L'homélie du dimanche (prochain)

27 mai 2015

Trinité : Distinguer pour mieux unir

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Distinguer pour mieux unir

 

cf. également

Trinité : ne faire qu’un à plusieurs

Les bonheurs de Sophie

Trinité : au commencement est la relation

La Trinité en actes : le geste de paix

La Trinité et nous

Homélie pour la fête de la Trinité /Année B
31/05/2015

 

Trinité : Distinguer pour mieux unir dans Communauté spirituelle« Distinguer pour unir »: c’est le titre d’un ouvrage du philosophe Jacques Maritain, l’un des inspirateurs du personnalisme chrétien (avec Emmanuel Mounier). Il formula ce principe pour analyser les différentes formes de science : naturelle, philosophique, théologique etc. en plaidant pour une intégration de ces degrés de la connaissance dans une science plus globale, caractérisée essentiellement par l’amour.

 

Distinguer pour mieux unir : c’est également le principe structurant de la fête de la Trinité de ce dimanche.

Il est évident que l’homme Jésus de Nazareth n’est pas identiquement superposable à Dieu, et pourtant il revendique avec lui une intimité, une intériorité mutuelle unique. « Qui m’a vu a vu le Père ». « Le Père et moi nous sommes un ».

Cette distinction du Père d’avec le Fils redouble avec le troisième sujet, qui procède de l’un et de l’autre (cf. Credo) : l’Esprit, souffle créateur du Père et mémoire vivante du Fils, parachevant son oeuvre aujourd’hui.

 communion dans Communauté spirituelleLe Père n’est pas le Fils, et le Fils n’est pas l’Esprit, et pourtant tous les trois ne font qu’un.

C’est donc qu’effectivement la distinction des trois personnes nourrit l’unité de leur  unique nature. C’est donc que ce principe de différenciation/unité est au cœur de l’identité divine trinitaire.

 

Un rapide survol biblique montre d’ailleurs que distinguer pour mieux unir est une loi vieille comme le monde :

- dès la Genèse, Dieu sépare la lumière des ténèbres, les eaux du dessus des eaux du dessous, les espèces végétales, puis animales, pour manifester dans cette explosion de vie la puissance de l’amour créateur. L’amour trinitaire engendre à son image de la différence au service de la communion.

- la création d’Adam et Ève est le climax de ce principe : tiré d’un être androgyne au départ d’après le premier récit de la création dans le livre de la Genèse, ou immédiatement en vis-à-vis d’après le second récit, l’être humain est à l’image de la Trinité : une seule nature humaine, des personnes distinctes appelées à ne faire qu’un dans l’amour.

clip_image010 distinguer- la Bible elle-même conjugue avec bonheur dans ses textes la différence et l’unité. La tradition juive comme chrétienne reconnaît en effet dans la Bible trois catégories de textes : la Torah (ou Pentateuque : Gn, Ex, Nb, Dt, Lv), les Prophètes (Isaïe, Jérémie…) et les Écrits (ou livre de Sagesse). Ces trois courants bibliques sont fort différents les uns des autres, et pourtant c’est leur convergence, leur interaction, leur cohérence qui constitue la révélation biblique. Lire la Torah sans la mettre en relation avec les critiques des prophètes, ou en oubliant ce que la sagesse apporte à la loi divise la Bible contre elle-même. Comme me disait mon professeur d’exégèse : ‘dans ce livre, le plus important c’est la reliure, parce qu’elle tient le tout ensemble…’

 

- le principe (trinitaire) de différenciation/unité joue encore pour beaucoup d’autres réalités :

* les 12 tribus, avec un rôle spécifique pour la tribu de Lévi, qui forment l’unique peuple d’Israël.

* les 12 apôtres, avec un rôle spécifique pour Pierre, qui forment un seul collège apostolique. En plus, ce qui est accordé à Pierre individuellement l’est aussi aux 12 et à l’Église collectivement. « Tout ce que tu auras lié / délié sur la terre sera lié / délié dans le ciel » (Mt 16,19)… « Tout ce que vous aurez lié / délié… » (Mt 18,18).

* Dieu et César.
La question de l’impôt donne à Jésus l’occasion de fonder la célèbre distinction entre spirituel et temporel :« rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ». La laïcité française, qui a ses racines ici, ne doit pas oublier que cette distinction n’est pas faite pour opposer ni séparer, mais pour articuler des domaines de responsabilité distincte.

 

* « Sans séparation ni confusion ».

 MaritainLes premiers conciles ont débattu avec passion de l’identité de Jésus : est-il vraiment homme ? Est-il vraiment Dieu ? La réponse, subtile et nuancée, des pères conciliaires s’inspire également du principe trinitaire : distinguer pour mieux unir. Ils  distinguent en Jésus de Nazareth deux ‘natures’, divine et humaine, assumées en une seule personne, sans séparation ni confusion. Cette formule conciliaire qui s’applique d’abord aux Christ vaut par extension pour toutes les réalités humaines appelées à être divinisées par lui, avec lui et en lui.

 

* Devenir époux, sans séparation ni confusion entre les deux êtres ni les deux rôles, est l’affaire de toute une vie de couple.

Assumer et son rôle d’époux et son rôle de parent, sans confondre ces deux responsabilités ni les séparer, redouble l’ambition du défi amoureux. Être trop amant et pas assez père, ou au contraire trop mère et pas assez amante (et réciproquement !) fait partie des tâtonnements inévitables d’une relation qui grandit en intégrant ces vocations sans les confondre ni les opposer.

 

* Vie privée / vie professionnelle

C’est vrai encore de la vie privée et de la vie professionnelle, qu’on désire mener de front sans que l’une absorbe l’autre, sans qu’elles deviennent contradictoires non  plus.

 

* C’est également la même tension qui unit l’action et la contemplation, dans tous les combats qui sont les nôtres.

 

* C’est vrai de la foi et la religion dans leurs dimensions intérieure et institutionnelle : des théologiens protestants comme Karl Barth ou Rudolph Bultmann ont utilement distingué foi et religion, jusqu’à durcir cette différence en opposition irréductible. Des théologiens catholiques comme Urs von Balthasar ont cherché à concilier les deux pour ne pas ruiner l’unité de l’homme croyant.

 

 Trinité* Distinguer le politique et le religieux a été la grande affaire des 20 premiers siècles du christianisme. Les unir sera le défi de ce siècle. Saint Augustin, devant le spectacle de l’empire romain s’effondrant sous les invasions barbares, a posé les bases de la distinction entre Cité de Dieu et Cité des hommes, distinction qui a eu une postérité étonnante dans la société moderne. Ces deux cités dialoguent toujours fortement entre elles (mais dans d’autres pays que la France à vrai dire) à la recherche d’une unité supérieure.

