L'homélie du dimanche (prochain)

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31 octobre 2010

Toussaint : le bonheur illucide

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Toussaint : le bonheur illucide

 

Homélie du 01/11/2010
Fête de tous les Saints / Année C

 

Savoir qu’on est heureux, c’est déjà ne plus l’être

«  Le bonheur, comme l’amour, est illucide ou il n’est pas : car savoir qu’on est heureux, c’est d’emblée savoir que le bonheur ne dure pas, et donc vouloir qu’il dure; or, vouloir être encore heureux, c’est déjà ne plus l’être. En matière de bonheur, la fin du début, c’est le début de la fin. «  

Raphaël Enthoven

 

Cette analyse du philosophe Raphaël Enthoven peut éclairer de manière intéressante les Béatitudes de cette fête de Toussaint. En effet, Jésus révèle à certains qu’ils sont heureux, alors qu’ils l’ignoraient totalement !

« Heureux-vous les pauvres » ne signifie pas qu’il faille rechercher la pauvreté pour être heureux, ni qu’il faille canoniser la pauvreté en ne cherchant pas à la faire reculer…

C’est plutôt une révélation, qui surprend les premiers concernés : comment ? On galère pour le logement, les boulots précaires, la survie ordinaire… et toi le prophète tu nous dis que nous sommes heureux ? ! Première nouvelle !

 

Pourtant Jésus insiste, huit fois.

Huit fois, il dévoile que la situation extrêmement dure ou dense vécue par certains de ses auditeurs contient en fait une immense source de bonheur. C’est comme si vous disiez à un aveugle : « heureux es-tu, même si tu ne le sais pas, la beauté du monde t’est promise, t’est donnée. »

 

Le rayon de ténèbre

Toussaint : le bonheur illucide dans Communauté spirituelle 9782020251556FSSaint Jean de la Croix prenait la métaphore de la flamme et du spectateur.

Quand je regarde le monde à la lueur d’une flamme, je le vois en pleine lumière, mais je ne suis pas dans la lumière. Tant que je reste extérieur à la flamme, je crois voir, mais je ne vois que l’extérieur de la flamme. Si j’entre en elle, je ne peux plus voir le monde, je crois être dans le noir, alors qu’en fait je ne fais qu’un avec la lumière.

Si cette « vive flamme d’amour » nous brûle, alors nous ne savons plus que nous sommes heureux au moment où nous sommes pourtant à la pointe la plus incandescente de ce bonheur.

« C’est là la propriété de l’esprit purifié et anéanti quant à tout ce qui est particulier en matière de connaissance et d’affect : ne goûtant et n’entendant rien de spécial, demeurant vide, en obscurité et ténèbres, il embrasse tout avec une grande facilité, et se vérifie en lui ce que dit encore saint Paul : ?n’ayant rien, il possède tout.’ (2 Co 6,10) 

Une telle béatitude provient d’une totale pauvreté d’esprit.

 

Cette nuit obscure est une influence de Dieu en l’âme qui la purge de ses ignorances et imperfections… influence que les contemplatifs appellent contemplation infuse ou théologie mystique. Dieu y enseigne l’âme en secret et l’instruit en perfection d’amour, sans qu’elle fasse rien ni ne sache ce qu’elle est.

C’est une sagesse de Dieu amoureuse… qui la purge, l’illumine et la prépare à l’union d’amour.

« C’est pourquoi Denys et d’autres théologiens mystiques appellent cette contemplation infuse : ’rayon de ténèbre’. » 

 

Et les strophes des poèmes de saint Jean de la Croix sur la « nuit obscure » développent cela avec le goût du paradoxe et de l’union des contraires qui caractérisent la mystique authentique :

1. Par une nuit obscure,
enflammée d’un amour plein d’ardeur,
ô l’heureuse aventure,
j’allai sans être vue,
sortant de ma maison apaisée.

2. Dans l’obscure et très sûre,
par l’échelle secrète, déguisée,
ô l’heureuse aventure,
dans l’obscure, en cachette,
ma maison désormais apaisée.
51D0NVG7GFL._SL500_AA300_ bonheur dans Communauté spirituelle
3. Dans cette nuit heureuse,
en secret, car nul ne me voyait,
ni moi ne voyais rien,
sans autre lueur ni guide
que celle qui en mon c?ur brûlait.

 

Ou encore :

J’entrai mais je ne sus où,
et je restai sans savoir,
au-delà de toute science.

 

1. Je ne sus pas où j’entrai,
mais lorsque je me vis là,
ne sachant pas où j’étais,
je compris de grandes choses.
Ce qu’ai senti ne dirai,
car je restai sans savoir,
au-delà de toute science.

 

Au-delà de toute science

Au-delà de toute science, le bonheur est illucide : heureux les pauvres

Étonnante convergence : de Jésus à Raphaël Enthoven en passant par saint Jean de la Croix, nos béatitudes de Toussaint nous invitent, non pas à chercher à être heureux, mais à accueillir la révélation d’un bonheur inconnu !

Car vouloir être heureux, c’est se condamner à ne l’être jamais.

Le but de la foi au Christ n’est pas de devenir heureux. Le bonheur est plutôt une « divine surprise » révélée eu cours en cours de route comme une conséquence gratuite, non voulue, ignorée.

