L'homélie du dimanche (prochain)

28 août 2010

Un festin par dessus le marché

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Homélie du Dimanche 29 Août 2010 / Année C
22° Dimanche du temps ordinaire

 

Un festin par dessus le marché

 

« Quand tu donne un festin, n’invite pas tes amis? invite au contraire des pauvres, des estropiés, des aveugles? parce qu’ils n’ont rien à te rendre ».

·      Dans un premier temps, on se dit que cette injonction de Jésus ne peut être prise au pied de la lettre : trop difficile à suivre ! Pensez donc : on a déjà du mal à « rendre les invitations » de ceux qui nous ont accueilli à leur table ; alors inviter des inconnus ! Les « dîners en ville » se font rarement avec des handicapés ou des chômeurs?

Tenez : pensez aux mariages. Quand on a fait la liste de tous ceux qu’on doit absolument inviter au festin des noces (toujours la fameuse logique de « rendre la politesse »), il ne reste guère de place pour des gens un peu paumés, solitaires, marginaux. Même en faisant deux vitesses (le faire-part pour le cocktail et l’invitation pour le repas), il est rare de croiser à un mariage d’autres personnes que « des amis, des frères, des parents, de riches voisins »?

·      Ce constat serait presque désespérant : n’y a-t-il personne pour ouvrir sa table à ceux qui ne peuvent le leur rendre ?

En y regardant de près pourtant, on s’aperçoit que beaucoup plus de gens qu’on ne le croit pratiquent cette hospitalité.

Des jeunes par exemple donnent un ou deux ans de leur vie pour une mission humanitaire, pour une association de réinsertion, où visiblement ceux à qui ils viennent en aide ne pourront jamais leur rendre (du moins matériellement).

Ou bien des familles ouvrent leur table le Dimanche pour manger avec une personne handicapée d’un foyer de l’Arche de Jean Vanier.

D’autres accueillent pendant trois semaines d’été (par le Secours Catholique, Secours Populaire etc?) des enfants des banlieues pour leur offrir de vraies vacances où ils découvriront la mer, la montagne, les animaux de la ferme?.

D’autres encore, sans faire sonner la trompette devant eux, n’oublient jamais d’inviter à leur table de temps en temps la personne âgée isolée qui habite près de chez eux, ou la maman célibataire qui attend cette sortie comme une bouffée d’oxygène.

Des paroisses, des associations se démènent pour offrir un repas chaleureux aux SDF et autres épaves vivantes (ou du moins regardées comme telles) qui encombrent nos trottoirs?

Sans oublier les couples qui adoptent des enfants, tout en étant lucides sur les difficultés qui viendront plus tard lorsque les questions sur leur identité les perturberont plus ou moins?

Bref, regardez autour de vous avec ces lunettes du désintéressement que Jésus nous invite à chausser aujourd’hui : qui autour de moi pratique cette invitation large à ceux qui ne pourront jamais leur rendre ?

Et moi-même, où en suis-je – où en sommes-nous en famille – de cette ouverture de la table, du c?ur, à ceux qui ne m’inviteront jamais en retour ?

 

·      Les « pauvres, estropiés, boiteux, aveugles » du temps de Jésus sont toujours parmi nous. Il faudrait du coup être aveugle pour ne plus être sensible à ces solitudes et ces détresses modernes : les retraités des foyers long séjour et autres hospices-mouroirs, les sans-travail qui calculent chaque jour leur assiette au plus juste prix, les personnes handicapées qu’on parque à l’écart etc? Se couper de cet univers, c’est devenir inhumain. C’est vivre dans un autre monde sans vouloir entendre la souffrance de ceux qui « n’ont rien à rendre ».

Aucune culpabilisation dans l’attitude que recommande Jésus : il ne s’agit pas de ne plus donner de festins. Au contraire, il s’agit de les multiplier, pour en faire profiter le maximum de laissés pour compte !

Il ne s’agit pas de jouer les hypocrites, ou les puritains, mais de savourer la vie à pleine bouche en s’associant des compagnons venus de l’infortune.

Nul besoin de cacher sa richesse ou sa chance : il suffit de ne pas la garder pour soi, et de ne pas la partager qu’entre soi, dans un cercle de relations privilégiées de gens qui me ressemblent trop?

·      Pourquoi agir ainsi ? Pourquoi ouvrir son festin aux marginaux et aux exclus de la société ? Pourquoi ce désintéressement prôné par Jésus ? Par souci humanitaire ? Par altruisme ?…

Le texte donne deux raisons en fait : « tu seras heureux, parce qu’ils n’ont rien à te rendre » et « cela te sera rendu à la résurrection des justes ».

- La première raison est sans doute la plus radicale, et la plus fondamentale.

Parce que ceux à qui tu donnes ne peuvent te le rendre, tu ressembles de plus en plus à Dieu lui-même, qui donne sans compter ni calculer de retour. Tu quittes la sphère des relations marchandes : donnant-donnant, gagnant-gagnant, pour entrer dans le cercle des relations divines. C’est pourquoi ce bonheur est le plus profond : donner comme Dieu donne nous fait vivre de son bonheur à lui, « par dessus le marché ». « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, et tout le reste vous sera donné par dessus le marché ».

François Varillon a eu cette formule géniale pour montrer comment un don sans calcul nous divinise : « il faut appeler divin l’amour qui est assez fort pour ne pas exiger la réciprocité comme condition de sa constance » (in L’humilité de Dieu).

Inviter l’autre sans calcul, sans pourquoi, sans « retour sur investissement », sans autre but que lui-même nous fait entrer dans l’intimité heureuse de Dieu : voilà la première raison du désintéressement prôné par Jésus. 

Un festin par dessus le marché dans Communauté spirituelle festin_5

 

- La deuxième raison apparaît alors comme le prolongement de cette perspective de gratuité : « cela te sera rendu à la résurrection des justes ».