 

On pourrait continuer longtemps cette énumération des réalités humaines structurées selon le principe trinitaire de distinction/unité.
En termes savants, on pourrait dire que la révélation d’un Dieu trinitaire devient une clé anthropologique, qui nous aide à déchiffrer qui est l’homme. Créés à l’image de Dieu Trinité, chacun et ensemble, nous sommes appelés à distinguer pour mieux unir. Nous sommes faits pour apprivoiser nos différences, sans séparation ni confusion (sans communautarisme ni assimilation forcée, sans jalousie ni indifférence, sans rivalité ni juxtaposition…).

 

Relisons alors les responsabilités qui sont les nôtres :

Qu’ai-je tendance à séparer plutôt qu’à unir ?

Quelle distinction ai-je du mal à faire et à respecter sous couvert d’une unité trop rapide ?

 

 

 

1ère lecture : « C’est le Seigneur qui est Dieu, là-haut dans le ciel comme ici-bas sur la terre ; il n’y en a pas d’autre » (Dt 4, 32-34.39-40)

Lecture du livre du Deutéronome

Moïse disait au peuple : « Interroge donc les temps anciens qui t’ont précédé, depuis le jour où Dieu créa l’homme sur la terre : d’un bout du monde à l’autre, est-il arrivé quelque chose d’aussi grand, a-t-on jamais connu rien de pareil ? Est-il un peuple qui ait entendu comme toi la voix de Dieu parlant du milieu du feu, et qui soit resté en vie ? Est-il un dieu qui ait entrepris de se choisir une nation, de venir la prendre au milieu d’une autre, à travers des épreuves, des signes, des prodiges et des combats, à main forte et à bras étendu, et par des exploits terrifiants – comme tu as vu le Seigneur ton Dieu le faire pour toi en Égypte ? Sache donc aujourd’hui, et médite cela en ton cœur : c’est le Seigneur qui est Dieu, là-haut dans le ciel comme ici-bas sur la terre ; il n’y en a pas d’autre. Tu garderas les décrets et les commandements du Seigneur que je te donne aujourd’hui, afin d’avoir, toi et tes fils, bonheur et longue vie sur la terre que te donne le Seigneur ton Dieu, tous les jours. »  

Psaume : 32 (33), 4-5, 6.9, 18-19, 20.22

R/ Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu. (32, 12a)

Oui, elle est droite, la parole du Seigneur ;
il est fidèle en tout ce qu’il fait.
Il aime le bon droit et la justice ;
la terre est remplie de son amour.

Le Seigneur a fait les cieux par sa parole,
l’univers, par le souffle de sa bouche.
Il parla, et ce qu’il dit exista ;
il commanda, et ce qu’il dit survint.

Dieu veille sur ceux qui le craignent,
qui mettent leur espoir en son amour,
pour les délivrer de la mort,
les garder en vie aux jours de famine.

Nous attendons notre vie du Seigneur :
il est pour nous un appui, un bouclier.
Que ton amour, Seigneur, soit sur nous
comme notre espoir est en toi !

2ème lecture : « Vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ; en lui nous crions “Abba !”, Père ! » (Rm 8, 14-17)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Romains

Frères, tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu. Vous n’avez pas reçu un esprit qui fait de vous des esclaves et vous ramène à la peur ; mais vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ; et c’est en lui que nous crions « Abba ! », c’est-à-dire : Père ! C’est donc l’Esprit Saint lui-même qui atteste à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Puisque nous sommes ses enfants, nous sommes aussi ses héritiers : héritiers de Dieu, héritiers avec le Christ, si du moins nous souffrons avec lui pour être avec lui dans la gloire.

Evangile : « Baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit » (Mt 28, 16-20)

Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit : au Dieu qui est, qui était et qui vient !
Alléluia. (cf. Ap 1, 8)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

En ce temps-là, les onze disciples s’en allèrent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre. Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais certains eurent des doutes. Jésus s’approcha d’eux et leur adressa ces paroles : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »
Patrick BRAUD

 

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20 mai 2015

Le scat de Pentecôte

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Le scat de Pentecôte 

cf. également

Pentecôte : conjuguer glossolalie et xénolalie
Le marché de Pentecôte : 12 fruits, 7 dons
Et si l’Esprit Saint n’existait pas ?
La paix soit avec vous
Parler la langue de l’autre

Homélie pour la fête de Pentecôte 2015
24/05/2015

Connaissez-vous le scat ?

En jazz, c’est un phénomène bien connu : une chanteuse comme Ella Fitzgerald était capable de jubiler sur des onomatopées pendant des minutes entières avant de reprendre le fil de sa chanson. Le scat, vous en faites sans le savoir lorsque vous chantonnez, tout joyeux, en oubliant les paroles, devant un beau paysage ou sous la douche…

Eh bien, on a très fortement l’impression, en suivant le texte du livre des Actes, qu’à la Pentecôte les pèlerins de Jérusalem ont assisté étonnés au premier « scat liturgique » de l’Église envahie d’Esprit Saint. Pierre est même obligé de préciser :« ces gens ne sont pas ivres comme vous le supposez, car il n’est que 9h du matin ! » (Ac 2, 15). Certains en effet, en entendant l’Église chanter sa joie au-delà des paroles « se moquaient et disaient : ils sont pleins de vin doux » (Ac 2, 13).

Voilà un fruit majeur de la Pentecôte, un effet capital de l’Esprit Saint en nous : la joie déborde tellement que nous n’avons plus de mots pour la décrire !

Rappelez-vous : quand avez-vous été subjugués par la beauté, d’une musique, d’un paysage, d’un tableau ? quand avez-vous été bouleversés par l’intensité enivrante d’un regard, d’un silence ? Dans ces moments-là, les mots nous manquent, mais le souffle qui est en nous nous fait jubiler au-delà des paroles. Et nous improvisons comme Ella Fitzgerald un scat débordant de joie ! Ella, elle avait ce don de communiquer la joie en se laissant envahir par elle : son chant était une petite Pentecôte ! Vraiment inspirée par un Esprit magnifique…

Ce don de l’Esprit n’a jamais manqué à l’Église.

Pensez aux longues vocalises des moines et moniales bénédictins tenant des portées entières sur un « o » de Dominus ou un « a » de alléluia, jusqu’à être comblés et épuisés de bonheur à moduler cette voyelle dans le chant grégorien, le temps suspendu….

