L'homélie du dimanche (prochain)

3 décembre 2017

Ne nous laisse pas entrer en tentation

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 12 h 01 min

Ne nous laisse pas entrer en tentation

« Ne nous laisse pas entrer en tentation » : c’est la nouvelle traduction francophone de la fin du Notre Père, Elle est entrée en vigueur aujourd’hui même, et changera bien des habitudes !


Pour la comprendre, reportons-nous aux tentations présentées à Jésus lui-même au désert.

 

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Quel est l’enjeu de cette modification ?

L’ancien traduction : « ne nous soumets pas à la tentation » pouvait porter à confusion. Dieu serait-il l’auteur de la tentation ? Prendrait-il un malin plaisir à nous y soumettre ? La réponse toute la Bible est très nette : non !

The%2BFall%2Bof%2BAdam%2Band%2BEve%252C%2BHugo%2Bvan%2Bder%2BGoes%2B1470 Notre Père dans Communauté spirituelleNotre première lecture de la Genèse précise bien que c’est le serpent qui induit Ève en tentation, pas Dieu. Notre évangile met bien Satan en scène comme celui qui cherche à faire chuter Jésus, au sens propre comme au sens figuré.

Et St Jacques sera encore plus clair : « Que personne, lorsqu’il est tenté, ne dise : c’est Dieu qui me tente. Car Dieu ne peut être tenté par le mal, et il ne tente lui-même personne. » (Jc 1,13)

Prier Dieu de ne pas nous soumettre à la tentation laisserait planer un doute sur l’innocence divine face à la victoire du mal sur nous : impensable ! La nouvelle traduction recherche à éviter cet écueil, en collant au plus près du latin : ne nos inducas in tentationem = fais en sorte que nous ne soyons pas conduits sur le chemin de la tentation.

Elle colle davantage encore au grec : le verbe utilisé eispherô signifie porter dans, faire entrer. La tentation est vue (en grec) comme un lieu dans lequel Dieu nous introduirait. C’est un peu ce que fait l’Esprit dans l’évangile de ce dimanche : il conduit Jésus au désert pour y être tenté (par Satan, pas par Dieu) Mt 4,11.

C’est le sens que Jésus donne à sa prière à Gethsémani : il entre en tentation (« que cette coupe s’éloigne de moi ») mais la surmonte en s’appuyant sur son identité filiale (« Père, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux »). Connaissant la faiblesse de ses disciples, il leur conseille alors, fort de cette expérience à Gethsémani : « priez pour ne pas entrer en tentation » (Mt 26,41). Dieu peut nous conduire vers (le désert, la tentation), mais il ne veut ni ne peut nous introduire dans.

Le désert est ici le lieu type de la tentation, en référence à l’épisode de l’Exode où les hébreux ont mis Dieu à l’épreuve (Ex 17,7), à Massa, près de Réfidim.

Mais c’est Dieu qui est mis à l’épreuve à Massa, comme Jésus est mis à l’épreuve au désert. Le peuple hébreu à Massa, le Satan au désert enfreignent chacun le commandement : « tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu » (Mt 4,7 ; Lc 4,12 ; Dt 6,16).

Sachant d’expérience que ce combat pour rester fidèle dans l’épreuve est vraiment dangereux, Jésus demande ses disciples de prier pour que nous ne soyons pas exposés à nous engager dans cette rude bataille. Suivre le Christ, c’est s’exposer à être tenté. « Ne nous laisse pas entrer en tentation » signifie : aide-nous à ne pas mettre le pied dans les sables mouvants de la tentation, que nous risquons de ne pas pouvoir traverser.

Car, si l’Esprit nous conduit au désert, c’est bien de nous-mêmes que nous entrons dans l’influence du mal. À l’image d’Ève qui aurait pu se boucher les oreilles au sifflement du serpent : mais elle s’est exposée (imprudemment) et s’est finalement laissée vaincre par le tentateur.