Le processus de divinisation que cette pratique de l’hospitalité met en route sera pleinement accomplie et manifestée au-delà de la mort, en Dieu. « Faites-vous des trésors dans le ciel », dit Jésus ailleurs. Loin de revenir à un calcul intéressé (« acheter son paradis » !), cette perspective eschatologique (visant la fin des temps) permet de relativiser les valeurs actuelles, et d’avoir le courage d’agir comme Dieu agit, lui qui est plein d’amour « envers les bons comme envers les méchants ». Inviter ceux qui ne peuvent rien donner en retour n’est jamais qu’anticiper l’invitation que Dieu accomplira un jour en plénitude. Tout ce que nous aurons vécu ici-bas selon cette logique du « pur amour » sera récapitulé en Christ, lui qui est par excellence le don de Dieu, sans retour ni calcul ?

 

·      Alors, passons en revue cette semaine notre pratique de l’invitation à notre table, à nos finances, à nos festins de tous ordres : puisque Dieu le premier se livre à nous sans calculer le retour, à qui pouvons-nous transmettre pareille invitation ? Quels « pauvres, estropiés, aveugles » pouvons-nous avoir la joie de faire asseoir à notre table ?…

 

 

1ère lecture : Exhortation à l’humilité (Si 3, 17-18.20.28-29)

Mon fils, accomplis toute chose dans l’humilité, et tu seras aimé plus qu’un bienfaiteur.
Plus tu es grand, plus il faut t’abaisser : tu trouveras grâce devant le Seigneur.
La puissance du Seigneur est grande, et les humbles lui rendent gloire.
La condition de l’orgueilleux est sans remède, car la racine du mal est en lui.
L’homme sensé médite les maximes de la sagesse ; l’idéal du sage, c’est une oreille qui écoute.

Psaume : Ps 67, 4-5ac, 6-7ab, 10-11

R/ Béni soit le Seigneur : il élève les humbles

Les justes sont en fête, ils exultent ;
devant la face de Dieu ils dansent de joie.
Chantez pour Dieu, jouez pour son nom.
Son nom est Le Seigneur ; dansez devant sa face.

Père des orphelins, défenseur des veuves, 
tel est Dieu dans sa sainte demeure. 
A l’isolé, Dieu accorde une maison ; 
aux captifs, il rend la liberté.

Tu répandais sur ton héritage une pluie généreuse, 
et quand il défaillait, toi, tu le soutenais. 
Sur les lieux où campait ton troupeau, 
tu le soutenais, Dieu qui es bon pour le pauvre.

2ème lecture : La fête éternelle sur la montagne de la nouvelle Alliance (He 12, 18-19.22-24a)

Frères, quand vous êtes venus vers Dieu, il n’y avait rien de matériel comme au Sinaï, pas de feu qui brûle, pas d’obscurité, de ténèbres, ni d’ouragan, pas de son de trompettes, pas de paroles prononcées par cette voix que les fils d’Israël demandèrent à ne plus entendre.

Mais vous êtes venus vers la montagne de Sion et vers la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste, vers des milliers d’anges en fête
et vers l’assemblée des premiers-nés dont les noms sont inscrits dans les cieux. Vous êtes venus vers Dieu, le juge de tous les hommes, et vers les âmes des justes arrivés à la perfection.
Vous êtes venus vers Jésus, le médiateur d’une Alliance nouvelle.

Evangile : Pour avoir part au royaume de Dieu : choisir la dernière place, inviter les pauvres (Lc 14, 1a.7-14)

Un jour de sabbat, Jésus était entré chez un chef des pharisiens pour y prendre son repas.
Remarquant que les invités choisissaient les premières places, il leur dit cette parabole :
« Quand tu es invité à des noces, ne va pas te mettre à la première place, car on peut avoir invité quelqu’un de plus important que toi.
Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendrait te dire : ‘Cède-lui ta place’,
et tu irais, plein de honte, prendre la dernière place. Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : ‘Mon ami, avance plus haut’, et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui sont à table avec toi.
Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »
Jésus disait aussi à celui qui l’avait invité : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi t’inviteraient en retour, et la politesse te serait rendue.
Au contraire, quand tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ;
et tu seras heureux, parce qu’ils n’ont rien à te rendre : cela te sera rendu à la résurrection des justes. » 
 Patrick Braud

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21 août 2010

Jésus et les « happy few » : une autre mondialisation est possible

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Jésus et les « happy few » :
une autre mondialisation est possible

 

Homélie du 21° Dimanche du temps ordinaire / Année C

22/08/2010

·      Faut-il des exodes pour enfin ouvrir ses portes à d’autres ?

Faut-il un exil pour découvrir que d’autres peuples, d’autres cultures sont appelées elles aussi à partager la même gloire ?

Isaïe semble bien faire cette lecture universaliste de l’histoire d’Israël : il aura fallu la catastrophe de la déportation et de l’exil à Babylone (587-537 av. JC) pour que ce petit peuple à la nuque raide accepte enfin l’universalité du salut offert. « J’enverrai des rescapés de mon peuple vers les nations les plus éloignées, vers les îles lointaines qui n’ont pas entendu parler de moi? De toutes les nations, ils ramèneront vos frères en offrande au Seigneur » (Is 66,18-21).

Pourtant, dès le début, Dieu avait bien signifié à Israël que son élection particulière était au service de l’Alliance avec toute l’humanité, chaque Jésus et les « happy few » : une autre mondialisation est possible dans Communauté spirituelle Noe_arcenciel_chagallpeuple selon son génie propre. La mission confiée à Adam, le sceau qui protégeait Caïn, l’arc-en-ciel signe de l’alliance avec Noé : tout le début de l’Ancien Testament souligne l’universalité de l’Alliance que Dieu veut conclure avec tous. Même la circoncision pour Abraham, et l’Alliance particulière grâce à Moïse et la Tora ne seront pas comprises comme étant contre les autres peuples, mais au service de la manifestation du Dieu unique à tous, pour que chaque peuple conclue sa propre alliance avec Lui.

Mais Israël avait peu à peu oublié que son élection par Dieu est pour les autres : un service de l’humanité, et non pas un privilège réservé aux « happy few ».