Pensez aux groupes charismatiques (les pentecôtistes, bien nommés !) qui ont redécouvert ce qu’ils appellent le chant en langues (la glossolalie) : il arrive dans la prière qu’un groupe chante sans partition ni paroles, comme s’il y avait un chef d’orchestre invisible, et cela donne une mélopée puissante harmonieuse et belle…

Relisez saint Augustin qui était déjà témoin au 4ème siècle de ce « scat spirituel » sous l’effet de l’Esprit de Pentecôte. Il est lui aussi partisan de cet excès, de cette densité de joie si forte qu’elle appelle le chant :

« Chantez-lui le cantique nouveau, chantez bien (nous dit le psaume). Chacun se demande comment chanter pour Dieu. Chante pour lui, mais évite de chanter mal. […] Eh bien, il te donne cette méthode de chant : ne cherche pas des paroles, comme si tu pouvais expliquer ce qui plaît à Dieu. Chante par des cris de jubilation. Bien chanter pour Dieu, c’est chanter par des cris de jubilation. En quoi cela consiste-t-il ? C’est comprendre qu’on ne peut pas expliquer par des paroles ce que l’on chante dans son cœur. En effet ceux qui chantent, soit en faisant la moisson, soit en faisant les vendanges, ou n’importe quel travail enthousiasmant, lorsqu’ils se mettent à exulter de joie par les paroles de leurs chants, sont comme gonflés par une telle joie qu’ils ne peuvent la détailler par des paroles, ils renoncent à articuler des mots, et ils éclatent en cris de jubilation. […]

Que ton cœur se réjouisse sans prononcer de paroles et que l’infinité de tes joies ne soit pas limitée par des syllabes. Chantez bien avec des cris de joie. » (Homélie sur le psaume 32)

Cette joie-là ne vient pas de nous, de nos seules forces : elle nous est donnée, elle vient de Dieu, elle est Dieu-en-nous : l’Esprit qui nous rend présent à nous-même, présent au monde…

Bref, être habité par l’Esprit Saint, c’est se laisser remplir par une joie que rien ne pourra nous ravir. Non pas une joie naïve, bêtasse, qui serait ignorante du combat spirituel à mener. « Mon cœur s’est ouvert depuis ce jour alors que je le croyais mort » témoignait une adulte lors de sa confirmation. C’est donc que l’Esprit vient apporter la joie en traversant les forces de mort auxquelles nous sommes confrontés : pas en niant le mal, mais en gagnant sur lui grâce au pardon, grâce à la Résurrection du Christ travaillant en nous…

Au cœur des difficultés économiques actuelles, le monde attend des témoins de cet Esprit-là : des acteurs compétents, responsables, qui surtout relèvent les défis sans amertume ni violence, sans résignation ni fatalisme. Des acteurs sociaux habités, imprégnés, transpirant d’une joie profonde qui vient de l’espérance en la Résurrection.

Dans les débats de société sur l’Europe et les élections à venir, on espère des témoins comme à la Pentecôte remplis d’un Esprit d’enthousiasme communicatif. Souvenez-vous : l’hymne à la joie de Beethoven est quand même notre hymne européen officiel !

C’est l’enjeu de notre confirmation : être « confirmés », c’est être rendus fermes dans la confiance en Dieu, source intarissable de notre joie.

C’est l’enjeu de la communion au Corps du Christ : être « enivrés » de l’Esprit du Christ jusqu’à avoir au cœur un sentiment de plénitude et de suffocation qu’aucune épreuve ne pourra nous enlever. La sobre ivresse de l’Esprit est le fruit de cette communion eucharistique.

 

Il y a bien d’autres effets de l’Esprit de la Pentecôte : parler la langue de l’autre, proclamer les merveilles de Dieu (Ac 2, 11), devenir chacun et chacune prophète (Ac 2, 17-18) mais je voulais aujourd’hui insister sur la joie, fruit de l’Esprit de Pentecôte, car de cette joie-là notre société a faim et soif plus que jamais.

Alors, laissez l’Esprit de votre baptême improviser en vous un scat jubilatoire qui vous maintiendra en communion avec Dieu, pour l’étonnement et le plaisir de ceux qui vous entourent…

 

Messe du jour de Pentecôte

1ère lecture : « Tous furent remplis d’Esprit Saint et se mirent à parler » (Ac 2, 1-11)

Lecture du livre des Actes des Apôtres

Quand arriva le jour de la Pentecôte, au terme des cinquante jours après Pâques, ils se trouvaient réunis tous ensemble. Soudain un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent : la maison où ils étaient assis en fut remplie tout entière. Alors leur apparurent des langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa une sur chacun d’eux. Tous furent remplis d’Esprit Saint : ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit.

 Or, il y avait, résidant à Jérusalem, des Juifs religieux, venant de toutes les nations sous le ciel. Lorsque ceux-ci entendirent la voix qui retentissait, ils se rassemblèrent en foule. Ils étaient en pleine confusion parce que chacun d’eux entendait dans son propre dialecte ceux qui parlaient. Dans la stupéfaction et l’émerveillement, ils disaient : « Ces gens qui parlent ne sont-ils pas tous galiléens ? Comment se fait-il que chacun de nous les entende dans son propre dialecte, sa langue maternelle ? Parthes, Mèdes et Élamites, habitants de la Mésopotamie, de la Judée et de la Cappadoce, de la province du Pont et de celle d’Asie, de la Phrygie et de la Pamphylie, de l’Égypte et des contrées de Libye proches de Cyrène, Romains de passage, Juifs de naissance et convertis, Crétois et Arabes, tous nous les entendons parler dans nos langues des merveilles de Dieu. »

Psaume : 103 (104), 1ab.24ac, 29bc-30, 31.34

R/ Ô Seigneur, envoie ton Esprit
qui renouvelle la face de la terre !
ou : Alléluia ! 
(cf. 103, 30)

Bénis le Seigneur, ô mon âme ;
Seigneur mon Dieu, tu es si grand !
Quelle profusion dans tes oeuvres, Seigneur !
La terre s’emplit de tes biens.

Tu reprends leur souffle, ils expirent
et retournent à leur poussière.
Tu envoies ton souffle : ils sont créés ;
tu renouvelles la face de la terre.

Gloire au Seigneur à tout jamais !
Que Dieu se réjouisse en ses œuvres !
Que mon poème lui soit agréable ;
moi, je me réjouis dans le Seigneur.

2ème lecture : « Le fruit de l’Esprit » (Ga 5,16-25)
Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Galates

Frères, je vous le dis : marchez sous la conduite de l’Esprit Saint, et vous ne risquerez pas de satisfaire les convoitises de la chair. Car les tendances de la chair s’opposent à l’Esprit, et les tendances de l’Esprit s’opposent à la chair. En effet, il y a là un affrontement qui vous empêche de faire tout ce que vous voudriez. Mais si vous vous laissez conduire par l’Esprit, vous n’êtes pas soumis à la Loi. On sait bien à quelles actions mène la chair : inconduite, impureté, débauche, idolâtrie, sorcellerie, haines, rivalité, jalousie, emportements, intrigues, divisions, sectarisme, envie, beuveries, orgies et autres choses du même genre. Je vous préviens, comme je l’ai déjà fait : ceux qui commettent de telles actions ne recevront pas en héritage le royaume de Dieu. Mais voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi. En ces domaines, la Loi n’intervient pas. Ceux qui sont au Christ Jésus ont crucifié en eux la chair, avec ses passions et ses convoitises. Puisque l’Esprit nous fait vivre, marchons sous la conduite de l’Esprit.