D’où le caractère « illucide » de cet état paradoxal, noyé dans un « nuage d’inconnaissance » qui est pourtant le signe de la vraie science…

 

- Est lucide (lux, lucis = lumière en latin) celui qui grâce à la lumière regarde le monde. Élucider une affaire, c’est faire la lumière sur elle en braquant dessus le projecteur de la vérité. Il faut sortir du rêve pour devenir lucide, en étant réveillé.

- Est illucide celui qui ne cherche pas à savoir, parce que, de l’intérieur, il est uni à ce qui 573_600 illucidele brûle.

Van Gogh est un peintre illucide (comme tous les peintres de génie !) lorsqu’il ne fait qu’un avec sa toile…

 

La tradition spirituelle chrétienne regorge d’harmoniques à ce thème. Pensez à la « joie parfaite » de St François d’Assise, où le disciple battu et transi de froid est mis à la porte du couvent : « ô frère Léon, écris qu’en cela est la joie parfaite ». Pensez à la célèbre réplique de Jeanne d’Arc à qui son juge demande si elle est en état de grâce : « si je n’y suis pas, Dieu m’y mette ; si j’y suis, Dieu m’y garde », autrement dit : je ne sais pas si je suis ou non en état de grâce, et cela ne m’appartient pas. Disant cela, elle vivait de cet état qu’elle confessait ignorer?

 

 

La jauge joie

Ainsi en est-il du bonheur annoncé par le Christ. Contrairement aux marchands du bien-être, aux thérapeutes de l’épanouissement personnel, le Christ ne nous appelle pas à rechercher le bonheur (à la limite, il nous ferait plutôt peur avec ses avertissements sur la croix, le rejet, l’exclusion…). Il nous décrit ici dans les Béatitudes le portrait de l’homme-Dieu en huit traits majeurs, et nous donne un indicateur de progrès dans notre identification à lui : plus vous progresserez sur le chemin de la pauvreté, des pleurs, de la miséricorde, de la soif de justice etc… plus vous vous enfoncerez au coeur de la « vive flamme d’amour » où sans le savoir vous serez heureux.

La joie est d’avantage une jauge qu’un objectif?

Si vous cherchez votre bonheur en dehors de cette vive flamme, vous croirez être heureux, mais cela vous filera entre les doigts plus sûrement que le sable des plages.

 

La non-possession du bonheur

Paradoxe évangélique à ne pas évacuer : ne pas chercher à être heureux libère des idoles, Toussaint Toussaintet un autre bonheur est donné alors, de façon mystérieuse, au coeur de la « nuit obscure » (de la pauvreté, des larmes, la soif de justice…).

 

C’est lorsque vous renoncerez à vouloir le bonheur que vous pourrez l’accueillir et en vivre vraiment, sans le posséder, sans même le savoir…

 

Les saints que nous fêtons aujourd’hui ne se retournent pas sur leur bonheur : immergés dans la louange, ils exultent de joie sans « savoir », sans posséder leur joie.

 

Que l’Esprit de sainteté nous donne d’anticiper avec eux la non-possession de notre bonheur !

 

 

Dans « Rémi sans famille », le Maître VITALIS initie Rémi à ne pas chercher à savoir s’il est heureux ou pas… :

 

 

1ère lecture : La foule immense des rachetés (Ap 7, 2-4.9-14)

Lecture de l’Apocalypse de saint Jean

Moi, Jean, j’ai vu un ange qui montait du côté où le soleil se lève, avec le sceau qui imprime la marque du Dieu vivant ; d’une voix forte, il cria aux quatre anges qui avaient reçu le pouvoir de dévaster la terre et la mer :
« Ne dévastez pas la terre, ni la mer, ni les arbres,avant que nous ayons marqué du sceaule front des serviteurs de notre Dieu. »
Et j’entendis le nombre de ceux qui étaient marqués du sceau : ils étaient cent quarante-quatre mille, de toutes les tribus des fils d’Israël.
Après cela, j’ai vu une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, races, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau, en vêtements blancs, avec des palmes à la main.
Et ils proclamaient d’une voix forte : « Le salut est donné par notre Dieu, lui qui siège sur le Trône, et par l’Agneau ! »
Tous les anges qui se tenaient en cercle autour du Trône, autour des Anciens et des quatre Vivants, se prosternèrent devant le Trône, la face contre terre, pour adorer Dieu.
Et ils disaient : « Amen !Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et forceà notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! »
L’un des Anciens prit alors la parole et me dit : « Tous ces gens vêtus de blanc, qui sont-ils, et d’où viennent-ils ? »
Je lui répondis : « C’est toi qui le sais, mon seigneur. » Il reprit : « Ils viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs vêtements,ils les ont purifiés dans le sang de l’Agneau. »

Psaume : 23, 1-2, 3-4ab, 5-6

R/ Voici le peuple immense de ceux qui t’ont cherché.

Au Seigneur, le monde et sa richesse,
la terre et tous ses habitants !
C’est lui qui l’a fondée sur les mers
et la garde inébranlable sur les flots. 

Qui peut gravir la montagne du Seigneur
et se tenir dans le lieu saint ?
L’homme au coeur pur, aux mains innocentes,
qui ne livre pas son âme aux idoles.

Il obtient, du Seigneur, la bénédiction,
et de Dieu son Sauveur, la justice.
Voici le peuple de ceux qui le cherchent !
qui recherchent la face de Dieu !