Être choisi par Dieu n’est pas un privilège de nantis, c’est une responsabilité pour autrui. Ce n’est pas une « niche spirituelle » (pour faire le parallèle avec les « niches fiscales »…).

De même d’ailleurs pour les avantages, les talents, les atouts que le hasard et la naissance donnent aux uns et refusent aux autres : l’intelligence n’est pas donnée pour devenir supérieur et coupé des autres, mais pour les servir. La richesse n’est pas héritée pour renforcer une dynastie, mais pour accumuler une formidable énergie de création d’emplois et de richesses à partager. La naissance dans un pays « développé » n’est pas une chance réservée à quelques-uns, c’est une dette vis-à-vis de ceux qui sont nés sans rien ou quasiment dans leur berceau?

Jésus a vécu jusqu’au bout cette pro-existence, cette existence-pour-les-autres : il n’est pas Fils de Dieu pour être au-dessus, mais pour faire de nous des fils adoptifs. Il n’est pas Saint pour être séparé des pécheurs, mais pour les sanctifier en allant manger et se compromettre avec eux. Il n’annonce pas un salut pour VIP ou pour un petit club de parfaits, mais pour les prostituées et les collaborateurs de l’occupant romain etc.

Le célébrissime thème de la porte étroite de notre évangile d’aujourd’hui ne renie pas cette universalité du salut, au contraire.

Le salut n’est pas étroit ; c’est l’accès au salut qui est étroit.

La maison est immense, car elle peut contenir tous ceux qui viendront « de l’orient et de l’occident, du nord et du midi » ; c’est le chemin qui y mène qui est resserré, et dangereux.

L’avertissement de Jésus concerne ces « happy few » (qu’ils soient juifs ou chrétiens ou musulmans?) qui se croient déjà arrivés, parce qu’ils appartiennent au petit reste fidèle du peuple élu. Même la participation à l’eucharistie ne garantit pas automatiquement cette entrée par la porte étroite : certains auront « mangé et bu en sa présence », c’est-à-dire auront communié au Corps et au sang du Christ dans l’eucharistie, et seront pourtant « jetés dehors ». Certains auront écouté son « enseignement sur nos places », c’est-à-dire seront « calés » en religion, et subiront le même sort?

·      C’est donc que l’ouverture au salut vient de Dieu, et la fermeture de l’homme.
La Bible atteste que l’offre de la vie est pour tous, et que chacun est hélas capable de la refuser.
Mais c’est bien pour tous les peuples que la Création a été donnée.
C’est bien « pour rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés » (Jn 11,52) que le Christ est mort.

Une autre mondialisation est donc à l’oeuvre dès le commencement de notre univers : le Dieu unique garantit l’appartenance de toutes les ethnies à une seule famille humaine.

La distinction des personnes divines garantit le respect des particularités de chacun.

La communion de l’Esprit Saint montre le chemin « étroit » de cette autre mondialisation : de vraies relations d’interdépendance, où chacun devient lui-même en étant lié, relié aux autres, en échangeant sans cesse avec eux, pour se recevoir de cette circulation généralisée.

Si le festin final est destiné à ceux « de l’orient et de l’occident, du nord et du midi », c’est qu’il est possible de l’anticiper dès maintenant. En favorisant les échanges de biens et de services, de personnes et d’idées, l’économie globalisée actuelle ? malgré ses innombrables défauts ? a au moins ce mérite de pointer le sens ultime de l’activité humaine : « rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés », sans confusion ni séparation. Mieux qu’une économie protectionniste qui se méfie des échanges, mieux qu’une économie autosuffisante qui ne veut compter que sur ses propres forces, l’interdépendance moderne nous oblige à retrouver l’universalisme du salut annoncé par Isaïe et Jésus. Notre vocation n’est pas d’être sauvés contre, sans ou malgré les autres, mais grâce à eux. Ce n’est pas un jeu concurrentiel, ni un jeu ?à somme nulle’, mais un jeu « coopératif » ?

Une autre mondialisation est possible?

Parce qu’elle répond à l’appel de la Genèse (« multipliez-vous » « soumettez la terre »), de l’Exil (« ces messagers de mon peuple annonceront ma gloire à toutes les nations » (Is 66,19), du Christ lui-même (« qu’ils soient un comme Nous sommes Un » Jn 15), la mondialisation des échanges de tous ordres (économique, culturels spirituels, familiaux?) entre les peuples exprime la vocation de l’humanité à se laisser rassembler une seule famille.

·      Justement, appliquez ce thème de l’universalité du salut à la famille : y accueillons-nous ceux qui viennent « de l’orient ou de l’occident, du nord ou du midi », c’est-à-dire ceux qui  ne pensent pas comme nous, ont une autre culture ? Faisons-nous une place à notre table familiale pour ceux semblent « les derniers » (Lc 13,30) aux yeux des hommes ? Savons-nous quitter ce sentiment d’appartenir aux « happy few » qui fait regarder les autres familles avec mépris, condescendance ou cynisme ?

Le chemin est étroit pour accéder au salut pourtant si large : l’avertissement de Jésus n’enlève rien à l’universalité de son message. Il rappelle la perspective de notre responsabilité : l’humanité entière rassemblée des quatre coins de l’horizon. Il souligne le danger de s’égarer en cours de route : la porte étroite.

·      Mais pourquoi faut-il donc des catastrophes, comme l’Exil à Babylone pour les juifs ou la Croix pour Jésus de Nazareth, pour que nous commencions à réaliser que nous sommes faits pour l’universel ? Peut- être pouvons-nous, en période de bonheur tranquille et de prospérité régulière, rester ouverts à cet horizon « catholique » (kat holon, en grec = selon la totalité) ? Mais l’endormissement nous guette alors de croire que tout cela est mérité, et que nous n’avons plus besoin des autres.