Séquence de Pentecôte

Viens, Esprit Saint, en nos cœurs
et envoie du haut du ciel
un rayon de ta lumière.

Viens en nous, père des pauvres,
viens, dispensateur des dons,
viens, lumière de nos cœurs.

Consolateur souverain,
hôte très doux de nos âmes,
adoucissante fraîcheur.

Dans le labeur, le repos ;
dans la fièvre, la fraîcheur ;
dans les pleurs, le réconfort.

Ô lumière bienheureuse,
viens remplir jusqu’à l’intime
le cœur de tous les fidèles.

Sans ta puissance divine,
il n’est rien en aucun homme,
rien qui ne soit perverti.

Lave ce qui est souillé,
baigne ce qui est aride,
guéris ce qui est blessé.

Assouplis ce qui est raide,
réchauffe ce qui est froid,
rends droit ce qui est faussé.

À tous ceux qui ont la foi
et qui en toi se confient
donne tes sept dons sacrés.

Donne mérite et vertu,
donne le salut final,
donne la joie éternelle. Amen.

Evangile : « L’Esprit de vérité vous conduira dans la vérité tout entière » (Jn 15, 26-27 ; 16, 12-15)

Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Viens, Esprit Saint !
Emplis le cœur de tes fidèles !
Allume en eux le feu de ton amour !
Alléluia.

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Quand viendra le Défenseur, que je vous enverrai d’auprès du Père, lui, l’Esprit de vérité qui procède du Père, il rendra témoignage en ma faveur. Et vous aussi, vous allez rendre témoignage, car vous êtes avec moi depuis le commencement.  J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous ne pouvez pas les porter. Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière. En effet, ce qu’il dira ne viendra pas de lui-même : mais ce qu’il aura entendu, il le dira ; et ce qui va venir, il vous le fera connaître. Lui me glorifiera, car il recevra ce qui vient de moi pour vous le faire connaître. Tout ce que possède le Père est à moi ; voilà pourquoi je vous ai dit : L’Esprit reçoit ce qui vient de moi pour vous le faire connaître. »
Patrick BRAUD

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14 mai 2015

Conjuguer le « oui » et le « non » de Dieu à notre monde

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 14 h 00 min

Conjuguer le « oui » et le « non » de Dieu à notre monde

Homélie du 7° Dimanche de Pâques / Année B
17/05/2015

Le rapport de l’Église au monde
« Je leur ai fait don de ta parole, et le monde les a pris en haine parce qu’ils ne sont pas du monde, de même que moi je ne suis pas du monde. Je ne demande pas que tu les retires du monde, mais que tu les gardes du Mauvais. Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde. Consacre-les par la vérité : ta parole est vérité. De même que tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde. » (Jn 17, 18-19)

Il y a dans l’évangile de Jean une dialectique de la situation des chrétiens dans le monde : à la fois dedans et dehors, immergés dans la vie sociale de leurs contemporains, et témoignant d’une autre vie qui vient d’en-haut ; solidaires des combats pour la dignité humaine et contestant la prétention de ce monde à être l’horizon ultime de l’homme.

L’Église est sacrement parce qu’elle est dans le monde sans être du monde. Cette double appartenance (au monde de l’homme et au monde de Dieu) se traduit dans Vatican II par la présence des deux documents sur l’Église, Lumen Gentium (LG) et Gaudium et Spes (GS). Regardons comment.

Lien de solidarité Église-monde
Dès le départ, le Concile définit le public auquel il veut s’adresser: non pas les seuls catholiques, mais le monde entier, « toutes les créatures », « tous les hommes » « tout le genre humain » (LG 1). C’est en effet qu’il y a un lien de solidarité entre Église et monde: même si l’Église est  antérieure au monde dans le dessein de Dieu, car elle est « annoncée en figures dès l’origine du monde » (LG 2), l’Église sait qu’elle vit et agit  dans le monde (LG 3), dont elle fait elle-même partie, et où s’y opère sa croissance (LG 3). L’Église, destinée à s’étendre à toutes les parties du monde, prend place dans l’histoire humaine (LG 9) et non pas en-dehors. Parce que Dieu a aimé ce monde (LG 41), tel qu’il est, au point de laisser le Christ donner sa vie pour le salut de ce monde (LG 17), l’Église veut porter sur ce monde le même regard d’amour, cherchant à être signe de l’action continuelle du Christ au milieu du monde, Lui qui en est la lumière véritable (LG 3; 28; 48). C’est donc d’emblée un regard d’amour qui prévaut, et non une attitude de défiance et de dénégation du monde dans lequel l’Église est plongée.

Lien de contestation Église-monde
Au service de la croissance du monde vers plus d’humanité en Dieu, l’Église ne peut pourtant être réduite à une réalité du monde. Les élus sont choisis par le Christ dès avant la création du monde (LG 3), et l’Église est antérieure au monde (LG 2). C’est pourquoi elle est aussi un vis-à-vis, un guide, qui, par son existence même, conteste et se différencie d’une vision trop humaine de l’évolution du monde, que ce soit le mythe du « progrès » ou celui de l’autonomie absolue de l’homme. Blessé par le péché, le monde a besoin d’un salut, d’une rédemption qu’il ne peut se donner à lui-même (LG 9;52). Plus encore, « la figure de ce monde passe » (LG 42;48), et « le renouvellement du monde est irrévocablement acquis et, en toute réalité, anticipé dès maintenant: en effet, déjà sur la terre l’Église est parée d’une sainteté encore imparfaite mais véritable » (LG 48). Nous attendons le renouvellement définitif du monde (LG 6) où, avec le genre humain tout l’univers trouvera sa perfection définitive dans le Christ (LG 48). L’Église ne doit donc pas avoir peur de se différencier de ce monde lorsque celui-ci refuse sa vocation divine; et cela au prix même de persécutions pendant ce « pèlerinage sur la terre » (LG 7). C’est pourquoi le témoignage du martyre reste l’horizon réel de tout disciple du Christ, « acceptant librement la mort pour le salut du monde » afin de « le suivre sur le chemin de la Croix, à travers les persécutions qui ne manquent jamais à l’Église » (LG 42).