2ème lecture : Nous sommes enfants de Dieu et nous lui serons semblables (1 Jn 3, 1-3)

Mes bien-aimés, voyez comme il est grand, l’amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes. Voilà pourquoi le monde ne peut pas nous connaître : puisqu’il n’a pas découvert Dieu.
Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. Nous le savons : lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu’il est.
Et tout homme qui fonde sur lui une telle espérance se rend pur comme lui-même est pur.

Evangile : Les Béatitudes (Mt 5, 1-12a)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Quand Jésus vit toute la foule qui le suivait, il gravit la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent.
Alors, ouvrant la bouche, il se mit à les instruire. Il disait :
« Heureux les pauvres de coeur : le Royaume des cieux est à eux !
Heureux les doux : ils obtiendront la terre promise !
Heureux ceux qui pleurent : ils seront consolés !
Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice : ils seront rassasiés !
Heureux les miséricordieux : ils obtiendront miséricorde !
Heureux les coeurs purs : ils verront Dieu !
Heureux les artisans de paix : ils seront appelés fils de Dieu !
Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice : le Royaume des cieux est à eux !
Heureux serez-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.
Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux ! »
Patrick BRAUD 

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30 octobre 2010

Zachée : le juste, l’incisé et la figue

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Zachée : le juste, l’incisé et la figue

 

Homélie du 31/10/2010

31° Dimanche du temps ordinaire / Année C

 

 

Zachée dans le sycomore : histoire top connue, rabâchée depuis le CE 2 au caté… Comment pourrait-elle encore nous surprendre ?

Je vous propose trois détours pour essayer de libérer l’effet de surprise que la Bible veut souvent jouer avec nous.

 

Zachée le juste

Le nom de Zachée vient de Zaccaï en araméen = le juste.

Ce n’est pas précisément ce qu’est Zachée au début du récit : il est loin d’être juste ! Mais, « justement », devenir juste est au coeur de la rencontre entre Jésus (?Dieu sauve’) et Zachée (?le juste’, ou du moins celui qui est appelé à le devenir).

De manière étonnante, le prénom arabe dérivé de Zachée, Zacca, garde la trace du lien entre Zachée, sa justification et l’argent, puisque l’aumône légale dans l’islam se dit « Zakat », de la même racine que Zachée !

 

Comment Zachée devient-il juste ? Non pas en faisant l’aumône (vs islam), car ce n’est dans l’évangile qu’une conséquence (d’ailleurs non exigée par Jésus) et non un préalable.

Zachée devient juste grâce au double mouvement qui caractérise bien des rencontres de Jésus : chercher / être appelé.

Chercher : « il cherchait à voir qu’il était Jésus ».

Être appelé : « Zachée, descend vite. Aujourd’hui il faut que j’aille demeurer chez toi ».

 

Chercher / se laisser appeler : où en suis-je de ce chemin de justification ?

 

Zachée l’incisé

Cherchant à voir qui est Jésus, Zachée monte dans le sycomore.

Drôle d’arbre que ce sycomore dont les feuilles rappellent celles du mûrier (syco-morus = ressemblant au mûrier). Il est grand, avec des branches basses assez horizontales (c’est pourquoi le petit Zachée l’a choisi pour s’élever). Il a des fruits bizarres, qui poussent sur le tronc et non sur les rameaux des branches.

 

Mais surtout, ces fruits ne sont pas comestibles à l’état naturel. Il faut y pratiquer une incision, à l’aide d’un petit outil tranchant, pour laisser s’écouler un suc laiteux inconsommable. Ensuite, avec le temps, ils mûrissent en une sorte de grosses prunes / figues comestibles et goûteuses.

D’ailleurs, Amos précise bien qu’il était « un sacrificateur de sycomores » (Amos 7,14-15) lorsque Dieu l’a appelé pour devenir son prophète.

 

Zachée, en montant dans ce sycomore, va en devenir lZachée : le juste, l'incisé et la figue dans Communauté spirituelle Sycamore_fruits‘un de ses fruits, assis à même le tronc, au plus près du Christ. Il va se laisser « inciser », « transpercer » par son appel à venir manger chez lui. Du coup, comme le suc laiteux, il laisse s’écouler la richesse accumulée injustement et qui lui devient insupportable (il rend quatre fois ce qu’il a volé). Et avec le temps, il mûrira en disciple et apôtre du Christ (jusqu’à Rocamadour ! Cf. infra).

 

Quel « coup tranchant » vient dans mon existence accomplir ce que l’appel du Christ a fait pour Zachée, ce que le couteau d’Amos faisait pour les figues de sycomore ?

 

Les crises qui nous déstabilisent ne peuvent-elles pas devenir ce geste chirurgical où le scalpel des événements nous pousse à produire du fruit autrement (et du meilleur !) ?

Sans faire l’éloge du malheur, peut-on au moins le subvertir en y faisant résonner un appel à revenir à l’essentiel : « descends vite » et à tisser d’autres liens : « il faut que j’aille  demeurer chez toi » ?

De la catastrophe personnelle à la crise économique, en passant par tant de faillites collectives ou privées, Zachée dans le sycomore ne figure-t-il pas la possibilité de porter du fruit autrement, à travers le scalpel de la parole de Dieu, acérée et à double tranchant (Ap 1,16 ; He 4,12) ?

 

Zachée la figue (de Rocamadour) !

Le résultat de cette blessure symbolique qui touche Zachée, c’est justement de le transformer, avec le temps, en apôtre du Christ (comme une bonne figue de sycomore bien mûrie…).

On en trouve la trace dans la région du sanctuaire de Rocamadour !