Peut-être l’épreuve vient-elle seulement réveiller en nous cette soif d’exister les uns par les autres ? C’est très cher payer que de passer par l’Exil ou la Croix pour accéder à la communion universelle, catholique. Mais le Christ le premier n’a pas faibli lorsqu’il lui a fallu passer par cette « porte étroite ». Sa Passion témoigne de son amour pour les romains comme pour les grecs, les juifs fidèles comme les lâches, les bourreaux comme les victimes?

L’aurait-on cru s’il s’était seulement payé de mots ? s’il n’avait signé de son sang cette fraternité nouvelle à laquelle il appelle tous les peuples ?

 

·      Voilà de quoi nourrir les rêves si utiles de ceux qui travaillent sans compter pour une autre mondialisation (loin de l’idéologie ultra-libérale comme de l’idéologie de l’écologie radicale).

Voilà de quoi interroger nos familles sur leur ouverture réelle à l’universelle famille humaine.

Demandez-vous cette semaine comment vous pouvez devenir plus pleinement catholiques, en famille, au travail, c’est-à-dire ouverts à l’universel, à ceux qui viennent « de l’orient et de l’occident, du nord et du midi »…

 

1ère lecture : Dieu vient rassembler toutes les nations (Is 66, 18-21)

Parole du Seigneur : Je viens rassembler les hommes de toute nation et de toute langue. Ils viendront et ils verront ma gloire :
je mettrai un signe au milieu d’eux ! J’enverrai des rescapés de mon peuple vers les nations les plus éloignées, vers les îles lointaines qui n’ont pas entendu parler de moi et qui n’ont pas vu ma gloire : ces messagers de mon peuple annonceront ma gloire parmi les nations.
Et, de toutes les nations, ils ramèneront tous vos frères, en offrande au Seigneur, sur des chevaux ou dans des chariots, en litière, à dos de mulets ou de dromadaires. Ils les conduiront jusqu’à ma montagne sainte, à Jérusalem, comme les fils d’Israël apportent l’offrande, dans des vases purs, au temple du Seigneur.
Et même je prendrai des prêtres et des lévites parmi eux. Parole du Seigneur.

Psaume : Ps 116, 1, 2

R/ Allez par le monde entier proclamer la Bonne Nouvelle

Louez le Seigneur, tous les peuples ;
fêtez-le, tous les pays ! 

Son amour envers nous s’est montré le plus fort ;
éternelle est la fidélité du Seigneur !

2ème lecture : Dieu corrige ceux qu’il aime (He 12, 5-7.11-13)

Frères,
n’oubliez pas cette parole de réconfort, qui vous est adressée comme à des fils : Mon fils, ne néglige pas les leçons du Seigneur, ne te décourage pas quand il te fait des reproches.
Quand le Seigneur aime quelqu’un, il lui donne de bonnes leçons ; il corrige tous ceux qu’il reconnaît comme ses fils.
Ce que vous endurez est une leçon. Dieu se comporte envers vous comme envers des fils ; et quel est le fils auquel son père ne donne pas des leçons ?
Quand on vient de recevoir une leçon, on ne se sent pas joyeux, mais plutôt triste. Par contre, quand on s’est repris grâce à la leçon, plus tard, on trouve la paix et l’on devient juste.
C’est pourquoi il est écrit : Redonnez de la vigueur aux mains défaillantes et aux genoux qui fléchissent,
et : Nivelez la piste pour y marcher. Ainsi, celui qui boite ne se tordra pas le pied ; bien plus, il sera guéri.

Evangile : L’appel universel au salut et la porte étroite (Lc 13, 22-30)

Dans sa marche vers Jérusalem, Jésus passait par les villes et les villages en enseignant.
Quelqu’un lui demanda : « Seigneur, n’y aura-t-il que peu de gens à être sauvés ? » Jésus leur dit :
« Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et ne le pourront pas.
Quand le maître de la maison se sera levé et aura fermé la porte, si vous, du dehors, vous vous mettez à frapper à la porte, en disant : ‘Seigneur, ouvre-nous’, il vous répondra : ‘Je ne sais pas d’où vous êtes.’
Alors vous vous mettrez à dire : ‘Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné sur nos places.’
Il vous répondra : ‘Je ne sais pas d’où vous êtes. Éloignez-vous de moi, vous tous qui faites le mal.’
Il y aura des pleurs et des grincements de dents quand vous verrez Abraham, Isaac et Jacob et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous serez jetés dehors.
Alors on viendra de l’orient et de l’occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume de Dieu.
Oui, il y a des derniers qui seront premiers, et des premiers qui seront derniers. »
Patrick BRAUD

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14 août 2010

Marie en son Assomption : une femme qui assume !

Classé sous Communauté spirituelle — lhomeliedudimanche @ 0 h 01 min

Marie en son Assomption : une femme qui assume !

 

Homélie pour la fête de l’Assomption de Marie / Année C

15/08/2010.

 

·      Assomption ?

Laissez résonner en vous ce mot étrange.

On y entend quelque chose comme « assumer », mais aussi « ascenseur », « somptueux »?

La plupart des Français confondent d’ailleurs l’Ascension et l’Assomption. Non sans raison, car il n’arrive jamais à Marie que ce qui arrive d’abord à son Fils : être emporté dans la gloire auprès de Dieu « corps et âme ». C’est bien le même mouvement qui a provoqué l’« ascension » du Christ et l’ « assomption » de Marie : le désir de Dieu de faire partager ce qu’Il est lui-même à ceux qui justement sont ses « proches ».

 

 

Tous les feux d’artifices, les bals populaires, les festivals et concours pyrotechniques qui fleurissent sur les plages et les côtes de nos rivages cet été pour le 15 Août s?enracinent sans le savoir dans cette fête (autrefois nationale) : célébrer l’une des nôtres déjà dans l’intimité de Dieu, de tout son être. Les fusées multicolores et autres feux de Bengale ne brûlent plus pour célébrer l’Assomption.  

 

Reste cependant comme un parfum d’espérance commune à travers ces réjouissances nationales : nous sommes faits pour la beauté, pour « monter » vers le ciel, à l’instar des bouquets de pétards scintillants qui arrachent toujours des « oh » et des « ah » aux enfants comme aux foules massées autour des bases de lancement. Comme si regarder un feu d’artifice nous rappelait confusément notre propre vocation à « monter » nous aussi vers plus haut, vers plus beau, vers « le ciel »?