Distinction et différence Église-monde
Cette double appartenance de l’Église (au monde et au Royaume de Dieu) lui donne une responsabilité particulière dans l’achèvement de l’histoire humaine en Dieu. Elle doit travailler à la consécration et la sanctification du monde (LG 31), sans se confondre avec lui, sans non plus n’être que la mauvaise conscience du monde… En fait, c’est un triple mouvement d’accomplissement / redressement / dénonciation qui marque les rapports Église-monde. L’image du sel de la terre et de la lumière du monde reprise en LG 9, ou l’image des chrétiens « âme du monde », tirée de la Lettre à Diognète et citée en LG 38, essaient de maintenir cette tension, sans la résoudre dans la seule logique de l’enfouissement (sel de la terre) ou de la visibilité à tout prix (lumière du monde). Il faut donc sans cesse conjuguer le « oui » et le « non » sur notre monde, avec la liberté intérieure de ceux qui discernent la venue du Royaume de Dieu relativisant toute réalisation humaine, et pour laquelle toute réalisation humaine est pourtant d’un prix inestimable.

 Au cours de l’histoire
Cette double appartenance, cette tension entre le « oui » et le « non », cette double logique d’attestation-contestation du monde, le Chapitre III sur l’histoire en montrera la complexité et la diversité de réalisations historiques. Essayons simplement ici de caractériser à grands traits les principaux types historiques du rapport Église-monde.

Aux premiers siècles: la contestation du monde, jusqu’au martyre
Le christianisme s’est affirmé peu à peu dans son originalité, en se dégageant du judaïsme et en se différenciant de lui. A partir de là, la rencontre avec la culture et le monde gréco-romains, avec le paganisme, provoque l’affrontement des deux cultes : le culte dû à l’empereur, à Rome et à ses dieux; le culte au Dieu de Jésus-Christ. Il faut choisir : l’Église refuse de concilier les deux, au prix des persécutions et des martyres. L’Empire voit alors dans l’Église une menace pour sa propre cohésion. La contestation du monde ne peut cependant être absolue, comme si il fallait être un « pur », un « parfait » héroïque pour être chrétien, ce qui contredirait l’aspiration universelle du message chrétien, et notamment de sa prédilection pour les faibles, les petits et les foules [1]. Le refus de l’idolâtrie ne se fait pas sans mal, ni sans quelques concessions (viandes immolées aux idoles). La question des « lapsi » déchire un moment l’Église. Finalement, contre la position des intransigeants qui n’admettaient pas de faiblesse dans la contestation du monde païen, les modérés firent admettre la discipline pénitentielle et la réintégration dans la communauté.

Certains chrétiens veulent durcir cette opposition à l’Empire (Tertullien par exemple), mais la plupart des évêques ont le souci (pastoral) de ne pas trop provoquer les autorités pour que le christianisme puisse prendre sa place dans la vie de la cité. Mais les uns et les autres demeurent dans une logique première de contestation du monde païen, dans l’affirmation notamment du seul culte à Dieu.

De Constantin à la Renaissance: attestation (du monde par l’Église) plus que contestation
Avec la paix constantinienne, le christianisme devient un élément constitutif de la société, et même une force de cohésion. L’appartenance à la société et l’Église devient de plus en plus une seule et même réalité. Seuls des ermites et des moines vont résister à cette fusion Eglise-monde : en partant au désert, ou en constituant des ‘contre-sociétés’ monastiques.
L’impact culturel du christianisme va devenir plus prégnant encore après les invasions barbares: force de résistance, puis de victoire sur les barbares, la « chrétienté » se forme et s’organise, palliant les déficiences d’un Empire déliquescent en Occident. « Chrétienté » englobante et très fortement structurée. De là vont naître des situations conflictuelles entre le « sacerdoce » et le « pouvoir civil », entre le « spirituel » et le « temporel » (cf. la « théorie des deux glaives » de Boniface VIII). Cette sorte de confusion entre Église et société provoque une certaine méfiance envers ce qui est extérieur, envers les cultures non-occidentales également (cf. le schisme de 1054, ou le problème des rites chinois avec Mattéo Ricci), et tend à la transplantation ailleurs du modèle culturel occidental. Dans les pays de « rois très chrétiens », l’alliance du trône et de l’autel va marquer pour longtemps les relations Église-État: les « convenances » théologiques trouvées à la monarchie témoignent de l’appui sans faille que l’Église donne alors au régime en place.

De la Renaissance à la modernité: contestation de l’Église par le monde ; réactions ecclésiales
Avec la Renaissance, et plus encore à partir du siècle des Lumières (XVIIIème siècle), un processus de sécularisation s’amorce. L’Église, dénoncée comme oppressive et castratrice par les penseurs et les politiques est amenée à se défendre, à définir sa place et son rôle dans la société. Au XV-XVIème siècles, la découverte du Nouveau Monde et les colonisations font rencontrer l’Église avec la pluralité des cultures, alors qu’elle-même (l’Église catholique en tous cas, identifiée à l’époque à l’Église occidentale) reste très liée à une culture, qui est ainsi remise en cause.

De là diverses attitudes ecclésiales en réaction :

- l’affirmation apologétique de la supériorité du christianisme pour ce qui concerne la vérité et le bien suprême de la société; de même que la supériorité du christianisme sur les autres religions rencontrées dans le monde.

- le combat contre le rationalisme, le modernisme: le Syllabus (1864), l’encyclique Pascendi  en 1908 contre les erreurs modernistes…

- mais aussi le dialogue avec la science (malgré la « bavure » Galilée!), dialogue rendu possible grâce à la longue tradition universitaire de l’Église, sans laquelle la pensée moderne n’aurait pu se développer. Peu à peu, les déviations du syncrétisme, du concordisme ou au contraire de l’opposition farouche vont s’atténuer. Les crises de l’affrontement au modernisme et au positivisme sont cependant révélatrices de la façon dont le sujet moderne s’est pensé contre la religion chrétienne, en émancipation de l’Église et de sa tutelle sur la société.

- plus récemment, la volonté d’affirmer l’identité chrétienne et d’évangéliser les cultures et toutes les zones de l’activité humaine (Evangelii Nuntiandi, Action Catholique…), en un temps où les idéologies marxistes et libérales tendent à privatiser l’expression de la foi.

- la volonté d’ »ouverture au monde », qui a succédé à l’attitude de défense d’une  forteresse assiégée: recherche d’une participation à la construction du monde, recherche de nouveaux langages de foi. À côté de cette ouverture au monde, l’évangélisation retrouve aujourd’hui une annonce de type kérygmatique (nouveaux mouvements religieux), comme la nécessité d’un dialogue avec toutes les autres religions (rencontre inter-religieuse d’Assise…).