 

L’enjeu de cette nouvelle traduction est donc vital pour nous :

1. Ne pas croire ou laisser croire que Dieu serait l’auteur de la tentation.

2. Ne pas croire ou laisser croire non plus que nous sommes l’auteur absolu du mal. C’est un autre (le « serpent », le « Satan ») qui nous tente, et nous tombons dans le panneau en entrant en tentation.

3. Prendre conscience de notre propension naturelle à succomber aux tentations, aux fausses promesses que nous rencontrons sur notre route.

« Dieu ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces » 1Co 10,13 : cette conviction de Paul nous aide à déchiffrer nos épreuves comme des victoires à remporter et non des destructions cumulatives. La prière du Notre Père nous rend forts pour ne pas mettre les pieds en terrain miné : appuyés  sur l’amour paternel de Dieu pour nous, c’est ne pas s’engager sur des chemins où le combat serait trop difficile, ne pas s’exposer imprudemment en préjugeant de sa force. Et si la fournaise de l’épreuve arrive, comme à Massa ou Gethsémani, que notre communion au Christ nous rende forts en lui pour devenir fidèles à travers la tentation.

 

Un enjeu oecuménique

C’est l’autre aspect du Notre Père : la seule prière que Jésus a enseignée à ses disciples doit pouvoir être récitée ensemble, quelles que soient les confessions chrétiennes. C’était le cas jusqu’à présent depuis Vatican II. Qu’en sera-t-il en 2015 ? Les autres Églises chrétiennes vont-elles adopter ce « ne nous laisse pas  entrer en tentation » ? On peut regretter que l’Église catholique ait décidé ce changement de manière unilatérale, sans y associer les autres Églises. Elles pourront cependant y trouver une bien plus grande fidélité au texte biblique, et une plus grande cohérence théologique. Espérons que le Notre Père ne se terminera pas en un bredouillage généralisé et gêné, jetant un voile pudique sur nos différences en la matière…

Aucune traduction n’est parfaite. Traduttore, traditore disent les italiens !

« Ne nous laisse pas entrer en tentation » laisse encore planer quelques  interrogations. On sent bien qu’il y a conflit entre la liberté humaine qui peut choisir de se laisser dominer par la tentation, et l’amour de Dieu qui désire nous en sauver, mais ne peut le faire malgré nous… En remplaçant la soumission à par l’entrée en, la nouvelle version du Notre Père a le mérite de réveiller notre liberté en s’appuyant sur l’amour de Dieu pour nous.

Si vous avez déjà hésité au seuil d’une vraie tentation, vous savez ce que cela veut dire.

 

Dieu ne soumet personne. Il vole au secours de celui qui l’appelle.

Et comment devenir fidèles sans prier, c’est-à-dire sans nous appuyer sur Dieu qui alors ne nous laisse pas entrer en tentation ?

 

 

1ère lecture : La création de l’homme. Le péché (Gn 2, 7-9; 3, 1-7a)

Lecture du livre de la Genèse

Au temps où le Seigneur Dieu fit le ciel et la terre, il modela l’homme avec la poussière tirée du sol ; il insuffla dans ses narines le souffle de vie, et l’homme devint un être vivant.
Le Seigneur Dieu planta un jardin en Éden, à l’orient, et y plaça l’homme qu’il avait modelé.
Le Seigneur Dieu fit pousser du sol toute sorte d’arbres à l’aspect attirant et aux fruits savoureux ; il y avait aussi l’arbre de vie au milieu du jardin, et l’arbre de la connaissance du bien et du mal.

Or, le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs que le Seigneur Dieu avait fait. Il dit à la femme : « Alors, Dieu vous a dit : ‘Vous ne mangerez le fruit d »aucun arbre du jardin’»
La femme répondit au serpent : « Nous mangeons les fruits des arbres du jardin. Mais, pour celui qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : ‘Vous n’en mangerez pas, vous n’y toucherez pas, sinon vous mourrez.’ »
Le serpent dit à la femme : « Pas du tout ! Vous ne mourrez pas !
Mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal. » 
La femme s’aperçut que le fruit de l’arbre devait être savoureux, qu’il avait un aspect agréable et qu’il était désirable, puisqu’il donnait l’intelligence. Elle prit de ce fruit, et en mangea. Elle en donna aussi à son mari, et il en mangea.
Alors leurs yeux à tous deux s’ouvrirent et ils connurent qu’ils étaient nus.