De cela, Marie en son Assomption est le témoin.

De cette aspiration, Marie élevée dans la gloire est le garant.

Comme, dans un feu d’artifice, il y a des fusées qui sont chargées d’éclater le plus haut possible en parapluies de gerbes phosphorescentes, Marie en son Assomption est chargée de nous transmettre cette immense espérance : nous sommes faits pour vivre au plus haut de nous-mêmes, en Dieu?

Et nous attendons le bouquet final, où toutes les couleurs seront enfin réunies, dans une pétarade assourdissante?

 

·      Avec cette image de la montée vers le haut, l’Assomption évoque également l’action d’assumer ce que l’on est. En français, lorsque quelqu’un dit : « j’assume », cela veut dire qu’il ira jusqu’au bout de sa décision. Dans le langage de Dieu, l’Assomption veut dire qu’Il assume l’humanité de Marie, sa condition de créature, pour la porter à son incandescence. « J’assume l’?uvre de mes mains – semble dire Dieu - et je vais jusqu’au bout de la logique en vertu de laquelle j’ai demandé à Marie de porter Jésus comme son enfant. »

Du coup, il est en même temps donné à Marie d’assumer elle aussi toute son humanité, sa finitude (car elle une créature – comme nous – alors que le Christ est « engendré non pas créé » comme nous le disons à chaque Credo).

Méditer sur la figure de Marie, une femme « qui assume », peut changer notre vision de l’Assomption !

 

·      Et c’est vrai qu’elle assume, cette jeune fille de Nazareth !

 

- Dès l’âge de 16-18 ans, elle assume une grossesse imprévue, surprenante. Bien que cette grossesse-là soit unique dans l’histoire humaine, l’étonnement et l’embarras de Marie devant cette naissance à venir ressemblent à ce que tant de jeunes filles ont dû assumer suite à une grossesse « non désirée ».

Assomption (Montage plat)Nombre de mères se reconnaîtront dans les questions de la vierge de Nazareth : comment cela se fera-t-il ? Que vais-je devenir avec cet enfant en moi ?

Ne dit-on pas fort justement que les hommes « n’assument pas » lorsqu’ils laissent tomber leur compagne lorsqu’elle est enceinte ? Ou que la société n’assume pas ses responsabilités en préférant parfois encourager l’IVG au lieu d’accompagner jusqu’au bout et après ?

On le voit : assumer une grossesse imprévue, c’est un chemin d’humanité encore aujourd’hui si difficile que Marie demeure une référence, une grande soeur même, dans la manière dont elle a pu affronter cette situation, en maintenant sa confiance en Dieu. Joseph est celui qui l’a aidé à surmonter ce statut si honteux de « fille-mère » : il a assumé un enfant qui n’était pas de lui, il lui a donné son nom, sa famille, son héritage…

Nombre de pères se reconnaîtront en Joseph, quand ils doivent eux aussi assumer les enfants d’un autre, avec amour et respect.

 

- Puis son fils s’est mis à partir sur les chemins de Palestine, à l’âge de trente ans environ, c’est-à-dire à l’âge où ses amis de Nazareth étaient déjà mariés, rangés? Marie là encore a dû assumer ce nouveau statut pour son fils : prophète itinérant, guérisseur renommé, mystique exalté? Était-ce là ce qu’elle avait rêvé pour lui ? N’a-t-elle pas dû combattre intérieurement pour ne pas faire pression, pour laisser son fils aller, pour accepter de ne plus le comprendre ? On trouve la trace de ce combat intérieur – où Marie apprend à assumer sa maternité divine- dans quelques passages : l’épisode de Jésus au Temple de Jérusalem à 12 ans (« Marie conservait toutes ces choses en son coeur » Lc 2,51), son désir de le ramener à la maison avant que tout cela ne dégénère (« ta mère et tes frères sont là, dehors, qui te cherchent » Lc 8,20), son énorme silence lors de la Passion de son Fils, où aucun des 4 évangélistes ne lui fait prononcer une parole?

Nombre de mères se reconnaîtront dans cet accompagnement, joyeux et douloureux, que tout parent doit assumer lors de la croissance de son enfant : se réjouir de ses succès, se laisser interroger par ses échecs, mais toujours être là, même dans l’incompréhension totale de ses paroles ou de ses actes?

 

- Après la résurrection de son fils, Marie n’a pas fini son « pèlerinage de foi », selon la belle expression de Jean-Paul II pour désigner le parcours de cette femme qui, d’étape en étape, n’en finissait pas de découvrir ce qu’elle devait assumer pour devenir ce qu’elle était : la mère du Messie.

En effet, ce n’est pas elle que Jésus relevé d?entre les morts choisit pour se manifester aux disciples, mais Marie-Madeleine.

Ce n’est pas elle que son Fils vivant pour toujours envoie annoncer cette extraordinaire nouvelle à tous les peuples, mais ses disciples, eux qui n’avaient guère « assumé » pendant la Passion (car fuir, renier, trahir celui qu’on disait aimer, c’est l’exact contraire de la manière dont Marie a assumé la déréliction de son enfant !).

À la Pentecôte, le projecteur est mis sur l’assemblée des disciples, à tel point que Marie semble disparaître derrière le halo naissant des prédicateurs inspirés que deviennent les Onze.

Nombre de mères se reconnaîtront dans cet effacement blessant auquel le parcours de leur enfant semble les cantonner. Nombre de femmes savent d’instinct que persévérer dans la confiance finit pourtant par être fécond, plus que l’abandon, plus que l’aigreur ou l’indifférence forcée.

 

Car il n’y a nulle jalousie en Marie.

Marie en son Assomption : une femme qui assume ! dans Communauté spirituelle assomption_poussinNulle revendication d’une place qu’elle estimerait lui revenir de droit.

Nulle révolte devant l’apparente ingratitude de son Fils, pour qui elle semble ne plus exister.