Bref, depuis la Renaissance, le fragile équilibre médiéval est rompu, et l’Église est amenée à repenser son rapport au monde, sans le limiter au rapport Église-État.

Des éléments ont permis de repenser ce rapport:

- la redécouverte, grâce au renouveau biblique, de l’histoire, comme un lieu où s’exprime l’action de Dieu. Non pas seulement comme un passé mort ou idéalisé, mais comme une dynamique où l’Esprit Saint conduit l’Église. L’Église est une part d’humanité qui vit l’histoire comme habitée par la Promesse divine, et ouverte à l’avenir de Dieu.

- l’intérêt ainsi porté à l’eschatologie, non réduite aux « fins dernières », permet d’envisager le rapport de l’Église au monde, non comme un rapport entre ces deux termes seulement, mais en référence à un troisième: le Royaume, qui les englobe tous deux, qui est la « fin » des deux, leur avenir absolu, que l’Église espère et fait advenir pour elle comme pour le monde.

« On parle d’attention au monde… mais l’Église serait-elle autre que le monde ?  N’est-elle pas le monde, elle aussi ? et nous chrétiens aussi ? Alors vers quoi nous tournons-nous quand nous nous tournons vers le monde ? L’Église n’est pas tout simplement « non-monde », elle n’existe pas « à côté » ou « au-dessus » de la société sécularisée, mais en elle, comme une communauté qui lui appartient et qui essaie de vivre des promesses de Dieu annoncées et définitivement confirmées en Jésus-Christ, et qui donc tente à nouveau de faire pénétrer cette espérance dans la société contemporaine dont elle critique les exclusives et les prétentions totalitaires. Elle annonce, non son espérance, mais celle du Royaume de Dieu comme avenir du monde. » [2]

L’Église n’est pas seulement un « non-monde », mais une part d’humanité, ce qui permet de dépasser tout dualisme dans les relations. Il serait cependant dangereux de refuser toute altérité et toute différence, toute rupture, comme si l’Église trouvait son principe d’existence dans le monde seulement, et non de Jésus-Christ et du don de l’Esprit. Mais, de fait, l’Église n’est pas « à côté » du monde, se désintéressant de l’histoire pour ne regarder que vers le ciel. Elle n’est pas « au-dessus », seule habilitée à juger le monde, les actions et les comportements des hommes.  Elle est dans le monde comme son lieu d’existence; elle est  le monde devenant déjà Corps du Christ, elle est le « monde réconcilié » en puissance. Mais elle n’est pas purement et simplement le « déjà-là », dans un monde qui serait tout entier dans le « pas encore ». Elle est appelée à annoncer ce « pas encore » qui est la vérité ultime du monde comme d’elle-même, et donc à s’ouvrir et à ouvrir le monde à l’avenir de Dieu, en dénonçant les situations humaines étrangères ou hostiles à la vraie dignité de l’homme en Dieu.  Elle doit aussi accueillir, recevoir, de ce monde où Dieu continue d’être en dialogue avec toute l’humanité, et d’agir par le souffle de son Esprit, que nul ne peut enfermer, pour que son Règne arrive.

Entre l’Église et le monde, le rapport doit se vivre en termes de solidarité, de dialogue, de service (du dessein de Dieu pour le monde), de critique également au titre de la mission prophétique de l’Église à discerner la venue du Règne, et les obstacles à cette venue, dans le présent des hommes.

On peut résumer cette dialectique Église-monde dans le tableau suivant  [3] :

 

ARGUMENTS THÉOLOGIQUES

 

 

Dire « OUI » au monde

 

Dire « Non » au monde

 

  

 

POUR

  • Création
  • Incarnation
  • Discerner l’action invisible de l’Esprit (de Dieu) dans le monde
  • Croire en l’homme
  • Tradition d’un rapport critique à la Tradition
  • Rédemption (Croix, jugement du monde, salut…)
  • Le « oui » sincère au monde ne va plus de soi (désillusions du Progrès)
  • Affirmer l’identité visible de l’Esprit (du Fils) par  et  dans  l’Église.
  • Croire en Dieu
  • Nécessité de la Tradition (mémoire croyante; points de repères…)

 

 

 

 CONTRE

  • « Naïveté optimiste »
    => risque de complicité avec le péché du monde
  • Risque de la disparition de la médiation ecclésiale (enfouissement, sel de la terre…)
  • Lien Église-salut compromis
  • Tradition minimisée
  • Faire de Dieu (de l’Église) le « bouche-trou de nos insuffisances »
  • Survalorisation  de la médiation ecclésiale
  • Logique du tout ou rien
    => risque de sectarisme, de fermeture
  • Nostalgie du passé (idéalisé)

 

Notons que Vatican II a désamorcé le conflit potentiel entre l’Église et le monde en réintroduisant le troisième terme dont Jésus lui-même faisait l’essentiel de sa mission : le Royaume de Dieu, irréductible à l’Église comme au monde…

Apprenons donc de l’Esprit du Christ ce que veut dire : être dans le monde sans être du monde

 


[1]. Le fondateur d’ATD Quart-Monde a de très belles pages sur l’amour des foules par Jésus dans l’Évangile; Cf. WRESINSKI J., Heureux vous les pauvres, Cana, Paris, 1984 et Les pauvres sont l’Église, Le Centurion, Paris, 1983.

[2]. METZ J.B., Pour une théologie du monde, Cerf, Coll. Cogitatio Fidei n° 57, Paris, 1971, p 107.

[3]d’après GAGEY P. H.-J., Le « oui » et le « non » de Dieu sur notre monde, Documents Épiscopat n° 14, Septembre 1993.

 

 

1ère lecture : « Il faut que l’un d’entre eux devienne, avec nous, témoin de la résurrection de Jésus » (Ac 1, 15-17.20a.20c-26)
Lecture du livre des Actes des Apôtres

En ces jours-là, Pierre se leva au milieu des frères qui étaient réunis au nombre d’environ cent vingt personnes, et il déclara : « Frères, il fallait que l’Écriture s’accomplisse. En effet, par la bouche de David, l’Esprit Saint avait d’avance parlé de Judas, qui en est venu à servir de guide aux gens qui ont arrêté Jésus : ce Judas était l’un de nous et avait reçu sa part de notre ministère. Il est écrit au livre des Psaumes : Qu’un autre prenne sa charge. Or, il y a des hommes qui nous ont accompagnés durant tout le temps où le Seigneur Jésus a vécu parmi nous, depuis le commencement, lors du baptême donné par Jean, jusqu’au jour où il fut enlevé d’auprès de nous. Il faut donc que l’un d’entre eux devienne, avec nous, témoin de sa résurrection. » On en présenta deux : Joseph appelé Barsabbas, puis surnommé Justus, et Matthias. Ensuite, on fit cette prière : « Toi, Seigneur, qui connais tous les cœurs, désigne lequel des deux tu as choisi pour qu’il prenne, dans le ministère apostolique, la place que Judas a désertée en allant à la place qui est désormais la sienne. » On tira au sort entre eux, et le sort tomba sur Matthias, qui fut donc associé par suffrage aux onze Apôtres. 