Psaume : Ps 50, 3-4, 5-6ab, 12-13, 14.17

R/ Pitié, Seigneur, car nous avons péché.

Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.

Oui, je connais mon péché, 
ma faute est toujours devant moi. 
Contre toi, et toi seul, j’ai péché, 
ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait. 

Crée en moi un c?ur pur, ô mon Dieu, 
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. 
Ne me chasse pas loin de ta face, 
ne me reprends pas ton esprit saint. 

Rends-moi la joie d’être sauvé ; 
que l’esprit généreux me soutienne. 
Seigneur, ouvre mes lèvres, 
et ma bouche annoncera ta louange.

2ème lecture : Là où le péché s’était multiplié, la grâce a surabondé (brève : 5, 12.17-19) (Rm 5, 12-19)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains

Frères,
par un seul homme, Adam, le péché est entré dans le monde, et par le péché est venue la mort ; et ainsi, la mort est passée en tous les hommes, du fait que tous ont péché.
Avant la loi de Moïse, le péché était déjà dans le monde. Certes, on dit que le péché ne peut être sanctionné quand il n’y a pas de loi ; mais pourtant, depuis Adam jusqu’à Moïse, la mort a régné, même sur ceux qui n’avaient pas péché par désobéissance à la manière d’Adam. Or, Adam préfigurait celui qui devait venir.
Mais le don gratuit de Dieu et la faute n’ont pas la même mesure. En effet, si la mort a frappé la multitude des hommes par la faute d’un seul, combien plus la grâce de Dieu a-t-elle comblé la multitude, cette grâce qui est donnée en un seul homme, Jésus Christ.
Le don de Dieu et les conséquences du péché d’un seul n’ont pas la même mesure non plus : d’une part, en effet, pour la faute d’un seul, le jugement a conduit à la condamnation ; d’autre part, pour une multitude de fautes, le don gratuit de Dieu conduit à la justification.
En effet, si, à cause d’un seul homme, par la faute d’un seul homme, la mort a régné, combien plus, à cause de Jésus Christ et de lui seul, régneront-ils dans la vie, ceux qui reçoivent en plénitude le don de la grâce qui les rend justes.
Bref, de même que la faute commise par un seul a conduit tous les hommes à la condamnation, de même l’accomplissement de la justice par un seul a conduit tous les hommes à la justification qui donne la vie.
En effet, de même que tous sont devenus pécheurs parce qu’un seul homme a désobéi, de même tous deviendront justes parce qu’un seul homme a obéi.

Evangile : La tentation de Jésus (Mt 4, 1-11)

Acclamation : Ta parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance.
L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole venant de la bouche de Dieu.
Ta parole, Seigneur, est vérité, et ta loi, délivrance.(cf. Mt 4, 4)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Jésus, après son baptême, fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le démon.
Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim.
Le tentateur s’approcha et lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains. »
Mais Jésus répondit : « Il est écrit : Ce n’est pas seulement de pain que l’homme doit vivre, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » 

Alors le démon l’emmène à la ville sainte, à Jérusalem, le place au sommet du Temple et lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. »
Jésus lui déclara : « Il est encore écrit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. » 

Le démon l’emmène encore sur une très haute montagne et lui fait voir tous les royaumes du monde avec leur gloire.
Il lui dit : « Tout cela, je te le donnerai, si tu te prosternes pour m’adorer. »
Alors, Jésus lui dit : « Arrière, Satan ! car il est écrit : C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras, et c’est lui seul que tu adoreras. »
Alors le démon le quitte. Voici que des anges s‘approchèrent de lui, et ils le servaient.
Patrick BRAUD

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