Dans sa confiance en lui, elle sait qu’elle ne sera pas confondue, et que sa relation unique avec lui trouvera sa plénitude dans un achèvement unique.

L’Assomption est cet achèvement unique – annonçant le nôtre – où Dieu ratifie la ténacité de Marie, et lui donne raison contre toutes les apparences humaines.

Nombre de mères se reconnaîtront dans cette opiniâtreté où leur amour, défiant les apparences, leur donne de tenir bon, d’assumer les pires épreuves, les pires humiliations s’il s’agit de se battre pour la chair de leur chair. Nombre de femmes savent au plus intime d’elles-mêmes que cela vaut la peine de ne pas baisser les bras pour défendre la vie qui a jailli de leur corps, sans rien revendiquer pour elles.

 

·      Finalement, le langage populaire n’a pas tort, en associant l’Assomption, l’Ascension, et le fait « d’assumer » dans la vie !

Marie est le signe vivant que nous pouvons aspirer à « plus haut », à ne pas rester collés à raz de terre, car nous sommes à l’image du Dieu « très haut », et c’est pourquoi l’être humain est « somptueux ».

Marie aujourd’hui glorifiée dans tout son être promet la même plénitude à toutes les femmes qui mènent un combat semblable au sien : assumer une maternité, la mort d’un compagnon qui était un véritable soutien (Joseph), la longue éducation d’un enfant surprenant, ses choix bizarres ou sa fin humiliante?

 

·      Que les hommes se rassurent : non seulement ils ne sont pas exclus de cette promesse, mais ils peuvent devenir eux aussi la mère du Christ, selon la belle déclaration de Jésus (qui a dû peiner Marie sur le moment, mais qu’elle a comprise plus tard, beaucoup plus tard !) :

« « Qui est ma mère ? Et mes frères ? »  Et, promenant son regard sur ceux qui étaient assis en rond autour de lui, il dit: « Voici ma mère et mes frères. Quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi un frère,  une soeur, une mère. » » (Mc 3,33).

 

 

1ère lecture : La Femme de l’Apocalypse, image de l’Église comme Marie (Ap 11, 19a ; 12, 1-6a.10ab)

Le Temple qui est dans le ciel s’ouvrit, et l’arche de l’Alliance du Seigneur apparut dans son Temple.

Un signe grandiose apparut dans le ciel : une Femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds,e t sur la tête une couronne de douze étoiles.
Elle était enceinte et elle criait, torturée par les douleurs de l’enfantement.
Un autre signe apparut dans le ciel : un énorme dragon, rouge feu, avec sept têtes et dix cornes,et sur chaque tête un diadème.
Sa queue balayait le tiers des étoiles du ciel, et les précipita sur la terre. Le Dragon se tenait devant la femme qui allait enfanter, afin de dévorer l’enfant dès sa naissance.
Or, la Femme mit au monde un fils, un enfant mâle, celui qui sera le berger de toutes les nations, les menant avec un sceptre de fer. L’enfant fut enlevé auprès de Dieu et de son Trône,
et la Femme s’enfuit au désert, où Dieu lui a préparé une place.

Alors j’entendis dans le ciel une voix puissante, qui proclamait : « Voici maintenant le salut,la puissance et la royauté de notre Dieu, et le pouvoir de son Christ ! »

 

Psaume : 45, 11-12a, 12b-13, 14-15a, 15b-16

R/ Heureuse es-tu, Vierge Marie, dans la gloire de ton Fils.

Écoute, ma fille, regarde et tends l’oreille ;
oublie ton peuple et la maison de ton père :
le roi sera séduit par ta beauté.

Il est ton Seigneur : prosterne-toi devant lui.
Alors, les plus riches du peuple,
chargés de présents, quêteront ton sourire.

Fille de roi, elle est là, dans sa gloire,
vêtue d’étoffes d’or ;
on la conduit, toute parée, vers le roi.

Des jeunes filles, ses compagnes, lui font cortège ;
on les conduit parmi les chants de fête :
elles entrent au palais du roi.

2ème lecture : Le Christ nous entraîne tous dans la vie éternelle ( 1 Co 15, 20-27a)

Frères, le Christ est ressuscité d’entre les morts, pour être parmi les morts le premier ressuscité. Car, la mort étant venue par un homme, c’est par un homme aussi que vient la résurrection. En effet, c’est en Adam que meurent tous les hommes ; c’est dans le Christ que tous revivront, mais chacun à son rang : en premier, le Christ ; et ensuite, ceux qui seront au Christ lorsqu’il reviendra. Alors, tout sera achevé, quand le Christ remettra son pouvoir royal à Dieu le Père, après avoir détruit toutes les puissances du mal. C’est lui en effet qui doit régner jusqu’au jour où il aura mis sous ses pieds tous ses ennemis. Et le dernier ennemi qu’il détruira, c’est la mort, car il a tout mis sous ses pieds.

 

Evangile : « Heureuse celle qui a cru ! » (Lc 1, 39-56)

En ces jours-là, Marie se mit en route rapidement vers une ville de la montagne de Judée.
Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth.
Or, quand Élisabeth entendit la salutation de Marie, l’enfant tressaillit en elle. Alors, Élisabeth fut remplie de l’Esprit Saint,
et s’écria d’une voix forte : « Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni.
Comment ai-je ce bonheur que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ?
Car, lorsque j’ai entendu tes paroles de salutation, l’enfant a tressailli d’allégresse au-dedans de moi.
Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. »
Marie dit alors : « Mon âme exalte le Seigneur,
« Mon âme exalte le Seigneur,
mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur.
Il s’est penché sur son humble servante ; désormais tous les âges me diront bienheureuse.
Le Puissant fit pour moi des merveilles ; Saint est son nom !
Son amour s’étend d’âge en âgesur ceux qui le craignent.
Déployant la force de son bras, il disperse les superbes.
Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles.
Il comble de bien les affamés, renvoie les riches les mains vides.
Il relève Israël son serviteur, il se souvient de son amour,
de la promesse faite à nos pères, en faveur d’Abraham et de sa race à jamais. »
Marie demeura avec Élisabeth environ trois mois, puis elle s’en retourna chez elle.
Patrick BRAUD 

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7 août 2010

Agents de service

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Agents de service

 

Homélie du 19° Dimanche du temps ordinaire / Année C

08/08/2010

 

Agents de service dans Communauté spirituelle 129fwebTrois béatitudes en quelques lignes : l’événement est suffisamment rare pour ne pas laisser passer cette particularité de notre passage d’Évangile.