Psaume : 102 (103), 1-2, 11-12, 19-20ab

R/ Le Seigneur a son trône dans les cieux. ou : Alléluia ! (102, 19a)

 Bénis le Seigneur, ô mon âme,
bénis son nom très saint, tout mon être !
Bénis le Seigneur, ô mon âme,
n’oublie aucun de ses bienfaits !

Comme le ciel domine la terre,
fort est son amour pour qui le craint ;
aussi loin qu’est l’orient de l’occident,
il met loin de nous nos péchés.

Le Seigneur a son trône dans les cieux :
sa royauté s’étend sur l’univers.
Messagers du Seigneur, bénissez-le,
invincibles porteurs de ses ordres !

2ème lecture : « Qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui » (1 Jn 4, 11-16)
Lecture de la première lettre de saint Jean

Bien-aimés, puisque Dieu nous a tellement aimés, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres. Dieu, personne ne l’a jamais vu. Mais si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous, et, en nous, son amour atteint la perfection. Voici comment nous reconnaissons que nous demeurons en lui et lui en nous : il nous a donné part à son Esprit. Quant à nous, nous avons vu et nous attestons que le Père a envoyé son Fils comme Sauveur du monde.

 Celui qui proclame que Jésus est le Fils de Dieu, Dieu demeure en lui, et lui en Dieu. Et nous, nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. Dieu est amour : qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui.

Evangile : « Qu’ils soient un, comme nous-mêmes » (Jn 17, 11b-19)

Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Je ne vous laisserai pas orphelins, dit le Seigneur ;
je reviens vers vous, et votre cœur se réjouira.
Alléluia. (Jn 14, 18 ; 16, 22)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean

En ce temps-là, les yeux levés au ciel, Jésus priait ainsi : « Père saint, garde mes disciples unis dans ton nom, le nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient un, comme nous-mêmes. Quand j’étais avec eux, je les gardais unis dans ton nom, le nom que tu m’as donné. J’ai veillé sur eux, et aucun ne s’est perdu, sauf celui qui s’en va à sa perte de sorte que l’Écriture soit accomplie. Et maintenant que je viens à toi, je parle ainsi, dans le monde, pour qu’ils aient en eux ma joie, et qu’ils en soient comblés. Moi, je leur ai donné ta parole, et le monde les a pris en haine parce qu’ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi je n’appartiens pas au monde. Je ne prie pas pour que tu les retires du monde, mais pour que tu les gardes du Mauvais. Ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi, je n’appartiens pas au monde.
Sanctifie-les dans la vérité : ta parole est vérité. De même que tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde. Et pour eux je me sanctifie moi-même, afin qu’ils soient, eux aussi, sanctifiés dans la vérité. »
Patrick BRAUD

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11 mai 2015

Ascension : « Quid hoc ad aeternitatem ? »

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

« Quid hoc ad aeternitatem ? »

cf. également :

Ascension : la joyeuse absence
Ascension : l’ascenseur christique
Une Ascension un peu taquine : le temps de l’autonomie
Les vases communicants de l’Ascension

Homélie de l’Ascension 2015 / Année B
Jeudi 14 Mai 2015

« Quid hoc ad aeternitatem ? »

On raconte qu’une ancienne mère abbesse d’une communauté bénédictine répondait par cette phrase laconique aux moniales qui venaient lui exposer leurs petits problèmes de vie communautaire (car elles en ont elles aussi !).

« Quid hoc ad aeternitatem ? »

En latin : « Qu’est-ce que cela par rapport à l’éternité ? »

Autrement dit : « Remettez vos problèmes en perspective. Ne perdez pas de vue le but, le terme de votre présence ici. Alors vous relativiserez les petits soucis, et surtout vous trouverez le souffle nécessaire pour traverser les difficultés en gardant les yeux fixés sur le but de votre aventure humaine. »

« Quid hoc ad aeternitatem ? »

C’est sans doute l’une des significations de la fête de l’Ascension du Christ : Dieu non seulement a ressuscité Jésus d’entre les morts, mais en plus « il l’a placé plus haut que tout », « il l’a placé au-dessus de toutes les puissances et de tous les êtres qui nous dominent ». (2° lecture Ep 1,17-23). Depuis l’Ascension, nous savons que le but de notre vie n’est pas ici-bas, mais en Dieu-même, unis au Christ, dans la communion de l’Esprit Saint.

Ascension : « Quid hoc ad aeternitatem ? » dans Communauté spirituelle ascensionDès lors, levons les yeux ! Fixons notre regard sur le terme qui nous attend ! Comme le marin se règle sur la lueur du phare par-dessus les vagues (ou sur l’aiguille de son compas, la flèche de son GPS…), ne laissons pas les soucis de l’instant présent nous détourner du but ultime. Et ce but ultime, ce n’est rien de moins que d’être élevé avec le Christ dans la gloire du Père, c’est-à-dire en fait d’être divinisé, de devenir Dieu lui-même ! « Il est monté au ciel pour nous rendre participants de sa divinité » (2° Préface de l’Ascension).

Si nous gardons en mémoire cette perspective grandiose que l’Ascension nous ouvre, alors nous ne serons pas submergés par les inévitables aléas du présent ; alors la véritable importance des choses et des êtres pourra se révéler à nous ; alors une autre hiérarchie des priorités pourra guider notre vie…

Votre voisin vous semble insupportable ? C’est peut-être vrai, mais :« quid hoc ad aeternitatem ? »

Votre voiture est en panne, et la série noire de ce genre de problèmes vous décourage ? « Quid hoc ad aeternitatem ?… »

Cela ne veut pas dire être indifférent à tout. Mais tout replacer dans l’axe de l’Ascension : quel est le poids de ce qui m’arrive si je le place dans la perspective du Christ qui me fait monter auprès de son Père ? Même la mort d’un être aimé, même une maladie cruelle peut être baignée d’une autre lumière si je lève les yeux vers le Christ en Ascension, à l’instar de toutes les figures de pierre sculptées sur la façade de nos cathédrales.

« Mets en nos coeurs un grand désir de vivre avec le Christ en qui notre nature humaine est déjà près de toi » (oraison de l’Ascension) …

 

Même la crise économique actuelle peut être vécue autrement à la lueur de cette espérance.