La légende veut que Zachée soit arrivé dans ce site extraordinaire. Devenu ermite, sa recherche de solitude l’a amené à vivre dans ces rochers. D’où le nom Roc (rocher) ? Amadour (amator = amateur) : celui qui aime le rocher, c’est-à-dire celui qui aime la solitude de ce lieu sauvage. Le nom Amadour proviendrait peut-être également de l’arabe Amad – Aour = le juste, ce qui rappelle bien l’araméen Zaccaï = le juste = Zachée.

Il aurait apporté avec lui une statue de la Vierge en bois noirci, sculptée par saint Luc lui-même ! (analogie avec la légende de l’icône peinte par saint Luc ?)

En tout cas, très tôt, les pèlerinages s’organisent sur le lieu de l’ermitage de Zachée. Les miracles se succèdent sur la tombe de Rocamadour dont on avait retrouvé le corps momifié intact en 1166. Aujourd’hui encore, même si la Vierge noire a pris le pas sur l’ermite, les pèlerinages à Rocamadour reprennent de la vigueur (un million et demi de visiteurs par an) et portent de très beaux fruits spirituels.

 

Comme la figue incisée devient un fruit comestible sur le tronc du sycomore, ainsi Zachée continue-t-il de porter du fruit à Rocamadour…

 

Et moi (et nous), sur quel rocher Dieu nous appelle-t-il à devenir une figue savoureuse pour le plaisir des passants ?…

 

 

1ère lecture : Dieu aime toutes ses créatures (Sg 11, 23-26; 12, 1-2)

Lecture du livre de la Sagesse

Seigneur, tu as pitié de tous les hommes, parce que tu peux tout. Tu fermes les yeux sur leurs péchés, pour qu’ils se convertissent.
Tu aimes en effet tout ce qui existe, tu n’as de répulsion envers aucune de tes oeuvres, car tu n’aurais pas créé un être en ayant de la haine envers lui.
Et comment aurait-il subsisté, si tu ne l’avais pas voulu ? Comment aurait-il conservé l’existence, si tu ne l’y avais pas appelé ?
Mais tu épargnes tous les êtres, parce qu’ils sont à toi, Maître qui aimes la vie, toi dont le souffle impérissable anime tous les êtres.
Ceux qui tombent, tu les reprends peu à peu, tu les avertis, tu leur rappelles en quoi ils pèchent, pour qu’ils se détournent du mal, et qu’ils puissent croire en toi, Seigneur.

Psaume : Ps 144, 1-2, 8-9, 10-11, 13cd-14

R/ La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant !

Je t’exalterai, mon Dieu, mon Roi,
je bénirai ton nom toujours et à jamais !
Chaque jour je te bénirai,
je louerai ton nom toujours et à jamais.

Le Seigneur est tendresse et pitié, 
lent à la colère et plein d’amour ; 
la bonté du Seigneur est pour tous, 
sa tendresse, pour toutes ses oeuvres. 

Que tes oeuvres, Seigneur, te rendent grâce 
et que tes fidèles te bénissent ! 
Ils diront la gloire de ton règne, 
ils parleront de tes exploits. 

Le Seigneur est vrai en tout ce qu’il dit, 
fidèle en tout ce qu’il fait. 
Le Seigneur soutient tous ceux qui tombent, 
il redresse tous les accablés.

2ème lecture : Préparer dans la paix la venue du Seigneur(2Th 1, 11-12; 2, 1-2)

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens

Frères, nous prions continuellement pour vous, afin que notre Dieu vous trouve dignes de l’appel qu’il vous a adressé ; par sa puissance, qu’il vous donne d’accomplir tout le bien que vous désirez, et qu’il rende active votre foi.
Que notre Dieu vous trouve dignes de l’appel qu’il vous a adressé ; par sa puissance, qu’il vous donne d’accomplir tout le bien que vous désirez, et qu’il rende active votre foi. Ainsi, notre Seigneur Jésus aura sa gloire en vous, et vous en lui ; voilà ce que nous réserve la grâce de notre Dieu et du Seigneur Jésus Christ.
Frères, nous voulons vous demander une chose, au sujet de la venue de notre Seigneur Jésus Christ et de notre rassemblement auprès de lui :
si l’on nous attribue une révélation, une parole ou une lettre prétendant que le jour du Seigneur est arrivé, n’allez pas aussitôt perdre la tête, ne vous laissez pas effrayer.

Evangile : Zachée : la conversion d’un riche (Lc 19, 1-10)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Jésus traversait la ville de Jéricho.
Or, il y avait un homme du nom de Zachée ; il était le chef des collecteurs d’impôts, et c’était quelqu’un de riche.
Il cherchait à voir qui était Jésus, mais il n’y arrivait pas à cause de la foule, car il était de petite taille.
Il courut donc en avant et grimpa sur un sycomore pour voir Jésus qui devait passer par là.
Arrivé à cet endroit, Jésus leva les yeux et l’interpella : « Zachée, descends vite : aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison. »
Vite, il descendit, et reçut Jésus avec joie.
Voyant cela, tous récriminaient : « Il est allé loger chez un pécheur. »
Mais Zachée, s’avançant, dit au Seigneur : « Voilà, Seigneur : je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. »
Alors Jésus dit à son sujet : « Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison, car lui aussi est un fils d’Abraham.
En effet, le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. »
Patrick BRAUD

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23 octobre 2010

« J’ai renoncé au comparatif »