On est habitué aux quatre « heureux » des béatitudes de Luc (Lc 6), et plus encore au huit béatitudes  qu’on trouve chez Mathieu (Mt 5).

On oublie ces trois autres déclarations de bonheur que Jésus fait ici.

Or ces trois promesses – « qui feront des heureux » – sont toutes en lien avec le service, actif et vigilant :

- « heureux les serviteurs que le maître trouvera en train de veiller »

- « s’il revient à minuit et qu’il les trouve ainsi, heureux sont-ils ! »

- « heureux serviteur que son maître, en arrivant, trouvera à son travail ».

 

L’insistance est si forte qu’on se dit qu’il y a là une clé pour aujourd’hui encore.

Se mettre au service, rester vigilants et actifs en ce service, c’est une source de bonheur pour demain (« lorsque le maître viendra »).

Pour demain : car, contrairement à ce qu’on croit trop facilement (parce qu’on voudrait utiliser la foi pour être heureux, c’est-à-dire se servir de la foi au lieu de la servir?), Jésus ne promet pas ici de bonheur immédiat. Il l’annonce pour le moment du retour du maître, c’est-à-dire de son retour à lui. D’ici là, il faut tenir, veiller sans voir venir, continuer à servir alors qu’apparemment on est tout seul et que le Christ semble bien loin…

 

Allusion sans doute aux premières générations des chrétiens, confrontés à la persécution, qui devaient tenir bon, rester fidèles, sans autre espérance que celle de rencontrer le Christ dans la même Pâque que lui (le martyre).

 

Allusion aujourd’hui à la condition ordinaire des chrétiens : servir.

Servir la croissance du monde à travers leur vie professionnelle.

Servir la croissance de la vie à travers leur famille.

Servir la beauté de la création grâce à la culture, les arts etc…

En ce sens, l’Église est fondamentalement diaconale, parce que être disciple du Christ, c’est durer dans le service, la plupart du temps sans rien voir de l’utilité réelle de ce service (« mon maître tarde à venir »).

Si l’Église ordonne quelques uns diacres, cela c’est justement pour rappeler à tous que la diaconie (= le service) est la condition ordinaire de la responsabilité chrétienne.

Rappelez-vous la béatitude (semblable aux trois nôtres) du lavement des pieds dans l’Évangile de Jean : « heureux serez-vous, si du moins vous le mettez en pratique » (Jn 13,17). Cette promesse liée au lavement des pieds rejoint la promesse liée au service – vigilant et actif – de ce dimanche.

 

Voilà pourquoi on a besoin des diacres : pour rappeler à tout chrétien qu’il est appelé au service, service de Dieu et service du frère, indissociablement unis.

Parce que la vocation de l’Église est d’être diaconale, servante de l’humanité, il faut qu’elle ordonne quelques-uns pour le rappeler à tous.

De même qu’elle ordonne quelques uns prêtres pour rappeler à tous qu’ils ont à vivre leur sacerdoce baptismal, c’est-à-dire à offrir leur vie au Père par le Christ dans l’Esprit.
Vous le savez, c’est le Concile Vatican II qui a ouvert la voie de la restauration du diaconat permanent, si florissant dans les premiers siècles. C’est « en vue du service » que le Concile l’a fait (Lumen Gentium 29, 63). La lettre aux catholiques de France précisait en 1996 : 
« Il est exclu de célébrer en vérité le mystère de la foi en s’en tenant à l’action cultuelle. Car le Dieu sauveur s’est lui-même identifié aux pauvres et aux petits? Le ministère des diacres nous rappelle tout particulièrement ce lien fondamental entre service de Dieu et service des hommes ».

Les diacres permanents nous rappellent cette dimension essentielle de l’Église, pour que le sacrement de l’autel et celui du frère ne soient jamais séparés l’un de l’autre…

 

Où en suis-je de cette attitude fondamentale de service ?

Surtout si j’ai reçu beaucoup (car alors « on me réclamera davantage ») : comment rester actif et éveillé dans la mise à disposition pour autrui de mes talents, de mes charismes ?

 

En entreprise, servir ses collaborateurs est la marque des grandes figures patronales. Loin d’écraser leurs équipes, les grands capitaines d’industrie libèrent l’énergie de leurs associés, leur donnent les moyens de grandir, font confiance, délèguent, catalysent leur enthousiasme…

Le service passe alors par le partage du pouvoir, du vouloir, de l’avoir : servir une aventure professionnelle commune demande cette vigilance active dont parle Jésus. Toujours sur le qui-vive pour promouvoir un collaborateur, un projet, une opportunité ; pour susciter une vision commune où chacun va donner le meilleur de lui-même ; pour partager les informations nécessaires ; pour partager jusqu’aux résultats financiers?

Leon HarmelUtopique ? Tant d’acteurs économiques – employés, ouvriers, cadres, actionnaires – ont été et sont toujours témoins que cette « utopie » du service est bien vivante et très féconde en entreprise ! Celui qui conçoit sa responsabilité comme un service, qu’il soit syndicaliste, opérateur sur une machine, hôtesse de caisse, cadre commercial ou grand patron, celui-là sait ce que Jésus veut dire : « heureux serviteur que son maître, en arrivant, trouvera à son travail ». Et le maître dont parle Jésus, c’est le maître des uns comme des autres, quelque soit leur position hiérarchique.

Chacun peut et doit répondre devant un « patron » plus grand que ceux qui l’entourent, et qui est commun à tous.

