L’Aujourd’hui de Dieu dans nos vies
L’Aujourd’hui de Dieu dans nos vies
Homélie du 3° Dimanche ordinaire / Année C
27/01/13
« Aujourd’hui s’accomplit à vos oreilles cette Écriture. »
Dans l’Évangile de St Luc, l’aujourd’hui du salut est un leitmotiv, un refrain obsédant qui parcourt toute la vie du Christ.
* Il y a d’abord celui de Noël, tout proche, celui de l’annonce aux bergers : « aujourd’hui vous est né un Sauveur » (Luc 2, 11). Ce n’est pas seulement l’anniversaire de la naissance de Jésus que nous avons fêté à Noël, c’est notre propre naissance, aujourd’hui, à la vie divine.
* Il y a ensuite celui du baptême : « aujourd’hui, je t’ai engendré ; tu es mon enfant bien-aimé. » (3,22)
Cette déclaration d’amour de Dieu n’est pas seulement celle de notre baptême autrefois, elle nous rejoint jour après jour : aujourd’hui, tu peux naître de nouveau? Chacun de nous peut dire : je n’ai pas été baptisé il y a tant d’années, c’est aujourd’hui que je suis baptisé, que je deviens baptisé?
* Puis vient l’aujourd’hui de l’Écriture, à Nazareth dans la synagogue de son enfance. « Aujourd’hui, cette écriture est accomplie pour vous qui l’entendez » (4,21).
La Bible que nous entendons le dimanche ou que nous lisons à la maison n’est pas un vieux texte pour les historiens : elle peut devenir une parole vivante pour moi aujourd’hui, qui me parle d’une façon si bouleversante que j’ai parfois l’impression qu’elle a été écrite pour moi, en connaissant le secret de ma vie?
* Quand Jésus guérit un homme paralysé – et qui n’est pas paralysé par des peurs et des blocages intérieurs ? – quand il lui pardonne ses péchés – et qui n’est pas pécheur ? – la foule s’écrit : « aujourd’hui, nous avons vu des choses extraordinaires » (5,26). C’est notre propre cri d’émerveillement et de louange lorsque nous savons nous arrêter pour discerner, aujourd’hui, les signes de l’action de Dieu en nous ou chez les autres.
* Devant l’hostilité d’Hérode, Jésus affirme la permanence de son action : « allez dire à ce renard : voici, je chasse les démons et j’accomplis des guérisons aujourd’hui et demain, et le 3ème jour j’atteins mon but. » (13,32) Il me faut poursuivre ma route aujourd’hui et demain et le jour suivant : ne pas baisser les bras, et continuer jour après jour la route qui est la mienne?
* Plus spectaculaire encore est l’aujourd’hui du salut qui est adressé à Zachée : « Zachée, descends vite, aujourd’hui il me faut demeurer chez toi » (19,5) et devant la conversion de Zachée, Jésus constate avec joie : « aujourd’hui, le salut est venu pour cette maison » (19,5). Pourquoi attendre à demain pour remettre de l’ordre dans ma vie alors que c’est aujourd’hui que le Christ s’invite chez moi ?
* Car malheureusement, l’aujourd’hui du salut renvoie également à l’aujourd’hui de la trahison de Pierre qui est aussi la mienne : « Je te le déclare, Pierre, le coq ne chantera pas aujourd’hui que tu ne m’aies renié 3 fois » (que tu n’aies par 3 fois nié me connaître) (22, 34-61).
* Pourtant l’aujourd’hui du salut sera plus fort que celui de mes reniements. À tel point que le criminel suspendu en croix à la droite de Jésus s’entendra dire cette parole, inouïe et injuste à première vue : « aujourd’hui, tu seras avec moi dans le Paradis » (23,43). La puissance de la résurrection du Christ peut se manifester dès maintenant en moi ! Il suffit que je l’accueille, que je la désire pour maintenant, et non pour hier ou pour plus tard, et que je croie de tout mon c?ur à l’accomplissement de cette promesse dès maintenant?
* Vous voyez, ce thème de l’aujourd’hui du salut est un thème cher à Luc, du début à la fin de son Évangile. Qu’est-ce que cela veut dire pour nous ?
Certains vivent dans le passé, en étant comme écrasés par des événements qui les ont blessés autrefois : il y a des paroles et des gestes si lourds, des faits si graves qu’on a l’impression qu’ils ne pourront jamais être guéris?
Certains au contraire semblent n’exister que pour le futur :faire des projets, maîtriser l’avenir, tout sacrifier à une réussite future semble être leur unique obsession, aux dépens d’une réelle présence aux gens et aux situations qui les entourent actuellement.