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

« J’ai renoncé au comparatif « 

 

Homélie du 24/10/2010

30° Dimanche du temps ordinaire / Année C

 

 

Afficher l'image d'origineLe patriarche Athénagoras (patriarche de Constantinople de 1948 à 1972) jouissait d’une réputation immense : sa sagesse, son ouverture d’esprit, son oecuménisme, la force de sa pensée spirituelle et théologique… tout cela impressionnait : d’où lui venait cette sérénité et cette bonté envers tous ? À 87 ans, il livrait ainsi le secret de sa bienveillance inconditionnelle :

« Je n’ai plus peur de rien. J’ai renoncé au comparatif. La guerre la plus dure, c’est la guerre contre soi-même. Il faut arriver à se désarmer. J’ai mené cette guerre pendant des années, elle a été terrible. Mais je suis désarmé. Je n’ai plus peur de rien, car l’amour chasse la peur. Je suis désarmé de la volonté d’avoir raison, de me justifier en disqualifiant les autres. Je ne suis plus sur mes gardes, jalousement crispé sur mes richesses. 

J’accueille et je partage. Je ne tiens pas particulièrement à mes idées, à mes projets. Si l’on m’en présente de meilleurs, ou plutôt non, pas meilleurs mais bons, j’accepte sans regret. J’ai renoncé au comparatif. Ce qui est bon, vrai, réel, est toujours pour moi le meilleur. C’est pourquoi je n’ai plus peur. Quand on n’a plus rien, on n’a plus peur.

Si l’on se désarme, si l’on se dépossède, si l’on s’ouvre au Dieu-Homme qui fait toutes choses nouvelles, alors, Lui, efface le mauvais passé et nous rend un temps neuf où tout est possible. »

 

« J’ai renoncé au comparatif » : tel semble bien être la clé de la paix intérieure.

Ne pas passer son temps à envier ceux qui ont « plus » (alors qu’ils ont reçu « différemment » et que cela peut devenir objet de louange), ni à mépriser ceux qui ont « moins » (même remarque).

Ne pas se comparer sans cesse aux standards de la réussite sociale ou médiatique.

Ne pas chercher même à se mesurer sur une échelle de sainteté ou d’efficacité.

 

La liberté bienveillante d’Athénagoras provient de cette attitude intérieure de non-comparaison.
Le mépris apparent du pharisien de la parabole provient de son obsession d’être « plus » que les autres : plus pur que le publicain, plus généreux que les juifs ordinaires (la dîme), plus pratiquant que les pratiquants ordinaires (en jeûnant deux fois par semaine).

Se comparer, en mieux ou en moins bien, c’est quitter le terrain de la louange pour celui du mépris ou de l’envie.

Se comparer, en plus ou en moins, c’est quitter le terrain de la gratuité pour celui du calcul et du mérite.

 

Le publicain lui aussi a renoncé au comparatif.

Il ne cherche pas à savoir si le pharisien est hypocrite ou non, orgueilleux ou inconscient. Il ne s’étalonne pas en fonction de critères sociaux ou religieux ambiants. Il demande juste à Dieu de l’accueillir tel qu’il est, et Dieu seul sait qui il est vraiment : « Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis ! ».

 

Renoncer au comparatif est salutaire pour chacun de nous. Mais aussi pour les groupes auxquels nous appartenons. Avec humour, deux pasteurs protestants (Roger Parmentier et Gill Daudé) actualisaient ainsi cette parabole de Jésus [1] :

 

Plusieurs Églises priaient devant l’Éternel.

 

- L’Église Réformée priait ainsi : Seigneur, je te rends grâce de ce que je ne suis pas comme le reste des Églises qui ne sont pas si bien organisées, ni bonnes théologiennes, si ouvertes au monde. Moi, j’ai un système presbytérien-synodal clair, un niveau de réflexion convenable et un sens du débat social…

 

- L’Église Évangélique priait ainsi : Seigneur, je rends grâce à ta souveraineté car je ne suis pas comme le reste des Églises qui sont infidèles à la Parole de Dieu, qui ont perdu la rigueur doctrinale et vendent leur âme au monde. Moi, je confesse que la Bible est la Parole de Dieu, je connais la confession de foi de la Rochelle, et je parle de conversion…

 

- L’Église charismatique-pentecôtiste priait ainsi : Seigneur ! Alléluia ! Gloire à toi ! Amen ! Béni sois-tu Seigneur, car je ne suis pas comme ces Églises endormies qui ont abandonné la Vie de l’Esprit, le Baptême biblique et le souci de l’évangélisation. Moi, je vis la plénitude de l’Esprit, mon Église est pleine de nouveaux convertis, et la louange est puissante chez moi ! …

 

D’autres groupes de militants actifs priaient eux aussi par journaux interposés :

 

- Je te rends grâce de n’être pas comme ces Talibans fondamentalistes qui ne craignent pas de massacrer à tort et à travers (comme des « chrétiens » l’ont fait au cours des siècles), qui ne craignent pas d’être kamikazes et de se suicider en faisant aussi mourir les autres, et qui croient vraiment entrer prochainement au Paradis (tant ils ont foi en lui)…

 

- Je te rends grâce de n’être pas comme ces Américains qui imposent leur domination financière et militaire, qui propagent le fondamentalisme biblique et refusent d’enseigner Darwin, qui se croient les champions du Bien contre le Mal et qui sont prêts à tous les massacres pour faire triompher leur point de vue…

 

- Un ‘mal croyant’ se tenait loin de ces Églises et de ces groupes. Il ne voulait même pas s’adresser à elles et il soupirait en disant : Oh, je ne suis pas meilleur que les autres mais s’il y a un bon Dieu, qu’il me soit favorable !

