orienter vers le service, le passer au filtre de la mort à soi-même… L’Ascension du Christ ordonne notre légitime quête de pouvoir vers son pouvoir à lui : dominer le mal, vaincre la mort, faire triompher l’amour de Dieu.

Qu’à cela l’Esprit du Christ nous aide en cette eucharistie !

 

 

 

LECTURES DE LA MESSE

PREMIÈRE LECTURE

« Tandis que les Apotres le regardaient, il s’éleva » (Ac 1, 1-11)

Lecture du livre des Actes des Apôtres

Cher Théophile, dans mon premier livre j’ai parlé de tout ce que Jésus a fait et enseigné depuis le moment où il commença, jusqu’au jour où il fut enlevé au ciel, après avoir, par l’Esprit Saint, donné ses instructions aux Apôtres qu’il avait choisis. C’est à eux qu’il s’est présenté vivant après sa Passion ; il leur en a donné bien des preuves, puisque, pendant quarante jours, il leur est apparu et leur a parlé du royaume de Dieu.
 Au cours d’un repas qu’il prenait avec eux, il leur donna l’ordre de ne pas quitter Jérusalem, mais d’y attendre que s’accomplisse la promesse du Père. Il déclara : « Cette promesse, vous l’avez entendue de ma bouche : alors que Jean a baptisé avec l’eau, vous, c’est dans l’Esprit Saint que vous serez baptisés d’ici peu de jours. » Ainsi réunis, les Apôtres l’interrogeaient : « Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le royaume pour Israël ? » Jésus leur répondit : « Il ne vous appartient pas de connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité. Mais vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. »
Après ces paroles, tandis que les Apôtres le regardaient, il s’éleva, et une nuée vint le soustraire à leurs yeux. Et comme ils fixaient encore le ciel où Jésus s’en allait, voici que, devant eux, se tenaient deux hommes en vêtements blancs, qui leur dirent : « Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Ce Jésus qui a été enlevé au ciel d’auprès de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel. »

 

PSAUME

(Ps 46 (47), 2-3, 6-7, 8-9)
R/ Dieu s’élève parmi les ovations, le Seigneur, aux éclats du cor.
ou : Alléluia ! (Ps 46, 6)

Tous les peuples, battez des mains,
acclamez Dieu par vos cris de joie !
Car le Seigneur est le Très-Haut, le redoutable,
le grand roi sur toute la terre.

Dieu s’élève parmi les ovations,
le Seigneur, aux éclats du cor.
Sonnez pour notre Dieu, sonnez,
sonnez pour notre roi, sonnez !

Car Dieu est le roi de la terre :
que vos musiques l’annoncent !
Il règne, Dieu, sur les païens,
Dieu est assis sur son trône sacré.

 

DEUXIÈME LECTURE

« Dieu l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux » (Ep 1, 17-23)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Éphésiens

Frères, que le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père dans sa gloire, vous donne un esprit de sagesse qui vous le révèle et vous le fasse vraiment connaître. Qu’il ouvre à sa lumière les yeux de votre cœur, pour que vous sachiez quelle espérance vous ouvre son appel, la gloire sans prix de l’héritage que vous partagez avec les fidèles, et quelle puissance incomparable il déploie pour nous, les croyants : c’est l’énergie, la force, la vigueur qu’il a mise en œuvre dans le Christ quand il l’a ressuscité d’entre les morts et qu’il l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux. Il l’a établi au-dessus de tout être céleste : Principauté, Souveraineté, Puissance et Domination, au-dessus de tout nom que l’on puisse nommer, non seulement dans le monde présent mais aussi dans le monde à venir. Il a tout mis sous ses pieds et, le plaçant plus haut que tout, il a fait de lui la tête de l’Église qui est son corps, et l’Église, c’est l’accomplissement total du Christ, lui que Dieu comble totalement de sa plénitude.

 

ÉVANGILE

« Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre » (Mt 28, 16-20)
Alléluia. Alléluia.Allez ! De toutes les nations faites des disciples, dit le Seigneur. Moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. Alléluia. (Mt 28, 19a.20b)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

 En ce temps-là,  les onze disciples s’en allèrent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre.  Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais certains eurent des doutes.  Jésus s’approcha d’eux et leur adressa ces paroles : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre.  Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit,  apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »
Patrick BRAUD

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