Or le Christ nous demande de l’accueillir aujourd’hui : non pas hier, dans nos regrets, nos nostalgies ou nos souvenirs, non pas demain dans nos rêves ou nos projections, mais dès maintenant en ce jour.
Quand nous étions petits, nos parents nous ont appris : « Ne remets pas à demain ce que tu peux faire aujourd’hui. » Le Christ nous le dit d’une façon plus radicale encore : « Crois-tu qu’aujourd’hui quelque chose peut changer en toi ? Croyez-vous que dès maintenant cette parole de salut et d’espérance commence à s’accomplir en vous ? Avez-vous le désir de vivre dès aujourd’hui, de vivre chaque journée qui passe comme un présent, un cadeau qui vous est fait pour aimer et vous donner à votre tour ? «
N’est-ce pas cette espérance d’un salut aujourd’hui qui manque à tant de gens, de leur vie conjugale ou professionnelle ? Les couples en crise qui n’osent pas affronter leurs difficultés présentes, ou qui au contraire s’y enfoncent en se disant : ça ne changera jamais? La détresse sociale des millions de famille en dessous du seuil de pauvreté en France, et qui se demandent : comment vivre aujourd’hui, comment retrouver une espérance dès à présent ?
* À tous ceux qui désespèrent et qui disent : « Je ne vois plus de sens à ma vie, je ne sais plus quelle est la signification de mon histoire », le Christ adresse cet encouragement et cet appel :
« Regarde ta propre histoire.
C’est toujours chaque instant présent qui contient la signification de ton histoire.
Tu ne peux pas regarder cette histoire en spectateur.
Tu dois l’envisager à partir de tes décisions, à partir de ta responsabilité.
Dans chaque instant présent de ta vie sommeille la possibilité qu’il soit l’instant du salut. À toi de le réveiller ».
(Bultmann, Histoire et eschatologie, Delachaux & Niestlé, Neuchâtel-Paris, 1959).
C’est maintenant le moment favorable, pas hier, pas demain.
C’est maintenant le jour du salut. » (2 Co 6, 2).
Aujourd’hui, cette parole du Christ s’accomplit pour nous qui l’entendons.
1ère lecture : Le peuple de Dieu redécouvre la Parole (Ne 8, 1-4a.5-6.8-10)
Lecture du livre de Néhémie
Quand arriva la fête du septième mois, tout le peuple se rassembla comme un seul homme sur la place située devant la Porte des eaux. On demanda au scribe Esdras d’apporter le livre de la loi de Moïse, que le Seigneur avait donnée à Israël.
Alors le prêtre Esdras apporta la Loi en présence de l’assemblée, composée des hommes, des femmes, et de tous les enfants en âge de comprendre. C’était le premier jour du septième mois.
Esdras, tourné vers la place de la Porte des eaux, fit la lecture dans le livre, depuis le lever du jour jusqu’à midi, en présence des hommes, des femmes, et de tous les enfants en âge de comprendre : tout le peuple écoutait la lecture de la Loi.
Le scribe Esdras se tenait sur une tribune de bois, construite tout exprès.
Esdras ouvrit le livre ; tout le peuple le voyait, car il dominait l’assemblée. Quand il ouvrit le livre, tout le monde se mit debout.
Alors Esdras bénit le Seigneur, le Dieu très grand, et tout le peuple, levant les mains, répondit : « Amen ! Amen ! » Puis ils s’inclinèrent et se prosternèrent devant le Seigneur, le visage contre terre.
Esdras lisait un passage dans le livre de la loi de Dieu, puis les lévites traduisaient, donnaient le sens, et l’on pouvait comprendre.
Néhémie le gouverneur, Esdras qui était prêtre et scribe, et les lévites qui donnaient les explications, dirent à tout le peuple : « Ce jour est consacré au Seigneur votre Dieu ! Ne prenez pas le deuil, ne pleurez pas ! » Car ils pleuraient tous en entendant les paroles de la Loi.
Esdras leur dit encore : « Allez, mangez des viandes savoureuses, buvez des boissons aromatisées, et envoyez une part à celui qui n’a rien de prêt. Car ce jour est consacré à notre Dieu ! Ne vous affligez pas : la joie du Seigneur est votre rempart ! »
Psaume : Ps 18, 8, 9, 10, 15
R/ La joie du Seigneur est notre rempart
La loi du Seigneur est parfaite,
qui redonne vie ;
la charte du Seigneur est sûre,
qui rend sages les simples.
Les préceptes du Seigneur sont droits,
ils réjouissent le c?ur ;
le commandement du Seigneur est limpide,
il clarifie le regard.
La crainte qu’il inspire est pure,
elle est là pour toujours ;
les décisions du Seigneur sont justes
et vraiment équitables.