 

Dans le dialogue oecuménique comme dans le dialogue en entreprise ou en famille, renoncer au comparatif permet de s’accueillir soi-même en vérité. Étant en paix avec soi-même, on peut dans le même mouvement accueillir l’autre, différent, sans vouloir le ramener à soi, à ses propres positions ou opinions.

 

 

Que pouvons-nous faire cette semaine pour « renoncer au comparatif » ?…

 

 


[1] http://protestantsdanslaville.org/roger-parmentier-bible-actualisee/RP26.htm

Patrick Braud

 

 

1ère lecture : Dieu écoute la prière du pauvre (Si 35, 12-14.16-18)

Lecture du livre de Ben Sirac le Sage

Le Seigneur est un juge qui ne fait pas de différence entre les hommes.
Il ne défavorise pas le pauvre, il écoute la prière de l’opprimé.
Il ne méprise pas la supplication de l’orphelin, ni la plainte répétée de la veuve.
Le Seigneur est un juge qui ne fait pas de différence entre les hommes.
Celui qui sert Dieu de tout son coeur est bien accueilli, et sa prière parvient jusqu’au ciel.
La prière du pauvre traverse les nuées ; tant qu’elle n’a pas atteint son but, il demeure inconsolable.
Il ne s’arrête pas avant que le Très-Haut ait jeté les yeux sur lui, prononcé en faveur des justes et rendu justice.

Psaume : Ps 33, 2-3, 16.18, 19.23

R/ Un pauvre a crié : Dieu l’écoute et le sauve

Je bénirai le Seigneur en tout temps,
sa louange sans cesse à mes lèvres.
Je me glorifierai dans le Seigneur :
que les pauvres m’entendent et soient en fête !

Le Seigneur regarde les justes, 
il écoute, attentif à leurs cris.
Le Seigneur entend ceux qui l’appellent : 
de toutes leurs angoisses, il les délivre.

Il est proche du coeur brisé, 
il sauve l’esprit abattu.
Le Seigneur rachètera ses serviteurs : 
pas de châtiment pour qui trouve en lui son refuge.

2ème lecture : Paul au soir de sa vie (2Tm 4, 6-8.16-18)

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre à Timothée

Me voici déjà offert en sacrifice, le moment de mon départ est venu.
Je me suis bien battu, j’ai tenu jusqu’au bout de la course, je suis resté fidèle.
Je n’ai plus qu’à recevoir la récompense du vainqueur : dans sa justice, le Seigneur, le juge impartial, me la remettra en ce jour-là, comme à tous ceux qui auront désiré avec amour sa manifestation dans la gloire.
La première fois que j’ai présenté ma défense, personne ne m’a soutenu : tous m’ont abandonné. Que Dieu ne leur en tienne pas rigueur.
Le Seigneur, lui, m’a assisté. Il m’a rempli de force pour que je puisse annoncer jusqu’au bout l’Évangile et le faire entendre à toutes les nations païennes. J’ai échappé à la gueule du lion ; le Seigneur me fera encore échapper à tout ce qu’on fait pour me nuire. Il me sauvera et me fera entrer au ciel, dans son Royaume. A lui la gloire pour les siècles des siècles. Amen.

 

Evangile : Parabole du pharisien et du publicain (Lc 18, 9-14)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Jésus dit une parabole pour certains hommes qui étaient convaincus d’être justes et qui méprisaient tous les autres :
« Deux hommes montèrent au Temple pour prier. L’un était pharisien, et l’autre, publicain.
Le pharisien se tenait là et priait en lui-même : ‘Mon Dieu, je te rends grâce parce que je ne suis pas comme les autres hommes : voleurs, injustes, adultères, ou encore comme ce publicain.
Je jeûne deux fois par semaine et je verse le dixième de tout ce que je gagne.’
Le publicain, lui, se tenait à distance et n’osait même pas lever les yeux vers le ciel ; mais il se frappait la poitrine, en disant : ‘Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis !’
Quand ce dernier rentra chez lui, c’est lui, je vous le déclare, qui était devenu juste, et non pas l’autre. Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »
Patrick BRAUD

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16 octobre 2010

La grenouille qui ne se décourageait jamais

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Homélie du 17/10/2010

29° Dimanche du temps ordinaire / Année C

 

La grenouille qui ne se décourageait jamais

 

 

Grenouiller jusqu’en haut

Afficher l'image d'origineIl était une fois une course …  de grenouilles.
L’objectif était d’arriver en haut d’une grande tour. Beaucoup de gens se rassemblèrent pour les voir et les soutenir.  La course commença.
En fait, les gens ne croyaient pas possible que les grenouilles atteignent le sommet de la tour, et toutes les phrases que l’on entendit furent de ce genre :
« Inutile !!!
Elles n’y arriveront jamais! »
Les grenouilles commencèrent peu à peu à se décourager, sauf une qui continua de grimper.
Les gens continuaient :
« … Vraiment pas la peine  !!! Elles n’y arriveront jamais!… »
Et les grenouilles s’avouèrent vaincues, sauf une qui continuait envers et contre tout !
A la fin, toutes abandonnèrent, sauf cette grenouille qui, seule et au prix d’un énorme effort, rejoignit la cime.
Les autres, stupéfaites, voulurent savoir comment elle avait fait.
A sa descente, l’une d’entre elles s’approcha pour lui demander comment elle avait fait pour terminer l’épreuve.
Et découvrit qu’elle… était sourde !