Or, lui répondre par le service – vigilant et actif – est le fondement du bonheur à venir…

 

Où en suis-je de cette attitude fondamentale de service ?…

 

Léon Harmel, figure du patronat chrétien « social »

 

1ère lecture : Dieu vient la nuit sauver son peuple (Sg 18, 6-9)

La nuit de la délivrance pascale avait été connue d’avance par nos Pères ; assurés des promesses auxquelles ils avaient cru, ils étaient dans la joie. Et ton peuple accueillit à la fois le salut des justes et la ruine de leurs ennemis. En même temps que tu frappais nos adversaires, tu nous appelais pour nous donner ta gloire. Dans le secret de leurs maisons, les fidèles descendants des justes offraient un sacrifice, et ils consacrèrent d’un commun accord cette loi divine : que les saints partageraient aussi bien le meilleur que le pire ; et déjà ils entonnaient les chants de louange des Pères.

Psaume : Ps 32, 1.12, 18-19, 20.22

R/ Bienheureux le peuple de Dieu !

 

Criez de joie pour le Seigneur, hommes justes !
Hommes droits, à vous la louange  !
Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu,
heureuse la nation qu’il s’est choisie pour domaine  !

Dieu veille sur ceux qui le craignent,
qui mettent leur espoir en son amour,
pour les délivrer de la mort,
les garder en vie aux jours de famine.

Nous attendons notre vie du Seigneur :
il est pour nous un appui, un bouclier.
Que ton amour, Seigneur, soit sur nous
comme notre espoir est en toi !

2ème lecture : La foi d’Abraham, modèle de la nôtre (brève : 1-2.8-12) (He 11, 1-2.8-19)

Frères,
la foi est le moyen de posséder déjà ce qu’on espère, et de connaître des réalités qu’on ne voit pas.
Et quand l’Écriture rend témoignage aux anciens, c’est à cause de leur foi.
Grâce à la foi, Abraham obéit à l’appel de Dieu : il partit vers un pays qui devait lui être donné comme héritage. Et il partit sans savoir où il allait.
Grâce à la foi, il vint séjourner comme étranger dans la Terre promise ; c’est dans un campement qu’il vivait, ainsi qu’Isaac et Jacob, héritiers de la même promesse que lui,
car il attendait la cité qui aurait de vraies fondations, celle dont Dieu lui-même est le bâtisseur et l’architecte.
Grâce à la foi, Sara, elle aussi, malgré son âge, fut rendue capable d’avoir une descendance parce qu’elle avait pensé que Dieu serait fidèle à sa promesse.
C’est pourquoi, d’un seul homme, déjà marqué par la mort, ont pu naître des hommes aussi nombreux que les étoiles dans le ciel et les grains de sable au bord de la mer, que personne ne peut compter.
C’est dans la foi qu’ils sont tous morts sans avoir connu la réalisation des promesses ; mais ils l’avaient vue et saluée de loin, affirmant que, sur la terre, ils étaient des étrangers et des voyageurs.
Or, parler ainsi, c’est montrer clairement qu’on est à la recherche d’une patrie.
S’ils avaient pensé à celle qu’ils avaient quittée, ils auraient eu la possibilité d’y revenir.
En fait, ils aspiraient à une patrie meilleure, celle des cieux. Et Dieu n’a pas refusé d’être invoqué comme leur Dieu, puisqu’il leur a préparé une cité céleste.
Grâce à la foi, quand il fut soumis à l’épreuve, Abraham offrit Isaac en sacrifice. Et il offrait le fils unique, alors qu’il avait reçu les promesses
et entendu cette parole :C’est d’Isaac que naîtraune descendance qui portera ton nom.
Il pensait en effet que Dieu peut aller jusqu’à ressusciter les morts : c’est pourquoi son fils lui fut rendu ; et c’était prophétique.

 

Evangile : Se tenir prêts pour le retour du Seigneur (brève : 35-40) (Lc 12, 32-48)

Jésus disait à ses disciples : « Sois sans crainte, petit troupeau, car votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume.
Vendez ce que vous avez et donnez-le en aumône. Faites-vous une bourse qui ne s’use pas, un trésor inépuisable dans les cieux, là où le voleur n’approche pas, où la mite ne ronge pas.
Car là où est votre trésor, là aussi sera votre coeur.
Restez en tenue de service, et gardez vos lampes allumées.
Soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces, pour lui ouvrir dès qu’il arrivera et frappera à la porte.
Heureux les serviteurs que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller. Amen, je vous le dis : il prendra la tenue de service, les fera passer à table et les servira chacun à son tour.
S’il revient vers minuit ou plus tard encore et qu’il les trouve ainsi, heureux sont-ils !
Vous le savez bien : si le maître de maison connaissait l’heure où le voleur doit venir, il ne laisserait pas percer le mur de sa maison.
Vous aussi, tenez-vous prêts : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. »
Pierre dit alors : « Seigneur, cette parabole s’adresse-t-elle à nous, ou à tout le monde ? »
Le Seigneur répond : « Quel est donc l’intendant fidèle et sensé à qui le maître confiera la charge de ses domestiques pour leur donner, en temps voulu, leur part de blé ?
Heureux serviteur, que son maître, en arrivant, trouvera à son travail.
Vraiment, je vous le déclare : il lui confiera la charge de tous ses biens.
Mais si le même serviteur se dit : ‘Mon maître tarde à venir’, et s’il se met à frapper serviteurs et servantes, à manger, à boire et à s’enivrer,
son maître viendra le jour où il ne l’attend pas et à l’heure qu’il n’a pas prévue ; il se séparera de lui et le mettra parmi les infidèles.
Le serviteur qui, connaissant la volonté de son maître, n’a pourtant rien préparé, ni accompli cette volonté, recevra un grand nombre de coups.
Mais celui qui ne la connaissait pas, et qui a mérité des coups pour sa conduite, n’en recevra qu’un petit nombre. A qui l’on a beaucoup donné, on demandera beaucoup ; à qui l’on a beaucoup confié, on réclamera davantage.
»
Patrick Braud

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