Accueille les paroles de ma bouche,
le murmure de mon c?ur ;
qu’ils parviennent devant toi,
Seigneur, mon rocher, mon défenseur !
2ème lecture : Diversité des membres dans l’unité du corps du Christ (1Co 12, 12-30 (lecture brève : 12, 12-14.27))
Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre au Corinthiens
Frères,
Prenons une comparaison : notre corps forme un tout, il a pourtant plusieurs membres ; et tous les membres, malgré leur nombre, ne forment qu’un seul corps. Il en est ainsi pour le Christ.
Tous, Juifs ou païens, esclaves ou hommes libres, nous avons été baptisés dans l’unique Esprit pour former un seul corps. Tous nous avons été désaltérés par l’unique Esprit.
Le corps humain se compose de plusieurs membres, et non pas d’un seul.
[ Le pied aura beau dire : « Je ne suis pas la main, donc je ne fais pas partie du corps », il fait toujours partie du corps.
L’oreille aura beau dire : « Je ne suis pas l’?il, donc je ne fais pas partie du corps », elle fait toujours partie du corps.
Si, dans le corps, il n’y avait que les yeux, comment pourrait-on entendre ? S’il n’y avait que les oreilles, comment pourrait-on sentir les odeurs ?
Mais, dans le corps, Dieu a disposé les différents membres comme il l’a voulu.
S’il n’y en avait qu’un seul, comment cela ferait-il un corps ?
Il y a donc à la fois plusieurs membres, et un seul corps.
L’?il ne peut pas dire à la main : « Je n’ai pas besoin de toi » ; la tête ne peut pas dire aux pieds : « Je n’ai pas besoin de vous ».
Bien plus, les parties du corps qui paraissent les plus délicates sont indispensables.
Et celles qui passent pour moins respectables, c’est elles que nous traitons avec plus de respect ; celles qui sont moins décentes, nous les traitons plus décemment ;
pour celles qui sont décentes, ce n’est pas nécessaire. Dieu a organisé le corps de telle façon qu’on porte plus de respect à ce qui en est le plus dépourvu :
il a voulu qu’il n’y ait pas de division dans le corps, mais que les différents membres aient tous le souci les uns des autres.
Si un membre souffre, tous les membres partagent sa souffrance ; si un membre est à l’honneur, tous partagent sa joie. ]
Or, vous êtes le corps du Christ et, chacun pour votre part, vous êtes les membres de ce corps.
[ Parmi ceux que Dieu a placés ainsi dans l’Église, il y a premièrement des apôtres, deuxièmement des prophètes, troisièmement ceux qui sont chargés d’enseigner, puis ceux qui font des miracles, ceux qui ont le don de guérir, ceux qui ont la charge d’assister leurs frères ou de les guider, ceux qui disent des paroles mystérieuses.
Tout le monde évidemment n’est pas apôtre, tout le monde n’est pas prophète, ni chargé d’enseigner ; tout le monde n’a pas à faire des miracles,
à guérir, à dire des paroles mystérieuses, ou à les interpréter. ]
Evangile : Prologue de Saint Luc ? « Aujourd’hui, s’accomplit la Parole » (Lc 1, 1-4; 4, 14-21)
Acclamation : Alléluia. Alléluia.
Le Seigneur a envoyé Jésus, son Sauveur, porter la Bonne Nouvelle aux pauvres,
annoncer aux prisonniers qu’ils sont libres. Alléluia. (cf. Lc 4, 18)
Commencement de l’Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
Plusieurs ont entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous, tels que nous les ont transmis ceux qui, dès le début, furent les témoins oculaires et sont devenus les serviteurs de la Parole.
C’est pourquoi j’ai décidé, moi aussi, après m’être informé soigneusement de tout depuis les origines, d’en écrire pour toi, cher Théophile, un exposé suivi, afin que tu te rendes bien compte de la solidité des enseignements que tu as reçus.
Lorsque Jésus, avec la puissance de l’Esprit, revint en Galilée, sa renommée se répandit dans toute la région. Il enseignait dans les synagogues des Juifs, et tout le monde faisait son éloge. Il vint à Nazareth, où il avait grandi. Comme il en avait l’habitude, il entra dans la synagogue le jour du sabbat, et il se leva pour faire la lecture. On lui présenta le livre du prophète Isaïe. Il ouvrit le livre et trouva le passage où il est écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu’ils sont libres, et aux aveugles qu’ils verront la lumière, apporter aux opprimés la libération, annoncer une année de bienfaits accordée par le Seigneur.
Jésus referma le livre, le rendit au servant et s’assit. Tous, dans la synagogue, avaient les yeux fixés sur lui.
Alors il se mit à leur dire : « Cette parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit. »
Patrick Braud