Cette histoire de grenouilles nous invite à rester sourds à tous ceux qui nous disent que « c’est impossible », à tout ce qui nous décourage d’aller au bout de notre désir le plus vrai.

 

Prier sans se décourager

Ne pas se laisser décourager est bien sûr le La grenouille qui ne se décourageait jamais dans Communauté spirituelle ex17_12bthème central des textes de ce dimanche.

Moïse a besoin de son frère Aaron et de Hour pour le soutenir dans son intercession, les bras levés. S’il « baisse les bras » (l’expression en français vient de là), le peuple perdra le combat.

 

Le psaume 120, comme bien des psaumes, cherche lui aussi du courage dans la prière : « Je lève les yeux vers les montagnes : d’où le secours me viendra-t-il ? »

 

Et Jésus enfonce le clou avec sa parabole « pour montrer à ses disciples qu’il faut toujours prier sans se décourager ».

La prière est un combat où le découragement nous guette immanquablement tôt ou tard : devant le silence de Dieu, devant le temps qui passe et où il ne se passe rien, devant tant d’injustices qui se répètent à longueur d’années, de siècles…

Pourtant, prier sans se décourager, c’est trouver du courage en priant.

Et saint Paul rajoute à la prière l’Écriture comme source de courage : « tu connais les textes sacrés : ils ont le pouvoir de te communiquer la sagesse, celle qui conduit au salut par la foi que nous avons en Jésus Christ ».

 

La question de ce dimanche taraude bien des ‘combattants de la survie ordinaire’.

29z3c5ig courage dans Communauté spirituelleAujourd’hui comme hier, où trouver la force pour continuer à chercher du travail quand on est chômeur depuis trop longtemps ? Où trouver l’énergie pour continuer à se battre pour ses enfants quand on est une femme seule ? Comment ne pas sombrer dans l’alcool ou la dépression lorsqu’on est à la rue ? Où trouver un soutien pour ne pas « baisser les bras » lorsqu’on entre en chimiothérapie ? lorsque la mort nous enlève un être proche ?

 

Comment apprendre à devenir cette grenouille sourde : sourde à la fatigue, à l’échec, à la frustration, à la peur… ?

 

Du coeur à l’ouvrage

Le mot courage en français vient du latin cor, le coeur_anatomie Expéditcoeur. Quelques expressions en gardent la trace : « avoir du coeur à l’ouvrage », c’est le signe du courage. « Perdre coeur » au contraire, c’est abandonner peu à peu le combat.

Le courage et le coeur ont partie liée. Non pas au plan sentimental, mais anatomique : le coeur est cette formidable pompe qui injecte à tout l’organisme le combustible et l’énergie nécessaires à l’activité de l’ensemble. Aller puiser du courage, c’est retrouver en soi la pompe à énergie qui va galvaniser l’effort et le faire durer. Le coureur de fond harmonise les battements de son coeur avec ses pieds et sa respiration, pour tenir bon des kilomètres durant, sans points de côté, sans se décourager.

 

On comprend alors pourquoi Jésus, le psaume et Moïse lient le courage et la prière.

Prier, c’est se recentrer sur le coeur de soi-même en Dieu, ou de Dieu en soi-même…

Prier, c’est revenir à l’essentiel de ce qui nous anime, et ainsi laisser à nouveau le sang de la confiance irriguer nos combats, même les plus longs, même ceux qui nous semblent interminables…

La prière n’est pas ‘expéditive’

Notre vieux fond païen rêverait une prière « expéditive ». Lorsque le résultat d’une telle demande païenne se fait attendre, nous sommes découragés. On a même inventé un saint dans nos églises pour cultiver cette tendance « expéditive » de la prière : c’est justement… Saint Expédit ! Le jeu de mot qui découle du nom de saint Expédit en dit long sur notre impatience !

 

La légende faisait de saint Expédit un commandant Romain d’Arménie, converti au Christ et décapité pour cette raison en 303 par l’empereur Dioclétien. Le pape Pie XI a rayé son nom du martyrologe romain en 1905, mais rien n’y fait : on continue à espérer de lui un traitement en colissimo de nos prières urgentes… Sans doute à cause de la légende de sa conversion. On raconte qu’Expédit était sur le point de demander le baptême lorsqu’un corbeau arriva en criant : ‘Cras ! cras ! cras ! cras !’ (ce qui signifie : ?demain !’, en latin, et cela ressemble au croassement du corbeau). Expédit l’écrasa en criant à son tour : ‘Hodie ! hodie ! hodie ! hodie !’ (?aujourd’hui !’). Expédit est donc souvent représenté portant la palme du martyre, écrasant un corbeau, avec les inscriptions : Cras ! Hodie !

Mais la ferveur populaire oublie que c’est sur la conversion que porte la rapidité « expéditive » de la prière du saint, pas sur la réalisation d’une demande dans la prière !

La conversion peut être expéditive, la prière plus rarement…

Voilà pourquoi il nous faut apprendre à « toujours prier sans se décourager jamais ».

« Luttez avec moi dans la prière », écrit Saint-Paul (Rm 15,30).