Un chef d’entreprise écrivait : « J’opposerai la logique du profit financier à court terme à celle, légitime à mon sens, du profit économique à long terme, nécessaire pour l’investissement, et outil de mesure de la performance. »

Le danger pour bien des acteurs économiques, c’est de rester fascinés, hypnotisés par le court-terme. L’Ascension nous invite à voir les choses de haut, à prendre de la hauteur, avec le recul de l’histoire, pour refuser la dictature du court-terme ; pour refuser l’angoisse de ceux qui n’ont pas de mémoire longue, ni d’espérance plus longue encore.

jeune_pousse Ascension dans Communauté spirituelleLes « âges sombres », dark ages selon la formule des historiens anglais de l’Antiquité tardive comme de l’époque contemporaine, font apparaître l’enchevêtrement de deux cités : la terrestre et celle de Dieu. Et cet enchevêtrement radical oblige à parler d’une ambivalence du temps de l’Histoire, où les processus de décadence s’accompagnent le plus souvent de processus de renouveau. Tel est le diagnostic que nous pouvons poser sur notre époque.

Les statistiques ne doivent pas nous inquiéter davantage. Elles sont respectables, utiles, précieuses, mais de là à accorder aux sondages une espèce d’autorité transcendante, non ! C’est pourquoi les obsessions quantitatives actuelles : combien de baptisés ? combien d’ordinations ? combien de conversions ? sont très  ‘courte vue’.

« La qualité est la quantité à l’état naissant » (Bergson).

Or c’est l’état naissant qui nous intéresse, l’aube du jour présent.

 

Vous le voyez, fêter l’Ascension du Christ peut changer notre lecture de la crise économique ou  ecclésiale actuelle. Puisque le Ressuscité est élevé auprès de Dieu avec notre nature humaine, le but de notre existence est « en-haut ».

Alors ne laissons pas les vagues et les vents contraires nous détourner de ce but ultime. Et si une contrariété légère ou une épreuve sérieuse vient à vous troubler, répondez-lui avec l’humour de l’ancienne abbesse : « quid hoc ad aeternitatem ? »

 

 

 

1ère lecture : « Tandis que les Apôtres le regardaient, il s’éleva » (Ac 1, 1-11)

Lecture du livre des Actes des Apôtres

Cher Théophile, dans mon premier livre j’ai parlé de tout ce que Jésus a fait et enseigné depuis le moment où il commença, jusqu’au jour où il fut enlevé au ciel, après avoir, par l’Esprit Saint, donné ses instructions aux Apôtres qu’il avait choisis. C’est à eux qu’il s’est présenté vivant après sa Passion ; il leur en a donné bien des preuves, puisque, pendant quarante jours, il leur est apparu et leur a parlé du royaume de Dieu.  Au cours d’un repas qu’il prenait avec eux, il leur donna l’ordre de ne pas quitter Jérusalem, mais d’y attendre que s’accomplisse la promesse du Père. Il déclara : « Cette promesse, vous l’avez entendue de ma bouche : alors que Jean a baptisé avec l’eau, vous, c’est dans l’Esprit Saint que vous serez baptisés d’ici peu de jours. » Ainsi réunis, les Apôtres l’interrogeaient : « Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le royaume pour Israël ? » Jésus leur répondit : « Il ne vous appartient pas de connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité. Mais vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. »  Après ces paroles, tandis que les Apôtres le regardaient, il s’éleva, et une nuée vint le soustraire à leurs yeux. Et comme ils fixaient encore le ciel où Jésus s’en allait, voici que, devant eux, se tenaient deux hommes en vêtements blancs, qui leur dirent : « Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Ce Jésus qui a été enlevé au ciel d’auprès de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel. »  

Psaume : 46 (47), 2-3, 6-7,8-9

R/ Dieu s’élève parmi les ovations, le Seigneur, aux éclats du cor. ou : Alléluia ! (46, 6)

Tous les peuples, battez des mains,
acclamez Dieu par vos cris de joie !
Car le Seigneur est le Très-Haut, le redoutable,
le grand roi sur toute la terre.

Dieu s’élève parmi les ovations,
le Seigneur, aux éclats du cor.
Sonnez pour notre Dieu, sonnez,
sonnez pour notre roi, sonnez !

Car Dieu est le roi de la terre,
que vos musiques l’annoncent !
Il règne, Dieu, sur les païens,
Dieu est assis sur son trône sacré.

2ème lecture : « Parvenir à la stature du Christ dans sa plénitude » (Ep 4, 1-13)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Éphésiens

Frères, moi qui suis en prison à cause du Seigneur, je vous exhorte donc à vous conduire d’une manière digne de votre vocation : ayez beaucoup d’humilité, de douceur et de patience, supportez-vous les uns les autres avec amour ; ayez soin de garder l’unité dans l’Esprit par le lien de la paix. Comme votre vocation vous a tous appelés à une seule espérance, de même il y a un seul Corps et un seul Esprit. Il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, au-dessus de tous, par tous, et en tous. À chacun d’entre nous, la grâce a été donnée selon la mesure du don fait par le Christ. C’est pourquoi l’Écriture dit : Il est monté sur la hauteur, il a capturé des captifs,il a fait des dons aux hommes. Que veut dire : Il est monté ? – Cela veut dire qu’il était d’abord descendu dans les régions inférieures de la terre. Et celui qui était descendu est le même qui est monté au-dessus de tous les cieux pour remplir l’univers. Et les dons qu’il a faits, ce sont les Apôtres, et aussi les prophètes, les évangélisateurs, les pasteurs et ceux qui enseignent. De cette manière, les fidèles sont organisés pour que les tâches du ministère soient accomplies et que se construise le corps du Christ, jusqu’à ce que nous parvenions tous ensemble à l’unité dans la foi et la pleine connaissance du Fils de Dieu, à l’état de l’Homme parfait, à la stature du Christ dans sa plénitude.

Evangile : « Jésus fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu » (Mc 16, 15-20)

Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Allez ! De toutes les nations faites des disciples, dit le Seigneur. Moi, je suis avec vous tous les jours
jusqu’à la fin du monde.
Alléluia. (Mt 28, 19a.20b)

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc

En ce temps-là, Jésus ressuscité se manifesta aux onze Apôtres et leur dit : « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé ; celui qui refusera de croire sera condamné. Voici les signes qui accompagneront ceux qui deviendront croyants : en mon nom, ils expulseront les démons ; ils parleront en langues nouvelles ; ils prendront des serpents dans leurs mains et, s’ils boivent un poison mortel, il ne leur fera pas de mal ; ils imposeront les mains aux malades, et les malades s’en trouveront bien. »

 Le Seigneur Jésus, après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu. Quant à eux, ils s’en allèrent proclamer partout l’Évangile. Le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient.
Patrick BRAUD

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