 

La faim heureuse

Telle la grenouille sourde, celui qui va puiser du courage dans la prière et l’Écriture cmic8mu2 grenouilledécouvrira en cours d’ascension ce que saint Augustin appelait la « faim heureuse ». Rien à voir avec le Happy End d’Hollywood ! Mais la lente transformation qu’opère en nous la fidélité qui ne se décourage pas d’attendre, qui ne se décourage pas de se battre encore et encore :

« Quand Dieu tarde à vous donner, c’est, non pour vous refuser ses dons, mais pour vous les faire apprécier. On reçoit avec plus de joie ce qu’on a désiré longtemps ; on n’apprécie pas ce qu’on obtient trop vite. Demandez, cherchez, insistez. En demandant et en cherchant vous grandissez, et vous vous préparez à recevoir ce que vous demandez. Dieu vous réserve ce qu’il ne veut pas vous donner tout de suite, afin que vous appreniez à désirer avec grandeur de grandes choses. Nous demandons ce que nous devons posséder éternellement, ce qui doit nous rassasier éternellement. Mais pour être rassasiés, ayons faim et soif. Il a été dit : « bienheureux ceux qui ont faim et soif de justice » ; la faim peut donc quelquefois être heureuse ? Oui, lorsqu’elle prépare au rassasiement, car si vous n’aviez que dégoût, vous n’arriveriez pas à la possession des trois pains » 

(saint Augustin : sermon LXI, 5 & 6).

 

 

 

1ère lecture : Moïse ne baisse pas les bras (Ex 17, 8-13)

Lecture du livre de l’Exode

Le peuple d’Israël marchait à travers le désert.
Les Amalécites survinrent et attaquèrent Israël à Rephidim.
Moïse dit alors à Josué : « Choisis des hommes, et va combattre les Amalécites. Moi, demain, je me tiendrai sur le sommet de la colline, le bâton de Dieu à la main. »
Josué fit ce que Moïse avait dit : il livra bataille aux Amalécites. Moïse, Aaron et Hour étaient montés au sommet de la colline.
Quand Moïse tenait la main levée, Israël était le plus fort. Quand il la laissait retomber, Amalec était le plus fort.
Mais les mains de Moïse s’alourdissaient ; on prit une pierre, on la plaça derrière lui, et il s’assit dessus. Aaron et Hour lui soutenaient les mains, l’un d’un côté, l’autre de l’autre. Ainsi les mains de Moïse demeurèrent levées jusqu’au coucher du soleil.
Et Josué triompha des Amalécites au tranchant de l’épée.

 

Psaume : Ps 120, 1-2, 3-4, 5-6, 7-8

R/ Notre secours, c’est Dieu, le Maître du monde !

Je lève les yeux vers les montagnes :
d’où le secours me viendra-t-il ?
Le secours me viendra du Seigneur
qui a fait le ciel et la terre.

Qu’il empêche ton pied de glisser, 
qu’il ne dorme pas, ton gardien. 
Non, il ne dort pas, ne sommeille pas, 
le gardien d’Israël. 

Le Seigneur, ton gardien, le Seigneur, ton ombrage, 
se tient près de toi. 
Le soleil, pendant le jour, ne pourra te frapper, 
ni la lune, durant la nuit. 

Le Seigneur te gardera de tout mal, 
il gardera ta vie. 
Le Seigneur te gardera, au départ et au retour, 
maintenant, à jamais.

2ème lecture : Méditer l’Écriture pour proclamer la Parole(2Tm 3, 14-17; 4, 1-2)

 

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre à Timothée

Fils bien-aimé,
tu dois en rester à ce qu’on t’a enseigné : tu l’as reconnu comme vrai, sachant bien quels sont les maîtres qui te l’ont enseigné.
Depuis ton plus jeune âge, tu connais les textes sacrés : ils ont le pouvoir de te communiquer la sagesse, celle qui conduit au salut par la foi que nous avons en Jésus Christ.
Tous les textes de l’Écriture sont inspirés par Dieu ; celle-ci est utile pour enseigner, dénoncer le mal, redresser, éduquer dans la justice ; grâce à elle, l’homme de Dieu sera bien armé, il sera pourvu de tout ce qu’il faut pour faire un bon travail.

Devant Dieu, et devant le Christ Jésus qui doit juger les vivants et les morts, je te le demande solennellement, au nom de sa manifestation et de son Règne : proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps, dénonce le mal, fais des reproches, encourage, mais avec une grande patience et avec le souci d’instruire.

Evangile : Parabole de la veuve qui demandait justice sans se décourager  (Lc 18, 1-8)

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Jésus dit une parabole pour montrer à ses disciples qu’il faut toujours prier sans se décourager :
« Il y avait dans une ville un juge qui ne respectait pas Dieu et se moquait des hommes.
Dans cette même ville, il y avait une veuve qui venait lui demander : ‘Rends-moi justice contre mon adversaire.’
Longtemps il refusa ; puis il se dit : ‘Je ne respecte pas Dieu, et je me moque des hommes, mais cette femme commence à m’ennuyer : je vais lui rendre justice pour qu’elle ne vienne plus sans cesse me casser la tête.’ »
Le Seigneur ajouta : « Écoutez bien ce que dit ce juge sans justice !
Dieu ne fera-t-il pas justice à ses élus, qui crient vers lui jour et nuit ? Est-ce qu’il les fait attendre ?
Je vous le déclare : sans tarder, il leur fera justice. Mais le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ? » 
 Patrick Braud

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